139.3 - Troyd Markios

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Flint se pencha vers la louve virtuelle et lui caressa la tête pour la réconforter. Elle était triste mais essayait de le cacher, elle voulait rassurer son nouvel ami. Le grand blond ne s’était pas attendu à ce qu’il s’attache autant à une intelligence artificielle.

— Je m’excuse de t’avoir manqué de respect, dit-il. J’espère que tu sauras me pardonner, DIA-X12.

— Ce n’est pas grave. J’avais compris que tu étais contrarié par la situation.

— Non… Je t’ai traité comme un vulgaire robot, alors que selon moi, tu es bien plus vivante que je ne l’imaginais au départ. Cette expérience m’a ouvert les yeux.

— Moi… vivante… ?

La louve virtuelle semblait perdue dans ses pensées, alors que Flint lui fit une grattouille sous le menton. Ces mots la rassuraient et la chagrinaient à la fois. Elle savait qu’ils ne se reverraient pas avant quelque temps, mais était heureuse de se sentir utile auprès du Capitaine Markios.

Cassandra et les autres membres de la brigade remercièrent tous les esprits artificiels qui un à un, quittèrent le centre pénitencier. DIA-X12 afficha un dernier regard à Flint, avant de suivre ses frères et sœurs. Leurs premières rencontres avaient été brèves, mais chaque porteur avait l’impression d’abandonner ces pauvres bêtes imaginaires à leurs sorts. Même Nash, qui normalement, n’avait aucune affinité avec Bella dans le vrai monde, aurait aimé que Wyatt Silverwind soit là pour elle.

— Ce combat s’est passé plus vite que je ne l’aurais imaginé, mentionna Flint. Si ça avait été le monde réel, je sens que ça aurait été plus difficile. Pas vous ?

— Mouais, répondit Gabriel. Mais avec Luna et ses connaissances informatiques, on s’en est bien sortis, je trouve. Que va-t-on faire de Troyd, au réveil ?

— Je peux toujours le tuer comme sur la station lunaire… répliqua Misaki avec un sourire mauvais. Pas de pitié pour ce porc.

La guérisseuse éclata de rire, mais se tut rapidement, car elle avait peur de paraître égoïste. Elle aurait fait la même chose que sa meilleure amie, du moins, pour cette fois. En tant que soigneuse professionnelle, elle ne pouvait pas se permettre de penser comme une meurtrière, mais seulement pour le bien-être des autres.

— Est-il au moins dans un incubateur ? interrogea Shayne. Je ne m’en souviens plus.

Il tourna son visage vers Flint, puis sa fiancée. Cassandra hocha la tête.

— Oui, comme nous tous, répondit le capitaine. Quand je me suis réveillé un peu plus tôt, j’étais dans un incubateur, entouré du même liquide qu’on avait utilisé sur la base.

— Certains souvenirs du monde réel sont encore flous dans mon esprit, formula l’elfe basané. Qu’est-ce qui cause ça, d’après vous ?

— Probablement ce fichu virus, suggéra Cassandra.

Ils entendirent alors un bruit de cloche étrange au-dessus de leurs têtes, suivi de la voix de Luna à travers ce qui semblait être un interphone imaginaire.

Ça va les gars, dit-elle. Le porc a été endormi avec de puissants sédatifs. Il ne se réveillera pas avant vingt-quatre heures. Je vais fermer le serveur et vous sortir. Tenez-vous prêts, ça va vous donner le tournis.

— Oh punaise, soupira Flint. C’est reparti pour un tour… !

Aussitôt ces paroles prononcées, les membres de la Septième Brigade furent déconnectés en même temps et tout devint noir autour d’eux. Le monde virtuel avait complètement disparu. Il ne restait plus qu’un tourbillon étrange de données informatiques qui tournoyait autour du capitaine et de ses amis. Tranquillement, ils revenaient un à un dans le monde réel.

Flint se sentait un peu nauséeux lorsqu’il rouvrit les yeux, mais il n’avait pas autant mal au cœur que plus tôt, dans la journée.

Le liquide protecteur qui l’entourait coulait déjà à travers les tubes de son incubateur. Près d’une minute plus tard, il sortit du récipient en verre et ramassa la serviette que lui tendit aussitôt sa fille, Estelle. La journaliste se leva sur la pointe de ses pieds afin de lui faire une bise sur la joue.

