127.4 - Le fléau des anges

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Un peu plus tôt, avant que l’état d’alerte ne soit sonné dans le Célestia, Misaki s’était aventurée au nord du campement, en pleine nuit. Elle suivait les traces de Randell, qui avait décidé de partir à la chasse aux ingrédients afin de faire une surprise à ses parents. Ce dernier désirait concocter des potions magiques, dans le but de leur donner un certain avantage dans les champs de batailles. Cependant, le jeune garçon n’avait pas un très bon sens de l’orientation et s’était perdu en chemin. Lorsque que l’albinos avait enfin repéré l’enfant, celui-ci était perché sur la branche d’un arbre, alors qu’un chien de l’enfer jappait dans sa direction. La guerrière se servit de son bâton afin de tuer la bête et leva son regard vers celui qu’elle devait surveiller.

— C’était quoi l’idée de quitter ma chambre sans même m’avertir ! gronda cette dernière.

Randell grimaça d’inquiétude. Sa tante d’adoption avait élevé la voix. Elle n’était pas contente du tout. Même si le jeune mage avait toute l’intelligence de son incarnation précédente, il lui arrivait toujours de commettre des erreurs de jugement.

— C’est que… tu dormais paisiblement… et je ne voulais pas te déranger, couina-t-il.

— Mais que fais-tu debout, à trois heures et demie du matin ?! File te coucher tout de suite avant que je me fâche ! J’ai promis à tes parents que je veillerais sur toi, alors t’as intérêt à m’obéir, sinon je devrais me montrer plus sévère !

— Ah non… je suis puni, c’est ça ?

— Oh que oui, jeune homme ! Tu es privé de dessert pour trois repas !

— Hé ! Mais ce n’est pas juste ! Je voulais faire un cadeau à mes papas…

— Tu aurais dû me demander de t’escorter avant !

Mettant une main sur sa hanche, Misaki ressentit son bâton se transformer dans l’autre. Lusso, le chien de prairie, grimpa le long de son bras pour aller se poser sur son épaule. Le petit animal était peu bavard, comme d’habitude. Il tourna la tête vers sa porteuse et se dit qu’il pourrait venir en aide à l’enfant.

— Ça ne sert à rien de le gronder, il voulait bien faire, bailla celui-ci, fatigué.

— Oh non, toi tu ne dis rien. Ce n’est pas à toi de veiller sur le petit.

— Allons Megumi, on a tous été jeunes…

— Oui, mais lui c’est la deuxième fois qu’il est un gosse !

Frustrée, la guerrière albinos grimpa à l’arbre et tendit une main vers Randell, afin qu’il s’approche d’elle. Il sauta à son dos et s’agrippa. Puis, elle se laissa retomber. Soudain, un bruit intense se fit retentir, au sud. L’alarme du Célestia avait été déclenché et une lueur éclaira un peu l’obscurité. La femme comprit rapidement que le campement était attaqué.

— Merde, merde, merde, merde ! râla cette dernière. Pourquoi n’ai-je pas pris de monture avec moi ? Misaki, espèce d’idiote !

— Qu’est-ce qui se passe ? demanda Randell, confus.

La guerrière prit une grande respiration et tenta de contrôler sa colère avant de se retourner vers l’enfant qu’elle posa à terre.

— Petit un, ne t’aventure plus dans le noir sans être accompagné par un adulte. Petit deux, de méchantes personnes ont été repérées près du Célestia, donc nous devons à tous prix retourner là-bas et nous assurer que tout le monde va bien. Compris ?

Randy posa son regard de chien battu dans les yeux de sa tante, qui tentait tant bien que mal à ne pas se laisser amadouer. Elle ne pourrait jamais résister aux enfants, tellement elle aimait jouer le rôle d’une maman. L’albinos soupira et mit une main sur la tête de l’enfant, afin de le réconforter.

— Compris… répliqua-t-il, déçu.

— Quand tu seras assez grand et assez fort pour te débrouiller sans un adulte, on te laissera te promener un peu plus, mais pas avant. C’est dangereux de se promener seul comme ça, à ton âge. Tu aurais pu te faire manger par ce chien de l’enfer !

— Mais je sais me défendre, rouspéta le gamin.

Elle fit semblant de ne pas l’entendre.

Même si l’alarme du Célestia la déconcentrait, Misaki ne pourrait pas partir de cet arbre avant de s’être assurée que Randell avait compris cette leçon. Néanmoins, elle était curieuse d’en savoir plus sur le projet personnel du gamin.

— Sinon, as-tu trouvé ce que tu cherchais ?

Le petit châtain hocha la tête et lui montra son plus beau sourire avant d’ouvrir son sac à dos qu’il tenait entre ses mains. Il lui montra trois sortes de plantes différentes que la guerrière ne réussit pas à discerner dans le noir. Elle pencha sa tête d’un côté.

— Je crois que j’ai ce qu’il faut pour nous préparer des filtres d’invisibilité ! dit-il.

— Est-ce que ce sont les bons ingrédients, au moins ? Nous sommes sur une nouvelle planète, après tout. Tu risques d’être déçu par les résultats.

— Mais non ! Je les ai toutes identifiées avec ma magie. Elles contiennent toutes les mêmes éléments alchimiques que sur Aeglys.

