Chapitre 28

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Ecrit en écoutant notamment : Billx – Irish Legend [PsyTrance]



Point de vue Michaël, nuit de samedi à dimanche, 1h07


J’ai du mal à m’endormir, et malgré le discours rassurant du secouriste qui a emmené Morgan, j’attends d’éventuelles nouvelles de ses parents. Heureusement, vers trois heures du matin, la fatigue finit par avoir raison de moi, mais je ne m’endors pas pour bien longtemps, car je me réveille avant l'aube, en proie à un stress intense. Je me précipite sur mon téléphone, et j’ai l’immense joie de constater qu’un message de son père m’est parvenu :

— Rien de grave pour ton ami, si tu veux, tu peux passer le voir dans la matinée. Merci beaucoup d’avoir permis de nous prévenir.

Je me rendors plus sereinement, rêvant de ses yeux bleus foncés que je reverrai rapidement. Vers neuf heures, je prends une solide collation en tête à tête avec mon frère, mes parents étant bien plus matinaux que nous deux.

— Je t’ai entendu rentrer vers une heure du matin, c’était déjà fini ?

— Euh non, disons qu’il y a eu un petit incident technique. Enfin, c’est compliqué et inintéressant… réponds-je en enfournant une tartine beurre-confiture.

Juste avant de partir, j’ai Lilian au téléphone qui sollicite mon aide pour un exercice de mécanique :

— … Alors là, t’appliques le principe fondamental de la dynamique… T’obtiens l’accélération selon l’axe z… Oui, tout à fait, t’as plus qu’à intégrer deux fois ton expression… et surtout, tu n’oublies pas les conditions initiales !! Je te dis juste ça pour ton intégrité physique si jamais Kwiatowski t'envoie au tableau…

Sur ces entrefaites, je retourne à mes préoccupations intimes. Je suis assez indécis concernant l’attitude à tenir envers Alexandre après les messages qu’on a échangés hier soir, et me résous finalement à temporiser le temps que je m’explique d’abord avec Morgan.

Pour éviter d’être assailli de questions embarrassantes, j’informe ma famille que comme il y a deux semaines, je vais donner des cours à un ami. Un vague sentiment de malaise me parcourt lorsque je vois une lueur s’allumer dans les yeux de mes parents, laquelle m’indique qu’ils savent sûrement très bien que la première fois où j’étais allé le voir, c’était en esquivant un repas de famille, habituellement ennuyeux à mourir et aux conversations fades, sauf lorsqu’il s’agit de demander avec insistance quand on ramènera enfin une copine…

Comme d’habitude, je prends mon vélo, et avec le froid sec de cette matinée de mi-octobre, je traverse la campagne alsacienne emmitouflé tel un alpiniste s’attaquant à l’Everest. Mais ce n’est pas ce temps vivifiant qui va m’arrêter, je ressens un profond besoin, presque un devoir, d’aller constater de mes propres yeux comment va mon beau footballeur.

Je suis de temps à autres ébloui par un soleil puissant qui fait scintiller la première pellicule de givre de l’année couvrant les champs. Malgré mes précautions, dont fait partie la double paire de chaussettes, j’arrive chez mon ami les pieds transis.

J’écrase brutalement la sonnette de mon index raidi par le froid et n’ai heureusement pas à attendre longtemps avant que la porte ne s’ouvre. C’est la mère de Morgan qui m’accueille ; je me doute bien qu’elle n’a pas passé une nuit reposante, cependant, dans sa bienveillance, elle se préoccupe aussi de mon état :

— Oh, mais tu dois être complètement congelé, mon pauvre. Tu es complètement fou ! Tes parents ne pouvaient pas t’emmener ? Oh je parle trop, entre vite, je t’en prie. Tu veux boire quelque chose ?

Je me dirige vers le salon d’une maison que je commence à connaître, et y trouve le père de Morgan, vissé dans un fauteuil, un café à la main. Il regarde à travers la fenêtre d’un air vaguement pensif. Je comprends que ça n’a pas dû être très gratifiant d’aller récupérer son fils au milieu de la nuit dans cet état ; c’est un peu une hantise de chaque parent… Et c’est à se demander si je n’aurais pas dû m’occuper moi-même de lui.

Opérant une rotation de quarante-cinq degrés, il m’interpelle soudainement :

— Viens, Michaël, assieds-toi. Je te l’ai déjà dit, mais je te remercie infiniment pour ta présence d’esprit. Rappelle-toi surtout que tu n’as pas à te sentir coupable envers Morgan par rapport au fait de nous avoir mis au courant. Même s’il peut te le reprocher, c’était la bonne décision.

J’acquiesce d’un air entendu, mais ne peux m’empêcher de prendre sa défense :

— Vous le connaissez bien mieux que moi, mais en tant qu’ami, je suis persuadé que c’était juste un accident ponctuel. J’espère que vous arriverez à en discuter avec lui.

Il esquisse un léger sourire forcé, envisageant évidemment le pire en tant que père dévolu à la bonne éducation de son fils. J’ai même l’impression qu’il veut me faire réaliser que j’ai une vision bien trop ingénue des choses.

La mère de Morgan débarque alors en apportant un plateau garni de deux tasses fumantes et de moult biscuits. Je m’exclame :

— Oh, ce n’était pas nécessaire, mais merci quand même !

Après avoir eu le temps de tremper les lèvres quelques fois, son père me demande :

— Allez, va voir s'il est réveillé, si oui, fais-le descendre, j’espère que tu pourras m’éclaircir sur quelques points par rapport aux évènements d’hier soir.

— Euh… mais je ne voudrais pas interférer dans vos affaires… rétorqué-je mal à l’aise. Vous ne voulez pas lui parler en tête à tête ?

— Si, mais j’ai le reste de la journée pour ça, maintenant, on va profiter que tu sois là.

Je monte alors sans conviction les escaliers vers la chambre de Morgan et frappe deux coups légers.

J’attends quelques secondes, puis il répond d’une voix penaude et harassée :

— Entrez, pas de problème.

J’entre délicatement dans la chambre et découvre mon bel ami allongé sur le dos. Il est beau avec la couverture qui ne recouvre qu’à moitié ses pectoraux… Par contre, il m’a l’air bien éreinté.

— Depuis quand tu me vouvoies ? demandé-je surpris.

— Bah, euh, je pensais que c’étaient mes parents, je pense qu’ils seront moins amènes que toi...

— Ah merde, réponds-je confus, ce sont eux qui m’envoient en l'occurrence... désolé... .

Il se lève alors doucement, et s’habille devant moi sans aucune pudeur, exhibant son corps athlétique dont l'harmonie ravit mes sens au point de me faire tressaillir. J’ai une terrible envie de le saisir par la taille et de l’embrasser…


Point de vue Morgan

À contrecœur, et même si le fait qu’il se préoccupe autant de moi me fait me sentir encore plus proche de lui, je préfère lui donner le change. Je l’ai déjà assez embêté que pour lui rajouter des soucis avec son copain... Et puis, il a l’air de bien l’aimer, son Alexandre… Ainsi, pour mettre les choses au clair, je lance:

— Bon, de toute façon, je ne sais pas très bien ce que je vais pouvoir leur raconter, je ne me souviens d’absolument plus rien à partir du moment où j'ai dû prendre cette saloperie. Et même avant, c’est plutôt flou.

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