Chapitre 7: La main du protecteur

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Les jours suivants, j’étais si déprimée que je ne voulais plus sortir de la maison.

Heureusement, Cal qui avait remarqué mon humeur matinale, avait décidé de me tenir compagnie.

Je ne voulais pas la mêler à tout cela mais elle n’était pas dupe et elle voyait bien que quelque chose n’allait pas.

Alors au lieu de rejoindre ses amis dans la cité, elle décidait de rester avec moi.

Et je dois bien avouer qu’elle avait réussi à me remonter le moral.

D’après elle, elle m’avait concocté un programme pour me rebooster.

Nous passions une bonne partie de la journée à nous entraîner dans le sous-sol de la villa. Elle m’emmenait également dans tous ces endroits sur Avraska plutôt réservés aux « jeun’s » pour employer ses termes. Et plus tard, elle décidait également de m’accompagner au palais de l’Echénox car selon elle, rendre visite à Carlisle me ferait le plus grand bien.

C’est elle qui avait organisé de A à Z toute cette journée et à vrai dire, je n’avais pas mon mot à dire, car dès que j’ouvrais la bouche pour lui dire que je préférais rester chez moi, la petite me réprimandait…

Les rôles étaient inversés. En temps normal, je ne l’aurai pas laissé faire, mais cette fois-ci cela m’amusait.

Finalement, je dois bien avouer que sa petite remise en forme m’avait fait le plus grand bien et j’oubliais très vite cette histoire avec Bragg qui m’avait tout de même bien miné le moral.

Dès qu’elle était en âge de combattre, je me rendais bien compte que la petite avait tout pris de moi alors que je n’étais pourtant pas sa mère. Elle avait hérité de mon fichu caractère et elle me tenait tête continuellement. Cependant, elle ne dépassait jamais les limites car elle savait très bien qu’il n’était pas bon que je me mette en colère.

Elle faisait tout pour m’impressionner et voulait absolument faire tout pour que je sois fière d’elle. Mais elle n’avait pas besoin de faire cela car comme une mère pouvait être fière de ses enfants, je l’étais tout autant de Cal qui était devenue ma fille de cœur.

Elle était si forte et elle était tellement courageuse.

Elle était toujours dans l’optique de développer ses aptitudes au combat et de s’améliorer. Si bien qu’un jour elle nous demanda à Thraän et moi, l’autorisation d’affronter Taneck, le favori du Général qui était également devenu son ami.

Thraän accepta évidemment, moi également mais je n’étais pas rassurée à vrai dire. Car je savais ce que la petite avait dans le ventre. Elle était hargneuse et n’aurait laissé aucune chance au pauvre Taneck.

Le combat entre ces deux-là s’était déroulé dans une des grandes salles d’entraînement.

Les seigneurs avaient tenu à être présents ce jour-là. Il y avait également d’autres spectateurs dont mes filles et les recrues de Thraän.

Avant même que le combat ne commence, je faisais remarquer à celui-ci que nous n’aurions pas dû autoriser Cal à affronter Taneck mais Thraän semblait plutôt sûr de lui.

Alors en attendant le début du duel, je demandais à la petite d’être indulgente avec son adversaire tout en la briefant.

— Je sais que tu es ravie à l’idée de prouver ta valeur à tous ces gens, mais rappelle-toi qu’il s’agit là d’un entraînement. Taneck n’est pas ton ennemi. Ne t’écarte pas de l’objectif !

Cal se met à rire.

— Dame Anna, n’ayez crainte ! Je vous promets que je ne l’abîmerai pas…

Je souris à mon tour. Elle rajoute juste après : « Peut-être un petit peu quand même… »

Je grimaçais et souriais à ses âneries avant de lui dire de filer rejoindre son adversaire.

Une vingtaine de minutes plus tard, Taneck était à terre. Et Cal ressortait victorieuse de ce combat.

Elle avait dit vrai. Elle n’avait pas amoché le malheureux, enfin « pas trop » !

Les seigneurs semblaient ravis par les progrès de Cal et ils me le faisaient rapidement savoir.

Décidément, cette petite m’impressionnait de jour en jour.

Cal s’était sûrement mise en tête qu’elle arriverait à me faire oublier ce chagrin qui me rongeait depuis tant d’années.

Je dois bien avouer que grâce à elle, ma vie avait changé.

Mais toute cette souffrance intérieure m’empêchait d’aller de l’avant. Je n’avais pas la force de me battre et surtout plus l’envie.

