Chapitre 53 - L'Elément Déclencheur

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Note : ce chapitre contient une illustration réalisée par Noémie DUMONT que nous ne pouvons malheureusement pas publier sur Scribay. Vos pouvez la retrouver sur mon compte Wattpad, Instagram ou Facebook ! Bonne lecture :)

À une vingtaine de minutes du gouffre, Cirth commença à s’inquiéter de la disparition de ses deux compagnons qui n’étaient toujours pas revenus au campement. Il marcha le long des allées, entra dans les tentes et examina chaque feu de camp pour s’assurer qu’ils n’étaient pas rentrés. Inquiet, il se dirigea alors vers la tente de la Guilde pour y retrouver Vorondil, Rana et Narmacil. Il s’arrêta devant, inspira profondément comme s’il était coupable avant de soulever le tissu et d’y entrer. À l’autre bout, dans le coin, assis sur des chaises de bois sculptées, jouant à une partie de cartes, se trouvaient ses trois camarades. Il s’approcha doucement pas à pas, enjambant les quelques hommes dormant sur le sol avant de s’arrêter à leurs côtés. Rana le regarda en coin, il savait que quelque chose se tramait. Il posa alors sa carte violemment sur la table.

— Qu’est-ce qu’il se passe Cirth ? lui demanda-t-il.

— Tu veux te joindre à nous ? proposa alors Vorondil.

— Non… Je…

Rana posa son tas de cartes devant lui et donna une tape dans le dos du jeune garçon qui s’avança.

— Vas-y, crache le morceau. La guerre est finie. Qu’est-ce que tu veux qu’il se passe maintenant ?

— Anario est parti seul dans la forêt. Sauron l’a suivi mais ils ne sont toujours pas rentrés.

— Ils sont partis ? Ils vont revenir, laisse-leur un peu de temps, remarqua Narmacil.

— Ça fait déjà une heure ! s’exclama Cirth. Peut-être même plus !

— Peut-être que nous devrions aller voir ? suggéra Rana. Après tout, ça ne nous prendrait que quelque temps.

— Oui, tu as sans doute raison, poursuivit Vorondil. Allons régler ça et nous rentrerons tous ensemble.

Tous posèrent alors leur paquet de cartes sur la table, retournés. Ils se levèrent et sortirent de la tente puis se dirigèrent vers leurs chevaux. Ils les décrochèrent du pilier de bois qui les retenait et montèrent dessus, chevauchant en direction de la forêt. Ils y entrèrent, trottèrent à travers les arbres, à l’affût d’un indice. Soudain, alors qu’ils longeaient une petite rivière, Narmacil remarqua une lumière rouge écarlate à sa droite, attirant son regard entre les troncs. Il tira sur ses rênes pour s’en approcher.

Arrivé à la lisière de la forêt, il descendit de son cheval et s’enfonça dans ce qui s’apparentait à de la boue. Il s’avança pas à pas puis il s’arrêta net sans dire un mot. Cirth, qui remarqua sa disparition, fit signe à Vorondil et Rana de s’arrêter pour revenir en arrière. Ils laissèrent leurs montures près d’un arbre et marchèrent en direction de cette lumière dans la nuit.

— C’est quoi cette drôle d’odeur ? demanda Cirth d’un air dégoûté.

— On dirait celle du sang, répondit Vorondil.

— C’est du sang… ajouta Rana.

Il était accroupi sur la terre, avait prélevé une poignée de terre et la fit tomber de sa main sur le sol, laissant une grande tache rouge sur sa peau. Il se releva alors et rejoignit ses trois camarades se trouvant côte à côte à quelques mètres de lui.

— Que se passe-t-il ?

Il s’avança, méfiant, puis s’arrêta à leurs côtés, ébloui par une lune écarlate et sanglante. Ils se trouvaient alors en haut du gouffre, là où était arrivé Anario lorsqu’il avait suivi Isil. Vorondil baissa les yeux. Il vit son frère non loin de là, allongé sur le sol.

— ANARIO ! cria-t-il.

Il sauta de son perchoir, dégringola la pente de la falaise et courut vers son frère, inquiet. Avant même de l’atteindre, il s’arrêta brusquement, gêné par quelque chose sur le sol. Il recula de quelques pas, baissa ses yeux et vit, avec effroi, la tête mutilée de son défunt père.

— Qu’est-ce que… ? Père ?

— Vorondil… Ne t’approche pas ! murmura Sauron.

