Fallin All In

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Se réveiller avec le soleil levant, elle dormant paisiblement sur son torse. Une sensation qu’il n’aurait cru ne vivre qu’une fois dans sa vie et pourtant, elle était bien de nouveau réelle. Son parfum sucré de cerise envahissait ses sens de la plus douce des manières et jamais au grand jamais il n’aurait voulu prendre le risque de perdre ce précieux cadeau. Son précieux cadeau. Il la regarda dormir paisiblement, son corps mince et dénudé, enveloppé dans la masse confortable et réconfortante de sa couette. Un sourire lui échappa ainsi qu’un petit ricanement… Et dire qu’au départ, ce n’était que pour l’histoire d’une nuit.

Une nuit où, après quelques verres attablés seuls à un bar non loin de son appartement, ils avaient échangé un regard qui avait scellé la fin de leur soirée.

- Sen, avait-elle marmonné, est-ce que tu penses que je suis si fade que ça ?

Parce que cette idiote s’était mis une absurdité pareille en tête après avoir essuyé un échec amoureux quelque temps auparavant. Elle n’avait certes pas eu le choix de le quitter, mais pourquoi, diable, irait-elle penser une chose pareille ?

- Tu sais très bien que non, s’était-il contenté de répondre avant de finir son verre de whisky et que la musique jazz du bar changeait de nouveau. Sinon je ne resterai pas avec toi.

Il avait tenté la plaisanterie tout en sachant qu’avec ce qu’ils venaient d’échanger silencieusement ça ne servait à rien. Ils étaient foutus, du moins pour ce soir. Cependant, la suite il ne l’avait pas vu venir. Quand elle avait fondu sans précédent sur ses lèvres, les capturant délicieusement malgré l’arôme amer d’alcool qui restait en fond, il avait été pris au dépourvu. Elle avait toujours aimé l’amertume d’un bon blue lagoon. Mais il avait savouré cet instant et lorsqu’elle s’était retirée, les joues rougies par son acte, il avait senti quelque chose craquer en lui.

- Désolée… Je n’aurai pas…

- Une seule nuit ? avait-il sorti de nulle part.

Elle avait retourné son regard dans le sien, ses pupilles écarquillées, parfaitement consciente, comme si l’alcool avait quitté tout son système. Ils savaient tous les deux que ça serait une parfaite excuse pour agir comme si de rien n’était le lendemain.

- Une seule nuit, avait-il repris en déposant son verre et ce qu’il devait pour leurs deux boissons. Soit mienne pour une seule nuit.

Elle n’avait pas hésité un instant, finissant le fond de sa boisson bleuté.

- Quand tu veux, je ne vois pas de soucis à ça.

Alors ils étaient allés dans son appartement, parce qu’il ne pouvait décemment pas la ramener dans ce vieux hangar au milieu de ses amis, et ils avaient fait l’amour toute la nuit. Sen ne s’était pas reconnu ce soir-là, mais jamais il ne le regretta alors que le corps délicat de Mizae glissait suavement entre ses mains, que sa bouche parcourait ce dernier pour créer, chez elle, des sons uniques. Sen avait toujours aimé la musique et le jazz, mais ce qui s’échappait de la bouche de cette femme céleste qui avait retourné son monde en quelques instants, c’était une mélodie divine et si pure.

Le lendemain, il s’était réveillé en tenant son corps chaud contre le sien et puis leur routine avait repris, comme si de rien n’était. Mais tout était différent en lui, dès qu’il posait les yeux sur elle, les images de ce soir-là ressurgissaient. Il se sentait coupable et se détestait de s’être mis dans une situation pareille puisque c’était lui qui avait proposé ça. Elle paraissait si normale, comme si tout était comme avant et rien de tout ça ne s’était passé. Ils savaient tous les deux que c’était faux.

Et puis hier soir, alors qu’il veillait sur son lit, fixant le plafond comme s’il lui apporterait une réponse, son téléphone avait sonné. Il l’avait ignoré une première fois, mais son regard ne cessait de descendre vers le petit engin électronique et dans un juron, il craqua pour s’en emparer. Son cœur fit un bond, ou deux, voire trois.

Mizae :

Tu me manques.

Il y eut un autre envoi quelques secondes après, alors que son regard ébahi fixait sans relâche l’écran.

Et pas de la façon dont tu devrais me manquer.

Sen comprit alors qu’on ne pouvait pas toujours contrôler ce qui ne dépendait pas de nous. Parce que lui aussi, elle lui manquait d’une façon dont elle ne devrait pas, mais bon sang, qu’est-ce qu’il voulait lui manquer ainsi. Il se redressa sans perdre de temps, conscient de tomber sans aucune barrière dans cette spirale dont il ne savait pas comment il s’en sortirait. Il se sentait comme un funambule coincé sur son fil avec la folle envie de sauter dans le vide pour voir ce qui l’attendait. Il ouvrit la porte de sa chambre à la volée et se rua dans l’immense salon du vieux hangar en travaux, provoquant le sursaut de quelques-uns de ses amis. Il ne prit pas la peine de s’expliquer plus longtemps et se rua jusque chez elle.

