Chapitre 7 : Le dessert

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— Tu sais que je n’ai jamais vu de ma vie quelqu’un manger aussi lentement. C’est quoi le projet ? Tu espères que le sommeil me gagne, comme la dernière fois, et que je m’écroule de fatigue, la tête la première dans l’assiette ? C’est ça ?

Imperturbable, Richard réprime un sourire et continue de manger le hachis parmentier. Voir Anthony s’agiter ainsi est un délice. Il ne sait pas ce qui est meilleur : savourer le succulent plat préparé par Mama ou regarder son invité trépigner d’impatience.

Non, en réalité, il sait.

— C’est moi où tu joues avec mes nerfs ?

Complètement.

— Si tu me dis qu’il y a du dessert, je hurle, s’exclame-t-il encore.

Richard observe son invité ronger son frein et se met à rire.

— Du tiramisu. Il a l’air succulent.

Anthony tape son front du plat de la main et s’adosse à sa chaise, bras croisés sur le torse. Ses yeux noirs fustigent le quadragénaire, qui s’en amuse. La patience et la jeunesse ne font pas bon ménage.

— Je n’ai plus faim.

Vraiment ?

Le gamin est fébrile. Une de ses jambes fuselées monte et descend comme posée sur un ressort. Richard décide de mettre un terme à son supplice. Même si aucun des deux n’a fini de manger, il s’essuie les lèvres et se lève. Puis se penche vers Anthony pour lui dévorer la bouche.

— Tu seras mon dessert.

Le jeune homme se redresse pour lui rendre son baiser. Puis, tout en l’embrassant, il dirige Richard vers la chambre à coucher. Dans leur frénésie, les deux hommes abandonnent assiettes sales sur la table et plats à moitié entamés sur le plan de travail. Traversant la maison, agrippés l’un à l’autre, ils échangent caresses et étreintes fougueuses. Leurs corps survoltés se cognent contre meubles et obstacles croisés sur leur chemin. Richard s’arrête devant sa porte, qu’il pousse d’un coup d’épaule.

— Pas dans la chambre d’ami. Tu dors avec moi cette nuit.

Anthony esquisse un sourire et se jette de nouveau sur les lèvres du quadragénaire, affamé. Il le pousse dans la pièce sombre, uniquement éclairée par les lampadaires extérieurs. Les volets encore ouverts laissent entrevoir l’éclat de la lune. Ronde et pleine, elle les illumine de son disque sélène.

Richard, déstabilisé par les assauts de son invité, butte contre le cadre du lit et s’étale de tout son long sur la couette immaculée. Sur le dos, il est rejoint par l’adolescent, qui le surplombe désormais. Ce dernier lui arrache son tee-shirt et le fait passer par-dessus sa tête. Richard se félicite d’avoir remplacé sa chemise par une tenue plus décontractée après sa douche. Vu la hargne de son partenaire, celui-ci aurait fait sauter tous les boutons. Lorsqu’il est torse nu, Anthony se met à embrasser sa peau brunie par le soleil breton. Insatiable, il dirige ses mains baladeuses vers le bas de survêtement de son hôte et en défait le nœud. Puis s’y glisse à l’intérieur. Il caresse le membre tendu et chaud par-dessus le boxer.

Richard essaie de ralentir la cadence en lui attrapant la main, mais le gosse, plein d’aplomb et de voracité, en profite pour lui enlever son jogging. Quelques secondes plus tard, l’homme est en caleçon alors que son invité est encore habillé. Anthony s’apprête à lui retirer son boxer. Richard l’arrête en lui tenant le visage entre les mains.

— J’en ai autant envie que toi mais on a toute la nuit et...

— Ok, sourit Anthony. Message reçu.

Ce dernier se calme et se rallonge sur lui. Il recouvre son corps d’éphèbe, contre lequel il s’échauffe avec sensualité. Puis lui offre sa bouche charnue avec douceur. Sa langue taquine celle de son amant. De la pointe humide, il caresse ses lèvres pulpeuses, l’une après l’autre. Richard se laisse faire, se délectant de cette volupté, de cette tendresse. Il a envie de prendre son temps et Anthony semble l’avoir compris. Leurs mains se font plus chastes, plus timides. Richard glisse les siennes sous le tee-shirt et lui effleure le dos du bout des doigts. Anthony se perd sur son ventre et ses pectoraux dessinés. Il frotte son sexe en érection contre celui de son hôte, tout aussi excité. Il le sent bien raide et gonflé sous le tissu de coton.

Tandis que leurs gestes se coordonnent, leurs souffles se désordonnent. Tous les deux respirent plus forts. Mais alors qu’Anthony ahane sous le coup de l’excitation, Richard sent l’air lui manquer. Enseveli par une montée d’émotion, sa respiration se fait courte et saccadée. Il est en train de faire l’amour avec le fils de son meilleur ami. Cette pensée le saisit malgré lui. Elle le perturbe tant qu’Anthony le ressent.

— Si tu me parles de mon père, je te jure que je vais débander.

Richard éclate de rire et tourne la tête de droite à gauche en signe de dénégation, avant de le faire basculer sur le dos et de reprendre le dessus. Son invité est désormais à sa merci... et ravi de l’être.

— En cas de panne, j’ai une solution efficace, ne t’inquiète pas, le taquine Richard avec un clin d’œil.

