Chapitre 13

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Et c'est parti pour une nouvelle semaine de cours. Le week-end a connu tellement de rebondissements que je ne l'ai pas vu passer. J'ai l'impression d'avoir très peu révisé, ce qui me frustre, car je n'aime pas être en retard dans mon programme.

Quand j'arrive à la fac ce matin, je ne vois ni Elodie ni Simon. C’est donc toute seule que je me dirige vers le lieu où l'on se retrouve habituellement, je me laisse glisser sur le sol et j'ouvre un livre de cours.

Alors que j'allais me plonger dans quelques révisions, je vois, non loin de moi, un gros 4X4 blanc, type Range ROVER, qui se gare à la hâte. Un homme en sort et se dirige dans ma direction. Il ne me faut pas plus de temps pour reconnaître l’homme qui m’a menacé ce week-end, même de loin. S'il est venu vérifier l'effet de ses propos, il doit être déçu même pire : énervé. Il arbore un smoking noir et des lunettes de soleil opaque type aviateur. Ses cheveux bruns sont minutieusement plaqués par du gel ce qui lui donne un air encore plus sévère. Même à distance, il me terrifie. Mon corps se tend alors que je me relève pour l’accueillir.

Au même moment, Elodie et Simon se pointent, bras dessus bras dessous, le sourire jusqu’aux oreilles. Je les salue et fixe mon père du regard alors que je fais la bise à Simon. Bien qu’il soit à bonne distance de moi, je le vois rougir, ce qui ne présage rien de bon pour la suite. Il effectue un demi-tour et repart aussi vite qu'il est arrivé. Une chose est certaine, il ne veut pas mêler ses fils à cette histoire, sinon il ne se serait pas gêné pour venir m’affronter. Je sais, sans l’ombre d’un doute qu’il va me faire payer cet affront un jour ou l’autre. Reste plus qu’à savoir quand.
Alors que je pense encore à Samuel, Simon interromps ma rêverie.

- Tu vas bien, Cara ? S'inquiète-t-il en me fixant comme si j'avais quelque chose sur la figure. Tu as l'air d'avoir vu un fantôme.

Je reprends mes esprits et, puisque de toute façon Samuel sait à présent que je côtoie Simon, je décide de mettre mon demi-frère dans la confidence.

- On va dire que ça va, mais j’ai besoin de te parler, Simon.

Nous nous excusons auprès d’Elodie et je le prends à part pour lui raconter la façon dont notre père a débarqué hier pour me menacer et m'obliger à quitter la ville. Une fois mon récit fini, Simon est livide.

-Qu.. Quoi ? Non ? Il n'a pas osé ! Il... Il ...

Bon bah voilà, j'ai cassé Simon. Il sera l'avocat bégayant du barreau...
Il s’arrête trois seconde, reprends son souffle et retrouve finalement ses idées.

- Je ne vais pas laisser les choses se passer ainsi ! J'ai enfin retrouvé ma sœur, ce n'est pas pour que mon père me l'enlève à nouveau. Je vais prévenir Nate ! Annonce-t-il en commençant à sortir son téléphone.

Je suis flatté par son soutien mais je ne peux m’empêcher de le couper dans son élan.

- Je ne suis pas sûr que Nate soit la solution, dis-je en cherchant son regard ? Comment crois-tu que Samuel m’ait retrouvé ? Hein ?

Ses yeux s’écarquillent comme si je venais de dire la pire horreur qui soit.

- Cara, ne me dit pas que tu penses que Nate est derrière tout ça ?

- Je suis désolée, Simon, lui dis-je en haussant le ton. Je ne fais que recoller les morceaux et je ne pense pas que ce soit une simple coïncidence que Samuel débarque chez moi le lendemain même de ma rencontre chaotique avec notre frère.

Il s’écarte, visiblement heurté par mes propos.

