Chapitre 20

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Ecrit en écoutant notamment : Billx – Pagan Totem [PsyTrance/Hardtek]

Ce lundi, nous subissons notre premier contrôle de maths de l’année. Je ressens une tension notable chez mes camarades : la matière est coefficient 7 au bac, et personne n’a franchement envie de se prendre une taule et de commencer à stresser dès le mois de septembre.

Nous nous installons pour deux heures qui s’annoncent intenses, sortons des copies, des stylos et notre bonne vieille calculatrice TI. Le prof déambule entre les rangs en sifflotant pour distribuer les sujets, et seulement quelques minutes après, j’entends déjà un certain nombre de mes camarades souffler et râler sur la supposée difficulté du sujet. Ce n’est pas mon cas, j’ai déjà parcouru tout l’énoncé, et j’évalue à vue d’œil qu’il ne me faudra probablement qu’une heure et demie pour tout terminer.


Je jette un coup d’œil à Lilian et le vois déterminé, déjà occupé à rédiger le premier exercice. Après tout, je lui ai bien expliqué le cours ; je ne me fais pas de souci pour lui.

Quant à moi, je détruis méthodiquement les questions sur les nombres complexes en mode Blitzkrieg, et encadre même trois quarts d’heure en avance le dernier résultat.


Lilian, toujours aussi appliqué, semble en être à la fin de l’avant dernier exercice. Comme on a prévu de sortir manger ensemble en ville, je l’attends jusqu’à la fin du contrôle, ce qui me laisse 45 minutes pour rêvasser à une personne qui vous est familière, ou encore pour me délecter de la tête déconfite arborée par ce crétin de Victor. Je sais que ce n’est pas bien de se réjouir du malheur des autres, mais lui, pour le coup, il le mérite bien.

Alors que j’en suis à m’imaginer me blottir contre le dos de Morgan et glisser impétueusement ma main sous son T-shirt, parcourant les doux reliefs de son ventre, je sens une légère pression sur mon flanc droit, bien réelle celle-ci. Vérifiant bien que notre prof est toujours profondément absorbé par les volutes émergeant sauvagement de sa tasse de thé fumante, je me retourne et ai la surprise de voir Alexandre me tendre un morceau de papier plié. Mais qu’est-ce qu’il me veut, lui ? En tout cas, le week-end a été bénéfique pour le cocard que je lui ai infligé… Par simple curiosité, je m’en saisis brusquement et le déchiffre :


Il faut utiliser quelle formule à l’exercice 2 ? Excuse-moi pour l’autre jour, je ne t’en veux pas :-)


Alors là, pour le coup, il est gonflé ! Il y a seulement une semaine, il me traitait de sale pédale, et maintenant, il voudrait que je lui tende la main ? Il voudrait que j’oublie ça ? Mais bien-sûr, je vais être trop gentil, et dans une semaine, il recommencera à se moquer de moi ? Il ne faut pas me prendre pour une buse !

En guise de vengeance, je feins de fouiller dans mes copies pour retrouver le problème en question, puis me mets à répondre à son message. Je rature sa demande et la recouvre intégralement d’un Sale crétin ! en trait gras. Je lui rends son papier, puis attends quelques secondes avant de me retourner pour profiter du spectacle. Ne serais-je pas un peu sadique sur les bords, finalement ?

Et effectivement, je le vois la tête penchée vers sa table entre ses avant-bras, et j'observe ses poings se crisper.

Cinq minutes plus tard, la sonnerie retentit, et comme le veut la tradition, le prof de maths doit s’employer pour arracher les copies des mains de quelques élèves récalcitrants qui tentent de grappiller une ou deux précieuses minutes.


Avec Lilian, nous quittons la cohue pour sortir du lycée et aller nous restaurer. Il paraît ravi de sa performance et me propose d’aller manger un tacos sur la place de la cathédrale pour fêter ça. C’est plus cher que le self, mais au moins, on se goberge bien, et après avoir discuté un moment du programme de l’après-midi et observé les gargouilles en grès sculpté qui nous narguent, juchées sur les arches de la façade de la cathédrale, nous rentrons repus pour assister à notre cours d’allemand.

Alexandre n’est pas avec moi pour ce cours, mais je le revois pour notre dernière heure de la journée, physique-chimie. Je me demande pourquoi il s’est assis seul à une rangée, l’air un peu déprimé, au lieu d’être avec ses compères habituels.

Peut-être à cause du contrôle de ce matin ? Cela ne me semble que peu convaincant, étant donné qu’il n’est pas habitué à avoir des notes flamboyantes d’après ce que je sais.

Il n’empêche que son comportement a brutalement changé après la pause de midi. Mais en fait, pourquoi est-ce que je m’intéresse tellement à lui, tout d’un coup ? Peut-être parce que je le trouve plutôt attirant avec son air blessé…


Attention, tomber amoureux d’un mec qui hait profondément les gays au point de s’être donné en spectacle devant la classe, ce n’est pas la meilleure invention du siècle... J’espère que ça me passera…

Et pour cela, rien de tel que de consacrer mon énergie à solidifier mon amitié avec Morgan. Je rentre chez moi légèrement confus par les évènements de la journée, et profite des quelques dizaines de minutes d’intervalle avant de partir à l’entraînement pour prendre une solide collation.

L’entraînement est toujours aussi sympa avec mon ami : il a déjà l’air tout excité par la soirée où nous allons dans deux semaines, et m’en fait part avec une passion débordante :

— Il y aura Billx, avoue, c’est trop kiffant ce qu’il fait, c’est mon artiste français préféré !

Il me parle ensuite de reverse bass, de lignes de 303, de kicks frenchcore, m’énumère ses genres de musique électronique préférés... Je hoche la tête et approuve périodiquement, faisant semblant de ne pas être complètement largué, ce qui a l’air de le ravir au plus haut point. Il va falloir que je prenne quelques cours sur Wikipédia si je ne veux pas paraître ridicule…

Je vais finalement me coucher assez tôt après cette intense journée, et, avant de m’endormir, je me surprends en flagrant délit de souillure de moi-même par la volupté (pour reprendre ce cher Kant), appuyée par le beau regard d’Alexandre, ses sublimes sourcils anguleux d’un noir brillant, et ses cheveux aux reflets mordorés. Non ! Je n’ai pas le droit ! Cela ne va m’apporter que des ennuis!

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