96.2 - Le cri de l'ange

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— Ne t’en fais pas pour lui, répondit son mari. Je suis certain qu’il finira par se manifester, une fois qu’il aura terminé sa mission.

— Ça fait quand même plusieurs semaines… Et s’il était mort ?

— Ne raconte pas de bêtises, Pri'. Lucas a sûrement dû s’égarer, comme toujours. Tu sais à quel point il a un très mauvais sens de l’orientation…

La naine soupira et secoua la tête.

— Une fois ce stupide conflit terminé, je demanderais la permission au Roi et son épouse de me laisser mener une équipe au sud de la province. Nous finirons bien par trouver ce qui s’est passé à notre ami !

— Allons chérie, nous sommes en guerre…

— Qu’essaies-tu d’insinuer par là ?

— Il a de fortes chances qu’il soit mort.

Frustrée, Priya lui donna une petite tape sur le dos, tout au-dessus de sa petite queue touffue de lapin. Il couina de douleur et se retourna vers elle, vexé. Il retourna ensuite ses yeux dorés en bas des escaliers et continua son chemin, posant rapidement ses pattes sur chaque marche. Celui-ci n’avait jamais trouvé de chaussures pour ses pieds, il ne portait que des protections métalliques autour de ses chevilles. Les créatures de son espèce étaient beaucoup plus humaines que bêtes, mais il leur arrivait cependant d’avoir des traits uniques à leurs races. Par exemple Boris avait des mains presque humanoïdes et pour cette raison, cela lui permettait de tenir des armes.

— Compte-toi chanceux que tu sois mon époux, sinon je t’en voudrais VRAIMENT d’abandonner notre meilleur ami ainsi ! grogna-t-elle.

Il haussa les épaules.

— Comment se porte notre nouvelle recrue ? demanda-t-il à l’attention de Misha.

— Elle ? fit son épouse. Elle était un peu secouée lorsque je l’ai trouvée, mais tel que prévu, elle avait déjà fait une prise au garde et l’avait balancé contre le mur. Je lui ai brisé la nuque lorsqu’il s’est relevé et me suis caché dans l’ombre, pendant qu’elle a glissé sous le lit. Ce n’était plus qu’une question de temps avant que la grosse andouille ne rentre dans la chambre.

— Et comment t’es-tu rendu au couloir, déjà ?

— J’ai emprunté le passage secret de l’aile est du château.

— Bien joué.

Il s’arrêta alors en bas des escaliers et fit signe à sa compagne de s’arrêter. Il sortit ensuite une flèche de son carquois et prépara son arc. Ils entrèrent aussitôt aux cachots et il visa un premier garde dans la nuque. Il décocha sa flèche et retira aussitôt un autre projectile, puis se tourna vers un second démon vêtu d’armure. Celui-là fonça dans leur direction lorsqu’il remarqua que son ami venait de périr.

La majorité des sbires de Troyd ne traînaient pas à l’intérieur du château ; ils rôdaient dans les ruelles d’Archenwald et détruisaient ou incendiaient tout sur leur passage. Le tyran avait beau être un général autrefois, il n’était pas si futé que ça. Il n’était bon qu’à deux choses : se battre et obéir. Sinon, il passait ses journées à agresser les dames qu’on osait lui mettre sous la main...

— Eh ! Vous êtes venus nous sauver ? demanda la vieille dame qu’on avait enfermée, un peu plus tôt. Je vous reconnais ! Vous êtes des soldats !

— Oui, ne vous en faites pas, nous avons commencé à vider le château des intrus, répondit Boris. Priya ? T’as le trousseau de clés ?

— Non, Misha l’a sur elle. Il y a probablement un passe-partout sur l’un de ces gardes. Vérifie, donc…

L’homme-lapin rangea son arc. Ses longues oreilles ne détectaient aucun son étranger, à part celui des prisonniers et du crépitement des flammes, dans la cheminée au fond de la pièce. Il s’approcha du premier garde qui avait été abattu et y trouva un autre trousseau de clés. Il se chargea alors de libérer les victimes, une par une, pendant que son épouse verrouillait Troyd dans l’une des cellules vides. Avant de refermer la porte, toutefois, elle passa des menottes magiques au tyran, et s’assura que ses mains soient sorties de la cellule. Avec ces entraves, il ne pourrait pas tellement bouger, ni lancer de sorts, car elles avaient été conçues spécialement pour empêcher les mages criminels de faire appel à la magie.

— Et voilà ! Une bonne chose de faite, dit Priya. On fait quoi maintenant ?

— Emmenons ces gens en sécurité, proposa son mari. J’entends toujours des bruits de combats à l’étage d’au-dessus…

— Ne vous en faites pas pour nous, Monsieur Lightwood, dit un jeune cuistot en uniforme. Nous nous défendrons !

— Je préférerais que vous restiez ici pour le moment, mentionna l’hybride. Les renforts ne vont pas tarder à arriver. Le roi et la reine sont en route pour le château, pendant que nous nous parlons.

— Comment ça ? Ne sont-ils pas décédés ? interrogea la vieille cuisinière.

