le jump-look (partie 2)

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Cette fois, rien. J’avais beau regarder autour de moi et me concentrer sur les « sons ». Rien ! Le vide. J’étais surpris mais je ne devais pas le montrer à mes parents !

Quelques instants plus tard, Hélène revint parmi nous.

« Voilà, Zoé s’est endormie.

– Elle était vraiment fatiguée votre puce, ajouta ma mère.

– Ces derniers temps, elle est un peu malade, mais bon, ça va passer. »

Hélène voulait faire croire que la maladie de Zoé était bénigne mais personne n’était dupe. Surtout pas moi.

Pour changer de sujet, je décidai de questionner Hélène à propos du – comment il s’appelle ce pouvoir déjà ?

« C'est quoi ce train qui est passé devant moi à toute allure, tout à l'heure ?

– Laisse-moi t’expliquer : en fait le jump-look se caractérise par un son ou une image mentale assez forte. Chacun en a sa propre perception. Pour certains le son est associé à une image. On retrouve ce son, cette image ou cette combinaison pour commencer et pour finir un jump-look. Une petite précision : n’essaie jamais d’arrêter un jump-look. Celui-ci doit disparaître de lui-même. Sinon tu risques de graves lésions au cerveau. Ce pouvoir peut être dangereux s’il est mal maîtrisé.

– C’est rassurant ça !

– Avec toi, le risque est minime, j'ai confiance en toi. Le jump-look doit se terminer tout seul. C’est tout.

– D’accord. C’est noté.

– Je vais pouvoir servir le café maintenant, proposa Hélène.

– Il doit être passé, renchérit maman. »

*

C’est bizarre que le gamin ait autant de mal à se rappeler le nom du pouvoir. Ce n’est pourtant pas compliqué. Pour ma part, je ne sais pas si les lésions de ce jump-look pourront endommager mon cerveau. Péniblement, je tourne la tête de gauche à droite. D'un côté, un mur de briques rouges... De l'autre, derrière la baie vitrée, j’entrevois des sourires carnassiers et des regards luisants de folie : ils me glacent le sang. Je décide de replonger pour ne plus les affronter.

*

Hélène se dirigea vers la cuisine, sortit les tasses puis les remplit. Elle nous rejoignit avec un plateau.

« Un bon petit café et ça repart ! affirma notre hôte.

– Vous semblez plus en forme que tout à l'heure, répondit ma mère.

– C’est gentil à vous. Mais vous savez ce que c’est, entre le boulot et les enfants, je n’ai pas une minute à moi.

– Et la leucémie de votre fille. Vous vous en sortez bien, Hélène. Vous ne pouvez pas faire grand-chose de plus. Vous aimez votre fille, vous la soutenez, mais vous devez aussi penser à vous. Vous reposer, sinon vous ne tiendrez pas le coup, la prévins-je.

– Pour l’instant je préfère veiller sur ma fille. Pour mon repos, on verra ça plus tard.

– Restez forte. Tout va bien se passer. », l'encourageai-je.

*

"Je" tente de réconforter Hélène. Ce ne sera peut-être pas d'une grande efficacité, mais au moins la réaction est plausible pour un enfant de cet âge.

*

« Tu veux un autre verre de jus d’orange ? me demanda Hélène.

– Non merci.

– Tu veux que je te montre la chambre de Vivien ?

– Pourquoi pas.

– Pendant qu'il explore la chambre, vous pouvez regarder la télévision, termina Hélène.

– Nous aussi on aimerait visiter votre maison, répondit ma mère.

– Ah... Euh... Oui, bien sûr. Si ça vous dérange pas, ce sera pour une autre fois. Je n’ai pas trop le temps aujourd’hui.

– Alors pourquoi voulez-vous montrer la chambre de votre fils à Fabien ? questionna mon père.

– Vous savez la visite d’un enfant est beaucoup plus rapide. En fait je n’ose l’avouer mais c’est un peu le bazar dans la chambre, annonça Hélène, gênée.

– Ne vous en faites pas pour ça, la rassura maman.

– Promis, vous découvrirez la maison la prochaine fois. Aujourd'hui, si vous le permettez bien sûr, j’embarque votre fils. Il verra ainsi les jouets du mien.

– Je ne comprends pas trop votre obstination, mais après tout vous êtes chez vous, se résigna maman.

– C’est gentil à vous. En attendant, et pour vous remercier, je vais vous mettre notre dernier joujou technologique. Je suis sûre qu’il va vous plaire : c’est une immersion dans la réalité virtuelle avec télé 3D, casque ultra réceptif et tout le tintouin. Vous allez adorer l’expérience. Un bon film d’action, ça vous tente ? »

*

Et ils avalent ça aussi facilement. « Vous êtes chez vous donc vous pouvez embarquer notre fils et nous laisser ici comme des plantes. »

Je ne me laisserais pas avoir si facilement en tant que parent, j’aurais accompagné mon enfant.

« Aïe ! » hurlé-je. Je ne les ai pas vus revenir. Par surprise on vient de me planter une aiguille dans le bras. Un gros calibre. Elle me semble démesurée.

« Inspire. Expire. » Je me concentre sur ma respiration. Ma tête tourne. Mon cerveau a dû exagérer la longueur de la pointe. Je halète, ma gorge s'assèche. Je transpire. La sueur coule le long de mon corps. Pourtant, je frissonne. Ma vue se brouille : je n’aperçois que leurs ombres. Je les sens autour de moi. Je suis incapable de les distinguer, encore moins de les compter. Que vont-ils me faire ? Ils ouvrent et ferment mes paupières de plus en plus rapidement. Pourquoi me torturent-ils ainsi ? J’ai envie de hurler, mais aucun son ne sort.

Soudain, ils stoppent leur manège, puis l’un d’eux amène un verre d’eau. Il porte le liquide à mes lèvres. J’avale péniblement, mais ils me laissent le temps de terminer. Ensuite, quelqu’un d’autre prend mon pouls et sourit.

Il semble que je réagisse bien, car ils s’éloignent et ressortent. Si c’est pour me faire comprendre que je dois arrêter de commenter, c’est efficace. Ils m’avaient prévenu de ne pas interférer, mais c’est plus facile à dire qu’à faire…

Lors de leur premier souvenir, je ressentais moins les choses, je participais de loin à la vision, mais désormais je commence à ressentir les douleurs physiques et psychiques… J’ai beau me tortiller dans tous les sens, je suis fait comme un rat et je n’ai que peu d’options possibles. J’inspire profondément pour me calmer. Plus vite j’en aurai fini, plus vite ils me laisseront sortir. Du moins, je l'espère…


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