— Ne me dis pas que tu as emporté avec toi tes accessoires de potions…

— Mais non… J’ai simplement un mortier et un pilon…

— Franchement, Randy, tu n’aurais pas pu attendre que je me lève ?

La guerrière n’attendit pas la réponse de son protégé avant de refermer son sac, rapidement. Elle se pencha et l’invita à grimper sur son dos. Par réflexe, Lusso décida de bondir à terre et de marcher aux côtés de sa porteuse. Ils entamaient déjà le trajet du retour vers le Célestia, alors que Randell discutait de ses récentes découvertes avec sa gardienne. Au bout d’un quart d’heure, ils croisèrent Cassandra et Windy qui avaient quitté le campement de manière dramatique. Surprise, Misaki sursauta.

Que s’est-il passé, nom d’une pipe ! s’exclama l’albinos, dans sa langue natale.

L’elfe soupira de soulagement quand elle remarqua que son amie était toujours vivante, ainsi que l’enfant des Markios. Elle avait reconnu quelques mots que Misaki lui avaient enseigné, durant leur voyage. Elle descendit de sa jument noire et lança un sort de lumière au-dessus de leurs têtes, afin de mieux les éclairer.

— Les forces du mal ont trouvé le moyen de rendre malade nos soldats, afin de les transformer en déchus, expliqua Cassandra en langue commune. Lucas, ainsi que tous mes patients, ont été infectés. Plusieurs des nouveaux arrivés ont aussi subi le même sort. J’ai été obligée de fuir le camp.

Misaki déglutit lorsqu’elle réalisa que son ex avait été transformé en monstre. Quelques heures plus tôt, il avait blagué et rigolé avec elle, avant qu’ils aillent se coucher. Elle ne comprenait pas comment il avait fait pour basculer du côté obscur, si rapidement.

— C’est contagieux, ajouta l’elfe, inquiète. J’ai pour théorie que cela se propage par la salive, les morsures et les écorchures provoquées par les ongles des autres déchus. Avez-vous été touchés par l’un d’entre eux ?

L’albinos fit signe que non et tourna la tête vers le gamin.

— Et toi ? T’as croisé des démons sur la route, n’est-ce pas ?

— Seulement ce clébard, répondit ce dernier. Il avait faim, le pauvre…

— Il allait te manger, Randy, répliqua sa gardienne, sévèrement.

Le garçon leva les épaules. Au moins, Cassandra était rassurée de voir que sa meilleure amie et l’enfant n’avaient rien de grave. Cependant, elle ne pouvait pas s’empêcher d’avoir le cœur lourd, à cause de tous ces gens qu’elle avait dû abandonner. La jeune femme les avait tous trahis, en les laissant entre les griffes des déchus. Elle n’avait pas eu le choix. Sa survie était très importante pour le bien-être de l’armée. On lui avait donné l’ordre de ne pas mourir, durant l’absence de ses proches.

L’elfe baissa son regard et se recouvrit le visage. Des larmes coulaient le long de ses joues, c’était plus fort qu’elle. La pauvre avait dû se faire forte et brave ; elle avait cru que sa meilleure amie et le petit garçon s’étaient faits tués ou même convertis par les démons. Pour la guérisseuse, constater qu’ils étaient toujours vivants, était un miracle.

— Je vous croyais morts… hoqueta-t-elle.

Misaki avait elle aussi un pincement au cœur. Elle n’aimait pas voir l’elfe dans cet état. Elle mit une main sur son épaule, afin de la réconforter.

— Ça va, nous sommes là. Tout ira bien, tu verras.

— Je voudrais bien t’y voir toi… soigner tout plein de patients, rien que pour te rendre compte que ces derniers sont tous devenus des monstres…

Elle essuya ses larmes et tenta de se ressaisir. Tous les gens qui travaillaient dans la médecine devaient s’assurer de laisser leurs sentiments de côté, afin de bien soigner leurs patients. Cela ne les empêchait pas de ressentir le besoin d’évacuer des émotions fortes, lorsqu’ils en avaient l’opportunité. Misaki était l’une des rares personnes, à part Shayne Wolfe, qui assistait à une telle crise. La brunette se tourna vers la jument et claqua des doigts afin de réduire l’intensité lumineuse de sa lumière magique.

— Où va-t-on maintenant ? demanda le petit Randell.

— On ne peut pas retourner au campement, déclara la crécerelle, attachée au dos de Cassandra, sous son apparence d’arc. Notre prochain objectif est de retrouver Flint et les autres. Nous devons à tout prix leur expliquer ce qui s’est passé.

Misaki hocha la tête, alors l’elfe lui offrit une main pour l’aider à monter sur la jument. La monture était assez puissante pour les porter tous trois, mais Lusso devrait prendre l’apparence d’un accessoire, afin de ne pas déranger la déranger. Windy opta pour devenir un bracelet au poignet droit de sa porteuse. Randell s’assit entre les deux demoiselles et ils reprirent la route, tous ensemble. Cette guerre avait déjà causé plusieurs victimes. Elle ne ferait qu’empirer, au fil du temps.

Il leur fallait retrouver les autres, au plus vite.

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