Chapitre 1.7: anneau céleste

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Natalie Lonskaïa :

Encore et toujours des affaires à traiter, des dossiers empilés qui semblaient se multiplier sans fin. Entre les demandes de justification et les attaques diplomatiques à peine dissimulées, cela faisait maintenant un mois que Jérémy était enfermé dans son entrepôt. Les ambassadeurs français demandaient à venir pour s'assurer que nous prenions soin de Jérémy et qu'il ne souhaitait pas rentrer en France, voulant vérifier que tout cela était de sa propre volonté. Mais ce n’était pas tout : d'autres pays tentaient aussi de négocier son rapatriement sous notre nez, chacun cherchant à tirer profit de sa technologie.

Vivian, quant à elle, avait été envoyée traquer les espions étrangers tentant d'infiltrer notre pays. Elle en avait déjà attrapé plus d’une vingtaine, venant de pays différents, bien que leurs nations d'origine n'admettent même pas leur existence.

Et puis, il y avait les demandes incessantes de matériel de la part de Seraphina. J’avais fini par la convoquer pour une explication, et en attendant son arrivée, je m'occupais de remplir des papiers de refus ou de report concernant les visites d’ambassadeurs désireux de rencontrer Jérémy.

Toc, toc.

« Entrez, » dis-je, sans lever les yeux de mes dossiers.

Seraphina entra, vêtue d’une salopette de mécano, ce qui me surprit un peu. Mais j’étais trop fatiguée pour relever ce détail.

« Dis donc, ça ne doit pas être tous les jours qu’on te voit avec autant de paperasse sur ton bureau, » lança-t-elle, un brin moqueuse. Elle n’avait pas tort. D'habitude, mon bureau était impeccable, les affaires traitées immédiatement. Mais là, deux piles de dossiers trônaient devant moi, comme un rappel constant de ma charge de travail.

« S'il te plaît, épargne-moi tes commentaires. Tout ça, c'est à cause de lui, » répondis-je sèchement. En plus de mes responsabilités habituelles en tant que gestionnaire des affaires des différents secteurs de LADA, je devais maintenant gérer tous les problèmes qu'il provoquait dans le pays.

Seraphina s’installa en face de moi, une feuille de demande de matériel à la main. « Tu voulais me voir, il me semble ? »

Je pointai la liste de ses demandes. « Oui, c’est au sujet de ce que tu tiens dans ta main. Un lingot d’or, sérieusement ? » dis-je en levant les yeux vers elle. « Et puis, que fais-tu dans cette tenue ? Tu es censée le surveiller, pas jouer les mécanos. »

Je la voyais sourire faiblement, mais il fallait que je comprenne pourquoi ses demandes étaient devenues si extravagantes.

« Cela fait un moment que tu n’as pas passé dans l’entrepôt, non ? » commença Seraphina, me sortant de mes pensées. « Jérémy construit une machine qui va lui permettre de créer de nouveaux anneaux célestes, d'après ce qu'il m'a expliqué. Pour cela, il a besoin de mélanger plusieurs éléments, dont de l'or. Il ne m’en a pas dit plus, mais tu sais qu'il a besoin de main-d'œuvre qualifiée, et on ne peut pas mettre n'importe qui là-bas. J’ai déjà Daniel qui nous aide, et nous arrivons justement à la phase finale. Que dirais-tu de lâcher ces papiers et de venir voir ce qu’on est en train de réaliser ? » L'idée était tentante... bien trop tentante, d'ailleurs.

« Bon, j’arrive, mais laisse-moi me servir un thé avant, et on passera récupérer ton lingot d'or au passage, » dis-je, me résignant.

Nous arpentions les couloirs blancs et stériles du souterrain jusqu'à un ascenseur qui nous descendit profondément dans la montagne. Ce lieu était sécurisé par toute une série de systèmes de sécurité à la pointe de la technologie, et seules trois personnes y avaient accès.

