115.3 - Une pause bien méritée

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— Le Conseil n’arrêtait pas de me mettre des bâtons dans les roues, râla le capitaine. C’était impossible pour moi de sortir de la ville pour aller m’entraîner contre des monstres. Ils n’ont même pas voulu que je rejoigne une brigade avant mes vingt-six ans. Le réalises-tu ? J’ai dû attendre vingt-six ans avant qu’ils m’autorisent à me grouiller les fesses et enfin me rendre utile en dehors du palais…

— Ton tempérament a toujours causé de nombreux problèmes aux fonctionnaires de la région, Flint. Essaie de te mettre à leur place. Les brigadiers sont des gens dignes de confiance. De ton côté, ça a toujours été très délicat de te trouver une place. Il fallait qu’ils te placent avec Nash, car celui-ci savait comment te parler…

Le grand blond souffla des narines.

— Je n’en reviens pas que tu ne prends même pas la défense de ton propre frère, rechigna-t-il. Et dire que je ferais tout pour toi…

— Allons, ne fais pas cette tête. Si tu es désormais le chef de la Septième Brigade, c’est que tu as mûris et qu’ils ont reconnu tes efforts en tant que bon citoyen.

Le capitaine lui tira la langue. L’ambassadeur gloussa, ce qui dessina un sourire aux lèvres de l’autre blond. Le plus jeune des quadruplés n’était plus aussi rancunier qu’auparavant, mais il se souviendrait toujours de la période de sa vie où les membres du Conseil l’avaient forcé à patrouiller uniquement dans les rues de Baldt.

— Est-ce que cette conversation t’a fait du bien ? demanda-t-il à Lucas.

— Oui. Nous pourrons reprendre tout ça une autre fois, si tu le souhaites. J’aimerais poursuivre ma lecture avant d’aller me coucher.

Flint allait se lever quand il se souvint la raison pour laquelle son interlocuteur était en froid avec sa compagne. Il se passa une main dans les cheveux.

— Y a-t-il quelque chose que je puisse faire pour Misaki et toi ?

— Non. Ça ira. Je me suis déjà excusé de m’être emporté et elle a accepté mes excuses.

Il prit une pause avant de poursuivre :

— J’aimerais par contre être seul, maintenant…

Le grand blond hocha la tête, puis souhaita bonne nuit à son quadruplé, mais pas avant de lui poser une bise sur le front. Ensuite, il sortit de la serre et se dirigea vers les dortoirs du vaisseau. Lucas, quant à lui, n’arrivait plus à lire. Cette discussion avait réussi à lui rappeler de très mauvais souvenirs.

¤*¤*¤

Athéna observait les étoiles à travers la grande vitre du pont. Voilà des heures qu’elle n’avait pas quitté cette pièce. Après avoir programmé plusieurs données sur l’un des nombreux claviers d’ordinateurs, elle avait décidé de s’asseoir sur le siège du capitaine du vaisseau et de se reposer un peu. Perséphone avait voulu discuter avec elle, mais sa sœur était préoccupée. Finalement, ce fut Artael qui vint la sortir de ses pensées. Ce dernier n’arrivait pas à fermer l’œil et trouvait le comportement de son ancienne flamme très étrange.

— Tu ne dors pas ? interrogea la dame céleste, qui remarqua ses cernes.

— C’est plutôt à moi de te poser cette question.

Athéna, au regard inquiet, esquissa un sourire en coin.

— Je suis une grande fille, Artie. Pas besoin de t’inquiéter pour moi.

— Je t’ai connue plus affectueuse que cela.

Le ton de ce dernier était calme, mais la blonde pouvait y discerner de l’inquiétude.

— Que veux-tu dire ? Ai-je fait quelque chose de mal ? formula-t-elle.

L’ancien président de Baldt secoua la tête avant de s’approcher de la mère de ses enfants.

— Que fais-tu de notre histoire d’amour ? exprima-t-il. J’ai pleuré de nombreuses années, pour toi, tu sais ? J’ai conscience que nous plongeons au beau milieu d’une guerre, mais tu n’as pas démontré le moindre signe d’intérêt envers moi depuis—

La déesse se leva et rejoignit celui qui avait autrefois fait battre son cœur. Elle posa son index droit sur les lèvres de ce dernier, afin de lui faire signe de se taire.

— Je ne pense pas que ce soit une bonne idée… Tu sors à peine d’une relation avec ton ex-amante et je suis convaincue que tu as encore des sentiments pour elle.

Il repoussa la main de la déesse, gentiment.

— C’était il y a plusieurs mois, quand même, répondit Artael. Il est vrai que je ressens toujours un petit quelque chose pour elle mais c’est surtout platonique… Et puis, elle est sûrement morte ou bien réincarnée quelque part… J’aurais aimé qu’on reprenne peut-être un jour, mais je n’ai jamais ressenti la même chose qu’avec toi…

— On ne construit pas une relation comme ça en quelques années, simplement pour la jeter à la poubelle lorsque son ex-fiancée se pointe dans le décor…

La Princesse de l’Olympe se croisa les bras et secoua la tête. Elle s’était convaincue que celui-ci l’avait oubliée depuis tout ce temps, mais elle s’était trompée. Elle ressentait au plus profond de son cœur qu’Artael et Ellen n’auraient pas fonctionné, car il pensait sans arrêt à elle, son Athéna.

