(Si cette nouvelle intéresse un éditeur je peux en faire un roman de 500 pages)

AGLAGLA

Boussens, Haute-Garonne, 12 septembre 2 050

A 95 ans Alan Brocq n'est plus depuis longtemps en état de travailler, même s'il fait encore une bonne température de 5° le jour et moins cinq la nuit, la température normale l'été maintenant. Il n'est pas non plus en état de faire le fantassin. Mais il peut toujours faire le guetteur derrière les vitres chauffées au poêle à charbon de l'ancien hôtel abandonné devenu poste d'observation militaire avec vue sur la Garonne. Il est mieux là que chez lui où il ne peut plus se chauffer suffisamment. On lui a même confié un fusil mitrailleur avec des balles explosives pour le cas où des « tafurs » parisiens ou lyonnais, s'aventureraient pour envahir la commune. A l'autre bout du plateau des Boïdures des guetteurs plus jeunes et mieux armés sont là pour avertir en cas d'attaque des tafurs par le nord, bien plus probable.

Dans les villes l'armée fait face, mais des « tafurs » ont déjà massacré des villages entiers pour se réfugier dans les maisons de leurs victimes.

Les tafurs, c'est lui qui les avaient appelés comme ça le premier, la Dépêche du Midi l'avait repris et le mot avait fait florès parce qu'il n'y en avait pas d'autre. Tafur est un mot de la langue d'oc médiévale que la langue d'oc contemporaine n'a pas gardé. Il voulait dire « truands » mais avait désigné aussi dans l'Histoire les pauvres qui étaient allés à la Croisade derrière les chevaliers, pauvres sans armes ou guère et sans argent. Ils avaient subi plus que les autres les chaleurs écrasantes, la famine atroce lors des sièges, autant ceux que les croisés menaient que ceux auxquels ils résistaient. C'était eux, les tafurs, qui pillaient partout où ils étaient passés, en Allemagne, en Croatie, en Bulgarie, pour manger. C'était eux qui avaient massacré les Juifs par fanatisme et par ignorance. Ils avaient même parfois massacré des chrétiens d'orient parce qu'ils étaient vêtus à peu près comme les Arabes. Partis avec des idées mystiques et généreuses ils étaient devenus les pires des bandits ; pauvres devenus sauvages et cruels par misère et par ignorance.

Le mot désigne maintenant les cocus du prétendu réchauffement climatique. Les idiots qui avait voulu sauver la planète et ne pouvaient plus se sauver eux-mêmes ; et qui, rageux et désespérés, attaquent les villages et massacrent leurs habitants pour trouver un abri.

Les premiers réfugiés climatiques étaient arrivés en Europe occidentale dès l'année 2035. C'était tous les Norvégiens, Danois et Suédois dont le pays était sous la glace, soit plus de 20 Millions de personnes.

2 050 était le début de la fourchette établie par les géographes spécialistes du climat : ils avaient annoncé dès les années 1980 une glaciation qui se produirait « entre 2050 et 2100 » elle devait couvrir de glace « toute la Scandinavie, Berlin, Lille-Roubaix-Tourcoing » et évidemment des villes en Russie, en Pologne …

Mais elle était venue dès les années 2030 à cause des dirigeants qui avaient cru les billevesées de l'autiste Greta Thunberg. Le président Biden avait envoyé dans l'espace des centaines de milliers de miroirs pour rejeter la chaleur du soleil vers l'extérieur de la Terre. Le président Macron, toujours suiviste, avait envoyé pour sa part quelques milliers de miroir juste avant de quitter le pouvoir à la fin de son second quinquennat. Le résultat en avait été un effondrement rapide des températures de l'été, ce qui était l'objectif, mais aussi de l'hiver.

Revenu de leur admiration stupide pour le petit monstre les Suédois avaient voulu tuer Greta Thunberg, protégée par les autorités et évacuée maintenant on ne savait où, sans doute aux Etats Unis. Ses parents n'avaient pas échappé à la fureur populaire. Ils avaient été lynchés devant les caméras alors que la couche de glace n'était encore que d'un mètre d'épaisseur. Maintenant toute la Scandinavie était sous trois mètres de glace au sud et bien plus encore au nord du pays. Même chose pour le Canada et tous les Canadiens avaient passé la frontière américaine. D'ailleurs les habitants des états de Washington, du Montana, de l'Oregon, du Maine étaient eux-même des tafurs.