Une fois toutes les vérifications passées, la porte s’ouvrit sur une vaste salle composée de trois grands étages fortifiés, construits pour supporter le poids de tout le matériel, notamment les lingots d’or. Sur un côté, le serveur principal de la base était lui-même enfermé derrière une grille, à l’abri de toute tentative de piratage ou d'interférences électromagnétiques. De l'autre côté, des casiers verrouillés derrière une autre grille contenaient des informations confidentielles sur de nombreuses personnes. Ces données étaient une arme redoutable pour manipuler ou faire chanter ceux qui s’y opposaient. Après tout, c’était l’une des forces de notre réseau d’informations.

« Impressionnant, non ? » avec un sourire en coin, alors que je contemplais la pièce.

La sécurité ici était tellement stricte qu’elle en devenait presque oppressante, un reflet de l’importance de ce que nous protégions.

Je pris un petit lingot de 250g dans le coffre, tandis que Seraphina m’attendait à l'entrée de la chambre forte. En sortant, je lui tendis le lingot.

« On va commencer par ça, et on verra ensuite, une fois qu’il aura montré des résultats concluants. »

« Ça devrait suffire, j’espère, » répondit-elle avec un léger sourire.

Nous nous dirigeâmes vers l’entrepôt de Jérémy Chapi, empruntant les couloirs silencieux du complexe souterrain.

« Et son travail, comment avance-t-il ? » lui demandai-je pour avoir un rapport oral de sa part avant de lire quoi que ce soit de plus formel.

« Il avance bien. D’après ce que j’ai compris, il veut créer des anneaux célestes plus grands que ceux qu’il possède déjà, » répondit Seraphina.

« Pourquoi des plus grands ? » demandai-je, intriguée.

« Je lui ai posé la même question, et il m’a expliqué que c’était plus rentable pour l’instant. Il voudrait aussi organiser une conférence privée avec le pôle médical. »

« Une conférence médicale ? Dans quel but ? » demandai-je, fronçant les sourcils.

« Cela aurait un lien avec un produit miracle, selon ses dires, » répondit Seraphina en haussant les épaules. « Depuis notre conversation dans l'avion, je pense qu'il a réfléchi et qu'il veut obtenir des avis plus professionnels sur son remède. »

« Il ne t’a rien dit de plus ? » continuai-je, souhaitant en savoir plus.

« Non, pas vraiment. Lui et sa fille sont surtout concentrés sur la fabrication de la machine. Et toi, il t’a expliqué quelque chose ? »

Je pris un instant pour formuler ma réponse. « Oui, mais c’est un sujet trop délicat à mon goût. Son remède pourrait effectivement soigner totalement le corps, voire faire repousser des membres. Dit comme ça, c’est un miracle. Mais dans un cadre plus large, cela pourrait facilement dégénérer en catastrophe sociale. »

L’ascenseur s’ouvrit enfin sur le couloir menant à l’entrepôt de Jérémy. À l’ouverture de la porte, je fus surprise par l'ampleur des résultats obtenus jusqu’à présent.

Le vaisseau de Jérémy se trouvait maintenant dans un coin de la pièce, avec à ses côtés ce qui ressemblait à un énorme bus scolaire sans carrosserie. Seul le squelette métallique était présent. mais ce qui me surprener le plus c'était a machinerie en son centre de la piece . Un anneau métallique, paré de plusieurs nuances de couleurs, semblait en suspension au milieu de la machinerie , soutenu par les 2 générateurs de chaque côté que Jérémy les appelait les « anneaux célestes. » Toute cette structure complexe était reliée à une plateforme ronde au plusieurs manette descende du dessue , tandis que deux pupitres disposés de chaque côté étaient équipés de vitres teintées. Derrière ces vitres, je pouvais distinguer Daniel et Jérémy, concentrés sur leur travail.

L'entrepôt, autrefois immaculé, était désormais parcouru par une multitude de câbles électriques qui couraient le long des murs et du plafond, tous connectés à un poste de pilotage installé dans un autre coin de la pièce. Sur l’un des écrans de ce poste, un avatar apparaissait, donnant une impression de chaos organisé dans cet espace autrefois vide.

« Bonjour, cela faisait longtemps que nous ne nous étions pas vus. Que pensez-vous de tout cela ? » demanda Jérémy en interrompant son travail, tandis que Daniel me saluait d’un geste militaire à mon arrivée.

