Alina - 2.1

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Les lames coupaient avec précision les feuilles du petit arbre, prenant de temps à autre des branches isolées. Celles qui étaient de trop, celles qui mettaient la vie même de la plante en danger. Il fallait garder un certain équilibre pour que tout fonctionne, et ce, que ce soit pour les végétaux ou les hommes.

Alina, qui faisait ainsi chuter les tiges grâce à ses ciseaux, s’arrêta une fois son œuvre achevée ou une fois qu’elle jugea son travail accompli. Elle abandonna son outil sur une table à sa gauche et se positionna plus confortablement sur son petit siège en bois.

La Baronne Devràn était dans une grande verrière emplie de plantes et de fleurs. Toutes répartis sur le sol ou les étagères qui l’entouraient en formant un véritable écosystème où elles cohabitaient en harmonie les unes avec les autres. Ce lieu était son endroit privé, le refuge qu’elle regagnait lorsqu’elle était préoccupée. Certains se morfondaient sur eux même, lisaient ou bien parlaient quand ils étaient soucieux. Mais ce qui marchait avec Alina, c’était ce havre de tranquillité, son petit espace à elle qui lui permettait d’y voir clair dans ses pensées.

La Baronne était triste, après tout elle avait assisté au départ de l’un de ses fils. Et tout aussi grandiose que fût le triomphe de sa parade, elle avait du mal à l’accepter. Surtout qu’il se rendait à la guerre, comme son mari des années auparavant. En un autre temps…

Elle se retrouvait ainsi seule, seule avec elle-même dans ce lieu pour se ressourcer malgré les pensées qui tourbillonnaient dans son esprit. Pour se reconnecter avec l’apaisante nature comme lui avait enseigné sa mère.

Mais pragmatique comme elle l’était, Alina n’entretenait pas ce petit jardin, ces plantes par pur loisir. Elles avaient toutes leurs utilités et étaient pour la plupart médicinales. Quittant du regard le modeste arbuste qu’elle venait de tailler, Alina observa par-delà ce dernier. Elle scrutait les verrières qui reflétaient sa propre image et juste derrière l’impressionnant manoir de la famille.

Cette construction gigantesque était au centre du domaine des Devràn, au cœur de leurs « terres » qui en termes de superficie devait être bien comparable à celui de plusieurs quartiers de la ville.

Elle abandonna la grande bâtisse des yeux, la Baronne allait se replonger dans son travail, sur une seconde plante qui requérait ses bons soins, mais elle s’arrêta net en entendant une sonnerie résonner dans l’endroit. L’horloge des lieux, cette haute œuvre de bois nichée entre deux plantes, venait de retentir les douze heures et sa présence était demandée ailleurs.

Soufflant par pure irritation, Alina se mit debout. La matinée était passée plus vite qu’elle ne l’avait pensé, qu’elle ne l’aurait voulu. Elle se dirigea alors vers la porte de la verrière en s’arrêtant à mi-chemin pour saisir un petit sachet.

Ce dernier était disposé devant un arbuste isolé. Une plante différente de toutes les autres de par sa forme et couleur. Refermant les lanières du cornet de cuir, elle le rangea dans une des poches cachées de sa robe et quitta l’endroit.

La journée n’était certes pas radieuse, mais il ne pleuvait pas, c’était déjà ça et Alina marchait dans les allées pavées du domaine. La petite verrière où elle avait établi son jardin avait été aménagée par son mari dans l’une des dépendances du manoir. Dans la partie la plus éclairée de leur terre. Mais pas la plus proche de leur maison.

Ainsi elle traversa la propriété, ses bâtiments et les parcs qui se succédaient les uns après les autres.

Alina croisait de temps à autre des servants de la famille. Parfois des miliciens en patrouilles ou des jardiniers qui luttaient avec les haies. Ces derniers, répartis en grands nombres dans les espaces verts, taillaient et coupaient. S’occupaient de ces espaces de nature, des plantes comme la Baronne il y a peu.

