****

3 minutes de lecture

Il leur fallut vingt minutes pour rejoindre la lisière de la ville à pied.

Vingt minutes d’un silence pesant qui semblait suspendre ce monde.

Nul bruit de vie sauvage ne venait perturber la cadence sonore de leurs pas. Nul vent ne venait leur siffler aux oreilles, sinon le souffle régulier de leur respiration.

Hêcate étudiait Miles et ses hommes. Le lieutenant imposait le silence radio. Aucun d’eux ne laissait transpirer le moindre signe de stress. Ils marchaient aux aguets.

L’absence de bruit et la chaleur lui tapaient sur les nerfs.

Putain de militaire, se surprit-il à penser.

À l’abord des premières constructions, ils envoyèrent les drones repérer les lieux.

Des rues vides.

Ils s’engagèrent dans la cité, le long d’une large avenue pourpre pavée de pierres taillées. Des bâtisses de toutes tailles, toutes rectangulaires, aux toits plats, aux façades crépies de rose, encadraient des rues perpendiculaires sans fin. Les murs des habitations, percés de portes et de fenêtres sans vitre, s’ouvraient sur des pénombres silencieuses.

Ils lâchèrent les drones sur la ville, les firent survoler les grands axes, entrer dans les bâtisses.

Personne.

Ils décidèrent de pénétrer dans les bâtiments, fouillèrent de fond en comble un bloc de quartier.

Pas âme qui vive.

Les intérieurs étaient étrangement dépouillés. Des couches, des tables, des chaises, quelques ustensiles en céramique brisés à l’usage inconnu étaient les seuls vestiges de vie relevables. Seul le rire sonore régulier d’un filet d’eau courante brisait le silence austère de ces foyers vacants. Partout, des signes d’une activité récente. Partout, des places qui donnaient l’impression d’avoir été désertées, vidées méticuleusement quelques minutes plus tôt.

Plantés au beau milieu d’une rue déserte, le lieutenant Miles et ses hommes s’ennuyaient ferme.

— Bon, que savons-nous d’eux ? s’enquit Hêcate auprès de ses trois compagnons.

Miles lui lança un regard impatient.

— Nous ne savons rien, capitaine Feal, sinon qu’ils se sont volatilisés.

— Vous vous trompez, lieutenant. D’après les bâtiments et le mobilier, leur taille et leur corpulence doivent se rapprocher de la nôtre. Ils possèdent des sièges, des tables. Nous en déduisons qu’ils sont bipèdes, ou du moins qu’ils marchent debout. Ils s’assoient et se couchent, tout comme nous. Leurs outils, bien que leurs usages nous semblent obscurs, indiquent qu’ils possèdent aussi des membres préhensibles similaires aux nôtres. Nous n’avons pas trouvé d’équipement technologique, mais tous les indices laissent penser qu’ils possèdent des compétences avancées en ingénierie. Ils ont l’eau courante en plein désert. Les rues sont propres. Ils possèdent sans le moindre doute un système de traitement des eaux. Les bâtisses sont hautes, bien construites, suivent des règles architecturales, un plan urbain. Les avenues sont larges, pensées pour le déplacement de véhicules. Et surtout, leur société est pacifiste, organisée et légiférée par des règles strictes.

— Et qu’est ce qui peut bien vous foutre cette putain d’idée en tête ? répliqua Miles, dépassé.

— Leurs constructions ne possèdent ni porte, ni fenêtre, ni fermeture quelconque. Ils ne protègent pas leurs biens. Le respect de l’autre fait partie de leurs valeurs fondamentales. Les crimes doivent être peu fréquents, sinon inexistants.

Miles regardait autour de lui, comme s’il cherchait à vérifier les propos d’Hêcate.

— Il n’empêche que l’hospitalité ne semble pas faire partie de leurs coutumes ! cracha-t-il, agacé.

— On les a peut-être effrayés ? suggéra Pirtz. On a dû faire un boucan d’enfer en atterrissant.

— Ils ont pu évacuer la ville... reprit Miles.

— Ou bien ils sont cachés, invisibles ? lança Letman, gagné par la panique.

D’un seul corps, les trois militaires portèrent la main à leur ceinture, à proximité de leur arme.

— Allons ! Allons, du calme ! intervint Hêcate. S’ils étaient invisibles et leurs intentions hostiles, il y a bien longtemps qu’ils nous seraient tombés dessus. Quant à votre stupide idée d’évacuation, c’est tout simplement irréaliste. Vous avez vu la taille de cette cité ? Plusieurs millions de personnes doivent vivre ici. Ils n’auraient pas pu fuir en un temps aussi court. Les rues sont vides. Où sont les véhicules, les biens, les outils, les machines ? Et ce qui me perturbe surtout, c’est que nous n’avons trouvé aucune trace de vivres. Rien du tout. Pas même des ordures. Ces êtres doivent bien se nourrir, pourtant.

— Ils sucent peut-être des cailloux, docteur ! railla Miles.

Hêcate ne releva pas l’affront. Son cerveau emballé cherchait des réponses logiques.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 7 versions.

Vous aimez lire Mick ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0