« Bonjour à vous, » répondis-je, observant les lieux avec intérêt. « Vous avez su vous approprier cet espace, c’est le moins qu’on puisse dire. »

À ce moment, un petit drone roulant s’approcha de moi, portant un écran vertical sur lequel l’avatar que j’avais aperçu plus tôt s’affichait. C’était une jeune femme, habillée avec une robe finement brodée, d’une élégance presque royale.

« Bonjour, je me nomme Iris. Vous devez être madame Natali Lonskaïa. Seraphina et mon père m’ont beaucoup parlé de vous, » dit-elle en exécutant une légère révérence, tenant délicatement sa robe pour m’adresser un salut respectueux.

Je fus légèrement surprise. Après avoir lu de nombreux rapports à son sujet, je me retrouvais enfin face à elle, cette entité numérique qui n’était pourtant pas humaine. Mais il était clair que l’IA nommée Iris se tenait bien là, interagissant avec une grâce et une politesse impressionnantes.

L’étrangeté de la situation me frappa, mais il était évident que cette IA était bien plus qu’un simple programme.

« Enchantée de vous rencontrer, Iris. J’ai suivi votre performance lors de votre live, ainsi que les nombreux rapports que m’a fournis Séraphina sur vous, » dis-je, en observant de près cette IA qui, étonnamment, ne ressemblait en rien à une IA normale. Je pouvais remarquer chaque mimique humaine dans ses gestes, ses mouvements des mains, et même dans ses expressions faciales, ce qui piquait de plus en plus ma curiosité. Tandis que Jérémy s'approchait de nous dans sa tenue de travail, recouverte de tâches et équipé de gants bleus, il les retira avec un léger sourire en coin.

« Vous savez, vous pourriez venir nous voir plus souvent, au lieu de lire ces rapports, » dit-il, sur un ton qui ressemblait à un reproche léger. Il n’avait pas tout à fait tort. Depuis notre dernière discussion, je n’étais pas venue constater l’évolution de son travail en personne. Mais c’était en partie de sa faute aussi.

« Je vous rappelle que j’ai un travail qui occupe la majeure partie de mon temps, sans compter la charge supplémentaire causée par vos activités, » répliquai-je, un peu plus sèchement que je ne l’avais prévu, fatiguée par l’accumulation de responsabilités.

« Comment ça ? » demanda-t-il, ne comprenant pas, tout en levant les mains devant lui comme pour se protéger, un sourire gêné aux lèvres.

« Plusieurs pays cherchent à vous récupérer, pour votre information. De plus, il faut qu’on fixe une date pour que vous rencontriez plusieurs ambassadeurs de différents pays, en priorité ceux de la France. Sans parler des espions et des autres sujets qui vous concernent directement. »

« Pourquoi devrais-je les rencontrer ? Je n’ai rien à voir avec la politique, » répondit-il, visiblement perplexe.

« Au cas où vous ne seriez pas au courant, plusieurs personnes demandent de vos nouvelles et nous accusent de vous séquestrer. Félicitations, vous êtes devenu une personne importante, et il va falloir que vous fassiez une apparition publique. En outre, le président est constamment en déplacement pour calmer les tensions avec les autres pays. »

« Malheureusement, elle a raison, » ajouta Iris. « Sur les réseaux sociaux, beaucoup pensent que tu es retenu contre ton gré. Cela crée une pression croissante sur ce pays. »

Jérémy baissa la tête, visiblement désolé. « Je suis vraiment désolé pour tout le travail supplémentaire que je vous cause. Mais vous allez bientôt comprendre pourquoi tout cela est nécessaire. Passeriez-vous le lingot d’or, s’il vous plaît ? »

Séraphina, qui était restée silencieuse jusqu’à présent, s’avança et tendit le lingot d’or à Jérémy.

« C’était le dernier ingrédient qu’il te manquait ? » demanda-t-elle.

« Oui, si vous avez un peu de temps à m’accorder, Natali, restez donc que je vous présente la création d’un anneau céleste. » Jérémy semblait particulièrement excité par cette démonstration. Bien que je n’aie pas vraiment hâte de retrouver mes dossiers, ma curiosité l'emporta, et je décidai de rester.