Certes autour de Toulouse comme des autres grandes villes l'état a créé des logements provisoires pour les réfugiés climatiques, mais ils sont insuffisants face à 20 ou 25 Millions de Français fuyant les glaces au nord de la Seine pour tenter de s'installer plus au sud... sans compter les Belges, Allemands, Néerlandais et autres qui prennent dans l'urgence vitale le trajet qu'ils avaient l'habitude de prendre pour leurs vacances.

Les ignorants découvrent enfin que les ours blancs n'ont rien à faire sur la banquise où elle fait quatre kilomètres et demi d'épaisseur puisque ils se nourrissent de phoques et que les phoques sont bien incapables de faire des trous de 4 500 mètres et quelques d'épaisseur pour venir respirer.

Donc les ours blancs vont à la limite de la banquise où la glace ne fait que moins de deux mètres d'épaisseur, pour pouvoir manger.

D'ailleurs tous les ours savent nager, et les ours blancs ont en plus l'avantage d'avoir une bourre imperméable et très épaisse qui les protège de l'eau très froide. Donc un ours blanc sur un morceau de glace n'est pas un animal désespéré, c'est un fauve qui fait un festin.

Les Boussinois comme les réfugiés climatiques écoutent la radio en permanence, les premiers chez eux, les autres sur leurs smartphones.

On apprend que les Normands et les Bretons repoussent des tafurs parisiens. Le Gulf Stream protège la côte atlantique française (pas celle du Canada) comme il protèg la Méditerranée.
C'était grâce au Gulf Stream qu'il fait plus chaud à Naples qu'à New York alors que NY est légèrement plus au sud, tous deux à 40° de latitude, mais New York quelques dixièmes de latitude en dessous.

Enfin on laisse parler les géographes à la radio, particulièrement les spécialistes du climat qui s'étaient contentés en 2021 de faire une « déclaration des cinq cents » dans la Presse pour dénoncer les mensonges des écologistes.

Mais l'appel était venu bien des années trop tard et seul Le Monde et France Soir l'avaient diffusé, de sorte que peu de gents l'avaient lu et aucun décideur politique. Les politiques avaient même forcé une très anti-sociale « transition écologique » qui avait fait remplacer les voitures thermiques par des voitures électriques bien plus polluantes avec leur lithium... et maintenant, les gens bloqués par la neige et la glace dans leur voiture électrique, meurent brûlés vifs car le lithium peut s'enflammer d'un seul coup dans un embouteillage et on ne peut pas l'éteindre. En 2 023 en Mer du Nord un cargo avec des centaines voitures électriques et des milliers de batteries au lithium s'était enflammé et on n'avait pu que le regarder brûler pendant plus d'une semaine, détruisant toute vie aquatique à son entour.

Les géographes à la radio disent qu'on n'est qu'au tout début de la catastrophe qui ne touche pour l'instant que les nordiques comme on dit dans le Sud où l'on considère que le Nord commence à Limoges.

Ils expliquent en effet que le Gulf Stream nait de la fonte des glaciers du Groenland. Dans le Sud-Ouest du Groenland il fait 25° l'été. D'ailleurs il faut bien que la banquise finisse par s'arrêter. Elle ne peut pas couvrir toute la terre sinon la vie s'arrêterait.

Ce sont les glaciers, en fondant et plongeant par morceaux dans la mer, qui créent un courant froid en profondeur,

et depuis treize mille ans par réaction se crée un courant chaud (chaud en géographie c'est 5° parfois) qui bouge : le Gulf Stream.

Les géographes avertissent à la radio : « Si le Gulf Stream s'arrête et disparaît, Il fera encore plus froid à Rome et Naples qu'à New York, New York déjà couverte d'une fine pellicule de glace que les travaux publics ne peuvent plus faire fondre.

Maintenant enfin on les écoute mais il est trop tard : les miroirs de l'espace renvoient les rayons du soleil et les températures baissent de plus en plus : - 40 à Paris depuis trois semaines.