- Tu sais, Cara, je me considère plus que chanceux d’avoir enfin pu te rencontrer. Mais tu ne peux pas prétendre des choses quand tu ne connais pas les personnes, me lance-t-il sèchement. Je connais Nate, mieux que personne d’autre, et je ne pense pas qu’il soit impliqué dans tout ça. Et s’il te plait ne m’oblige pas à entrer dans un bras de fer où il me faudrait choisir entre toi et lui.

Je pèse ses mots, et reprends mon calme. Je ne connais pas Nate, et il se peut qu’il soit mêlé à tout ça, tout comme c’est aussi possible qu’il n’y soit pour rien. Mais Simon a raison sur un point, je ne peux pas le mettre dans une situation qui l’obligerait à choisir entre mon jumeau et moi. D’autant plus que ce n’est absolument pas mon intention.

- Je suis désolée, Simon. Ce n’est absolument pas mon souhait de me mettre entre Nate et toi. Mais comment…

- Notre père à le bras long, me coupe-t-il, ne l’oublie pas.

Nate passant pour le suspect idéal, je n’avais pas envisagé d’autres options. Mais il est vrai que notre père ayant des contacts partout en ville, il n’a pas dû être difficile pour lui de savoir que je viens d’y poser mes bagages. D’un coup, je me sens honteuse d’avoir porté de telles accusations face à Simon.

- Je me sens tellement stupide, exprimé-je tout à coup en réalisant que je plongeais sans réfléchir dans le jeu de notre père. Je n’ai rien contre Nate en plus, au contraire, j’ai vraiment espoir qu’un jour il accepte ma présence. Mais tout se bouscule depuis mon arrivée et je suppose que j’ai fini par suivre bêtement des pistes au lieu de réfléchir.

Simon se radoucit et s’approche pour me prendre dans ses bras.

- Je n’ose même pas me mettre à ta place, Cara, me confit-il doucement. En revanche, je sais que même si Nate peut paraître froid parfois, il ferait n'importe quoi pour sa famille.

- Oui, mais le problème, c'est que là il s’agit de sa famille contre sa prétendue sœur corrigé-je amèrement. Je pense que son choix est vite fait.

Simon me repousse doucement en me faisant les gros yeux. Sa tête est si comique que j’esquisse un petit sourire.

- Arrête un peu de te mettre dans cette position de rejet. Tu es de notre famille, point final ! Trancha-t-il. Et quand il s'agit de notre père, Nate choisit toujours le côté opposé.

Il a beau tout faire pour me rassurer, je ne suis pas convaincue que mon jumeau renie notre père pour moi, mais je capitule face à Simon qui a visiblement une tonne d’arguments. Il connaît notre frère mieux que moi, après tout, alors je ne peux que me fier à son jugement.

- Si tu le dis, je n'ai plus qu'à te croire, finis-je pars dire.

Les portes du bâtiment s’ouvrent, mettant ainsi un terme au débat. Avec Elodie, nous nous séparons de Simon et nous rejoignons l'amphithéâtre.

Alors que je suis concentrée sur le prof qui parle, je reçois le SMS d'un numéro inconnu.

« Je t'avais dit de ne pas les approcher et de partir ! Maintenant prépare-toi aux conséquences ».

Ce message me fait l’effet d’une bombe. Il a beau ne pas être signé, je n’ai pas besoin de devinette pour savoir de qui il provient. Je suis dans tel un état de colère, que je n'arrive même plus à suivre le cours. Je ne saurais dire pourquoi, mais défier l’autorité de cet homme, qui n’a en commun avec moi que le chromosome X, me stimule autant que cela m’effraie. Je sais qu’il sera prêt à tout pour arriver à ses fins, après tout on parle de Samuel Lafont, un homme dont l’égo est trois fois supérieur à la superficie de Paris. Seulement, nul ne peut ignorer la loi, et même lui n’est pas au-dessus ainsi il ne risquera pas de tout perdre pour une fille qu’il a abandonnée il y a douze ans. Enfin, j’ose l’espérer.