Je l’observai alors réduire le lingot d’or en une fine poudre, n’en prenant finalement qu’une grande cuillère qu'il saupoudra méticuleusement. Aux côtés de sa fille Iris et de Séraphina, je me retrouvais face à cet immense anneau de métal. En y regardant de plus près, je constatai que l’anneau flottait littéralement en suspension, probablement grâce à des aimants, entre deux petits générateurs disposés de chaque côté. Les nuances de couleur que j'avais remarquées plus tôt étaient dues à la diversité des matériaux utilisés pour sa fabrication, tels que le cuivre et l’aluminium.

Jérémy, aidé de Daniel, s'approcha de l’anneau et commença à le faire tourner à la main, tout en saupoudrant la poudre d’or avec précision.

« Je vous prie de me suivre, le démarrage peut être quelque peu éblouissant, » nous avertit Iris. Elle nous guida vers l'un des pupitres protégés par des vitres teintées, tandis que Daniel et Séraphina s'installaient à leurs postes. Jérémy, quant à lui, s'installa sur la plateforme ronde entre les deux pupitres, portant de lourdes lunettes aux verres teintés. Il saisit deux poignées amovibles au-dessus de lui, qu'il abaissa, tandis que ses pieds étaient fermement fixés sur la plateforme par des anneaux métalliques.

À chaque mouvement de ses bras, les systèmes mécaniques reliés à l’anneau répondaient, émettant des bruits de grincements métalliques qui résonnaient dans toute la salle.

« Vous ne comptez pas tout faire exploser, n’est-ce pas ? » demandai-je, un brin sarcastique, en observant la complexité du mécanisme.

« Normalement non, » répondit-il avec un léger sourire avant d’annoncer : « Lancement de la procédure. »

L’anneau commença à tourner de plus en plus vite, presque frénétiquement. À mesure que sa vitesse augmentait, les bras métalliques autour de lui se mirent à bouger, appliquant des pressions spécifiques sur sa surface. Un léger bourdonnement monta en intensité, et l’air dans la salle semblait vibrer légèrement.

Pendant ce temps, Daniel et Séraphina fournissaient des informations en continu, indiquant la vitesse de rotation et la température de l’anneau.

Je pouvais ressentir une tension grandissante, mêlée à une étrange fascination pour cette prouesse technologique.

La scène qui se déroulait devant moi était à la fois fascinante et empreinte de tension. Daniel et Séraphina, concentrés, énonçaient des informations précises sur la vitesse de rotation de l'anneau et la température qui augmentait progressivement. Chaque chiffre, chaque donnée semblait crucial pour maintenir la stabilité du processus. L’atmosphère dans la pièce devenait de plus en plus électrique, à la fois littéralement et figurativement, tandis que l'anneau atteignait des vitesses impressionnantes.

L'anneau céleste tournait à une telle rapidité que ses nuances métalliques se fondaient en une seule couleur brillante, presque hypnotisante. Le bourdonnement s'intensifiait, résonnant dans tout l'entrepôt comme un grondement lointain. Jérémy, concentré, guidait les mouvements des bras mécaniques avec une précision quasi-militaire, tandis que ses pieds restaient fermement ancrés sur la plateforme.

Je jetai un coup d'œil vers Iris, qui observait la scène avec calme. Même si elle ne disait rien, je sentais qu’elle surveillait la moindre fluctuation des systèmes, prête à intervenir en cas de problème.

« La température atteint 850 degrés Celsius, » annonça Séraphina, une pointe d'inquiétude dans la voix.

« Stabilisation des flux d’énergie dans 3... 2... 1... », déclara Daniel, les yeux rivés sur son écran.

Soudain, à la surprise générale, Jérémy se mit à réciter un chant profond et solennel, comme une prière ancienne. Personne ne comprenait ce qu’il faisait, et une certaine tension envahit la pièce. L’anneau, sous l’effet de la machinerie, rougissait progressivement, devenant incandescent, tandis que des arcs électriques se formaient autour des générateurs et de l’anneau central.

