Guérison

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Mes petits chats. Jumeaux, complémentaires, opposés. Blond et brune. Jour et nuit. Ce que vous êtes, l'autre ne l'est pas.

Ma plus belle leçon de vie, particulièrement en ce moment.

Toi, mon petit père, tu as cette certitude d'amour. Ce côté séducteur. Cette demande de câlins. Cette façon de m'envoyer promener en te souciant peu de mes réactions. "Tu n'es pas contente, maman ? Ben ne le sois pas. Débrouille-toi avec ça."

Je me tire les cheveux pas poignées, à croire que la gamine frustrée, dans l'histoire, c'est moi. Probable.

Les enfants sont une source inépuisable d'apprentissages.

Toi, ma petite mère, tu as cette puissance intérieure. Cette perspicacité hors du commun. Cette compréhension instinctive.

Votre hypersensibilité, vous la manifestez de façon si différente que je n'arrive pas toujours à suivre.

Hier soir, ma chérie, tu faisais un dessin. Ton arrière grand-mère était là, retrouvant pour l'occasion son ancien métier d'institutrice de maternelle. Tu étais appliquée, plongée dans tes traits, puis quand tu as eu fini, tu t'es tournée vers moi.

- C'est un beau dessin pour toi.

Je t'ai remerciée. J'étais touchée. Je ne sais pas pourquoi, je t'ai demandée :

- Pourquoi tu ne le donnes pas à Nénette ? J'en ai plein, déjà, moi.

- Comme ça, tu m'aimes.

Je suis restée très conne. Au bout de quelques secondes, j'ai réussi à murmurer ces quelques mots:

- Je t'aime quoi qu'il arrive. Quoique tu fasses. Quoique tu me dises. Je t'aime plus fort que fort.

Tu as souri et tu as continué à dessiner. Moi, je me suis retenue de pleurer et j'ai fait à manger. "Donner pour être aimée ?".

Non et re-non.

"Donner parce qu'on aime"

Oui, double oui.

La nuance est fine, mais importante.

Plus tard, alors que je ruminais cette épisode, tu es revenue me dire.

- Même quand tu es fâchée, tu m'aimes ?

Cette fois, plus personne autour, j'ai pas résisté, j'ai fondu en larmes. J'aurais voulu ne pas te montrer ça, mais je n'ai pas pu. Fallait que ça sorte. Assise dans les escaliers, comme une andouille, je me vidais à coup de sanglots impressionnants.

Impossible d'arrêter le flot. Culpabilité qui revient mais dont je ne veux plus. Qui ne vibre plus. Qui n'est plus que moi.

Fallait-il que je projette tant sur toi pour que tu m'aies dit ça ? Qui était touchée ? Qu'étais-je en train d'interpréter ? Etait-ce toi, ou était-ce moi, que je pleurais ? Quelle enfant, à cet instant, avait besoin d'être consolée ?

- Tu es triste, maman ?

Tu es venue me faire un câlin. Empathie ? Besoin de donner pour aimer ? Je ne savais plus.

Puis tu es partie voir ton frère.

- Viens, il faut que tu fasses un câlin à maman pour qu'elle se sente mieux.

L'autre est venu. En râlant, mais il est venu. Les larmes de sa mère, c'est vite agaçant. Un mec, quoi.

Ils m'ont embrassé. Et j'ai encore pleuré.

J'avais envie de leur dire que ce n'était pas leur rôle, pas leur place, pas nécessaire. En même temps, c'était doux et bon. Je ne voulais pas qu'ils me donnent pour être aimé.

Puis j'ai réalisé. Peut-être qu'ils ne le faisaient pas pour ça. Peut-être que c'était moi qui interprétait tout de travers. Peut-être juste que je leur avais donné tant d'amour qu'ils avaient envie, juste envie, d'en donner à leur tour.

Et si je ne m'étais pas plantée ? Si, au contraire, j'avais réussi ?

Je ne savais pas. Peu importait. Je les ai pris dans mes bras, et j'ai saisi aussi ce bébé, ce tout petit bébé que j'avais consolé quelques semaines avant au cours d'une séance d'hypnose, et j'ai murmuré tout bas.

"Vous êtes les personnes les plus importantes de ma vie."

Le bébé d'abord, mes enfants ensuite.

Ce n'est pas moi avant eux, c'est moi avant les autres, pour être mieux avec eux, mieux avec les autres.

Se sauver soi, seule, pour s'offrir pleinement au monde. Je le comprenais depuis un an, le vibrais depuis quelques mois, le mettais en application depuis quelques semaines. Cette soirée ? Je la vivais soudain comme un petit rappel. Un petit test. Une petite vérification.

"Où en es-tu, toi ? As-tu compris qu'il fallait t'occuper de toi d'abord ? Te consoler, toi ? T'aimer, toi ? Te regarder, toi ?"

J'ai séché mes larmes. Dieu que j'avais avancé, même si du chemin, il en restait encore à faire. J'ai ri. On a lu l'histoire de Petit ours brun le crevard qui donne un dessin au sans abris plutôt qu'une couverture. Vous avez posé des questions, j'ai essayé d'y répondre. Le bébé dormait apaisé contre mon sein.

Mon héroïne est venue aux nouvelles. Je ne m'étais pas effondrée, finalement. Je survivais. Je me soignais. Je riais. Au plus bas du plus bas, je riais. Je volais. Je revivais. Je transcendais.

J'avais passé l'épreuve du soir, et avec mention, s'il vous plaît !

On a discuté. On s'est marrées. Elle suit son chemin. Moi aussi.

Le reste du monde en fait autant.

Même quand tout va mal, tout va bien, puisque l'amour dépasse tout. Toujours.

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