Un nouveau rivage

5 minutes de lecture

 À l'intérieur, une douleur intense et vive était ressentie. À l'extérieur, un sifflement assourdissant était entendu. Des mots, des mots, encore des mots... Une image apparut, vague, intangible, comme fantômatique. Des paroles incompréhensibles... Il étouffait, il faisait bien trop chaud dans cet endroit... Mais quel endroit ? Où était-il ? Charles regarda ses mains, puis autour de lui. D'un coup, il y faisait si doux, si calme... Il avait envie d'y rester toute sa vie... Ou toute sa mort. Il marcha un peu, sur un plancher intangible. Un résonnement doux imitait le bruit des pas de Charles. Il se trouvait en-dessous, ou au-dessus de la voûte étoilée. Le ciel, l'espace infini... ou bien le néant. Dans cet endroit, tout, ou rien, n'était appréciable par la conscience humaine. Charles ne pouvait plus compter sur ses sens, il ne pouvait plus compter sur lui-même. Il planait, et était écrasé à la fois. Pourtant, il était léger comme l'air. Seul ceci était un fait, réel ou non, et Charles le ressentait. Il était léger. Plus léger qu'il ne l'avait jamais été. D'ailleurs, il ne marchait pas. Il volait dans cet espèce de néant bleuté dans lequel il se trouvait. D'ailleurs, Charles entendait un tic-tac, mais différent de celui d'une horloge. En avançant lentement, ce qu'il vit lui coupa la respiration. Une boussole, géante, imposante, tenant magiquement en lévitation, se trouvait devant lui, indiquant le Nord-Nord-Est. Elle hésitait un peu, ce qui créait le tic-tac que Charles avait entendu. Le jeune homme essaya de se rapprocher de l'édifice, mais celui-ci s'eloignait au rythme de l'avancée de Charles.

 Alors qu'il avançait, une figure fantômatique apparut devant la boussole. Ce n'était ni une femme, ni un homme. C'était... indéfinissable. Une masse informe, blanchâtre et à l'air intangible, qui avait pourtant l'air si vivante et pleine d'énergie à la fois. Soudain, une voix s'éleva, résonnant de le néant azuré, ni masculine, ni féminine, ni humaine, ni elfique, c'était la voix de la chose:

- Souviens-toi...

Charles était sous le choc. Ce qui se passait devant ses yeux était incroyable. Une boussole géante, gardée par cet esprit devant lui, qui lui parlait. Il cligna des yeux au moins cinq fois, puis demanda, la voix vacillante:

- M-me s-souvenir ? M-mais de quoi ?

La chose ne répondit pas et laissa peser un silence inquisiteur.La voix reprit soudainement, plus puissante :

- Il est trop tôt pour en parler... Maintenant... RÉVEILLE-TOI ! avait hurlé la voix, devenue effrayante.

 Charles se réveilla, avec un mal de tête intenable. Le monde vrillait autour de lui, et il cria de douleur. Seulement, et heureusement, au bout d'une dizaine de secondes, cette terrible douleur s'évapora. Charles cessa alors de crier, quasiment instantanément. Il faisait chaud, là où il était allongé. En fait, il se rendit compte qu'il n'était plus sur l'Albatros, et commença à paniquer, ne se souvenant absolument pas des évènements passés. Pendant une bonne minute, il était totalement désorienté, à la merci de sa panique, et essayait du mieux qu'il pouvait de se souvenir de ce qu'il se passait. Pourquoi était-il sur cette plage ? Il se mit à faire les cent pas au bord de la mer, cherchant un sens à la raison de sa présence sur cette plage qu'il ne connaissait pas. C'est alors qu'il se souvint. Il se souvint de tout. L'Albatros, les pirates, la tempête, la vague... Tout ce qui s'était passé lui était revenu, et il aurait, au final, préféré ne pas s'en souvenir. Désemparé, autant par le fait qu'il ait survécu à cette vague géante que par le fait que tous ceux qu'il avait connu sur l'Albatros aient péri, il regarda la mer, à genoux, ne sachant plus quoi faire. Après une bonne dizaine de minutes, et se disant qu'il valait mieux ne pas rester en plein soleil, il se releva, et se retourna. La plage était faite de sable blanc, presque éblouissant au soleil, et semblait s'étendre à l'infini. Seul quelques rochers plantés au milieu de ce long drap blanc, contrastant avec la blancheur du sable. Derrière, là où se dirigeait Charles, une jungle luxuriante était plantée au beau milieu du décor. Cocotiers, palmiers, hautes herbes, lianes et cris d'animaux exotiques caractérisaient cette véritable forêt amazionienne.

