111.2 - L'ascension de Perséphone

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Le 4 juillet 2018, Lisa Sawyer lisait le document qu’une employée lui avait conseillé, quelques jours plus tôt. Assise dans son bureau, la patronne du Maple Leaf’s Gazette se mordillait l’ongle de son pouce.

Mais qui est ce Teddie Sage ? pensa cette dernière. Comment se fait-il qu’il connaisse tout de notre ancienne vie ? Est-il lié aux Markios ?

Elle venait de finir plus de la moitié du cinquième chapitre. Elle avait reconnu plusieurs noms importants de son passé, ainsi que celui de l’une de ses ennemies : Athéna. Diana Kingston avait-elle été mise au courant de cette histoire ? La dame espérait que ce n’était pas le cas. Elle regarda sur sa montre, il était temps pour elle de rentrer chez elle. L’heure du souper était souvent celui où elle envoyait la majorité de ses employés chez eux, car elle leur demandait souvent de venir travailler tôt dans la matinée, pour les gros contrats.

— Bonne soirée ! lança-t-elle à ses employés. N’oubliez-pas que j’ai besoin de vos articles pour vendredi ! Remettez vos clés USB sur mon bureau et je m’en chargerai demain matin ! Avez-vous des questions avant que je parte ?

— Est-ce qu’on peut avoir une augmentation de salaire ? plaisanta Thierry Ledoux, au fond de la pièce. Tout le monde s’esclaffa.

Lisa roula des yeux et secoua la tête.

— Très drôle, Ledoux. Peut-être que j’offrirais une prime pour le meilleur article, qui sait ? Maintenant, veuillez m’excuser, mais j’ai un rendez-vous très important avec mon mari. Au revoir ! Mm… Pendant que j’y pense…

Elle se tourna vers le pupitre de Diana Kingston, où cette dernière était en train de rédiger son dernier article. La petite blonde avait les yeux cernés et n’avait pas beaucoup dormit, la nuit précédente. Cette dernière performait à la caféine.

— Ma pauvre, pauvre Kingston… que vais-je faire de vous ? questionna la patronne. Vous vous tuez à la tâche. Demain, rentrez à midi, plutôt qu’à six heures.

— Très bien, Madame, répondit son interlocutrice. Mais qui s’occupera de votre café et de votre muffin ? Et vos rendez-vous… ?

— Je saurais très bien consulter mes messages, voyons !

Lisa Sawyer gesticula une main en l’air, pour lui montrer qu’elle s’en faisait pour rien. Un instant plus tard, elle salua ses employés une dernière fois, et marcha vers la sortie du bâtiment. Son expression changea rapidement, lorsqu’elle fut à l’extérieur. Son sourire hypocrite et son doux regard devinrent acerbes.

Profite de ta pause, la pute, parce que tu vas rentrer travailler sept jours d’affilée après tes récentes escapades, je ne sais où… pensa-t-elle.

Perséphone avait remarqué le comportement étrange de son employée modèle et craignait que cette dernière se soit réveillée et qu’elle se souvienne de tout. Déjà qu’ils avaient engagé Estelle Tabris comme stagiaire, la déesse trouvait les activités de ses employés de plus en plus louches. Elle craignait de perdre le contrôle.

— Quelque chose ne tourne pas rond, se dit-elle, tout bas, alors qu’elle grimpait à bord de sa voiture. Je vais devoir en discuter avec Greg

Elle sortit son téléphone portable de son sac à main qu’elle portait toujours avec elle. Elle composa le numéro de son mari et l’appareil sonna trois fois, avant qu’on ne décroche de l’autre côté. La directrice avait changé complètement de ton.

— Thane ? dit-elle. Tu as lu le bout d’histoire que je t’ai envoyé ?

— Oui, Persie, répliqua une voix masculine qu’elle trouvait rassurante. D’après moi les Markios ont commencé à retrouver leurs souvenirs.

— C’est aussi ce que je pense… Nous allons devoir passer au plan B.

— Dommage que nous devions en arriver là. Nous menions pourtant une existence si tranquille avant que cette histoire ne sorte au grand jour.

— Il a commencé à l’écrire il y a des années… tu t’en rends comptes ? Teddie se souvenait de tout depuis 2008… Encore faut-il savoir qui est ce type.

— Je mettrais ma main au feu qu’il s’agit de l’un des membres de la Septième Brigade.

Perséphone était à l’intérieur de sa jolie décapotable rouge et avait avancé son véhicule jusqu’à une intersection avec des feux clignotants. Elle attendait son tour pour tourner sa voiture en direction de Baldt Street.

Encore un terme qui est familier à Aeglys… soupira-t-elle, intérieurement. Mais qui est le crétin qui s’est réveillé avant les autres, au point de laisser des indices partout ? Roh, ça m’énerve ! Il me faut trouver l’identité de ce Teddie Sage…

— Nous pourrions toujours commencer les recherches à la Rôtisserie de Baldt Street, proposa Thanatos. L’un des propriétaires partage le même nom de famille que Teddie. Je crois qu’il s’agit d’Arthur Sage. Je n’y ai jamais mis les pieds, parce que tu sais comment je me sens, vis-à-vis les casse-croûtes.

