Vampire et cliffhanger

4 minutes de lecture

Summer sautille sur place à l’idée du carnage potentiel. Il va y avoir du sang, des morts et de l’action, voilà qui egayerait son quotidien bien morne. En sa compagnie, Gorgory monte dans une carriole apprêtée par la jeune fille, à l’orée des bois et roule vers le Donjon à toute berzingue.

A l’entrée, des gardes cornues arrêtent le duo. Qu’ils sont laids, qu’ils sont franchement immondes, pense Gorgory en les dévisageant. De fieffés gobelins, bons pour le goulasch de dragon, voilà ce qu’ils sont. Si ça ne tenait qu’à lui, ils seraient déjà sur le sol, éventrés, le corps baignant dans une mare de sang noir. Heureusement, Summer lui coupe l’herbe sous le pied et répond la première.

- Halte, vous entrez dans la demeure du Suprême Vrykolakas, faites demi-tour ou…

- Silence sous-fifres. Nous sommes là pour trucider votre maître diabolique. Laissez-nous passer.

- Oh, d’accord. Suivez-nous, nous allons vous mener à lui.

Summer et Gorgory se regardent. Ce sont sans doute les gardes les plus inutiles du monde. Enfin, si leurs intentions sont sincères pourquoi faire les difficiles ? Dans le pire des cas, c’est un piège, alors…

C’est un piège !

Sitôt un pied posé dans l’enceinte du Donjon, une nuée de mirmidons débaroulent dans la cour, lance au poing, canines prêtent à poinçonner la chair de leurs invités. C’est oublié qu’ils ont affaire au héros de Larion, au tueur de dragon, Gorgory l’Etrangleur qui… a juste le temps de se baisser pour esquiver un violent coup de poing de Summer, dont la puissance étale à elle seule, une douzaine de gardes d’un coup.

Gorgory est soufflé par ce spectacle. La garce ne mentait pas lorsqu’elle prétendait être très forte. D’une nouvelle mandale, elle cartonne une tripotée de sbires incompétents, explose leurs boucliers et fracasse un mur de pierre comme une vieille planche de bois. A côté, la lame d’Arcane fait pâle figure.

Mais force surhumaine ou non, lame mythique ou pas, la voie est rapidement dégagée. Le duo peut donc foncer au pied des escalier du Donjon, le gravir par bond puis démolir la porte de la salle du trône. Sur celui-ci, tout en lame et rouille, sursaute le Seigneur des Vampires.

- Hé, lance-t-il.

Pas le temps de niaiser, Gorgory se précipite sur lui, lame en avant et l’embroche comme une merguez d’une soirée grillade. Les yeux du Vampire s’écarquille, puis son corps s’effondre raide mort.

Mission accomplie.

Au loin résonne les échos d’une clameur belliqueuse. Gorgory se tourne vers Summer, prête à en découdre.

- Vite ! Nous devons partir ! Ses serviteurs vont rappliquer !

- Mais pourquoi ? Deux-trois coups high kick et l’affaire est pliée…

- J’ai dit : On y va !

Et sans attendre de réponse, Gorgory saute par la fenêtre, une habitude chez lui. La chute est longue, la tour haute, pourtant c’est encore une fois sans fracture, ni décès qu’il se relève trois cents mètres plus bas. Summer atterrit à ses côtés, fracassant le sol par là-même. Sans perdre de temps, le duo s’élance dans l’obscurité, prenant connaissance de leur nouvel environnement au fil de leur progression.

Un cachot. Ils sont dans un cachot. Si c’en est pas un, les murs moites, visqueux et la présence de corps putréfiés enfermés dans des cages accrochées au plafond craquelé, correspond fichtrement à l’idée que Gorgory se fait d’un cachot. Tout juste, ne croisent-ils pas un savant fou sapé comme tel.

Très vite cependant, ils sont obligés de ralentir. C'est qu'on n’y voit goutte dans cette fichue obscurité ! Gorgory pousse un juron et assène un violent coup d’épée contre la surface la plus proche, en l’occurence une vieille table en ferraille. Soudainement, la lame s’illumine, fendant le rideau de ténèbres d’une aura mystique. Quelle qu’en soit la raison, si tant est qu’il y en ait vraiment une, le chevalier et Summer peuvent reprendre leur marche.

Le duo marche un moment en silence. Ils tournent, retournent, marquent un détour, rebroussent chemin puis tournent encore avant de finir dans un cul-de-sac. La moutarde commence à monter au nez de Gorgory. Un labyrinthe est le pire des affronts que la réalité puisse lui offrir.

- Summer, casse ce mur à coup de poing.

- Moi ?

- Tu vois quelqu’un d’autre la gueuse ?! Je t’ai vu déboîter 12 types en un coup, tu peux bien péter ce mur.

- Je ne suis pas sûr, tu sais…

- Silence et fais-le, mendiante !

Hésitante, jetant des regards inquiets en direction de son compagnon irascible, Summer s’approche du mur, en tâte brièvement la surface avant de le briser d’un vigoureux punch. L’onde de choc est puissante, au point de secouer toute la structure du cachot et sans doute aussi du Donjon, dont l’intégrité commence à se fissurer. Il est temps de partir et vite.

Nouvel enfilade de couloir. Au-dessus d’eux, un grondement secoue la pierraille. Cogner un mur porteur, n’était peut-être pas l’idée la plus judicieuse que Gorgory ait eu ses dernières heures, non qu’il en ait vraiment eu jusqu’à présent.

Enfin, ils finissent par déboucher dans une petite rotonde crayeuse, dénuée de coupole. En son centre, une plante exotique s’agite au rythme des secousses ébranlant la pièce. Gorgory ne compte certes pas parmi les plus intelligents de son espèce, mais il a la certitude que s’ils restent tout deux plantés là comme des plots, la mort va les cueillir sous forme de bouillabaisse bien saignante.

Sans trop réfléchir, pour changer, le chevalier s’approche de la plante. Il lui semble percevoir un son. Une sorte de mélopée. Oui, c’est ça un fredonnement émis par la plante, maintenant clairement mûe par une force surnaturelle. Le chant gagne en puissance, en magnétisme aussi. Gorgory est à deux doigts de poser une main sur la tige épaisse recouvert d’épine, mais Summer l’en empêche.

L’étrange plante semble émettre un soupir. La seconde suivante, les vibrations de sa mélopée font trembler la rotonde, pour prendre une forme tangible. Devant les yeux médusées du duo, un portail aux reflets azur se matérialisent lentement, grandissant à chaque seconde. Du moins l’ont-ils pensé, avant de réaliser, trop tard, que le trou de ver les aspire. Le sol est lisse, sans aspérité. Incapable de se raccrocher à quoi que ce soit, Summer et Gorgory sont aspirés vers un autre monde...

Annotations

Vous aimez lire Naethano ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0