28.2 - La vengeance de la magicienne

5 minutes de lecture

— Les filles de mon âge me disent que je leur fais trop penser à une grande personne, parce que je parle trop comme elles… Mon vocabulaire est assez développé parce que j’ai été élevé ainsi, parmi les rebelles. On m’a encouragé très vite à parler quand j’étais très jeune… Par contre je n’ai jamais appris à lire avant de rejoindre l’orphelinat. C’est Sœur Agnès qui m’a enseigné ça, puis à compter et faire des phrases. J’en ai encore beaucoup à apprendre. Chaque jour apporte une nouvelle leçon, comme le dit souvent Père Shalom. Mais entre toi et moi, je trouve qu’il est vraiment trop à côté de la plaque, en ce qui concerne les goûts des enfants.

— Tu as la parole facile aujourd’hui ! s’esclaffa Flint. C’est bien !

— Bah, personne n’arrive à me comprendre mieux que ta sœur et toi, on dirait bien. Sarah est si gentille avec moi, elle me conte plusieurs histoires et me chante des berceuses avant d’aller au lit. Elle est comme… Hmm… Comme une… C’est bête, j’avais ce mot sur le bout de la langue…

— Une maman ? demanda Flint.

— C’est ça ! Une maman ! Elle me fait vraiment penser à une mère des fois.

Estelle n’avait pas tort à ce sujet. Sarah avait toujours eu ce petit côté maternelle d’aussi loin que Flint s’en souvienne. Elle s’était occupée de lui, de son frère et de Gwen alors qu’ils avaient grandi ensemble. Elle avait toujours été la plus responsable des quadruplés. Cela avait beaucoup aidé l’Oncle Nash qui avait pu compter sur elle dans ses propres tâches.

Sarah était ce qu’on appelle une bénédiction. Parfois, Flint se demandait si sa mère avait été ainsi. Car il avait beau essayer, il n’arrivait pas à s’imaginer une voix ou bien une personnalité qu’il aurait pu lui donner. Il aimerait bien en parler avec son père ou même son oncle Nash… Il voulait en savoir davantage sur la fameuse Diana, mais ils ne semblaient pas aimer parler du passé aussi ouvertement.

— Si je décide de t’adopter, ça va faire de toi une Markios, et tu sais ce qu’on dit de notre famille, déclara le blond. Qu’on est la plus dingue qui soit en ville. Avec mon oncle l’ivrogne qui a pris la fuite, mon autre oncle qui est un accro du travail, mon père le président, mon frère son assistant et aussi le conseiller, ma sœur la nonne, mon autre sœur qui s’est pris la malle, mon mari la marionnette et moi, la tête de mule. On forme vraiment une étrange de famille, tu ne trouves pas ? Et ça, c’est sans compter Luna qui est légalement sous notre tutelle. Celle-là n’est pas toujours facile à gérer non plus…

— N’empêche, j’aimerais bien avoir une aussi grande famille… Même si elle n’est pas parfaite. Au moins j’aurai une maison où rentrer le soir, lorsque je reviens de l’école. Moi je n’ai que l’église et l’orphelinat.

— Alors c’est décidé. Tu es désormais ma fille.

— Sérieux ? Vrai de vrai ?

— Plus que sérieux. Je veux t’adopter.

Estelle renifla un bon coup avant de se mettre à pleurer. Flint descendit la gamine de ses épaules, puis la serra contre lui et se pencha au sol. Il ne voulait pas lui donner le vertige. Elle pleurait, mais souriait. Comment ne pas craquer avec cette enfant ? Il ne voulait plus la voir aussi seule. Il avait envie d’en faire sa petite princesse. C’était une adoption sur un coup de tête, mais autant se jeter à l’eau maintenant qu’il en avait encore la chance. Flint sentait qu’il aurait regretté que quelqu’un l’adopte avant lui. C’était maintenant ou jamais.

— Je commençai vraiment à perdre espoir… sanglotait l’enfant, dans ses bras.

Flint put lire l’espoir qui renaissait dans les yeux bleus de la petite Estelle. Aussi bleus que les siens. Elle aurait même pu être sa fille biologique…

— Je ne vois pas pourquoi tu devrais t’en faire maintenant, je suis là pour toi, dit Flint qui caressa la tête de la fillette.

— Le jour où tu m’as donné cette poupée, je n’ai jamais été aussi heureuse de toute ma vie… Mais là… Mais là…

Gabriel, qu'ils avaient vu sur la route, marcha vers Flint et d'Estelle pendant qu'ils marchaient en direction du parc de la ville. Il écoutait en silence ce que son époux disait à la petite ; ils avaient déjà parlé de tout ça à plusieurs reprises. Le colosse avait déjà mentionné son désir de fonder une famille avec son mari, et il appréciait l'idée de peut-être adopter la gamine un jour. Lorsqu'il vit cette scène, il était si ému qu'il se mit à pleurer lui-même.

Flint invita Gabriel à s'approcher. Estelle courut aussitôt dans les bras du golem qui ne prit pas de temps pour la soulever dans les airs. Le blond pouvait bien se ficher de ce qu'en penseraient les autres. Pour lui, c'était un moment magique et rien ne pourrait le gâcher. Il était résolu plus que jamais d'adopter Estelle.

Certes, il y avait quelques passants qui dévisageaient le jeune couple et la gamine, comme d’étranges prédateurs, d’autres étaient tout simplement indifférents. Flint était habitué à ce genre de regards. Tant pis pour eux, c’était sa famille et lui. Rien d’autre n’avait d’importance. Gabriel riait aux éclats alors qu’Estelle le chatouillait dans la nuque. La fillette avait un plaisir malsain à le taquiner de cette façon, malgré ses indications comme quoi il détestait se faire chatouiller.

Flint devait l’avouer, c’était marrant de le voir sans défense à chaque fois qu’il se faisait prendre à ce petit jeu. Rien de mieux que tout ça pour détendre l’atmosphère.

Flint était finalement en train d’oublier sa dispute d’un peu plus tôt avec Kyran. Il était conscient cependant que cette adoption allait paraître comme une décision très hâtive, mais tout le monde dans sa famille – à l’exception de Gwen et de Troyd – était au courant qu’il désirait faire sa vie avec Gabriel. Tout ça impliquait l’adoption d’un enfant ou bien l’aide d’une mère porteuse. S’il adoptait Estelle légalement, il résoudrait ce problème. Il aurait la chance d’être un père.

Alors qu’il réfléchissait à comment il annoncerait la nouvelle à sa famille, Flint admirait tranquillement le regard étincelant de Gabriel, alors que ce dernier jouait avec leur enfant. Car oui, le gros barbu de son cœur s’était déjà fait à l’idée qu’Estelle serait sa propre fille.

Cassandra et Misaki se dirigeaient vers les montagnes de l’ouest, où elles comptaient mener leur enquête. Elles étaient accompagnées de Windy, l’esprit élémentaire qui se déplaçait au-dessus de leurs têtes. La crécerelle se servait de sa vision afin de repérer un quelconque ennemi à l’horizon. Les autres brigades étaient toutes occupées ce jour-là et les autres membres de la Septième Brigade avaient tous été injoignables pour une partie de la journée. Ainsi donc les deux jeunes femmes avaient emprunté deux chevaux à l’écurie, sans voiture, et partirent par la sortie ouest de la capitale. Elles avaient opté de ne pas déranger Ruby et les membres de la Première Brigade. D’après le Général Wolfe, elles pourraient atteindre les montagnes d’ici la fin de la soirée si elles gardaient un bon rythme sur la route.

Annotations

Vous aimez lire TeddieSage ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0