Sa petite manœuvre avait certes marché quelques temps, mais très vite, ces vieux démons avaient décidé de me rattraper. Ce jour-là, j’étais bel et bien arrivée à un point de non-retour…

S’il y a bien une chose que je ne supporte pas, ce sont bien ces soirées mondaines.

J’ai déjà répété je ne sais combien de fois à Kirah et aux garçons que je ne souhaitais pas y participer, mais jamais, ils ne m’ont fait cet honneur. Et au contraire, à chaque fois, j’étais évidemment conviée à ces événements organisés par « Sa Majesté » Carlisle.

Cette fois-ci, je n’ai pas fait d’effort vestimentaire car je me rappelle de ma dernière soirée avec Bragg où j’avais mis le paquet et qui s’était traduite par un échec monumental…

Une chose est sûre, on ne m’y reprendra plus !

J’ai juste cette cape qui recouvre mes épaules. Les cheveux coiffés en queue-de-cheval, un peu de maquillage et le tour est joué.

Ce soir, nous fêtons les quatre cent trente-cinq « printemps » d'un des notables de la cité, rien que ça ! Et évidemment tout le gratin y est invité.

Après avoir descendu quelques-unes de ces coupes aux boissons bien corsées, je rejoins Kirah et les autres. Bragg n’est pas avec eux et tant mieux !

Dès mon arrivée, ils m’observent tous d’un air suspicieux.

Ok… j’ai peut-être un peu abusé sur la boisson, mais pas la peine d’en faire tout un plat ! Et puis, j’ai peut-être un peu trop bu, mais comme d’habitude, je contrôle ! ou presque…

Thraän m’observe avec ce regard sévère. Il se sent toujours obligé de me dicter ma conduite. Quant aux autres, j’ai l’impression qu’ils ne sont pas ravis de me voir là, mais je fais comme si de rien était.

Soudain, alors que je m’apprête à prendre la parole, cette voix retentit juste derrière moi.

— Mais que vois-je… Cette chère Anna… cela faisait longtemps !

Je me retourne sur-le-champ et j’observe cette femme.

Elle est plutôt jolie, blonde, élancée et très sophistiquée. Je ne sais pas pourquoi, mais sa présence m’insupporte déjà…

— Est-ce qu’on se connaît ?

Elle esquisse un sourit.

— La rumeur était donc vrai… Pauvre Thraän, ils ont fini par cramer le cerveau de ta protégée... Oh ! j’en suis sincèrement navrée, dit-elle avec ironie.

Thraän s’apprête à ouvrir la bouche, mais évidemment je n’arrive pas à me contenir. Et ce qu’elle vient de dire m’a un tantinet mis hors de moi.

Je m’approche d’elle avec ce regard noir de colère.

Elle doit sûrement craindre ma réaction et avance à reculons.

— Je ne sais pas qui tu es et je m’en fiche éperdument, mais si je peux te donner un conseil, fais bien attention à toi si tu ne veux pas que je m’occupe de ton cas ! La protégée de Thraän est morte ! Continu de me provoquer et ce serait bien la dernière fois !

— Anna, cela suffit ! crie Thraän. Quant à toi Deniziah, je te demande de te retirer. Je pensais avoir été clair la dernière fois ?! rajoute-t-il désappointé.

Celle-ci n’a pas dû apprécier la façon dont il vient de lui parler.

— C’est cela ! Je devrais peut-être m’en aller… Quelle serait la réaction de mon père, le Haut Conseiller Narvhïn, s’il apprenait que cette sauvage a tenté de m’agresser ? dit-elle en me dévisageant.

A ce moment-là je me retiens pour ne pas lui bondir dessus.

Puis elle s’adresse au Général : « Pauvre Thraän, toi ? fréquenter ce genre de personne…comment as-tu pu tomber aussi bas ? »

Elle me dévisage à nouveau et s’en va rapidement.

Je sens très vite que l’ambiance est tendue par ici alors je préfère m’éclipser. Je pars en direction du buffet.

Je saisi une autre coupe et j’avale une gorgée.

— Tu es encore ivre !

C’est la voix de Thraän. Avec son tact légendaire, il essaye de me remettre à ma place. Mais évidemment, mon impulsivité reprend le dessus !

Je me retourne.

— Et alors ? Qu’est-ce que ça peut te faire ? On m’a invité à une fête ! J’ai le droit de m’amuser, non ?

