Un seul instant pour toute une vie...

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PDV (Point de vue) Edith Galister

 Il était minuit. La ruelle était presque vide, on entendait juste les miaulements des chats, le bruit du vent, c’était comme si le monde était vide. Et moi, j’étais là. Ici, là. J’étais un être vide dans une vieille enveloppe, qui menaçait de s’éteindre à chaque seconde, chaque minute, chaque heure, chaque jour.

 Toute ma vie avait été rythmée par la guerre, l’attente, la peur, l’amour…

 Je m’appelle Edith Galister, et un miracle vient de se produire.

 Ma soirée était comme d’ordinaire. Mon assistante de vie m’avait fait à manger, mit la télé, préparé mon lit, fait le ménage, tout était calme.

 Mais dans ma tête, c’était, comment dire ? Flou, désordonné, j’étais remplie de mille pensées et émotions. Toute ma vie j’avais attendu, depuis ce fameux jour, qu’IL revienne me voir, sans savoir s’il se souvenait de moi...

 Il avait été si galant ce soir-là, lorsque j’étais rentrée du café où je travaillais pour payer notre loyer, à Rachel et moi.

 Il était beau, tellement beau que je m’étais arrêtée sur le seuil du salon, comme éblouie. Je le voyais m’observer lui aussi, il semblait calme, mais je pouvais sans peine deviner son émoi silencieux.

 J’étais tombée amoureuse, ce jour-là. Chaque jour, je repensais à cette soirée, à ce moment le plus court et le plus long de toute mon existence…

 J’étais très admirée à l’époque, pour ma démarche gracieuse, ma chevelure abondante domptée en espèce de tresse, et ma silhouette fine. Comme toutes les jeunes filles de mon époque, d’ailleurs.

 Mais j’avais toujours fait comme si je ne les voyais pas, regardant droit devant moi comme me l’avait appris ma mère. Lorsque qu’un homme m’abordait, je lui répondais avec un petit sourire qui en disait long :

« Excusez-moi, mais on m’a appris à ne pas parler aux hommes comme vous, les coureurs de jupons, comme on vous appelle. Donc si vous voulez bien me laisser passer, je vous en serai gré »

 Arrivée chez moi, j’avais ôté mon manteau et m’étais dirigée vers le salon, un peu fatiguée. Puis je l’avais vu, et figée, j’avais curieusement dévisagé cet homme séduisant et en habits de militaire. Un ami de ma sœur ? Peut-être.

 Il me regardait toujours, quand ma sœur l’a rabroué, lui donnant mon nom après qu’il l’ait demandé. Puis, il l’avait prononcé, mon nom.

C’était… comme une explosion.

 Une explosion de sentiments qui venaient en moi. Il avait une voix, il avait tout de ce que j’aimais. J’ai craqué pour lui, et je l’ai regretté. Il était soldat, après tout, je ne le reverrais jamais. Quand il est parti, ma sœur avait le sourire aux lèvres, elle m’observait comme une amie qui avait compris. C’était tellement puissant.

 J’ai reçu une lettre une semaine plus tard, de LUI. Il disait tout en trois phrases, trois phrases qui sont restées gravées dans ma mémoire :

« Ma chère et tendre Edith,

Je vous écris car vous m’avez envouté, telle une princesse volant le cœur d’un prince. Vous possédez mon cœur, et ce depuis que mon regard s’est posé sur vous. Edith, ressentez-vous ce lien qui nous relie ? »

 J’avais répondu, toute émue et excitée, répondant à ses sentiments de manière égale. Nous nous sommes envoyé des missives régulièrement, contant nos journées, nous manquant de plus en plus. J’attendais, qu’un jour, il revienne et vienne me prendre dans ses bras, tel un mari rejoignant sa femme après des années d’absences.

 Mais il ne revenait pas. Et un jour, je n’ai plus rien reçu. Après l’inquiétude, vient l’angoisse qu’il ait trouvé une autre.

 Après tout, nous ne nous étions vus qu’une fois. Je suis allée chercher des informations sur lui, sa famille, son entourage.

 J’ai alors appris qu’il avait eu un accident. Une grenade avait explosé près de lui, le blessant à la tête. J’ai pensé à aller le voir, mais il y avait Rachel, et le café aussi.

 Je ne pouvais pas les laisser comme ça. Je n’eus plus de nouvelles jusqu’au jour où j’appris qu’un vol en direction d’un rassemblement de guerre partait, avec tous les militaires qui avaient été présents durant l’attaque ennemie dont Edmond et son groupe avaient été victimes.

 Son nom était cité parmi les militaires en partance. Depuis ce jour, je ne pensais qu’à ça, chaque seconde, chaque minute. Etait-il en danger ? Pensait-il à moi ? M’avait-il oubliée ?

C'est avec ces pensées en têteque j’entendis ma sonnette. Ah, les souvenirs… J’allais difficilement à la porte, soutenue par ma canne, et ouvris la porte. Un homme me faisait face, transpirant, angoissé, aux côtés d’une fillette. Il me dit :

« Bonjour, sommes-nous bien… chez Edith Galister ?

- Oui, c’est moi. En quoi puis-je vous aider ? »

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