— Bienvenue dans le monde des vivants, papa, dit-elle.

Cette phrase lui réchauffa le cœur. Au moins il n’avait pas vécu cette aventure pour rien, s’il se faisait accueillir si bien dans sur son vaisseau.

¤*¤*¤

En décembre, soit trois mois après l’incident de la dernière simulation ; Artael marcha le long d’un vaste tunnel métallique où se trouvaient de nombreux prisonniers de guerre. Voilà depuis longtemps que la guerre envers Satan et ses sujets était terminée. Certains de ces gens attendaient encore d’être jugés par le nouveau Conseil des dieux. Plusieurs semaines plus tôt, on avait déplacé un individu important dans l’une de ces cellules, tout au fond de l’étage le plus bas.

Cette prison se trouvait à plusieurs kilomètres de Baldt, au Saint Royaume. Seules les autorités de ce monde pouvaient y accéder, y compris quelques soldats bien entraînés. Aux prisonniers les plus dangereux, on s’assurait de limiter leurs mouvements en les entravant avec des bracelets magiques et des chaînes qui les électrocutaient, si jamais ils essayaient de s’enfuir. Le détenu qu’Artael était venu voire était nul autre que Troyd Markios. Sa sentence avait été choisie un mois plus tôt : la mort et la réincarnation. Les dieux voulaient éliminer les enfers afin de donner de meilleures opportunités aux démons de se racheter. Ils effaceraient ses souvenirs et il renaîtrait dans le corps d’un nouveau-né. Il serait endormi ce soir même, le 15 décembre 3919 AD. Sa seule demande fut de revoir son jumeau, une toute dernière fois.

Artael avait bon cœur et respectait toujours ses engagements. Pour cette raison, il décida de répondre à la dernière volonté de son frère. Ils auraient tous deux accès à une petite pièce, séparés par une vitre et une petite ouverture par laquelle ils pourraient discuter. Les jumeaux seraient surveillés par les gardiens de la prison, comme prévu, mais ils ne pourraient pas entendre ce qu’ils se diraient, seulement les voir. Le Président Markios avait compris que Troyd voulait lui dire quelque chose. Mais quoi ? Que lui voulait-il ? Ce fut sur ces pensées qu’il s’assit à l’intérieur de la salle qu’on leur avait réservée. Son frère s’installa en face de lui, les mains menottées derrière le dos. Il esquissa un petit sourire quand il vit son frère cadet.

— Alors, t’es venu. Pas mal, le frangin… Ça me va droit au cœur.

— Ce n’est pas un luxe, très cher. Tu as la cote maximale et tu as reçu la peine de mort. Ce n’est pas ce que j’appellerais une victoire.

— Peut-être, mais pour la première fois de ta misérable existence, tu oses répondre à mon appel alors que j’ai besoin de toi. Qu’est-ce qui a changé ?

— Rien. Je ne refuserais jamais la dernière volonté d’un membre de ma famille… aussi abject soit-il. Si je suis venu, c’est parce que tu voulais me parler, n’est-ce pas ? C’était bien ce que tu nous as dit au tribunal.

Troyd opina du chef et soupira.

— Ne crois pas que je vais m’excuser, car je suis tel qu’on m’a élevé. Par contre, si je dois mourir, autant révéler tout ce que j’ai sur la conscience depuis que je suis gamin. Une enfance que tu as sûrement oubliée, tellement tu étais occupé à élever notre frère. Es-tu prêt à entendre la stricte vérité ?

— La vérité sur quoi ? Je ne te suis pas.

— T’es-tu jamais demandé pourquoi papa avait fait de moi son favori ?

Artael haussa un sourcil. Il ne comprenait pas où il voulait en venir. Oui, Virgile Knox l’avait pris pour son chouchou, l’avait toujours sorti de prison et avait fait de lui son trophée – son général. Le mage avait toujours pensé que leur père adoptif l’avait simplement aimé à cause de sa personnalité et de sa puissance.

— Non… pas vraiment, répliqua-t-il.

— Tu te souviens des nombreuses fois où nous allions à l’église, quand la Mère Agathielle était toujours en services ? Papa l’aimait beaucoup la Mère Agathielle… oh que oui, il l’aimait… Tellement qu’il ne faisait que parler d’elle chaque fois qu’il me demandait de lui faire des trucs…

Artael écarquilla les yeux et se mit une main devant la bouche.

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