Tandis qu’elle passait à côté d’une de ces murailles de branches en étant saluée par les employés qui s’activaient dessus, Alina sentit comme un vent. Une soudaine bourrasque qui envoya tourner les feuilles autour d’elle. Relevant la tête, elle aperçut un petit dirigeable dont les bords étaient peints avec l’emblème familial, l’ours des Devràn. L’appareil qui la survolait à présent semblait s’approcher du domaine en entamant sa phase d’atterrissage.

Le dirigeable faisait vibrer ses hélices durant sa manœuvre, le moteur lui bien audible devait lutter pour maintenir en l’air l’engin en vue de son lourd chargement qui pendait en dessous. De nombreux câbles partaient de l’habitacle niché en dessous du ballon d’air et venaient ainsi retenir un grand filet où s’empilaient de multiples caisses.

Quelqu’un avait dû réaliser une commande importante, Paul qui passait ses journées dans un des hangars du domaine ne devait pas y être étranger…

Quittant du regard l’appareil qui s’approchait toujours plus du sol, la Baronne continua sur son chemin de dalle. Allée qui l’emmena au bout d'une longue marche vers les abords du manoir. Alina arriva sous l’ombre de la bâtisse et fut saluée par un homme occupant le porche d’entrée.

Le serviteur avait l’honneur d’officier à une tâche aussi ostentatoire qu’inutile, mais c’était ainsi que les choses fonctionnaient dans les niveaux supérieurs de la ville. Et il faut dire que ce n’était sûrement pas lui qui allait se plaindre d’avoir un travail, en vue des temps compliqués que la cité nation connaissait. Entre un départ pour les colonies et ça, son choix avait dû être vite fait.

— Madame, fit l’homme habillé d’un impeccable costume alors qu’il ouvrait la porte.

Le saluant de la tête pour le remercier, Alina se dirigea de suite vers l’imposant escalier au bout du vestibule d’entrée et commença à le gravir.

À chaque étage qu’elle passa, la Baronne rencontra quelqu’un et de temps à autre, on lui donnait des objets. Parfois, des livres à la vieille couverture reliée ou une simple bouilloire d’eau encore chaude. Ces servants avaient dû attendre, à l’affût de leur maîtresse pour lui fournir ce qu’elle leur avait demandé plus tôt dans la journée.

Les niveaux se succédèrent les uns après les autres et bientôt, Alina avança dans les recoins les moins occupées de la demeure, les parties plus secrètes, vers les combles. Cela fut de suite remarquable quand elle fut arrêtée dans sa marche par une grille. Posant ses livres et la bouilloire encore chaude sur le sol, la Baronne farfouilla dans ses poches.

Le sachet de cuir pris plus tôt n’était pas le seul passager de ses « doublures » secrètes. Tirant une clef ouvragée, elle la fit tourner dans la serrure de la grille et dans un audible grincement quand elle l’ouvrit.

Reprenant son chargement par terre, elle parcourut ensuite les quelques marches qui la séparaient du dernier étage de la demeure. Un peu essoufflée par son périple, Alina calma sa respiration dans le couloir où elle avança plus lentement. Ce passage était plongé dans une semi-pénombre d’où la seule lumière venait de la porte mis-close qui la terminait.

Alina pouvait entendre lors de son approche une voix. Indistincte au début et plus clairement quand elle ouvrit la porte découvrant la chambre et son occupant.

La pièce, modeste, était décorée et agencée avec goût compte tenu de l’état global des combles. Des draps peints à la main tapissaient les vieux murs et au centre de la salle, se tenait un jeune garçon occupé à jouer à côté d’une minuscule boîte ouverte.

La couleur de l’éclairage venait se refléter sur les rangs des petits personnages face à lui. Ces soldats de plomb, disposés en bon ordre, étaient alignés et semblaient alimenter son imaginaire avec leur guerre fictive. Certains envahissaient le dessus de la boîte dans une presque défiance de leurs « ennemis » à la teinte opposée qui, eux, demeuraient sur le plancher.