— Sauron ? Mais qu’est-ce qu’il se passe ?

Il releva la tête et vit devant lui son ami et son frère à terre, le premier épuisé et mal en point, le deuxième ne bougeant pas d’un pouce, peut-être même déjà mort. Autour d’eux, il vit Aegnor et quelques-uns de ses membres, mais surtout Isil qui avait planté son couteau dans la chair de Sauron. Un sentiment de haine l’envahit, vite, il comprit qu’ils étaient les auteurs de ce carnage, mais surtout qu’il avait affaire à la Guilde Nocturne, à l’origine de tous les monstres qui étaient apparus dernièrement, tuant sans le moindre scrupule. Il fronça les sourcils et sortit brusquement sa lourde épée de sa cape. Le bruit de la lame traversa les airs comme celui d’un souffle dans une flûte.

— Laissez-les tranquilles ! ordonna-t-il.

— Vorondil, ne viens pas ! Tu n’es pas assez fort ! répondit Sauron, alarmé.

— Qu’il vienne, après le frère aîné, je tuerai le plus jeune, ajouta Aegnor.

Sila avait repris connaissance après s’être violemment cogné contre les parois du gouffre. Il avait tout entendu et craignait lui aussi la mort de Vorondil. Certes, il avait créé la Guilde pour protéger son royaume d’un tel événement, mais ce n’étaient pas des monstres qu’ils avaient devant eux, c’étaient des hommes de l’autre monde, dotés de pouvoirs encore mystérieux. Il s’approcha pour retenir le jeune prince au cas où celui-ci tenterait quelque chose. Au même moment, Vorondil courut vers Aegnor, l’épée à la main.

— Je me suis entraîné pour ça. Je ne vais pas vous laisser tuer mon frère, ni mon ami !

— Vorondil ! cria Sauron.

— VORONDIL ! retentit la voix de Narmacil au loin. Reviens !

Le nom du prince traversa tout le gouffre à plusieurs reprises, arrivant jusqu’aux oreilles d’Anario, se trouvant toujours sur le sol. Il le vit alors dans sa tête, lors d’un voyage à Nevrestir, alors qu’ils étaient encore tout petits.

Anario avait à cette époque dix ans, peut-être neuf, et il veillait sur son petit frère lors d’un voyage avec le roi Calion qui rendait visite à son vieil ami, le seigneur Lomion. Pendant que ceux-ci discutaient de politique, Vorondil eut l’idée de partir explorer le château. Il ne voulait pas écouter son frère et partait n’importe où sans regarder où il mettait les pieds. Il s’était alors arrêté dans un couloir lorsqu’il avait entendu un petit rugissement venant de l’escalier se trouvant à sa gauche. Curieux, il était descendu, se tenant au mur tout le long du chemin.

Il était arrivé dans le sous-sol et avait vu des yeux rouges le regarder tendrement. Il s’en était approché pas à pas et avait aperçu un petit loup tout maigre, attaché par une chaîne en fer. Il le trouvait si délicat et adorable qu’il avait voulu s’en approcher pour le caresser. Anario avait descendu au même moment les marches, l’appelant depuis cinq bonnes minutes. Il l’avait vu près de l’animal et lui avait fait signe de s’écarter avant qu’il ne lui arrive quelque chose. Lorsque Vorondil s’était tourné vers son frère, l’animal était devenu d’un coup plus imposant et féroce. Ses griffes et ses dents avaient grossi et des cornes étaient apparues sur son front. Il avait bondi alors sur le jeune prince.

— VORONDIL ! avait crié Anario pour le mettre en garde.

Tout comme ce moment-là, le prénom de son frère en danger hantait son esprit, le réveillant alors brusquement sur le champ de bataille, éclairé par la lumière de la lune. Vorondil ? Il ouvrit les yeux peu à peu, porta sa main droite au niveau de son torse, effleura son armure du bout des doigts et sentit un trou en dessous de son cœur, là où il avait reçu l’impact de l’aura lancée par son adversaire. Je suis encore en vie ? Comment est-ce possible ? Il se redressa, perplexe, et vit son frère courir à côté de lui en direction de la Guilde.

— Vorondil, arrête-toi… murmura-t-il.

Tout le monde cessa alors de bouger, surpris par la voix d’Anario qu’ils croyaient déjà mort. Son frère s’arrêta net, l’épée à la main, et tourna sa tête vers la droite.

