Exploration...

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Aucun bruit, aucun sifflement ne dénonçait la moindre présence.

Pourtant, cette puanteur animale était si présente qu’il avait l’impression de mordre dans le cul d’un Yack.

Rowald sentait battre son cœur à coups sourds, dans sa poitrine, dans ses tempes.
La peur s’insinuait dans ses veines tel un serpent rampant vers sa proie.

Il secoua la tête pour se concentrer et se força à avancer.

Au mur, des torches rendues inutilisables par leur degré de pourriture avancé, fixées à des porte-flambeaux situés à un mètre cinquante du sol, prouvaient qu'au moins à une certaine époque, des êtres doués d'intelligence, de taille humanoïde, avaient vécu ici.

D’autres plus élevées lui faisait craindre qu’il n’y’avait pas eu que de petites gens.

Grâce à son infravision il explora la pièce, mais ne découvrit qu'une veille chaîne rouillée et brisée, des os rongés dont il ne tenta pas de déterminer la provenance et une vieille paillasse d'où provenait l'âcre odeur de moisi et de fauve.

S’en approchant, compte tenu qu’elle était vide, il posa sa main sur la paille écrasée et grimaça en sentant la faible chaleur résiduelle qui en émanait.
Contrairement à ses espoirs, il n’était pas seul.

Sur les murs, ça et là, de larges taches couleur rouille s'étalaient. A n'en pas douter du sang séché.

Deux portes s'offraient à lui. L'une labourée de griffes et entrouverte, l'autre plus ou moins intacte.

Sa gorge était sèche. Que n'aurait-il pas donné pour une nouvelle chopine de bière ?

Il grogna et poussa du pied la porte entaillée. Elle s'ouvrit sur un large hall en pierre d'où deux escaliers massifs taillés pour des géants menaient aux étages supérieurs. Aucune lumière, aucun signe de vie ne transparaissaient.

* La demeure de la mort elle-même doit ressembler à cet endroit.* pensa-t-il.

Aucune source de chaleur, pas même un insecte ou un nuisible n'était visible.

Rowald rajusta son sac, puis affermissant sa prise sur le manche de bois de son arme, commença à explorer la grande salle.

Cinq nouvelles portes s'offraient à lui dont, derrière lui, le double battant gigantesque qui devait ouvrir sur l'extérieur.

Se dirigeant vers la plus proche, il sentit le bois vermoulu s'effriter sous ses doigts et tomber en poussière.

Se reculant vivement, il ne put s’empêcher de tousser et frémit à l’idée que la bête pourrait l’entendre.
Après être resté immobile quelques secondes, n’ayant rien perçu, il reprit son exploration.

A sa droite, une table massive, accompagnée de six chaises dont deux renversées, portait encore les reliefs d'un antique repas. Un squelette, apparemment humain, était avachi sur un plat, ses bras l'entourant comme si dans sa dernière demeure il avait voulu emporter quelque chose de ce monde. Près des deux chaises à terre gisaient d'autres os, les uns éparpillés les autres pelotonnés dans la position fœtale.

Chacun d'eux détenait à l'annulaire de la main gauche, un anneau qui malgré la ternissure due à l’âge, ne pouvait être que de l'or. Rowald s'en empara et fourrant deux d'entre eux dans son sac, il glissa le dernier qu'il avait eu du mal à extraire à son propre doigt.

Levant les yeux, il prit la mesure du reste de la pièce taillée à l'image de géant. Une énorme table de pierre qui faisait bien cinq mètres de haut trônait en son centre, trois bancs de granit l'entouraient. Sur le côté un énorme coffre de six mètres sur quatre disparaissait comme tant d'autres meubles, sous une épaisse couche de poussière, mais pas un squelette de géant ne vint confirmer ses doutes.

Aucune fenêtre, aucune ouverture ne donnait sur le monde extérieur.

Dans le fond de la pièce une tache blanchâtre attira son attention.

S'approchant précautionneusement, il eut la surprise de découvrir, les os d'un minuscule dragon à deux têtes. Ses crocs étincelaient et à son cou un collier et un morceau de chaîne brisée pendaient. Ses griffes de métal plongeaient dans la pierre. Le reste de son corps disparaissait dans le mur de roche.

Un malaise s’insinua en lui. Il soupçonnait de la sorcellerie mais n’y connaissant rien en sciences occultes il ne pouvait aller plus loin dans ses réflexions.

Il ne fallut pas longtemps au nain pour découvrir le passage secret par lequel l'animal avait tenté de passer. Avec un grincement de crypte la pierre qui faisait dix fois sa taille racla le sol et pivotant découvrit un escalier noir et sombre.

Rowald résistant à la tentation de descendre immédiatement, décida d'explorer auparavant les pièces du rez de chaussée.

Laissant le passage ouvert afin qu'un peu d'air frais y pénètre, il sortit de cette salle et revint sur ses pas pour aller jusqu'à la suivante.

Là, se tenaient les fourneaux et des plats en quantité, le tout recouvert de la même couche de poussière.

Deux tas d'os blanchis se trouvaient dans un coin de la salle recouvert de haillons, de hautes échelles conduisaient jusqu'au plafond et puisque celui-çi se trouvait à une bonne dizaine de mètres.

