L'impatient jaloux

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        Théo est agaçant. Toujours à sauter partout pendant l'entraînement, à sourire aux filles, à faire le beau. Tout le monde l'adore. C'est énervant. Il y a surtout cette nana qui le bouffe des yeux. Une brunette à lunettes, passionnée. Je suis tombé sur son blog l'autre jour... Pffffiu... ! J'ai rien compris ! Elle se fait appeler Alicé, j'ai pas trouvé pourquoi. Puis elle écrit tout un tas de textes plein de métaphores, des figures de style dans tous les sens, des idées politiques. Elle est trop loin pour moi. J'ai beau lui courir après, j'arrive pas à la rattraper ! Et j'irai jamais lui demander ce qu'elle veut dire par « le jour est tyran » « la vérité absolue n'existe pas », surtout pas. Elle pourrait croire que je m'intéresse à elle. Qu'elle reste avec son blondinet, là... Quoique, on dirait que y'a quand même un peu d'eau dans le gaz entre eux deux. Je crois qu'il ne l'aime pas. Ce fou ! Qu'il me la laisse alors ! Mais j'ai bien vu comme elle le regardait la semaine dernière. Comme si c'était fini, qu'il n'y avait plus d'espoir. Elle attendait désespérément un sourire de sa part, un geste tendre. Et moi, sur le terrain d'à côté, qui essayait de faire des amortis parfaits pour qu'elle me remarque, pour qu'elle sache au moins que c'est moi Victor. Elle n'a pas daigné me regarder. Pas une seconde. Pas même lorsque j'ai envoyé le volant sur le terrain du gamin. Non, je suis passé tout près de celui qu'elle fixait, mais elle n'a même pas vu que j'existais. Salope ! C'était presque gênant de la voir le scruter de cette façon alors qu'il la fuyait. Mais en même temps, elle s'attendait à quoi en sortant avec un gamin ? Le type vient tout juste de découvrir comment fonctionne son engin, et elle, elle écrit sur le capitalisme. C'est pas compatible ! C'est comme l'huile et l'eau, ça se mélange pas. Ce qu'il lui faut c'est un homme, un vrai, quelqu'un de mûr qui saura la comprendre. Quelqu'un comme moi quoi ! Bon, je ne comprends pas ce qu'elle écrit, « certes », mais je comprends autre chose : les mots que sa bouche ne dit pas mais que ses yeux crient. Ca se voit à vingt mille kilomètres qu'elle est brisée. Quel gâchis quand même... Un si beau visage fêlé par cet hideux sourire en biais. Tout ça pour cet abruti qui n'a même pas encore son brevet. J'ai bien cru qu'elle allait s'effondrer jeudi dernier pendant les étirements. Et lui qui frimait. « D'habitude je suis meilleur gnagnagna c'est à cause de mon tee-shirt gnagnagna ». Tout le monde a ri, sauf eux deux. Ils se sont fixés un moment, intensément, bizarrement, et moi ? Toujours inexistant derrière lui. Je suis sûr que c'est même pas un vrai blond en plus.


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