Portraits loupes

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Dans une pièce exiguë que d’épais rideaux rendent sombre en plein jour, un homme se réveille fatigué. Sans savoir discerner ce qui est réel de ce qui ne l’est pas, il émerge lentement de l’état brumeux de son sommeil avant de se redresser lourdement sur le rebord de son lit.

De là, Il fixe le sol d’un air léthargique, ses yeux injectés d’un sang écarlate comme l’aube qu’ils ne connaissent plus. Il reste un certain temps à ne pas penser. Puis, quand il se rappelle qu’il respire, il se dirige vers la salle de bain sans regarder devant lui, selon un trajet tellement ancré en lui qu’aucuns objets ne l’entravent, s’en tenant à l’écart comme s’ils savaient déjà. Là bas, il actionne mollement le robinet d’eau chaude, savourant béatement son contact en se frictionnant le torse. Là aussi il y reste un certain temps.

Après ca, il se rend à sa cuisine qu’aucune paroi ne sépare du séjour. Il y trouve sa machine à café, flanquée de ses capsules qui attendent, impatientes, comme des amants qui s’apprêtent à passer à l’acte. Il leur rend grâce d’un geste que l’habitude rend vide de sens, prend peu à peu conscience de son corps à mesure que sa tasse se remplit, et la porte à ses lèvre une fois chaude.

Dès lors il se souvient, que toutes les heures se ressemblent et que chaque jour se confond dans le suivant, au point de donner à ce qu’il boit l’allure d’une marée noire, l’engluant comme un oiseau qui s’y baignerait.

Alors il se saisit brusquement d’une cigarette et s’imagine un instant, la voir le menacer de mettre feu au mazoute qu’il porte en lui. Il rit, Elle n’en fera rien. La dernière était aussi têtue que celle-ci, et les prochaines le seront, mais toutes nettement moins que lui. Il le sait, il en est sur. Après avoir écrasé son mégot avec une jubilation malsaine, comme le signe du seul pouvoir qu’il exercera jamais, il retourne sur son lit, devenu un canapé dans le craquement d’un mouvement sec sur le dossier.

Bien installé il allume la télé. Il se rend compte qu’aujourd’hui encore elle n’est qu’un mur, et la lumière qui l’anime rien de plus qu’un projecteur qui le montre immobile. Il rit encore, de plus belle cette fois-ci, couvrant bientôt le son d’une émission sans intérêts. Il rit tellement qu’il en renverse son café sur le lit, juxtaposant de nouvelles tâches à d’autres plus anciennes. Il nettoiera plus tard..

Après un long moment passé à se divertir à outrance, il ouvre une boîte. Magique selon ses dires. Il en sort un pochon d’herbe, un paquet de feuilles à rouler et une énième cigarette prête à venger ses prédécesseures. Muni d’un briquet à la pierre presque émoussée, il brûle le peu de souvenirs qu’il lui reste d’hier, faisant naître ainsi la brume du sommeil sans rêves qu’il connaît trop bien. Mais dans lequel il se perd quand même. A peine est venu le temps d’en finir qu’Il s’endort. Longtemps. Avant de se réveiller dans les tâches de café séchées de la veille. Il se lève. A peine est venu le temps d’en finir, qu’il recommence..

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