Mystère

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Ce fut un temps de disette pour la boîte, qui perdit de son intérêt et dont le ventre vide, affamé, grognait sans fin. Elle s’ennuyait terriblement, et ennuyait tout le monde avec son vide perpétuel, son absence de proposition.

Quelqu’un passa, de nuit, pour la décorer : une touche de bleu, de rose, un cœur et une tripotée de sexes drus : un sens du décorum exquis, très citadin.

Si les regards se tournèrent de nouveau vers la boîte délicatement customisée, les livres, eux, désertaient toujours l’affable refuge. Il se produisit alors quelque chose d’improbable qui fit un véritable scandale, au grand bonheur de la gazette : un livre de la bibliothèque, égaré depuis les années 60, y fut déposé - ainsi qu’une plainte, le lendemain, au commissariat, par la bibliothécaire Barbara Bourde.

Celle-ci était doublement furieuse : non seulement, c’était un sacrilège que d’avoir dérobé ce livre et de l’offrir sans contrepartie, mais les archives n’avaient pas été tenues à jour par ses prédécesseurs, des femmes qui négligeaient leur travail tout autant que leur hygiène ! Aussi n’était-il pas possible de connaître l’identité du coupable, qui sévissait bien avant l’ère bénie de l’informatique pour tous : un détrousseur de livres, à n’en point douter !

Ce livre en appela un autre, tout aussi étiqueté. Il ne fut pas rare de voir certains de ces livres, pas forcément regrettés, revenir d’entre les morts, mélangés à quelques achats malheureux, pour ne pas dire embarrassants et autres classiques mille fois vus, qui ne cessaient de revenir sous différentes éditions poche, avec une rigueur de zombie.

Barbara, préoccupée par ce qu’elle considérait comme les agissements d’un voleur en série, chargea son empoté de stagiaire de récolter tout livre qui leur appartiendrait. Elle précisa, du bout des dents : ne surtout pas prendre ceux de la bibliothèque de Maxiville qui, elle, utilise la Dewey pour faire comme tout le monde.

Si le jeune Barnabé ne voyait pas l’intérêt de cette mission vu l’absence de place dans les rayons, il n’était pas contre sortir prendre un bol d’air deux fois par jour, histoire de renifler autre chose que cette odeur de naphtaline qui s’incrustait dans ses vêtements avec la pugnacité des odeurs de frites, dans les fast food les plus infâmes : sans hésiter, il a dit ouais !

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