les étoiles roses

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Dans le désert du Nevada, James et Betty attendent un signe, le signe que tous espèrent. Le reste de la foule patientent dans la chaleur écrasante. Quelle bande d’ignares, comme si cela pouvait aider. Tout ce qu’ils vont gagner, c’est une insolation. Et encore, dans le meilleur des cas, ils ne sont pas adaptés aux températures extrêmes.

Soudain Betty éclate de rire. James la fusille du regard : elle a de nouveau une absence ! Cela lui arrive fréquemment ces derniers temps. Trop souvent. James ne pourra supporter ce comportement trop longtemps. Il finira par la mettre à la porte et elle se retrouvera, toute seule, au milieu des autres.

James respire bruyamment. Il doit se concentrer sur ce qu’il y a d’important. Qu’importe si sa femme pète un câble de temps à autre : elle ne sait plus vraiment ce qu’elle fait. Il est déjà trop tard pour elle. Ce n’est pas grave, James doit continuer de l’aimer. Pour son fils, pour sa fille. Eux sont encore là, en pleine possession de leurs moyens. Ils ne doivent pas savoir pour leur mère, cela les attristerait. Ils seraient même capables de revenir dans cette fournaise ! Non, décidément, James ne doit pas les prévenir.

Betty stoppe son fou-rire. Il est exactement 10h45. Comme tous les jours, depuis une semaine. La quinte débute de plus en plus tôt, mais se termine à la même heure. James n’explique pas ce phénomène.

Betty fait les cent pas dans la cuisine, c’est sa seconde phase. Elle marche de plus en plus vite dans le petit espace. James éloigne les chaises de la table pour éviter que sa femme ne se cogne dessus. Cette fois, c’est lui qui éclate de rire. Il ne devrait pas, mais ça l’amuse de voir son épouse comme une lionne en cage. Elle qui se moquait de son métier de maton, désormais elle est devenue comme l’un des prisonniers qu’il gardait. Tout comme avec eux, il lui lance des morceaux de pain, qu’elle avale comme une otarie. Heureusement que Luna et Jimmy ne sont pas là pour les voir. Ils penseraient que la maladie les a gagnés. Ce qui est faux, du moins pour James. Betty ne veut pas encore se l’avouer, mais tout son comportement indique le contraire.

Bientôt il laissera la porte ouverte et, sans s’en rendre compte, elle sortira de la maison. Ensuite, il l’enfermera dehors. Il condamnera la porte ainsi que les fenêtres. Il ne laissera que la trappe du toit, mais il sait que le risque est minime. La maladie atteint la zone du cerveau dédiée à l’intelligence. Même les plus stupides des singes sont plus intelligents que les atteints des étoiles.

Quel est le con qui a trouvé ce nom ? Franchement, c’est ridicule. Autant les cancéreux, ça a de la gueule, mais les atteints des étoiles ? Tout ça parce que le premier à avoir développé les symptômes était installé sur le toit de l’hôpital — d’ailleurs qu’est-ce qu’il faisait là ce con ? — lorsque la poussière d’étoile rose avait recouvert son bras. Cet imbécile se l’était étalé ensuite sur ses jambes. Non, mais, c’est pas possible de voir ça ! Et au lieu de rester sur le toit et de crever tout seul, il était redescendu, comme si tout était normal, et s’était collé à la première infirmière venue.

Celle-ci bien que surprise par cette étreinte amicale n’avait rien remarqué d’anormal. Jusqu’à ce que le médecin lui dise d’aller se coiffer, pour faire tomber la poussière rose de ses cheveux. Et ce con riait !

Bien sûr, il ne pouvait savoir que la plus grande épidémie de tous les temps allait se déclencher. Mais tout de même, ils auraient pu prévoir. Et surtout analyser… avant qu’il ne soit trop tard.

La progression fut rapide, par le toucher. D’autant plus que quelques grains suffisaient pour contaminer un corps. Ces foutues étoiles attaquaient et détruisaient tout sur leur passage : plantes, animaux, objets… tout y passait !

Rapidement, on remarqua les dégâts fait aux plantes : en moins de dix minutes les bouquets offerts aux malades se désagrégèrent. Tout bonnement réduit en cendres !

Les verres, les chaussures, le matériel chirurgical… tout tombait en cendres ! Personne ne comprenait rien. Les docteurs, les infirmières, les patients. Tous couraient dans tous les sens pour quitter ce lieu dément. Je me rappelle de tous ces gens qui hurlaient, qui se piétinaient pour sortir le plus rapidement possible. Qu’est-ce qu’ils croyaient ? Que l’herbe serait plus verte ailleurs ?

James avait amené son pote Roger pour une simple foulure de la cheville. Le pauvre n’avait pas survécu longtemps. On peut dire qu’il avait pratiquement été le patient 0. Le fou du toit lui avait mis son bras recouvert de poussière sur son nez. Attaque massive de bactéries indéterminées ! Puis l’infirmière était venue, celle qu’il avait enlacée. James n’avait pas demandé son reste et était parti à la recherche d’un docteur.

Il avait un trou dans cette journée, entre sa quête du docteur et la panique qui avait régnée ensuite, mécanisme de défense sans doute.

Il n’a pas compris comment Betty avait été infecté, car elle n’était pas dans cet hôpital et n’avait aucun lien avec les patients ou personnel hospitalier. Du moins, c’est ce qu’il croyait au début… Avant qu’il ne se rende compte que quelque chose ne tournait pas très rond dans a tête de son épouse : elle bavait de plus en plus souvent, elle perdait ses cheveux par grappes, des cloques se propageaient sur tout son corps… et ce n’était pas le pire ! Non le pire, c’est qu’elle devenait de plus en plus bestiale, elle n’arrivait plus à parler correctement, elle émettait des grognements à la place des mots.

Il ne comprenait rien, c’est alors qu’elle avait sorti une photo de la poche de son manteau. Au début, il n’avait pas compris où elle voulait en venir. Jimmy était au centre de l’image entouré d’une infirmière et du docteur Ferrys. Il avait placé le cliché sur la table en haussant les épaules, c’est alors qu’elle lui avait attrapé le bras et lui avait indiqué le médecin. Enervé, il lui avait fait savoir qu’il s’en foutait de ce docteur… Avant que les souvenirs ne lui reviennent. Betty avait prétexté que leur fils ne supportait pas d’être seul, pour passer la nuit dans l’hôpital. Sur le coup, bien que cela lui ait semblé bizarre, Jimmy n’étant pas spécialement fan des câlins, ni peureux de nature, il avait accepté, car Jimmy venait de subir une opération assez lourde.

Mais il avait revu les clins d’œil complices entre Ferry et Betty, leur sourire, leur complicité. Sa femme gardait les traces de son adultère en permanence sur elle. Il comprenait mieux pourquoi, qu’importe le temps, elle portait ce manteau. Et ceci expliquait son changement : elle avait été infectée par son amant !

Désormais c’était de l’histoire ancienne, Il l’avait vue devenir de moins en moins humaine et il sait que bientôt…

Demain même, il ouvrira la porte et la laissera sortir. Heureusement que ni Jimmy, ni Luna ne sont contaminés.

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