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Il avait fallu près de trois heures pour que la colonie retrouve son calme, après un réveil aussi mouvementé. Mme Briley et tous ceux qui se trouvaient dans son bureau avaient eu beaucoup de chance, puisque la pire blessure était l'épaule de Melay qui s'était démise quand il avait heurté le mur. Pour la responsable, une coupure au cuir chevelu qui ne lui avait même pas valu de points de suture, et pour les autres, quelques bleus et égratignures. En revanche le reste de la base n'avait pas eu autant de chance, et les blessés continuaient à affluer, certains dans un état grave. Les médecins avaient envoyé un premier rapport à sept heures, peu réjouissant. Deux morts ; un enfant qui avait été écrasé par une commode et un jeune homme qui s'était cassé la nuque en chutant dans les escaliers. Le nombre de blessés légers était de l'ordre de plusieurs centaines, et une dizaine de blessés graves. Sans parler des dégâts matériels qui n'avaient pas encore été évalués pour le moment. C'était une véritable catastrophe. Emmeline n'avait même pas encore eu le temps de passer voir ses enfants, on lui avait dit qu'ils n'avaient rien de grave ; elle avait dû s'en contenter. Une fois l'infirmerie un peu plus calme, elle avait pu donner quelques directives aux techniciens et ingénieurs encore en état de travailler. La femme avait donné à l'un d'eux la mission de localiser son mari, en espérant que ce serait fait rapidement. Pour sa part, elle était remontée dans son bureau ravagé et avait tenté de joindre la Terre par tous les moyens à sa disposition. Il était évident après une telle secousse que le matériel d'extraction était au mieux endommagé, au pire inutilisable. Ce qui remettait en cause l'essence même de leur présence sur Mars. Après une demi-heure à batailler avec ses maigres connaissances informatiques, elle était allée contempler par sa fenêtre la base malmenée. Elle songea que c'était un miracle qu'aucun batiment n'ait été éventré, jusqu'au moment où la gigantesque foreuse ploya lentement dans un crissement métallique, avant de s'effondrer en créant un nuage de poussière gigantesque qui noya toute la base. La responsable se précipita à son bureau pour ordonner à tous les techniciens disponibles de contrôler les filtres à air qui ne devaient à aucun prix s'encrasser, puis se laissa tomber sur sa chaise, submergée par ce désastre complet.

•••

Au niveau de la grotte détruite, parmi les gravats et la poussière soulevée par l'effondrement, un tentacule luisant se fraya un chemin jusqu'à la surface. L'appendice bleu s'aplatit à son extrémité pour former une sort de pelle, et commença à déblayer les décombres de ce qui fut un pan de montagne.

•••

Mme Briley fut rappelée par l'informaticien qu'elle avait chargée de retrouver le signal des montres perdues. Ce qu'il lui annonça n'était pas ce qu'elle attendait, ou plutôt faisait parti des pires cas de figures qu'elle avait imaginé.

  • J'ai réussi à reconnecter Superviseur à leurs montres. Par contre, il annonce que la montre de Franck Briley est hors-service. Et il ne capte pas le pouls de Marc Stelitch... Je- Je suis désolé Madame Briley...

Elle ne répondit pas tout de suite, il lui fallut quelques secondes pour intégrer ce qu'on venait de lui dire. Puis elle déclara d'une voix qu'elle voulait ferme, mais qui tremblait malgré tout :

  • Organisez la récupération dès que possible.

Elle coupa ensuite la liaison sans attendre de réponse. Elle embrassa du regard le capharnaüm dans la pièce, sans savoir comment elle devait réagir. Elle était sous le choc, avec la sérieuse impression que tout cela était irréel. Comment autant de choses peuvent-elles arriver en moins de vingt-quatre heures ?

  • Superviseur, où en est la liaison avec la Terre ?

Elle ne pouvait se raccrocher qu'à cela, il fallait que les responsables terrestres répondent pour qu'ils puissent décider de ce qu'il convenait de faire. L'oeil de Superviseur clignota des couleurs de l'arc-en-ciel, avant de se rouvrir pour donner la réponse.

  • La liaison avec la Terre est impossible Madame Briley, il semblerait que je sois bloqué au niveau du satellite relais. Le problème n'est pas de notre côté.

Emmeline hésita une seconde à se taper la tête sur le clavier, mais considérant que cela n'aiderait pas sa colonie à sortir de cette crise, elle se remit à son travail en centralisant les informations pour redistribuer les consignes à suivre ensuite.

•••

Le tentacule avait été rejoint par un deuxième, puis un troisième afin de creuser plus vite. Après quelques heures à ce rythme, ils firent émerger une sorte de boule gluante et phosphorescente. Les tentacules la poussèrent hors des gravats, l'envoyant rouler plus loin. La masse dégringola le tas de gravats avant d'aller heurter un rocher plus loin. Une fois éventrée, elle se scinda en deux pour dévoiler ce qu'elle contenait. Franck fut le premier à reprendre connaissance. Il se redressa, se secoua en comptant ses doigts pour s'assurer qu'il était bien vivant, et entier. Encore groggy, il eut la présence d'esprit de relever Marc, qui s'éveillait à son tour, puis ils se mirent à marcher en direction de la base.

•••

Un scientifique, quelques cheveux grisonnants au niveau des tempes et de petits yeux enfoncés entra en trombe dans le bureau de Mme Briley en brayant.

  • C'est impossible Madame ! Il se passe des choses inexplicables ici ! J'exige qu'on me renvoie chez moi immédiatement ! Je veux retourner sur Terre !

A bout de patience, la quadragénaire lui répondit d'un ton furieux.

  • Si c'est tout ce que vous avez à dire je ne vous retiens pas ! Prenez votre savoir, vos bagages et allez habiter sur Vénus, je m'en tamponne le coquillard ! Mais arrêtez de m'emmerder pour rien maintenant !

L'autorité qui émanait de la femme qui lui faisait face lui fit baisser les yeux. Il se dirigea vers la sortie sans faire plus de scandale et partit. Mme Briley le regarda faire, en se disant que certains étaient vraiment gonflés. Elle s'apprêtait à se remettre au travail quand Superviseur l'interrompit :

  • Mme Briley, je capte le pouls du docteur Stelitch. Sa montre est en mouvement, il revient vers la base à une vitesse moyenne de 5,3 km/h.

Superviseur afficha le plan du cratère avec la position en temps réel de la montre du chercheur, qui se déplaçait bel et bien. La femme ouvrit de grands yeux ronds, et se précipita à sa fenêtre pour essayer de l'apercevoir. Malheureusement, le nuage de poussière qui s'était formé suite à la chute de la foreuse lui bloquait complètement la vue. Elle espérait qu'il parviendrait à revenir à la base malgré la visibilité quasi nulle, et appela pour envoyer un médecin, un technicien et un scientifique dans le sas afin de l'accueillir. Elle ajouta qu'il devrait être placé en isolement, si sa santé le lui permettait, pour subir un interrogatoire. La responsable de la base avait l'intime conviction que la sortie de feu son mari et de Stelitch n'était pas sans lien avec le tremblement de terre qu'ils avaient subit.

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