— Et si je n’avais pas calmé les choses ? Tu l’aurais agressé comme ça devant tout le monde sans aucun scrupule ?

— Tu étais pourtant là… ce n’est pas moi qui ai commencé !

Je sens la colère monter en lui. Thraän n’aime pas que je lui tienne tête, mais il n’aura jamais le dernier mot !

Heureusement, je dois bien avouer que les Tanelyah m’ont sauvé la mise à cet instant précis, car j’ai bien senti qu’il n’en avait pas terminé avec moi.

Elles ont décidé d’aller faire un petit tour dans le jardin alors je préfère les suivre. Les filles passent devant.

Thraän attrape mon bras et m’oblige à rester.

— Tu es ivre alors que la soirée vient à peine de commencer !

— Pardon ?!

— Tu as très bien entendu !

— D’un, je ne vois pas de quoi tu parles ! De deux, j’ai passé une horrible journée et de trois, tu me fais mal. Alors par pitié, ne t’y mets pas et laisse-moi profiter tranquillement de cette soirée ! Et puis… Je n’ai pas de compte à te rendre !

— Peut-être, mais tout le monde s’inquiète pour toi ! Et puis, n’oublie pas que tu as été la responsable du royaume avant de céder ta place à Carlisle. Que penserons nos hôtes quand ils te verront dans cet état ?

Puis il rajoute d’une voix remplie de dégoût : « Regarde ce que tu es devenue ! »

Je le regarde d’un air niais et je joue de l’ironie.

— Je m’en fiche ! Je me fiche de ce que vous pensez tous ! Et ne me dis plus jamais ce que j’ai à faire !

Il me relâche et me laisse partir.

Thraän observe Anna qui s’éloigne. Celui-ci semble désespéré.

Mais après cette petite dispute avec Thraän et plus tard dans la soirée, je décidais de faire exactement tout le contraire de ce qu’il me reprochait.

Je saisissais à nouveau l’une de ces coupes, une autre puis encore une autre. Et sans m’en rendre compte, je ne me suis même pas aperçu que je sombrais un peu plus dans mon chagrin…

Je fais bande à part. Pendant que j’observe les filles en train de danser, mon regard se pose sur cet homme et cette femme qui semblent très complices. Je bois une autre gorgée et je continue de les observer.

Celui-ci tient sa dulcinée par la taille. Elle semble aux anges. Ils semblent très amoureux, tout comme Edhän et Kirah qui se tiennent un peu plus loin devant moi.

Mais ce qui vient de m’attrister, c’est cette famille que j’aperçois là-bas.

Je m’imagine à la place de cette femme. J’ai l’impression de me voir aux cotés de Thraän et de William. J’envie profondément ces gens, car je sais que jamais cela ne m’arrivera.

Et puis tout à coup, les mots de Thraän résonnent dans mon esprit. Il a raison. Je me rends à l’évidence, qu’à présent, je ne suis plus rien ! La Anna qu’il a connue, n’existe plus.

Les idées noires viennent de refaire surface. Pourquoi cette tristesse ne me quitte-t-elle pas ? Pourquoi ai-je l’impression d’avoir perdu ma joie ? Pourquoi ?

Je décide de quitter l’endroit. Je me rends dehors dans un autre jardin du palais. J’observe autour de moi. Par chance, la cour est vide.

Je me rapproche de la balustrade et j’observe l’horizon quelques secondes.

Ces pensées négatives envahissent à nouveau mon esprit.

Et si passer à l’acte était le seul moyen de me libérer de tout ça ?

Je n’aurais plus à subir les remontrances de Thraän. Je n’aurais plus à fuir Bragg et les autres… J’irais rejoindre tous ces gens que j’ai perdu. J’irais rejoindre William et nous pourrons enfin être réunis.

Je penche la tête de l’autre côté de la balustrade. La hauteur m’impressionne, mais au point où j’en suis, je crois que je suis capable du pire. Les larmes envahissent mes yeux.

— Anna, est-ce que tout va bien ?

C’est la voix de Bragg. Au moment où je décidais de sauter par-dessus bord, il venait me rejoindre.

J’étais pourtant seule. M’aurait-il suivi ?

Je me lance alors dans un petit discours imprévu.

— Et si je n’étais pas passée dans l’une de ces machines ?

Je crois que je ne contrôle plus rien. Je souris involontairement, puis je reprends d’une voix affligée : « C’est la vérité ! Je ne suis plus rien, regarde ce que je suis devenue… »

— Ne dis pas cela Anna et puis pourquoi fais-tu allusion à tout cela ?