Refermant la porte de la chambre silencieusement, Alina s’approcha à pas de loup, malgré les affaires qu’elle portait. Mais tout aussi discrète qu’elle fût, le jeune garçon qui jouait couché sur le sol leva sa tête. Il avait dû sentir quelque chose en dépit de son occupation plus que prenante.

Et quand son regard croisa celui d’Alina, il dit avec une joie perceptible : « Maman ! »

— Doucement… fit Alina alors que le garçon, après avoir couru pour la rejoindre, l’étreignit avec la force de sa jeunesse vigoureuse.

Et lorsqu’il desserra son emprise de la longue robe d’Alina, l'enfant la regarda en continuant.

— J’ai fini de peindre les soldats que tu m’as offerts, tiens, viens voir, dit-il en tirant la Baronne par ses habits.

— Oui, oui… J’arrive, laisse-moi juste poser mes affaires, lui répondit-elle avec un timbre de voix sévère, mais juste.

Rangeant les livres dans la petite bibliothèque voisine de l’entrée, elle abandonna ensuite sa bouilloire sur la table centrale où l’attendait d’ailleurs une tasse.

— Tu les as déjà fini !? dit Alina en se rapprochant du garçon qui lui tendait l’une de ses œuvres.

Prenant avec soins le soldat de plomb, elle l’ausculta. La peinture était correcte, voire bonne pour un enfant de cet âge. Même trop…

— C'est magnifique mon chéri, ça t’a plu de le faire ?

— Ho, oui, répondit le garçon en allant vers la seconde table des lieux qui reposait vers la grosse fenêtre ronde de la chambre.

Là de nombreux pots aux couleurs variées prenaient place, son « établi » à n’en point douter était actif. En témoignent les traces de pigments séchées qui recouvraient le bois du meuble.

Alina se voyait rassuré, son fils semblait avoir trouvé une occupation aussi chronophage que divertissante après tout.

— Je t’en achèterai d’autres dans la semaine si tu veux, apercevant le sourire qui illuminait le visage du jeune homme elle réagit. Mais maintenant il est l’heure de travailler.

— Haannn… fit-il comme unique réponse avant de se saisir de la chaise de son établi.

Alina qui l’observa faire en empoigna une également, et tous deux se retrouvèrent sur la table centrale de la chambre. Alors que la Baronne posait les livres qu’elle avait repris, le garçon qui dépassait tout juste de la table grâce à un coussin sous lui avait la tête maintenue par ses deux mains en exprimant une sorte de grimace.

— Tu sais que c'est important Lucan ?

— Oui… mais si on finit rapidement, on pourra parler plus longtemps après !?

— Bien sûr.

— Chouette ! s’exclama-t-il en se redressant.

— Mais avant, on va vérifier ce que tu as pu retenir d'hier.

— Quelle partie ? dit-il en soufflant.

— Pourquoi ne commencerions-nous pas… par la religion ? Que peux-tu me dire à ce propos ?

— Nous avons des religions majeures.

— hun hun…

— Trois ?

— Tout a fait, celle des Ombres est en référence à ?

— Aux deux lunes de Céresse !

— Elles sont omniprésentes et une éclipse à lieu tous les vingt ans. Ce moment est d’ailleurs un événement méllant peur et sacralité dans notre société. Il s'en suit la moisson servant a expulser les mutants de la société et garnir les rang des collèges arcaniques. En soi, controller les chagement du gerne humain. L’Empereur lui-même reconnaît le temple d'Ashai et la place au-dessus de la myriade d’autres cultes qui parsèment notre cité nation, notre Empire, pour s'accaparer les citoyens touché du don des arts arcanaiques. On dirait que tu as bien retenu nos derniers cours, dit Alina en souriant. On va donc passer à quelque chose de différent aujourd’hui. On va s'attaquer à la géographie.

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