Isabella (2)

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Elle m'aida à marcher jusqu'au lit.

« Repose-toi. T'as vraiment une sale mine.

– Merci, dis-je d’une voix fatiguée. »

Je m’allongeai sur le lit s'avérant inconfortable et plein de trous dans le matelas.

Je ne me posai aucune question sur la soudaine gentillesse d’Isabella, et pourtant j’aurais dû… Il fallait vraiment que je sois accroc à cette fille pour ne pas prendre mes jambes à mon cou !

D'ailleurs, je ne comprenais pas ce magnétisme. J'étais tout chose devant elle !

Quelques instants plus tard, je remarquai que la jeune femme s’était rapprochée d’un levier que je n’avais pas vu et qu'elle souriait d’un air malsain…

« La belle au bois dormant se réveille enfin ; je ne sais comment tu as réussi à dormir là-dessus. Moi, je n’y arrive pas. Probablement, car je sais que Claudia peut me jouer un sale tour si ça arrive.

– Ta sœur est aussi tordue que toi ? lançai-je.

– Le petit se rebiffe on dirait.

– Le jeu a assez duré ; je retourne au rez-de-chaussée.

– Essaie si tu peux, me jeta-t-elle en guise de défi. »

Je tentais de me redresser, mais des solides cordes liaient mes bras et mes jambes aux barreaux du lit. Je retombai lourdement sur le matelas et, après quelques secondes, tentai de me détacher, mais Isabella devait être une experte avec les nœuds.

Je me demandais comment elle avait pu me ficeler aussi facilement quand ma tête commença à tourner.

J’entendis au loin le rire de ma geôlière – qui se mêla à celui de Pauline –. Mon crâne partit en vrille totale, mais je me forçai à rester le plus calme possible.

Je jetai un coup d’œil machinal au plafond quand je remarquai des piques acérées ! J’en tremblai d’effroi et me débattis dans tous les sens.

« Tu comprends pourquoi je n’aime pas ce lit. Si Claudia voulait s’amuser un peu, je pourrais être à ta place. Rien que l’idée de ces piques me transperçant le corps… Quelle horreur !

Au fait, si tu te demandes comment j’ai pu te saucissonner, je vais être bon seigneur et éclairer ta lanterne. Le matelas est bourré d’opium ; c’est surement un de ces trucs de fakir ; c’est très utile pour nos victimes, déclara Isabella dans un grand éclat de rire.

Arrête de gigoter, ça sert à rien. »

Je n’étais pas le seul à m’être retrouvé dans cette position inconfortable !

« Bon, et maintenant que le spectacle commence, ajouta joyeusement Isabella. »

Elle pressa un bouton et les piques commencèrent leur longue descente. Centimètre par centimètre, elles se rapprochaient inexorablement !

Je tentais de ne pas céder à la panique, mais ce n’était pas facile ; les nœuds étaient résistants et cette folle attendait que je me fasse empaler avec impatience.

Désormais, les pointes n’étaient plus qu’à un mètre de mon ventre !

Si je ne trouve pas un moyen de sortir de ce lit, elles vont finir par me transpercer . Je dois trouver un moyen et vite.

Je me tortillai de plus en plus pour me libérer. En vain. Les liens mordaient la chair de mes poignets et chevilles. Pendant ce temps, Isabella vint s’asseoir à côté de moi, cependant en restant près du bord.

« Ne gesticule pas dans tous les sens, tu vas encore plus souffrir. Reste calme ».

Elle avança ses mains pour les passer dans mes cheveux, mais je la mordis sévèrement.

Elle recula, furieuse.

« Non mais, c’est quoi ces manières. Moi qui voulais te laisser une chance, car je te trouvais chou. Maintenant, je vais rester et te regarder lorsque les pointes te transperceront ! »

C'est alors que la voix de Donatella nous parvint.

« Isa, tu peux venir ?

– Non maman. Je suis occupée.

– Je sais chérie. Mais c'est urgent.

– Maman, tu sais bien que...

– C'est tonton Luciano. Il est venu spécialement pour toi, coupa Donatella.

– Tonton Luciano ? Il a quitté son île ?

– Puisque je te le dis. Il t'a apporté un cadeau, mais il n'a pas voulu m'en dire plus. Tu le connais, il est si mystérieux.

– Je descends tout de suite. J'ai hâte de voir sa surprise. Sa dernière en date m'a enthousiasmée : sa balade en mer du plongeur sicilien, pieds coulés dans du ciment, quel plaisir, ajouta l'adolescente à mon égard, pour me faire comprendre pourquoi elle aimait tant son oncle. »

Il semble aussi dingue que sa nièce !

Elle s’éloigna puis quitta la pièce.

Je me retrouvai seul face à ce piège… Comme j’étais de petite taille, Isabella n’avait pas pu m’attacher d’un bout à l’autre du lit et mes jambes étaient liées à une partie plus fragile du bois. En remuant, elles cognaient dessus et cette dernière commença à céder.

J’accélérai la cadence et bientôt je pus les dégager.