Son cœur tambourinait comme le tonnerre lorsqu’il sonna une première fois. Il s’était senti seul une grande partie de sa vie, avec un vide impossible à combler et lorsqu’elle ouvrit sa porte, ses longs cheveux châtains et ses grands yeux bleu-gris le remplirent instantanément.

Il n’attendit pas plus longtemps, il n’aurait pas pu. Son visage aux traits doux et rieur capturé entre ses mains, il embrassa Mizae comme si c’était la dernière fois de sa vie. Dans un doux gémissement, elle fondit dans cet échange en reculant pour les faire entrer et fermer la porte derrière eux. Les mains de la jeune femme glissaient sous les pans de sa chemise alors qu’il repoussait le gilet de ses épaules pour y avoir pleinement accès. Lorsqu’il s’écarta pour reprendre son souffle, leurs regards se croisèrent et il vit ses pupilles brûler d’un désir et d’un amour particulier.

- Toi aussi tu me manques d’une façon dont tu ne devrais pas, répondit-il finalement.

C’était ainsi qu’il se retrouvait de nouveau avec elle dans ses bras, un halo unique de douceur s’emparant d’eux. Il passa une main dans ses longs cheveux châtains et elle gémit doucement avant de relever son visage endormi vers le sien. Sen sourit. Du bout de son nez, il caressa le sien, jouant avec leur proximité, caressant la peau tendre de sa joue avec sa main. Parfois, leurs lèvres s’effleuraient et il sentait Mizae tenter de les capturer, mais il se reculait légèrement et elle soupirait en riant doucement. Leurs souffles se mêlaient avec joie, leurs cœurs battaient à l’unisson.

- Mizae, appela-t-il.

Elle ne répondit pas, il conclut qu’elle boudait de ces baisers qu’on lui avait refusés.

- Mizae…

Sa voix n’était qu’un souffle et un murmure, comme si le risque de parler trop fort changerait la rotation de ce monde.

- Hum, finit-elle par dire et il captura les vibrations de ce son dans ses lèvres.

Ravie, elle se redressa, sa main caressa son corps, lui provoquant des milliers de frissons. Elle faisait ressortir tant de versions de lui-même qu’il n’était même pas certain de pouvoir se reconnaître. Pourtant, il savait qu’il voulait les découvrir sans arrêt avec elle à ses côtés. Leurs lèvres dansaient sensuellement l’une contre l’autre avant qu’ils ne se séparent et qu’elle finisse par ouvrir les yeux pour tomber dans les siens. Alors, un sourire lui échappa et il ne sut pas si ça relevait de la vision qui s’offrait à lui ou de la confession qu’il s’apprêtait à faire.

- Je crois que je suis en train de tomber amoureux, souffla-t-il contre ses lèvres.

Voir ses joues rosir de plaisir agrandit son sourire. Elle glissa sa main dans ses cheveux blonds coupés au carré. Elle avait été une des seules à trouver cette coupe fantastique, lui l’aimait plus que tout.

- Ce qu’on est bête, répondit-elle. Moi je ne tombe que pour des hommes qui ne sont pas exactement ce qu’ils paraissent être.

- Ah ? fit-il joueur. Et qu’est-ce que je parais être ?

- Un innocent petit inconnu qui m’a payé un verre dans un bar de jazz, bien des mois auparavant.

Il rit et la serra un peu plus contre lui. Sa tête s’enfouit dans l’odeur suave et douce de ses cheveux, c’était ainsi qu’ils s’étaient rencontrés et dès le premier soir, leur alchimie avait été différente, au-delà de toutes espérances.

- Et qu’est-ce que je suis finalement ?

- Celui qui a retourné tout mon monde sans que je m’en rende compte.

Il y eu un silence durant lequel Sen savourait l’écho et le sens de ces paroles. Mizae s’accrochait à lui avec douceur, sa tête reposant toujours sur sa poitrine, les rayons du soleil envahissaient toujours plus la chambre de leur chaleur. Elle détestait les rideaux et avec cette vue, il comprenait pourquoi. Il se demanda un instant si elle s’était rendormie, mais les cercles que ses doigts tracèrent sur son ventre l’informèrent que non. Elle profitait simplement du moment, allongée au calme, près des battements réguliers de son cœur.

- Sen ? dit-elle au bout d’un long moment.

- Hum ?

- Soit mien. Soit mien et je serai tienne.

Il sourit en reconnaissant ses propres paroles, sa main caressa ses cheveux avec candeur alors que ses yeux fixaient toujours le soleil.

- Pour combien de temps ?

- Autant qu’on le voudra.

- Quand tu veux, je n’y vois aucun inconvénient.

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