— Mais ne ressens-tu rien pour moi ?!

Cette fois, le mage perdit patience. Il était vexé que cette dernière n’ait pas démontré la moindre émotion romantique à son égard. Ça n’avait rien à voir à son comportement habituel, mais le mage avait espéré depuis tant d’années qu’ils soient enfin réunis.

— Évidemment que je t’aime toujours… La question n’est pas là. Seulement, tu pourras retrouver Ellen très bientôt, et peut-être essayer de la reconquérir et… je n’ai pas envie de me mettre entre vous. Vraiment, tu l’as vu toi-même, mon chou, je ne suis vraiment pas faite pour avoir une vie sentimentale. Je suis beaucoup trop compliquée pour toi… Je dois tourner la page. Essaie de comprendre, Artie.

— Ça n’a aucun sens… Rien de ce que tu as fait durant ces dernières années n’a de sens, à mes yeux. Tu t’es servi de nous. Je t’ai fait confiance, pourtant…

— Je t’assure que mes intentions étaient nobles.

— Mais Athéna… Pourquoi… ? Pourquoi tant de secrets ? Que nous caches-tu encore derrières tes jolis yeux ?

— Vous savez déjà tout ce qu’il y a à savoir sur cette guerre et pourquoi j’ai agi ainsi pour ma sœur. Tout ce que j’ai fait, je l’ai fait pour ma famille.

La voix d’Artael commençait à craquer.

— En toute franchise, Ellen a toujours su que tu étais le grand amour de ma vie…

— Stop ! fit la déesse qui poussa celui-ci d’une main. Je te reconnais bien là, Artie. Tu essaies de me faire culpabiliser pour que je craque à mon tour. Cette tactique ne fonctionnera pas avec moi. Et puis, j’ai refait ma vie, moi aussi… Alors tu n’as aucun droit de me dire comment je dois me sentir face à tout ça. Tu m’entends ? Et pourquoi voudrais-tu de moi ? J’ai gâché ta vie… et celle de nos enfants…

— Alors… c’est comme ça que se termine notre histoire ? Sans même nous redonner une chance de s’aimer, comme avant ? Nous pourrions former une belle et heureuse famille… N’est-ce pas ce dont tu as toujours souhaité ?

Les joues de la déesse s’empourprèrent. Elle baissa son regard, timidement.

— Je sais que ça va te paraître bizarre, mais tu étais jeune et moi je n’avais pas toute ma tête lorsque je suis tombée enceinte de toi… Je ne m’imaginais pas que nous allions avoir des enfants, mais je savais que tu serais un bon père pour ces derniers… Alors… Alors…

Artael soupira. Il n’avait pas envie d’entendre le reste de cette excuse.

— Arrête, grogna-t-il. Nous étions amoureux l’un de l’autre. Nous avons conçu ces bébés ensemble et tu m’as dit que tu voulais être mère. M’as-tu menti ?!

Les yeux de la demoiselle s’écarquillèrent alors qu’elle ressentit des sueurs froides.

— Bien sûr que non ! rectifia la dame. Par contre plus d’une trentaine d’années se sont écoulées pour moi et pour vous tous. J’ai dû faire mon deuil, tout comme vous !

— Donc… c’est vraiment fini nous deux…

— J’en ai bien peur, Artie…

Le mage secoua sa tête et souffla des narines. Une partie de lui avait espéré que celle qu’il avait tant aimée, pourrait lui retourner les mêmes sentiments qu’avant. Ellen Prescott avait été pour lui une excellente amie durant plusieurs années de sa longue vie. Seulement, lorsque son monde avait été détruit, il avait perdu tout contact avec elle. Ils étaient sortis à de nombreuses reprises et avaient commencé une belle relation, pour ensuite rompre plusieurs mois plus tôt. Ils étaient quand même restés de très bons amis, malgré tout et il s’en voulait un peu de ne pas avoir pu être à ses côtés, lorsqu’Aeglys avait disparu. À la mort d’Ellen, celui-ci avait réalisé qu’il ne la reverrait sûrement plus jamais, il s’était déjà fait à cette idée.

— Je te trouve bien vite à draguer avec moi, sachant qu’elle n’est plus du côté des vivants, fit Athéna, dans le déni. C’est à croire que tu n’accordes aucune importance à cette femme.

— Puisque je me tue à te dire que c’est fini entre elle et moi ! Et puis, tu es bien hypocrite de croire que j’ai des problèmes d’attachement. Cyrus m’a bien expliqué que tu nous observais avec ta boule de cristal depuis tout ce temps ! Tu devrais être en mesure de savoir que j’ai fait un pacte avec Ellen, qu’on soit ensemble ou non. Si l’un d’entre nous devait mourir avant l’autre—

— Celui ou celle qui restera devra refaire sa vie… acheva la blonde. Je sais. J’ai tout vu quand ça s’est passé. Votre relation était tellement étrange, mais j’y voyais tellement de respect et de beauté… Vous aviez cette belle amitié… et… je ne pensais pas que tu tiendrais à cet engagement. J’étais persuadée que tu ferais tout pour la retrouver et tenter de refaire ta vie d’ange avec elle…

— Nous savions tous les deux que la vie est bien trop courte, Athéna. Elle ne méritait pas de finir le reste de ses jours, seule. Moi, non plus. Je t’assure, pour moi, c’est une très bonne amie et ça s’arrête là… C’est toi que je veux.

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