38.4 - La détresse de Flint

6 minutes de lecture

— Non… Elle marque un point, Flint, répliqua Dia. Il ne faut pas éliminer les possibilités que Serenity ou Derek soient des agents du culte. N’importe qui peut être un suspect…

— Merde ! Que dois-je faire alors ?! Je ne peux pas rester ici les bras croisés à attendre que la secte passe à l’attaque !

— Tu dois prendre une journée de congé, suggéra Misaki. C’est une requête en tant qu’amie et non un ordre. C’est pour ça que je suis si dure avec toi.

— Mais je…

— Pas de mais qui tienne ! gronda la jeune femme. Nous nous inquiétons pour ta santé mentale, Gabriel et moi !

— Il m’en aurait parlé…

— Ça suffit Flint… Tu en fais beaucoup trop pour un seul homme. Il faut que tu apprennes à lâcher prise. Tu n’as jamais pris le temps d’aller rendre visite à la tombe de ton oncle depuis l’incident et pourtant, une bonne partie de la ville s’est rendu au monument des défunts, ta famille y compris.

Le jeune homme s’avoua vaincu. Il avait compris qu’il tournait en rond et qu’il était en train de perdre la boule à force de s’inquiéter pour tout le monde. Il était vrai qu’il n’avait pas encore pris le temps de faire le deuil de Nash. Voilà pourquoi il s’était engagé durant les dernières semaines à rendre plusieurs services à Baldt ou bien à s’éterniser au centre d’entraînement avec les nouvelles recrues.

— Flint, j’ai peur pour toi… ajouta la capitaine. Tu es l’un de nos meilleurs soldats et nos plus loyaux brigadiers et il est vrai que tu nous as rendu beaucoup aidé et que plusieurs devraient prendre exemple sur toi, mais tu es en pleine crise… Tu as le droit de prendre quelque temps pour réfléchir à ton avenir et pleurer la mort de ton oncle. J’ai fait mes adieux à Yosuke quelques jours après être sortie de l’infirmerie, en compagnie de ton père, ton frère et Shayne, quand nous étions au monument… Quelques brigadiers ont suivi notre groupe afin d’aller porter des fleurs aux défunts. Ce jour-là, ton père et Kyran avaient besoin de toi, mais puisque tu étais trop occupé…

La guerrière se tut lorsqu’elle vit l’expression triste du jeune homme. Ce dernier serrait ses poings serrés contre ses hanches.

— Ça fait plusieurs mois que je te vois agir… rajouta sa supérieure. Au tout début, tu m’énervais parce que tu essayais toujours de montrer à tout le monde que tu pouvais être meilleur que Nash… Mais plus nous avons participé à ces missions et ces requêtes autour de la ville, plus j’ai commencé à mieux comprendre qui tu était vraiment. Et je dois admettre que j’ai beaucoup de respect pour ta famille et toi, car sans vous, les rebelles d’autrefois seraient probablement tous morts.

Le brigadier avala sa salive. La guerrière ressentait subitement l’envie de pleurer, mais se retint. Elle avait des souvenirs de Nash et de Yosuke qui remontaient en elle.

— D’après Artael, il se pourrait que tu commences une dépression comme ton oncle, mentionna Misaki. Il faudrait vraiment que tu fasses attention, sinon on risque de te perdre. Si tu devais disparaître en plus de Nash, ça serait une catastrophe pour ta famille et notre brigade. Tu peux nous parler de tes problèmes, tu sais ? On ne te jugera pas. Sinon… tu peux toujours consulter Monsieur Plante… C’est un très bon psychologue, tu sais ? Je…

Flint commença à pleurer en silence, malgré le fait qu’il essayait de retenir ses larmes depuis maintenant une bonne quinzaine de minutes. Il avait honte de son comportement et aussi de la façon à laquelle il s’était adressé à sa supérieure. Il se sentait beaucoup sous pression.

— Ce… ce n’est pas facile Misaki… dit-il après s’être rapidement essuyé les yeux. Je ressens tout ce poids sur les épaules parce que je n’ai pas envie qu’il arrive quoi que ce soit à Dia et les autres… Nash me manque beaucoup, c’est vrai… Mais je suis perplexe à l’idée que nous ayons à combattre tous ces clones de Troyd. Qui sait si Randell n’a pas utilisé les mêmes combines pour reproduire notre armée ?! Imagine si nous devions croiser une deuxième Misaki, une autre Luna, un petit groupe remplis de Cassandra ? Arriverons-nous à reconnaître nos amis ou serons-nous tous dupés par cette magie noire ? Je me sens tellement dépassé par les événements…

— Je comprends parfaitement cette peur Flint. Nous pensons tous comme toi, expliqua l’albinos qui lui afficha un triste sourire. Shayne est très concerné par la fragilité de ta santé mentale, et il n’est pas le seul. Gabriel vient souvent nous rendre visite en fin de soirée pour nous dire que tu pleures et que tu gémis durant ton sommeil. Voilà pourquoi Estelle dort avec Sakura et moi depuis quelques jours.