  Charles entra dans la jungle, encore un peu humide. Avant tout, Charles pensait à sa survie, et se disait qu'il fallait explorer les environs, afin de trouver un point d'eau douce. Il ne savait pas où il se trouvait, et pour le moment, il ne trouvait pas cette question primordiale. Son instinct et son sang-froid avaient immédiatement pris le dessus sur lui. Il se mit donc à marcher dans la jungle. Une chose était sûre, Charles n'était pas sur son continent natal, Rovenstern: le climat là-bas est inadapté pour qu'une jungle s'y trouve. À peine entré dans la forêt, Charles comprit que sa survie n'allait pas être une partie de plaisir: des enchevêtrements de lianes, de luxuriante végétation et de racines ralentissaient le progrès du mousse. Aussi, celui-ci tomba de nombreuses fois sur des obstacles dissimulés. Non seulement la flore était un problème, mais la faune posait aussi problème: Charles écrasait des moustiques par dizaine. Il n'avait rien sur lui. Même pas un couteau.

 Après ce qui lui avait semblé être des heures de marche dans la jungle, Charles se rendit compte qu'il se trouvait sur une colline, surplombant la végétation. Il grimpa à un arbre qu'il trouvait étrangement grand, et, une fois sur la première branche, il fut surpris de voir à quel point il était haut. Il se disait qu'il avait dû beaucoup marcher, puisqu'il pouvait carrément voir les quelques restes de sa chaloupe dispersés sur la plage en contrebas. Une petite brise se levait, amenant la fraîcheur avec elle. Cependant, Charles ne s'attarda pas trop sur sa branche, car le temps défilait, et le soir allait bientôt tomber. Il n'avait pas pu trouver d'eau, mais il s'était mis en tête de chercher un point d'eau le lendemain. Pour l'instant, il récupéra des feuillages et des branches à peu près sèches, ce qui était une tâche très difficile dans cette jungle tropicale. Non sans difficultés, il parvint enfin à récupérer de quoi démarrer un petit feu. Cependant, un autre problème majeur se présentait à lui: il ne savait pas comment démarrer un petit feu. Le soir était déjà tombé, et avec lui le doux voile doré se déposant peu à peu sur une l'étendue azurée devenant de plus en plus sombre. Charles essaya plusieurs méthodes pour allumer son tas de feuilles: il frotta deux pierres ensemble, sans succès, puis essaya de frotter deux bâtons entre eux, méthode ayant réussi à chauffer les deux bâtons, mais loin de faire des étincelles. Il essaya également de déplacer son tas de feuilles dans une zone encore éclairée par le peu de soleil en espérant que celui-ci allumerait le feu, mais cette idée fut bien évidemment couronnée de succès. De toute façon, c'était trop tard: la nuit était déjà tombée, et Charles ne voyait pas plus loin que le bout de son nez. Le froid apparut avec la pénombre, et Charles frissonait. Il n'aurait jamais pensé qu'il pouvait faire si froid dans cette jungle qui auparavant était étouffante. Cependant, il profita de l'étrange silence qui était apparu, seulement brisé par le très lointain fracas des vagues sur la plage en contrebas. Le mousse essaya de dormir au pied de l'arbre dans lequel il s'était hissé plus tôt, éclairé par la faible lueur de la Lune. Au bout de quelques minutes, il s'endormit, mort de fatigue.

Commentaires

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire Sir Segurade ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0