Je reviens à moi. J’essuie mes larmes avant qu’il ne se rende compte de ma faiblesse.

— Pour rien…

— Anna, je sens bien que ça ne va pas, mais tu dois rester forte !

— Pourquoi ?

— Pour moi ! Et pour les autres ! Tout le monde s’inquiète pour toi…

Je me tourne vers lui. Je souris à nouveau.

— Vous n’avez pas besoin de vous inquiéter, je vais très bien !

Bragg est la dernière personne que j’ai envie d’écouter. Après tout, il m’a abandonné. Notre relation n’est plus ce qu’elle était et je ne vois pas en quoi ses conseils pourraient bien m’aider.

Je n’ai plus rien à faire ici. Je le laisse là et je quitte l’endroit.

Au loin, Thraän la suit du regard.

Je traverse la ville à toute vitesse. Je n’ai pas envie de m’éterniser ici. Mais soudain une idée plus que farfelue me traverse l’esprit.

Je me rends au débarcadère.

Arrivée là-bas, j’observe l’horizon et cette chute qui se déverse dans le néant.

Je ne sais pas ce qu’il y a en bas.

A en croire les légendes, certains disent que la chute conduirait vers un autre monde et d’autres pensent qu’elle nous rapprocherait des êtres perdus.

Je ne sais pas exactement ce que je cherche, mais une chose est sûre, je ne peux pas continuer ainsi.

Je m’approche un peu plus près du bord. Je me débarrasse de la cape qui est encore sur mes épaules. Je la jette par-dessus le muret et je la regarde flotter dans l’eau.

J’enjambe le muret et je me mets debout. Je n’ai pas du tout d’équilibre alors j’ouvre mes bras de temps en temps pour ne pas chavirer de l’autre côté.

Et puis au moment où je m’apprête à passer à l’acte, quelque chose me persuade du contraire…

Je ne sais pas ce qui est en train de se passer, mais à cet instant je repense à tous les bons moments, même s’il y en a eu peu.

Je pense aussi à ma petite Caldénys. J’ai juré de veiller sur elle. Que deviendra-t-elle lorsque je ne serais plus là ?

En l’espace de quelques secondes, toutes ces pensées m’ont envahi et je ne suis presque plus tentée de mettre fin à mes jours.

Mais alors que je tente de faire marche arrière, mon pied glisse sur la rambarde. Je ne contrôle plus rien. Je tombe inévitablement de l’autre côté.

Je nage pour rejoindre le bord mais le courant est beaucoup trop fort. Je cris de toutes mes forces pour que quelqu’un me vienne en aide. Je lutte de toutes mes forces pour ne pas sombrer, mais il est trop tard. Je n’arrive plus à faire le moindre geste. Je suis emportée par le fond. Je bloque ma respiration, mais je suis beaucoup trop paniquée pour faire quoi que ce soit.

Mes paupières s’alourdissent, ma respiration diminue, le froid commence à m’envahir...

Soudain, alors que la jeune femme avait rendu son dernier souffle, une main protectrice vint la rattraper de justesse avant qu’elle ne s'aventure dans le néant.

J’ouvre les yeux et je tousse. J’observe l’homme qui se trouve juste au-dessus de moi.

— Thraän ? dis-je d’une voix frêle.

Il semble essoufflé et a du mal à se remettre de ses émotions.

— …

— Qu’est-ce que tu fais la ?

Je me relève, lui également.

— Je t’ai suivi !

— Tu m’as suivi ?! Sérieusement ? Tu te prends pour qui ?

Ce que je viens de dire n’a pas dû lui plaire.

Il me plaque contre la rambarde et semble très en colère.

Je n’arrive pas à me débattre. Je n'ai plus de force alors je l’écoute sans broncher.

— Je ne t’ai pas ramené sur Nosfuria pour que tu finisses de la sorte !

Ma parole ! Des larmes envahissent ses yeux. Est-ce que mon esprit n’est pas en train de me jouer des tours ?

— Et moi je ne t’ai rien demandé ! Tu aurais dû me tuer lorsque tu en avais l’occasion ! je lui hurle.

Je crois que je l’ai énervé encore plus. Il exerce une certaine pression sur moi et m’empêche de bouger.

— A partir de ce soir, puisque tu es incapable de faire les bons choix, tu m’auras constamment sur le dos ! Tu ne vivras plus et je te garantis que ta vie sera un véritable enfer !