— Je dois avouer que c’est très inquiétant, mentionna Dia.

— Pourquoi ne pas m’en avoir parlé, toi ? grogna le blond qui observa son épée.

— Je ne voulais pas t’embêter… Gabou m’a fait promettre de veiller sur toi en essayant de te remonter le moral… Toutefois, je ne suis vraiment pas douée pour ça… Déjà que je n’ai pas été capable de le faire avec Nash, je me sens inutile…

— Tu vois ? indiqua la capitaine, les autres ont commencé à remarquer ton changement de comportement et…

Flint leva une main et fit signe à Misaki de se taire. Il n’avait pas besoin d’en entendre plus. Il savait très bien où elle voulait en venir. Son état d’esprit détériorait. Il serait raisonnable pour lui de suivre les conseils de sa supérieure directe et de prendre congé pour la journée. Il remercia donc son amie, de lui avoir mentionné tout ça, puis sortit tranquillement de la pièce, dans un état second.

Il longea le long des couloirs, une main sur le pommeau de son épée. Il avait besoin de trouver la force afin d’emprunter un cheval à l’écurie, pour ensuite se rendre au monument des défunts. Toutefois, il n’en ressentait pas le courage. Perdu dans ses pensées, il s’adossa contre un mur et ferma les yeux. Il resta là pendant une bonne dizaine de minutes jusqu’à ce qu’il soit interpellé par son mari.

Ce dernier revenait de leur chambre, vêtu d’une armure de fer. Il avait enfilé à son dos, sa longue hache. Luna se trouvait à quelques mètres de lui. Gabriel avait remarqué l’expression de son mari et se demandait si Misaki avait finalement eu la patience de lui expliquer qu’ils se faisaient tous du souci pour lui. Il haussa un sourcil, inquiet.

— Pourquoi ne m’as-tu rien dit, à propos de mes problèmes de sommeil ? lui demanda le blond, droit dans les yeux.

— Tu étais à bout de nerfs dernièrement. Je ne voulais pas te provoquer…

— Tout le monde me croit malade ou fou en ce moment…

— Mais n’est-ce pas le cas, chéri ? Ne t’es-tu pas regardé dans la glace dernièrement ? Tu es blanc comme de la neige – sans vouloir faire de jeu de mot douteux pour Misaki… C’est comme s’il te manquait des globules rouges dans le sang… Je ne te vois même plus manger, aussi… Es-tu en train de te laisser mourir ?

— Ne t’en fais pas pour moi, je peux très bien me débrouiller seul…

— Ce n’est pas le cas. Tu as besoin de mon aide et de celle des autres, mais tu es trop entêté et malheureux pour te rendre compte qu’on se tuerait à la tâche, rien que pour te faire plaisir. Autrefois, tu aurais tout fait pour devenir capitaine… Maintenant que l’occasion se présente, tu abandonnes tout ça entre les mains de notre amie. Je t’ai connu plus déterminé que ça, chéri… et je m’en fais beaucoup pour toi…

Le colosse passa l’une de ses mains chaudes sur la joue froide de son mari, qui prit cette dernière, timidement. Flint perdit son regard dans les yeux verts de son homme. Il se sentait toujours au septième ciel en sa présence.

— Normalement, c’est toi qui es en charge des trucs les tâches les plus importantes pour notre brigade, dit Gabriel. Cette fois, laisse-moi prendre soin de toi… Je veux te faire plaisir… Je veux que tu puisses pleurer dans mes bras quand tu en auras envie… Je veux t’enlacer et te consoler quand tu auras besoin de moi…

— Gab…

— Désolé, je ne peux pas rester, le devoir m’appelle, expliqua le colosse qui lui fit un petit sourire en coin. Va te reposer pour aujourd’hui. Demain on ira faire une dînette dans les plaines, si la guerre n’a pas encore éclaté. Je te promets de te préparer l’une de mes excellentes tartes !

Le large brigadier se pencha alors vers Flint pour lui donner un baiser sur les lèvres, et partit aussitôt, alors qu’il se dandinait dans son armure. La magicienne salua son ami, même elle avait l’impression d’avoir vu un fantôme, puis s’éloigna afin d’aller rejoindre l’imposant guerrier.

Le blond serrait toujours le pommeau de Dia.

— Je t’aime… murmura-t-il, la voix brisée.

Annotations

Vous aimez lire TeddieSage ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0