« Moi, Jérémy Chapi, marcheur des rêves, je m'adresse aux échos d'un autre temps. Âmes vagabondes, empreintes d'une lumière éteinte, toi qui erres encore dans les souffles du monde… Entends mon appel. »

Sa voix, empreinte d'une solennité rare, résonnait comme une mélodie ancienne, s'élevant au-dessus du grondement des machines. Les murs semblaient vibrer sous l'intensité des mots, tandis que l'anneau se teintait peu à peu d'un rouge incandescent puis d’un blanc éclatant. Figés, nous observions Jérémy réciter ses paroles énigmatiques, tout en ajustant les poignées métalliques autour de lui. Une énergie étrange semblait emplir la pièce. Les arcs électriques crépitaient autour de l'anneau, et un tourbillon d’énergie se formait, comme si quelque chose d’invisible était sur le point de se manifester. Ni Daniel, ni Séraphina, ni moi-même ne savions ce que Jérémy essayait d’accomplir.

« Viens à nous, toi qui acceptes, embrasse la lumière et trouve ton destin. Rejoins le cercle éternel, entre dans l’anneau céleste et laisse-toi guider. »

Je jetai un regard à Séraphina et Pavel, aussi déconcertés que moi. La salle tremblait sous l’énergie dégagée par l’anneau, et le chant de Jérémy semblait devenir une sorte d’appel à quelque chose de bien plus grand que nous. Il ne s'agissait pas simplement d'un rituel... C’était comme s’il utilisait ce chant pour se donner de la force, pour accomplir l’impossible.

« Esprit lié à l’oubli, ombre éparse des jours passés, accorde-nous un fragment de ton essence. Embrasse ce cercle éternel et laisse ton être transcender la chair. Toi, homme océans, qui as combattu l’injustice sociale, toi qui as éclairé notre monde d’une part de lumière. Victor ! »

Le chant, à mi-chemin entre prière et incantation, prenait des accents de lointain, comme s’il convoquait quelque chose d’indicible. L’air lui-même semblait alourdi par une force invisible, une énergie qui dépassait l’entendement.

L’anneau s’illumina d’un éclat si intense qu’il semblait absorber toute la lumière environnante. Même à travers les vitres teintées, nous dûmes détourner les yeux. Le silence s’abattit soudainement sur la pièce, perturbé uniquement par le grondement sourd de la machinerie et les crépitements électriques.

Lorsque la lumière s’estompa, un calme étrange régnait. Séraphina et Pavel restaient bouche bée. Jérémy, lui, se tenait au milieu de la plateforme, le t-shirt trempé de sueur, révélant une ancienne cicatrice béante sur son abdomen. Essoufflé, il luttait pour reprendre son souffle, mais dans ses yeux brillait une lueur étrange, comme s’il venait d’accomplir quelque chose de monumental. Pourtant, aucun de nous ne savait exactement ce qui venait de se passer.

Jérémy descendit de la plateforme, chancelant légèrement sous le poids de l'effort. Il courut tant bien que mal vers l'anneau, sa respiration haletante trahissant sa fatigue visible.

« Merci encore d’être là, Victor, » murmura-t-il, tout en posant sa main sur la structure, un geste presque tendre. Malgré mes oreilles qui bourdonnaient encore à cause de la déflagration sonore, j’entendis distinctement ses paroles. Il écarta les deux petits anneaux situés de chaque côté de l’anneau central, et je remarquai aussitôt que leur éclat avait changé. Ils illuminaient faiblement, presque vacillants, comme sur le point de s’éteindre.

Le deuxième, en particulier, semblait proche du clignotement, sa lumière vacillant plus que de raison. « Tout s’est bien passé, merci encore, vous avez été formidables. Reposez-vous maintenant. » Il leur parlait comme à des êtres vivants, ce qui ne fit qu’accentuer mes doutes sur son état psychologique. Mais je remis cette réflexion à plus tard.

Jérémy détacha les deux petits anneaux avec précaution, les posant délicatement sur le côté, presque avec révérence.