— Ne t’approche pas, petit frère. Tu n’es pas de taille contre eux, poursuivit-il. Sila, ramène-le auprès des autres. Il ne faut pas qu’ils approchent, ajouta-t-il en regardant le dragon dans les yeux.

La bête prit alors son envol. Elle saisit le jeune frère dans ses pattes et recula plusieurs mètres en arrière vers les membres de la Guilde. Il le posa à terre et atterrit quelques pas à côté d’eux, les empêchant de s’approcher.

— Je ne peux pas rester ici sans rien faire ! protesta Vorondil.

— Si Sila t’a ramené ici et que ton frère ne veut pas que tu y restes, c’est bien pour te protéger. À quoi cela te servirait de mourir sur le champ ? remarqua Cirth, frustré mais compréhensif.

Anario se leva doucement, prenant appui sur lui-même. Il essuya le sang qui coulait de sa bouche et regarda Vasa droit dans les yeux.

— Ne me sous-estime pas. C’est moi qui ai appris à Sauron à utiliser son aura, et j’ai bien des ressources.

Sur ces mots, l’homme courut vers Anario et bondit sur lui. Leurs échanges de coups reprirent, des coups de poing, des lames qui s’entrecroisèrent, mais personne ne prenait le dessus. Observant de près, Aegnor commençait à perdre patience, et la porte vers le monde d’Evralar apparaissait peu à peu dans le ciel. Vasa porta un coup de poing au visage du prince qui le contra avec sa lame. Son épée s’entrecroisa alors avec l’avant-bras de son adversaire. Il y mit toutes ses forces et la lame de l’homme se brisa sous son poids. Il profita de sa surprise pour tourner son arme sur le côté et lui donner un grand coup dans les côtes, le faisant tomber à terre. Sans perdre un instant, il la lâcha et saisit le visage de son concurrent dans le creux de sa main. Il le regarda alors droit dans les yeux, ouvrit la totalité de ses portails spirituels et concentra toute son aura dans cette main. En un instant, le bruit d’une explosion se fit entendre. Le casque de l’homme se brisa alors en morceaux et son visage devint de plus en plus chaud, comme si on l’avait brûlé à plusieurs centaines de degrés. Anario se redressa, épuisé ; il avait mis toute sa force dans ce coup.

— Nous n’avons plus le temps de jouer maintenant. Il est bientôt l’heure, s’impatienta Aegnor.

Aegnor s’avança vers Anario, mit ses deux mains vers l’avant, les bras tendus, et deux charges simultanées sortirent d’elles en direction du prince. Elles traversèrent les airs en seulement un dixième de seconde, perçant son armure, ses deux épaules, sa chair, et ressortirent de l’autre côté au milieu d’un éclat de sang, sous les yeux écarquillés de Sauron. Le prince tomba alors brusquement vers l’arrière. Sa vue se brouilla et son souffle se coupa peu à peu. Un grand silence s’empara des lieux, glaçant le sang. Personne ne dit un mot. Sauron le regarda et ses yeux devinrent de plus en plus grands et rouges. Il se retourna et donna un coup de pied dans les jambes d’Isil, la faisant tomber sur le sol. Il se leva brusquement et sortit le poignard de son épaule. Le sang coulait de plus en plus vite.

— Que comptes-tu faire avec ce petit poignard ? demanda Aegnor, amusé. Me tuer ?

— C’est exactement ce que je compte faire ! répondit Sauron.

Il enleva son armure en cuir, arracha le haut de son chemisier et se coupa la main avec la lame du couteau. Maedhros, je suis désolé. Ça n’aura pas été si utile que ça. Le couteau tomba à terre. Il posa sa main sur son torse et recouvrit le sceau de son sang. Une énorme aura rouge et sanglante l’entoura alors, touchant presque les cieux, sa peau devint écailleuse et rouge, des cornes poussèrent sur son front, ses oreilles devinrent pointues, ses ongles prirent l’apparence de griffes, ses dents de crocs, et ses yeux étaient lumineux et sanglants, à l’image de la lune. Les débris de pierre volèrent dans tous les sens autour de lui. Un vent violent faisait reculer les personnes présentes, laissant les plus faibles paralysés.

— Enfin tu es là, démon.

Histoire écrite par A.L MATHERS ♥ IG @a.l_mathers

Illustrée par Noémie DUMONT ♥ IG @la_noun

Corrigée par Mélany BIGOT


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