Restait le problème des bras. J’avais beau bouger dans tous les sens, les cordages tenaient bon et les pointes se rapprochaient de plus en plus… Cela ne servirait à rien d’avoir libéré mes jambes si je restais prisonnier par…

Avant de céder complètement à la panique, je décidai de placer mes cuisses près de la tête de lit, pour limiter les dégâts. Je réussis à m'asseoir et forçai sur le lit comme un malade. Mes efforts finirent par payer et le bois craqua.

Je tombai à terre et ce que je vis sous le sommier me provoqua un haut-le-coeur : le cadavre momifié du dernier occupant se tenait devant moi ! Je reculai d'un bond et me retrouvai contre le meuble. Machinalement, je posai une main sur le matelas.

Une pointe du ressort se planta dans ma paume et me sortit de la torpeur ; je roulai loin de ce lit de malheur !

J’étouffai un juron et me massai avec mon autre main pour atténuer ma souffrance.

« Putain de lit », marmonnai-je.

Au moins, j’étais vivant. Il ne me restait plus qu’à quitter cette salle, mais encore fallait-il que je trouve la sortie. Je fouillais la pièce de long en large lorsque je remarquai une petite porte vers laquelle je me précipitai.

Elle me mena vers une salle que je ne connaissais pas. La puanteur de celle-ci m’assaillit dès mon entrée. Je faillis retourner dans l’autre pièce, mais n’avais guère de possibilités : je n’avais pas envie de tomber nez à nez avec Isabella.

Je plaçai ma main indemne devant mon nez et parcourus l’espace. Je devais trouver d’où provenait cette odeur pestilentielle. Pour commencer, je cherchai l’interrupteur. Une fois la pièce éclairée, je repérai au fond une cabine en verre et m'y dirigeai.

Plus j’avançais vers celle-ci, plus l’odeur devenait insoutenable.

« Qu’est-ce que je vais trouver là-dedans ? » m’inquiétai-je.

La vue de l’intérieur me provoqua des gargouillis et je reculai précipitamment.

« Quelle horreur ! C’est pas possible. »

Je pris mon courage à deux mains et me rapprochai à nouveau de la paroi de plexiglas ; on aurait dit une cabine comme on en voit dans les fêtes foraines pour attraper les peluches ou autres babioles avec des pinces, sauf qu’à l’intérieur de cette dernière se trouvaient des restes humains.

Des nez, des oreilles, des yeux…

Au milieu de ce fatras, quelque chose gesticulait !

« Mais c’est quoi ça ? Il y a un animal là-dedans ? », m’exclamai-je en reculant une nouvelle fois.

Doucement, j’observai de nouveau à travers la vitre. Mes cheveux se dressèrent au vu du spectacle. La sueur coula de mon front et je tremblai comme une feuille.

À l’intérieur, une adolescente se débattait. La pauvre n’avait quasiment plus de lèvres ni de nez ; elle avait aussi perdu un œil et sur tout son corps de nombreux morceaux de chair lui avaient été arrachés.

Je ne pus m’empêcher de vomir sur le verre. Je me décalai pour m’appuyer sur la vitre, car mes jambes cognaient l'une contre l'autre.

Dans la précipitation, je cherchai un objet pour briser le verre. À force de fouiller, je découvris dans un coin une batte de base-ball.

Je saisis mon arme et prévins la fille de se reculer.

Ficelée comme elle l’était, la malheureuse ne pouvait pas faire grand-chose.

La paroi explosa et la recouvrit de bris de verre. Elle réussit tant bien que mal à se protéger le visage avec les mains. Je libérai alors la prisonnière.

Heureusement, l’autre cinglée avait décidé de jouer avec moi plutôt qu’avec elle.

« Merci, ânonna la victime.

– On va sortir. Ne t'en fais pas. »

Je soutenais la jeune fille jusqu’au milieu de la pièce lorsque j’entendis au loin les cris d’Isabella. Elle venait probablement de s’apercevoir que j’avais réussi à m’enfuir.

« Il faut te cacher, l’autre folle va revenir, murmurai-je.

– Pla...card, dit la jeune fille en me désignant fébrilement une porte coulissante.

– Alons y. Accroche-toi à moi. »

Tandis que nous entendions les hurlements d’Isabella, nous nous dirigeâmes vers le placard. J’ouvris la porte et laissai l’ex captive se cacher à l’intérieur.

« Je reviendrais te chercher plus tard quand la situation se sera calmée.

– Elise, hoqueta la jeune fille.

– Moi, c'est Fabien. Reste calme Elise. Je vais appeler les secours.

– Merci, souffla l'adolescente.

– Pas un bruit surtout. Ne panique pas si tu entends des pas. Elle ne sait pas que tu te caches là. »

Elise tremblait comme une feuille, mais approuva d’un hochement de tête.

Je refermai le dressing avant de quitter la pièce. Puis je rentrai dans la salle du lit infernal où Isabella m’attendait.

Elle me frappa d’un grand coup sur la tête avec je ne sais quoi !

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