— Et après ? Qu’est-ce que ça va changer ? De toute façon, tu l’as dit toi-même… regarde ce que je suis devenue ! Je ne suis plus rien à présent !

Je ne tarde pas à me mettre à pleurer. Je voudrais tant que tout cela s’arrête.

Thraän me relâche.

Je suis si ivre et avec ce qui vient de m’arriver, je ne tiens plus debout. Je m’effondre à terre et je continue de pleurer.

Thraän se baisse. Il me prend dans ses bras et me serre contre lui.

— Anna…

Je n’arrive pas à m’arrêter. Je sanglote comme une fillette. Mais je ne sais pour quelle raison, sa présence me rassure. J’aime être tout contre lui alors qu’il y a encore quelques secondes, j’étais prête à l’étrangler !

— Je sais ce que tu penses de moi ! Je sais ce que vous pensez tous mais c’est plus fort que moi, je n’y arrive pas ! J’ai essayé mais c’est dur ! Je pense à toutes ces choses… elles ne veulent pas sortir de ma tête, je n’en peux plus…

— Anna… je sais ce que tu endures depuis toutes ces années, mais tu ne peux pas te laisser aller de la sorte. Viens avec moi à présent, rentrons !

— Je ne veux pas rentrer chez moi ! Cette maison est bien trop grande et…

— Chut… viens avec moi…

Thraän m’aide à me relever.

Nous marchons jusqu’au téléporteur où se trouvent les sentinelles. Et de l’autre côté, nous rejoignons sa demeure.

— Je ne devrais pas être ici… dis-je d'un air hésitant.

— Je sais, mais si je te laisse seule tu risquerais à nouveau de mettre fin à tes jours... Je n’ai pas envie d’avoir ta mort sur la conscience ! dit-il avec une légère pointe de sarcasme.

Je le regarde, mal-à-l’aise.

« Attends-moi ici, je vais chercher de quoi te changer. » rajoute-t-il.

J’observe le salon qui n’a pas changé. J’observe tout autour de moi et j’ai cette impression étrange de me sentir comme chez moi alors que cela fait une éternité que je n’avais pas mis les pieds ici.

Il revient et me tend une couverture que je place sur mes épaules et quelques vêtements qui lui appartiennent : « Tiens, ça fera l’affaire… »

— Mais…je ne vais pas porter tes vêtements ! Et puis si quelqu’un me voyait ici, Joline n’apprécierait pas de…

— Joline n’est pas sur Avraska ! Personne ne sait que tu es ici. Et quant à ces vêtements, c’est juste pour la nuit. Les tiens auront bien le temps de sécher d’ici-là…

Je soupire car je suis très gênée.

Thraän, la personne avec qui il ne se passe pas un jour sans que je m’engueule avec est encore une fois en train de me sauver la mise. Ma fierté en prend un sacré coup !

Il reprend : « Il est tard, je monte me coucher. La chambre que tu occupais autrefois est libre. Tu peux t’y installer. Je ne te montre pas le chemin…

Très embarrassée par la situation, je baisse la tête puis je la relève.

— Merci !

Il esquisse un petit sourire.

Je monte l’escalier et je fini par regagner cette fameuse chambre.

J’enfile la chemise que Thraän m’a donné. Je m’assois sur ce lit en suspension et j’observe encore autour de moi. Je n’ai que très peu de souvenirs, mais j’ai l’impression de revoir certains épisodes de mon passé dans cet endroit. Je ne peux pas rester ici.

Je quitte la chambre et je regagne celle de Thraän.

Il fait sombre et à première vue, il ne s’est pas encore endormi.

— Pourquoi tu fais tout ça pour moi ?

— Anna ? Tu ne dors pas ?

— Non, je n’y arrive pas !

— Tu devrais… il est tard…

— Tu n’as pas répondu à la question ! Pourquoi ?

Il se redresse et s’assoit sur son lit.

— Y’a-t-il une raison particulière pour sauver la vie de quelqu’un ou venir en aide à une personne qui en a besoin ?

— Tu es sûr qu’il n’y a rien d’autre ?

Je dois en avoir le cœur net.

— Certain !

J’ai l’impression qu’il dit vrai.

— …

Sur ces mots, je savais désormais qu’il n’avait aucune ambiguïté là-dessous. Thraän avait agi par devoir et non par amour.

Nous passions la nuit à discuter de tout et de rien comme de bons vieux amis et je finissais par m’endormir à ses côtés.

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