Valentin écrivain à succès

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    Un an plus tard, Valentin publia son premier roman. Voilà ce qu’on put lire alors dans le New York Times : 

«  Valentin Ashcroft nous dépeint là un monde qu’il connait bien puisque c’est le milieu dans lequel il a vu le jour : le milieu artistico-intellectuel américain et plus précisément New Yorkais. Il nous en donne là une image réaliste et sans concession comme un portrait au vitriol d’un univers en décomposition. Il utilise pour se faire un style très personnel et moderne comme pour broyer les codes de la littérature dans laquelle il a été baigné dès l’enfance. Fer de lance d’une nouvelle génération d’indignés, il deviendra probablement, s’il confirme son immense talent, l’un des écrivains majeurs de son époque. »

    Le livre fut un grand succès critique comme on a pu le lire ci-dessus mais, aussi publique. L’odeur du souffre qui se dégageait du roman avait attiré toute une catégorie de lecteurs avides de sensationnel. Evidemment, ses anciens amis n’étaient pas cités nommément mais, on pouvait facilement les reconnaître au travers des descriptions plus ou moins flatteuses qu’il en avait réalisées. Ces derniers essayèrent discrètement de nuire au jeune homme mais, sans y parvenir. L’ouvrage avait eu trop d’impact et la personnalité hors norme de Valentin le rendait intouchable. Il était devenu une sorte de lanceur d’alerte contre la décadence de la pensée et de l’art occidental. 


    Il quitta bientôt le pays pour échapper au cirque médiatique auquel il était allergique. Il ne donna que très peu d’interviews. Voulant sortir des sentiers rebattus de l’intelligentia, il avait vendu les droits de son livre à la société internet Netflix qui en fit une série à succès dans la veine de « House of Cards » sans en dénaturer le propos déjà lourdement machiavélique. Il avait reversé une grande partie de ses revenus à la promotion sur internet des jeunes auteurs et des artistes injustement méconnus. 


    William quant à lui s’était procuré le livre dès les premiers jours de sa sortie. Comme il n’avait pas revu Valentin depuis, il espérait trouver dans le roman les réponses aux questions qui étaient restées en suspens lors de leur dernier entretien. 

    La lecture fut à la hauteur de ses attentes. Comme il l’avait supposé, Val et Zach (devenus Julian et Gregory dans le roman) se connaissaient de longue date. Ils s’étaient en fait rencontrés sur internet bien avant de se croiser sur le campus de l’université de Columbia. 

    Abasourdi, William avait découvert à cette occasion l’engagement politique de son ex-compagnon au sein du mouvement Occupy Art. Attiré par la contestation de l’ordre artistique établi, Val’ s’était joint à lui pour travailler dans la clandestinité sur des actions militantes. Très peu de temps après leur rencontre IRL, les deux jeunes étudiants étaient devenus amants.


    Val n’avait pas totalement prémédité le chaos qu’il avait provoqué au sein du groupe d’amis de Tom. Opportuniste, il avait seulement profité et entretenu la déliquescence morale et intellectuelle qui avait déjà gangréné ces membres de  l’intelligentia. Par ailleurs, il avait bien vite vu l’intérêt qu’il pouvait en tirer pour alimenter une œuvre majeure qui aurait l’effet d’un coup de tonnerre dans les milieux artistiques et intellectuels.   


    Le Zach militant avait accepté la situation et compris l’enjeu mais, le Zach amoureux souffrait en silence. Cependant,  sa jalousie avait été piquée au vif  par la relation particulière que Valentin entretenait avec William. Non seulement il s’agissait d’un auteur qu’il admirait secrètement mais, il pensait aussi que son ami avait perdu l’objectif de sa mission et qu’il risquait de succomber au charme sulfureux de l’écrivain. Pour contrarier cette issue qu’il pressentait,  il avait donc décidé de s’inviter dans le jeu. Il ne se doutait pas qu’il y perdrait ses rêves et ses illusions.     


    William se remémorait les différentes périodes  passées et se demandait comment il n’avait pas pu se rendre compte de la complicité évidente qu’il y avait entre les deux garçons. La facilité avec laquelle Zach était devenu son amant, sa transformation rapide de garçon timide et réservé en libertin assumé.  Il n’avait rien vu tant il était obnubilé par sa relation passionnelle avec Valentin.


    William comprit que la surprise de Valentin lors de la réception pour la sortie mondiale de son roman n’était pas feinte. Il était seulement en colère contre son ami et le manque de confiance de ce dernier. En fait, il avait pris conscience que Zach était très amoureux de Val, même s’il s’en défendait au nom d’une certaine idée de la liberté. C’était du genre n’appartient à personne comme cela tu peux appartenir à tout le monde. Un genre d’adage que Val appliquait à la lettre mais que Zach plus prude n’arrivait pas à mettre en œuvre aussi facilement. Ce n’était que la puissante force de son amour (et un peu aidé par quelques drogues désinhibitrices) qui lui avait permis de suivre la surenchère organisée par Val.      

    Donc, en véritable virtuose de la manipulations, Valentin le fin stratège, avait mené en parallèle une bataille contre William et une autre contre Zach. 

    Et, il avait remporté les deux haut la main puisque William était maintenant totalement déconsidéré comme écrivain anti-système et que Zach avait fini totalement à sa merci ayant perdu toute crédibilité comme leader du mouvement « Occupy Art ».

    Les deux garçons s’étaient d’ailleurs quittés peu avant la publication du livre de Valentin. Ce dernier ayant balancé perfide :  

    - Ton petit mouvement de bisounours indignés, ça m’a amusé, quoi ? Une minute.  


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