Noix de Bleuterre
Sucré, envoûtant, d’une exquise douceur. Ces premiers mots se mêlèrent au flot de sensations et de plaisirs qui me submergèrent bientôt, à mesure que le nectar se répandait dans ma gorge, à mesure que sa vapeur bleutée emplissait mes poumons, gonflés comme les voiles d’un navire. Au cœur d’une vallée tapissée de végétation, j’étais une ravine asséchée où se déversait l’eau glacée de la montagne proche. J’étais le bois mort d’un arbre non loin, à l’ombre des frondaisons, où montait subtilement la sève depuis les racines les plus profondes, délicieusement enfouies dans le sol de cette immense forêt paisible. Rêveuse, je suivais le ruisseau qui la serpentait, puis découvrais l’immense lac couvert de brume, irréel, qu’elle cachait jalousement aux yeux du monde. Les tissues qui recouvraient ma peau glissèrent, voltèrent, et s’étendirent sur l’herbe fraiche que la plante nue de mes pieds foulait. Complétement dévêtue, la brise qui faisait danser les roseaux m’enveloppa. Je me faufilai dans l’eau plus froide encore que celle du ruisseau, jusqu’à la taille, puis plongeai dans les flots sombres, avec le vain espoir de ne plus jamais avoir à en sortir.
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