À la pause de midi, je n'ai toujours pas digéré le SMS reçu plus tôt dans la matinée. Je passe par toutes les phases émotionnelles jonglant principalement entre un vrai état de rage contre cet homme qui ne cesse de vouloir pourrir ma vie et une profonde tristesse quand je pense à tout ce que je peux perdre à présent si je m’entête à poursuivre le combat.

Cela fait plusieurs minutes que l’on est assis dans le réfectoire avec Elodie et je n’ai pas décroché un seul mot. Je sais qu’elle a remarqué mon changement d’attitude depuis ce matin et je lui suis reconnaissante qu’elle n’ait pas cherché à me questionner. Du coup, elle s’acharne à faire la conversation en me parlant des cours et de nos camarades de promo. Lorsque Simon nous rejoint, je ne sais pas quelle attitude adoptée. Je suis perdue dans mes pensées quand Elodie m'interpelle.

- Cara, tu es avec nous ? Questionne-t-elle en claquant les doigts devant mes yeux. Je te trouve complètement ailleurs ce matin.

D’un seul coup, je me sens bien trop à l’étroit dans cet espace surpeuplé et bruyant. Je n’arrive plus à réfléchir et mes sentiments s’entremêlent. Je dois sortir.

-Heu... Pardon. Je... Je viens de me rappeler que j'ai quelque chose à faire, prétexté-je pour pouvoir m'échapper rapidement. On se voit plus tard.

Je me lève précipitamment et tente de me faire un chemin jusqu’à la sortie.

- Cara attend ! Cri Simon dans le réfectoire.

Il me suit et finit par m'attraper par le bras, ce qui stoppe ma course. Je me retourne pour que je lui fasse face. A cet instant précis je me rends compte que je n’aurais peut-être pas dû le mettre dans la confidence.

-C'est à propos de ce matin ? Je veux dire, de toute cette histoire autour de notre père ?

Bien que son regard soit chargé d’incompréhension, va voix est plus dure. J’ose à peine le regarder dans les yeux. En guise de réponse, je lui fais un signe de la tête, avant d’ajouter :

- Je suis perdu, Simon, avoué-je la voix tremblante. Je suis partagée entre ce que je désire plus que tout et les menaces de notre père que je ne peux évidemment pas prendre à la légère.

- On est grand, tu sais, constate-t-il, pensant que cela me rassurerait. On est libre de faire nos propres choix à présent. Et moi je ne tiens pas à te laisser fuir sous prétexte que l’homme qui nous a conçu pense avoir son mot à dire sur les relations que j’entretien avec les autres. Ecoute-moi Cara, on a déjà perdu douze années alors il est hors de question que je te regarde t’en aller sans rien faire. Je ne compte pas te perdre, une nouvelle fois.

Il a mis tant de désespoir dans ses paroles, que ces mots touchent directement mon petit cœur. Les deux mains posées sur mes épaules, il semble attendre patiemment ma réponse.

- Je ne tiens pas à te perdre non plus, dis-je finalement en retirant ses mains. Seulement, pour l’instant, j’ai besoin de temps et j’ai surtout besoin d’être seule.

Cette boule au ventre, qui ne me quitte pas depuis ce matin, s’agrandit sous le poids de mes dernières paroles. Je me détourne de lui et commence à partir dans la direction opposée, quand il lance violemment.

- Tu as raison, Cara, fuit et laisse-le gagner ! Tu es bien comme Nate, vous pensez pouvoir tout régler vous-même. Tu lui ressembles plus que tu ne le penses !

Inutile de le regarder pour savoir qu’il est en colère. Il a parlé si fort et tout le self l'a entendu et de ce fait tous les regards se tournent vers moi au fur et à mesure que j’approche de la sortie. Je décide de ne pas répondre et accélère espérant vite retrouver la raison et un peu d’air frais

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