Les murs étaient recouverts d'étagères supportant diverses denrées, certaines pétrifiées, d'autres ratatinées, le reste inidentifiable ou méconnaissable.

Il n'entra pas, se contentant d'observer les dégâts depuis le seuil.

La pièce suivante était un dortoir. De même dimension que la précédente, les lits de tailles humaines, disposés sur cinq niveaux auraient pu accueillir une cinquantaine d'humains, mais seuls une dizaine d'entre eux étaient occupés par des squelettes.

Rowald grogna une fois de plus en se lissant la barbe.

Leur mort avait été foudroyante, ça puait la magie à plein nez.

Une furieuse envie de fuir le démangeait, fuir, prendre les jambes à son cou, mais il ne pouvait reculer.

Pressant le pas, il poussa la dernière porte. Il s'agissait en fait d'un râtelier d'armes pour géants.

Le plus petit poignard était aussi grand qu'une épée longue et de beaucoup plus lourd et plus massif. Il aurait pu à la rigueur se servir d'une des flèches comme d'une lance, mais n'aurait pas été capable de la soulever. Il repartit maussade.

Le passage était toujours ouvert. Il scruta un instant les ténèbres, sans rien y déceler d'anormal et allait descendre lorsqu'il lui sembla que le squelette du minuscule dragon avait bougé une de ses têtes. Il secoua la tête et se morigéna.

* C'est impossible ! C’est la peur ! Montres ce que tu as dans le ventre nom d’un nain ! * pensa-t-il.

Après avoir vérifier la fixation de son arme à sa ceinture, il descendit en se laissant glisser le long des marches car chacune d'elle atteignait facilement un mètre de haut et qu'une mousse sombre et duveteuse les recouvraient partiellement. Pour ne pas tomber mieux valait jouer la carte de la prudence et non celle de la témérité. En bas l'odeur d'humidité et celle de putréfaction était beaucoup plus forte.

La descente lui parut durer une éternité. Un relent de moisi s'insinuait à travers tous ses pores, imprégnait ses vêtements, et lui donnait la nausée.

Arrivé en bas, il buta sur un cadavre recroquevillé dont certains lambeaux de chair étaient encore accrochés aux os.

Un large couloir où deux chariots auraient pu se croiser sans soucis s'ouvrait devant lui.

Rowald reprit en mains sa hache et poursuivit. Une centaine de mètres plus loin, une grille lui barrait le chemin.

Un levier fixé à six mètres était levé. Même en lançant un grappin celui-ci n'aurait eu aucune prise.

Comment franchir la herse, il n'y avait que ce seul chemin. Si on lui avait demandé ce qui lui permettait de l'affirmer, il n'aurait su quoi répondre, mais c'était pourtant la seule possibilité et au fond de lui il le savait.

Rowald en était là de ses réflexions lorsqu’avec force de grincements, craquements et gémissement de pierre et métal la grille se leva d'elle même.

Avec un sursaut, il grogna. La vieille veillait au grain. Elle tenait à son caillou. C’était en lui une certitude.

Aspirant une grande bouffée d'air il la franchit. Le couloir se poursuivait.

Il n'avait pas fait trois pas que la herse s'abattit d'un mouvement sec derrière lui.

Il sursauta, et crispant de nouveau ses poings sur sa hache, il rentra la tête dans ses épaules et poursuivit son chemin.

Deux cents mètres plus loin, le gigantesque couloir se partageait en deux autres, identique au premier abord de par la taille, mais dont celui de droite semblait plus sombre et plus chaud que l'autre.

Rougeoyant; il renvoyait des bouffées de souffre.

Rowald n'avait pas le temps de s'arrêter pour explorer tout à sa guise, ce qui lui importait était de trouver rapidement cette fichue pierre et de retourner à "La Lance de Feu" consommer son marché. Avant de très vite oublier tout ça.

Il s'enfonça donc dans celui de gauche et parcourut encore une centaine de mètres avant de déboucher sur une gigantesque grotte qui semblait s'enfoncer dans le sol, d'une vingtaine de mètres de haut, parsemée çà et là de stalactites.

Une cinquantaine de cercueils, de sept mètres de long sur quatre de large, en pierre, surmontés chacun d'une statue représentant un chevalier couché, étaient alignés.

D'armures et d'armes identiques, seul leur traits et le pommeau de leurs épées les distinguaient les uns des autres.

Rowald resta un instant pétrifié devant cette crypte de géants à traits humains, il sentit sa gorge se serrer et ravala péniblement sa salive.

Le tunnel se poursuivait à l'autre bout de la pièce, plus loin, bien trop loin.

Afin de l'atteindre, il lui fallait descendre une nouvelle fois une longue volée de marches, traverser les gisants et en remonter la moitié. Il grommela et haussa les épaules.

Il s'apprêtait à ranger sa hache pour s'exécuter lorsqu'une forme grisâtre se matérialisa devant lui, revêtue de la même armure que les statues. Elle tenait à la main une épée de flamme. Son visage aux orbites vides exprimait une froide colère.

- Qui ose déranger le repos des chevaliers ?

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