« Voilà, une partie de la promesse que nous avions faite, » dit-il en se tournant vers moi, désignant l'immense anneau qui flottait encore dans l'air, bien plus imposant que tout ce qu'il avait montré auparavant.

Il y avait dans son regard un éclat, une sorte de fierté mélangée à quelque chose de plus profond, peut-être même de l'accomplissement.« Effectivement, je vois ça, » répondis-je à Jérémy, me plaçant face à l'immense anneau suspendu devant nous.

« On pourrait déjà relier la base à cet anneau pour le tester, » proposa Daniel, un brin enthousiaste.

Jérémy secoua la tête. « Pas encore. J'aurai besoin de lui pour en réaliser encore trois autres de la même taille. »

« Trois comme ça ? Mais combien en faudrait-il pour alimenter un pays ? » demanda Daniel, visiblement impressionné.

« Oh, normalement, juste cet anneau serait capable d'alimenter quatre pays comme la France, je pense. Mais je voudrais en créer un encore plus grand, capable d'alimenter un continent entier. De cette façon, j’espère que cela calmera certains pays si on leur propose une telle solution. Qu’en pensez-vous, Natali ? » demanda-t-il en se tournant vers moi.

Je pris un moment pour réfléchir. « Je pense qu'effectivement, cela va intéresser beaucoup de pays, » répondis-je prudemment. « Mais comment comptez-vous faire en sorte que cette énergie ne soit pas détournée à des fins militaires ? »

Jérémy croisa les bras, pensif. « J’y ai longuement réfléchi depuis que nous en avons discuté avec ma fille. Je pense que la meilleure solution serait de fonder notre propre pays ou principauté, où nous pourrions gérer directement les ambassades qui feraient office de centrales électriques. Cela nous permettrait de contrôler l’utilisation de l’énergie et, en plus, cela vous désolidariserait de nous. Ainsi, nous ne vous causerions plus d’ennuis. »

Iris intervint, expliquant en détail son plan. Sur l’écran, elle montra des projections complexes, illustrant le chemin de développement qu’ils avaient envisagé. La précision et la minutie de ses calculs étaient impressionnantes.

Le projet devenait de plus en plus ambitieux, mais les questions éthiques restaient nombreuses.« Cela n'est pas une demande simple que vous faites, mais pas impossible si vous passez devant l’ONU, » dis-je en réfléchissant à voix haute.

« Nous ferions d'une pierre trois coups en présentant ce projet devant l’ONU, » poursuivis-je, « cela arrêterait les demandes incessantes des autres pays et vous désolidariserait de nous. Il faut que j’en parle au président avant, mais cela ne devrait pas poser de souci. » L’idée me semblait de plus en plus intéressante, même si nous allions devoir les aider sur certains aspects.

Mais Iris interrompit mon raisonnement, pointant son père du doigt. « Sauf que… on a un léger problème. »

Je regardai Jérémy, perplexe, tandis qu’il joignait ses mains en un geste nerveux. « Euh… comment dire, je ne suis pas vraiment habitué à parler devant une foule, et encore moins devant des politiciens. Si Iris y allait à ma place ? »

Je faillis m’étouffer. Non, ce n’était pas possible, il m’aurait tout fait. « Non, je ne vous laisse pas le choix cette fois. Vous allez devoir y aller, quitte à ce que je vous donne des cours de socio-politique. »

Jérémy chercha une nouvelle excuse. « Mais qui va créer les anneaux pendant ce temps-là ? »

Je soupirai. « Daniel et Séraphina sont parfaitement capables. Ils vous ont vu faire, ils sauront s’en occuper. »

Jérémy sembla encore plus mal à l’aise. « Je suis désolé, mais… ce n’est pas aussi simple. Si vous n’avez rien entendu, vous ne pourrez pas le faire. »

Cette phrase nous laissa tous perplexes. Nous le regardions, interloqués, tandis qu’Iris, elle, faisait mine de ne rien savoir. « Testez, vous verrez bien, » ajouta-t-il mystérieusement.

« Très bien, » répondis-je avec un ton de défi. « Je vous attends demain dans mon bureau, et je veux vous voir habillée avec la tenue que nous allons vous apporter. »

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