— Non, l’armée des dieux renégats s’est emparée de leurs sosies. Mais soyez sans craintes. Nous sommes prêts à lancer la contre-attaque.

Priya esquissa un sourire aux paroles de son époux. Il n’était pas le capitaine de leur escouade pour rien. Plusieurs de leurs concepts avaient été empruntés par la république de Baldt, mais leurs groupes étaient beaucoup plus gros que là-bas. Boris s’occupait d’une équipe de vingt soldats, tous aussi habiles que lui et la naine en faisait partie. Normalement, Lucas gérait leur équipe, mais puisqu’il était absent, on avait nommé l’homme-lapin pour le remplacer.

— Merci Monsieur Lightwood, dit le cuistot qui lui avait adressé la parole, un instant plus tôt. Je commençai à perdre espoir… Vous me rassurez, maintenant que vous nous avez annoncé la bonne nouvelle.

— Oh, par Athéna… pleura la vieille dame. Ils sont vivants…

La pauvre dame qui s’était faite malmenée par les démons et les gardes de Troyd, un peu plus tôt dans la journée, était heureuse. Elle croyait que son monde s’était écroulé et qu’elle allait mourir. La présence des deux soldats la rassurait.

— Oui et ils ne sont pas contents, précisa Priya. Nous nous sommes fait avoir par les renégats, mais nous n’en avons pas fini avec leurs conneries. Ils vont comprendre ce soir qu’il ne faut jamais sous-estimer notre nation…

Malheureusement, le roi et la reine ne récupérèrent pas leur château ce soir-là, tel que prévu, mais réussirent à fuir la ville d’Archenwald en compagnie de plusieurs soldats. Leur cachette fut trouvée par le mage Randell Tabris qui leur avait envoyé ses acolytes afin de tuer la plupart d’entre eux. Boris et Priya Lightwood durent prendre la fuite, mais pas avant d’avoir escorté les prisonniers jusqu’à leurs troupes. La nation de Lanartis ne serait pas libérée avant quelques mois, mais pour eux, cette défaite n’était pas entièrement sans compensation. Les survivants décidèrent d’éviter les combats et de foncer vers l’ouest, en direction de la république. Le président de Baldt les accueillerait à bras ouvert.

¤*¤*¤

Le 18 juin 3918 AD, le combat faisait rage au sud de Baldt. Plusieurs anges étaient apparus au-dessus de la cité et avaient invoqué un gigantesque champ de force qui protégeait celle-ci.

Un représentant du Saint Royaume se présenta alors au bureau du président, escorté par quelques brigadiers qui avaient fait sa rencontre, cet après-midi-là. Ce dernier leur avait expliqué que l’au-delà avait remarqué les nombreux efforts de la ville afin de mettre un terme à cette guerre et que pour cette raison, ils désiraient les aider. Artael trouvait ce raisonnement particulièrement louche, mais ne pouvait pas refuser l’aide de ces créatures ailées.

— Vous dites que mon frère Nash est en route pour nous aider ? demanda le président, installé derrière son pupitre. Comment va-t-il ?

— Il est en pleine forme, Monsieur Markios, dit l’ange à la tête rasée. Celui-ci est en retard, malheureusement, ainsi que le reste de nos renforts. J’ai le regret de vous annoncer que tous les membres de la Septième Brigade sont morts, lors de leur mission dans le monde obscur. Néanmoins…

— Quoi… comment ?! s’exclama le président.

— Ils vont bien, je vous assure… seulement, ils sont des anges désormais et travaillent présentement pour nous. Nous les avons reconstitués dans des incubateurs dans lesquels on a modelé de nouveaux corps par-dessus leurs âmes. Ils devaient normalement me suivre et votre frère devait vous expliquer la situation, cependant il a décidé de me jouer un tour.

— Ah bon ? Pourquoi ça ?

— Parce qu’il se trouve en cet instant dans une dimension entre la nôtre et la vôtre. Celle-là est réservée aux divinités et aux anges qui souhaitent s’entraîner. Mes collègues et moi, nous avons compris qu’il avait programmé la salle, bien avant de venir ici. Là-bas, le temps se déroule différemment, donc quelques années pour eux deviendraient une journée entière pour nous. Cependant, j’ai cru comprendre qu’il a modifié la machine afin de nous quitter que quelques minutes seulement. Ça fait maintenant une demi-heure qu’ils sont partis.

— Croyez-vous qu’il se soit passé quelque chose, Cyrus ?

L’ange chauve secoua la tête et se passa une main dans sa barbichette.

— Votre frère a encore beaucoup de choses à apprendre du Saint Royaume, mais j’ai bien peur hélas que le Conclave des dieux n’apprécie pas ses initiatives.

— Où voulez-vous en venir ? demanda Kyran, à côté du président.

Ce dernier n’avait pas beaucoup dormi durant les derniers jours, tellement il était inquiet pour la sûreté de la république.

— Nash Markios est désormais le Dieu de l’Olympe et celui qui remplace le Zeus précédent, sur le trône, déclara-t-il. Cette information devait normalement rester secrète, mais puisque nos mondes vont bientôt coopérer ensemble, je crois que je n’ai plus vraiment le choix de tout vous dévoiler.

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