Son regard est empli de concupiscence. Armé de son sourire en coin, il dénoue à son tour les liens du survêtement et l’en débarrasse. Le sous-vêtement suit dans la foulée, dévoilant un sexe aux proportions appétissantes. Richard pose les yeux dessus. Fin connaisseur, il anticipe le plaisir que cela va lui procurer. Dans son jargon de libertin, Anthony est ce qu’il est courant d’appeler un TBM. Traduction : très bien monté. Il le dévore des yeux, avant de confesser :

— Tu es... magnifique.

Son invité rougit, gêné d’être le centre d’une telle attention. Richard se retient de faire le parallèle avec son père, ce qui serait malvenu en cet instant, mais une pensée le traverse. Il connaît le corps d’Erwann et sait que, décidément, ces deux-là se ressemblent. Abandonnant ses idées lubriques, il se penche vers son amant pour l’embrasser de nouveau. Il caresse son ventre et remonte le tee-shirt gris qu’il lui a laissé. Puis parsème de baisers ses abdominaux saillants. Sous sa bouche, le corps est sec, fin, peu développé, mais possède une pilosité toute masculine, traçant une ligne médiane sur son ventre bronzé. Richard effleure et lèche sa peau imprégnée par l’odeur de savon. Il regrette les effluves mâles qu’il avait senties précédemment. C’était le vrai parfum de son excitation.

Il arrive à sa toison brune, et saisit son membre avec sa main, avant de l’enfourner dans sa bouche. Anthony soupire, puis marmonne quelque chose d’incompréhensible. Ses doigts se perdent dans les cheveux de l’homme qui le suce si divinement. Celui-ci aspire son gland, tourne autour, le mordille, avant de le reprendre entre ses lèvres gourmandes. Il gobe ensuite l’intégralité de son sexe élancé, puis lèche les contours avec la pointe de sa langue. La fellation est sublime, profonde et lente, ses gestes suaves, amples ou saccadés. Anthony passe ses mains sur son visage pour s’empêcher de crier. Sa respiration s’accélère lorsqu’il sent sa sève monter. Il halète, au bord du précipice.

— Arrête, sinon je vais jouir.

— Jouis, lui ordonne Richard entre deux mouvements de succion.

Le quadragénaire a d’autres projets en tête et veut que l’adolescent se détende. Anthony bouge son bassin plus vite pour accompagner l’homme qui s’occupe de lui. Celui-ci continue d’engloutir sa verge jusqu’à ce que cette dernière se tende, gorgée par l’afflux sanguin, avant de se déverser dans sa bouche. Le corps du gamin se crispe lorsqu’il émet de puissants jets chauds à intervalles réguliers. Pendant qu’il jouit, il se répand en râles et onomatopées, ses doigts enfoncés dans la chevelure de son hôte. Ce dernier avale jusqu’à la dernière goutte de sperme.

Lorsqu’Anthony a repris ses esprits, Richard lui retire son tee-shirt. Et l’allonge sur le ventre, dos contre son torse. Il se serre contre lui, son buste puissant collé à ses omoplates saillantes. En embrassant sa peau moite, il perçoit et savoure les derniers tremblements de son corps après l’extase. Anthony tourne la tête vers lui, réclamant qu’il l’embrasse. Richard s’exécute et lui roule pelle sur pelle.

Son désir est monté en flèche, comme son sexe, qu’il presse contre les fesses musclées de son invité. À la demande de celui-ci, Richard vire son caleçon, dernière pièce de tissu qui les sépare. Les deux hommes sont nus, soudés l’un contre l’autre. Richard glisse une main sous le corps d’Anthony et caresse son membre durci, déjà au garde à vous. Lui-même affiche une belle érection. Pendant qu’il masturbe son amant, il frotte sa queue dressée contre ses chairs chaudes, rondes et accueillantes. S’en suit une nouvelle salve de gémissements rauques, de souffles courts, de plaintes lascives. Lorsque ses doigts encerclent le gland d’Anthony, Richard recueille le liquide onctueux et s’en sert pour lui lubrifier le sexe. Il caresse lentement cette partie sensible, juste sur le frein. Faisant cela, il embrasse puis mordille son cou et sa nuque. Emporté par son appétit vorace, Richard mord, puis aspire la peau jusqu’au sang. Lorsqu’il arrête, le suçon est bien visible sur la peau hâlée. Il observe le résultat, satisfait.

— Un souvenir, murmure-t-il à l’oreille d’Anthony.

— Tu vas être le premier, chuchote celui-ci, à bout de souffle. Tu crois que je pourrais t’oublier ?

Richard regarde la tâche rouge et diffuse. Elle est comme un sceau sur la peau couverte de sueur. Il sourit en pensant à sa signification. C’est sa marque de fabrique. Il aime laisser son empreinte sur ses amants de passage, même si, tout comme ces relations sans lendemain, cette trace ne dure pas...

— Tu ne m’oublieras pas. On n’oublie jamais un premier.

Et moi, non plus, je ne t’oublierai pas. Si seulement tu pouvais être le dernier...

Son ventre se serre à cette idée. Un pressentiment lui étreint la poitrine. Si l’un d’eux fait souffrir l’autre, cela ne sera pas forcément celui auquel on croit. Sous son apparence innocente, l’adolescent pourrait bien lui faire mordre la poussière. Richard le sait à présent, la torture a changé de camp.








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