— Je sais… soupira Perséphone. Tu as peur d’abîmer ta silhouette. Mais je t’assure que tu n’as pas pris un gramme depuis que nous sommes ici, alors cesse de t’en faire.

— Tu trouves ? Parce que j’ai l’impression de ne plus me sentir à mon aise avec tous mes pantalons. Je vais devoir commencer une autre diète…

La jeune femme roula des yeux.

— Pfft, tu ne seras jamais aussi obèse que le gros porc qui sert de mari au fils d’Artael, dit-elle pour se moquer de Gabriel.

— La pire création qu’ait jamais faite Randell. Merci de ne plus m’en rappeler.

— Tu aurais dû le tuer lorsqu’il a ouvert les yeux. Il nous a causé beaucoup de problèmes à cause de tous les coups de mains qu’il a offerts à cette maudite armée…

— J’ai éprouvé de la pitié, j’ai eu tort.

— Toi ? Faire preuve de compassion ? Tu veux rire…

— Et pourtant, toi t’en fais à tous les jours pour tes employés.

Le visage de Perséphone tourna au rouge. Il avait malheureusement raison. Sans le prévoir, ni le vouloir, elle avait commencé à s’attacher à tous ses employés, même Diana Kingston qu’elle n’arrivait pas à voir en peinture.

— Ce monde est toxique… soupira la déesse.

— Je crois surtout que tu peux enfin être toi-même, ma chérie. Ça doit te faire du bien d’être appréciée par tes employés.

— Oui… mais… tout ceci n’est qu’une stupide illusion doublée d’une multitude de lavages de cerveaux. Je n’ai rien mérité de tout ça.

— C’est comme tu l’as dit, nous pouvons toujours procéder au plan B.

— Tout d’abord, il faudrait connaître l’identité de cet auteur mystérieux. Ensuite, nous contacterons nos alliés.

— Dans ce cas je te suggère de commencer par la rôtisserie. Peut-être y reconnaîtras-tu quelques visages familiers.

— Bonne idée. Ne m’attends pas pour souper. Je ramasserais quelque chose de mon côté.

— À plus tard, Persie. Je t’aime.

— Moi aussi, mon beau…

Perséphone fit une bise à son appareil téléphonique et son mari l’imita. Ensuite, elle raccrocha son portable et mit ce dernier sur le siège d’à côté. Elle n’était pas certaine de connaître les coordonnées du restaurant auquel elle se rendait, alors celle-ci se gara un instant près d’un trottoir et vérifia l’adresse à travers le réseau Wi-Fi qu’elle arrivait à capter. Elle réalisa, en consultant son Samsung Galaxy, que le casse-croûte se trouvait à quelques maisons plus à l’ouest, près d’une autre ruelle qui menait à plusieurs appartements.

Ah, c’est plus près de la basse-ville que je l’imaginais, se dit-elle.

Finalement, elle trouva le bâtiment et commença à se garer sur le côté gauche du stationnement. Au moment où elle allait sortir de sa décapotable, elle vit un cuisinier sortir par la porte des employés avec un grand sac de poubelle vert. Il portait un couvre-chef sur la tête pour cacher ses cheveux, mais elle reconnut son teint basané et son corps finement ciselé. Celui-ci avait même conservé ses vieilles cicatrices de guerres. Il s’agissait du même homme qui lui avait mordu la nuque, lorsqu’elle avait voulu envahir la république.

— Enfin… comme on se retrouve, Wolfe, dit-elle en plissant des yeux.

Elle attendit qu’il jette le sac dans la benne à ordures, puis il rentra par la même porte.

Perséphone décida qu’il valait mieux pour elle de ne pas entrer à l’intérieur de ce restaurant. Elle activa donc un pouvoir à sa vue, qui lui permit de voir à travers les murs. Même si ce monde n’était pas conçu dans le but d’y avoir des pouvoirs magiques, la déesse et son mari avaient toujours accès aux leurs.

Après avoir fouillé un peu dans le bâtiment d’en face, Perséphone finit par trouver la personne qu’elle recherchait. C’était un grand blond avec une queue de cheval et une barbiche. Il discutait au téléphone, alors qu’il nettoyait une chope de bière. Elle le reconnut aussitôt : c’était Arthur Sage, alias l’alter ego d’Artael Markios.

Lorsqu’elle réalisa enfin d’avoir trouvé l’un des repaires de ses ennemis, la déesse sortit du stationnement en pleine vitesse et fit crisser ses pneus en appuyant sur le champignon, afin de dépasser deux voitures. Elle retourna chez elle, furieuse. Il était temps pour son mari et elle de faire appel à leurs alliés. Ces derniers s’occuperaient de cette tâche délicate et ils pourraient ensuite reprendre leur vie de rêve, sans interruption.

Vers vingt-heure, ce soir-là, Artael retournait à son appartement. Il marchait le long de la ruelle sombre reliée à Baldt Street. Le trajet pour se rendre chez lui n’était pas si long, alors ça ne lui prendrait que quelques minutes pour se rendre à destination. Il était accompagné de Shayne, qui avait opté pour mettre un simple tee-shirt noir par-dessus son torse et un jean bleu marin. L’ex-vampire commençait à s’habituer à son nouveau style de vie, même s’il savait que tout ceci n’était que temporaire.

— As-tu reçu des nouvelles de Marie ? interrogea ce dernier à son collègue de travail.

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