- 2  -

3 minutes de lecture

En fin de soirée, le temps change brusquement. Ça a commencé à tonner et l’orage s’est rapproché très vite. Ça pète de plus en plus dur ! Ça semble se bloquer sur la montagne, juste au-dessus. Normalement, je n’ai pas peur, mais là, tout seul, ça devient flippant. Paf ! le courant est coupé et la connexion aussi. Je me rabats sur des jeux nazes auxquels je jouais encore l’année dernière. J’essaie de pas trop penser pour ne pas avoir peur.

Tout d’un coup, j’ai à peine entendu des bourdonnements que ça éclate dans un boucan incroyable juste au-dessus de moi. Si je n’y étais pas allé cinq minutes avant, je faisais dans mon boxer, c’est vous dire ! Sûr que la foudre est tombée sur la maison. Sûr qu’elle va prendre feu ! Là, je regrette vraiment que mes parents ne soient pas là.

Subitement, un grand silence. Il ne pleut même plus. J’attends quand même un peu et je sors pour voir si la maison brule. J’ai oublié l’instruction n° 351, "toujours mettre un masque" ! J’ai tellement de règles à respecter que je les numérote. En fait, j’ajoute un numéro à chaque fois, histoire de leur faire comprendre qu’ils radotent et que ça me gonfle. Enfin, surtout ma mère…

Je suis à moitié rassuré quand je vois le noyer du père Jean transformé en allumettes de l’autre côté de la route. Dommage, car à la Toussaint, il nous donne plein de noix fraiches. J’adore ! Aucune flamme sur le toit. Ouf ! Enfin, à revenir vérifier ! Je traverse la maison pour sortir du côté auvent. Je m’écarte. Ouf, rien non plus. Il y a des tuiles par terre, c’est l’affaire du father. Il verra quand ils reviendront.

Je ressors de l’autre côté pour bien surveiller, car ça craint quand même, quand j’entends une sorte de halètement, de sanglots. J’allume la torche de mon phone et je fais un bond en arrière. Il y a un mec en boule contre le mur. Je vais me faire agresser ! Si je n’avais pas fait cinq minutes avant, c’était encore une belle occasion ! Finalement, rester tout seul, c’était débile. Je ne bouge pas, lui non plus. J’ai l’impression qu’il pleure. En plus, ce n’est pas un homme, mais un ado, comme moi. Je m’approche et je lui demande si ça va. Pas de réponse. Je m’approche encore. Ma lumière l’éclaire. Ses vêtements sont déchirés et c’est sûr qu’il a pas plus que mon âge. Il lève la tête et je vois qu’il a l’air complètement perdu. La maison est isolée, je suis bien obligée de le faire rentrer. J’ai du mal, car il a l’air sacrément sonné. Je suis obligé de lui prendre la main. Tout ça, toujours dans le noir ! Il est trempé. Je le fais asseoir sur le canapé et il s’effondre dessus. Je vais avoir droit aux engueulades, « Le beau canapé en cuir, gnan gnan gnan ! »

Je lui demande quand même si ça va. Pas de réponse. Il doit être étranger. C’est peut-être un de ces clandestins dont on parle sans arrêt. Il lève les yeux quand la lumière revient. J’avais tout allumé pour être sûr de ne pas rater le retour du courant. Ça fait beaucoup ! Il regarde autour de lui en clignant des yeux. Plus perdu, tu fais pas ! J’éteins presque tout. Ça a l’air de le rassurer.

— Où est-ce que je suis ?

— Chez moi ! T’es qui, tu viens d’où ?

— Je rentrais chez moi, et puis il y a eu l’orage.

— C’est où chez toi ?

— À Tobion, en bas, au Cabenan.

— C’est loin !

— J’étais en vélo ! Il faut que je rentre, mes parents vont s’inquiéter !

— On peut leur téléphoner, c’est revenu aussi.

— On n’a pas le téléphone…

— Ah !

Chelou, un mec qui n’a pas de phone !

— T’as pas un vélo à me prêter ? Je te le rends demain.

— Ben oui, mais…

— S’il te plait…

— Bon, viens voir.

Je le connais à peine et déjà, je dois lui obéir. Je n’aime pas trop.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 3 versions.

Vous aimez lire Jérôme Bolt ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0