Un silence pesant s'abattit sur les loges, les mains de ses soeurs restèrent figées telles des statues de glace. R'yline se retourna pour voir se découper la silhouette massive du roi dans l'encadrement de la porte.

— Femmes, ce soir, mon fils choisira l'une d'entre vous pour partager sa couche. Soyez bien consciente du privilège qui vous est offert. Je compte sur vous pour vous montrer à la hauteur, vous savez ce qui attend celle qui me déçoit.

Les pensées de la favorite s'agitèrent. Le roi tournait déjà les talons. Elle devait saisir cette opportunité en or. Alors que sa main se posait sur son flanc, le corps de la jeune femme se redressa et se dirigea vers la sortie. Elle rattrapa le souverain quelques mètres plus loin.

— Mon Seigneur, pour la première de votre héritier, il lui faut découvrir le meilleure de ce que la gente féminine a à lui offrir. Ainsi, il vous sera redevable.

Le regard ombrageux du roi se posa sur elle. La nymphe contrôla difficilement les tremblements parcourant tout son corps. Elle attendit le coup, la tête baissée, les yeux fixés sur les chausses de son maître.

— Qu'entends-tu par là ?

— En lui offrant le plus prestigieux, il sera en devoir de vous offrir à son tour le meilleur.

Ses années de pratique lui permirent de maîtriser sa voix pour en effacer les chevrotements et y insuffler des notes suaves.

— Tu as conscience que tu m'appartiens, asséna-t-il.

Elle s'approcha pour baiser les doigts de son roi et lécher délicatement chaque extrémité.

— Je vous suis toute dévouée. Vos intérêts sont ma priorité.

Un instant d'éternité s'écoula, la nymphe attendait la sanction. Il lui attrapa rudement le menton, leva sa tête vers son visage tout en serrant sa prise.

— Soit, et demain tu seras de nouveau mienne.

La danseuse vit dans l'éclat du regard ce qu'il lui en coûterait. Elle déglutit avec peine. Puis un afflux victorieux parcourut ses veines : ce soir, elle s''épargnerait son bourreau et ferait de l'héritier son amant.