Mea culpa.
Je tiens, bien entendu, à présenter mes plus sincères excuses au personnel des Directions départementales de l'Équipement (DDE) que ma récente intervention vocale en public, pourtant susurrée avec retenue pour moi-même seule, aurait pu blesser.
C’est une grotesque méprise qui, montée en épingle par des factions adverses — peut-être les A.D.B. (Amoureux Des Barrières) ou encore les F.D.R. (Fanatiques Des Rubalises) ? — mine fortement ma réputation jusque-là intacte.
D’après ces fallacieuses allégations, j’aurais, alors au volant de ma DS7 hybride, interpellé d’innocents éléments de sécurité disposés sur la voie publique par une interjection fort dépréciative. Du personnel humain — certainement désœuvré, n’avait-il aucun autre travail à faire que tendre l’oreille ? — m’aurait entendue alors crier : « Sales cônes ! ».
C’est absurde. En quoi aurais-je été motivée pour m’exprimer ainsi ? Pourquoi ces pauvres cônes auraient-ils mérité pareille haine ? Étaient-ils sales, maculés de la boue présente sur la chaussée ? C’est sûrement leur triste sort, et la responsabilité de leur état physique dégradé incombe alors entièrement au personnel occupé à ne rien faire, pourtant présent pour balayer la voie souillée que j’empruntais (note pour moi-même : leur suggérer de traverser la rue pour trouver un vrai travail).
Étaient-ils vieux ou laids ? Que nenni ! Et dans ce cas, d’ailleurs, il eût été plus pertinent d’user de « Vieux cônes » (ou « Vieilles cônes », si vous voulez) ! Mais je n’ai rien dit de tel et, croyez-moi, personne ne peut m’accuser d’être gérontophobe — ni moi, ni mon tendre époux, qui est mon plus fidèle soutien.
La raison de ce malentendu ? C’est bête comme chou : je rentrais ce soir-là bien fatiguée d’une de mes missions de bienfaisance (de l’humanitaire désintéressé chez les vendeuses en maroquinerie de luxe, toujours sous pression, les pauvrettes ; et je les aide à atteindre leurs objectifs). J’avais donc, pour oublier un peu tous mes soucis (beige ou taupe ? Croco ou agneau glacé ?), pris la liberté de fumer une de ces petites cigarettes coniques si amusantes, emplies d’herbes mystérieuses qui font rire et apaisent.
Mais ! Patatras ! Voilà qu’un Giléjone — certainement alcoolisé — au volant de son véhicule nauséabond (certainement Crit’Air 6, d’ailleurs : allez, oust !) freine devant moi sans prévenir ! De mes lèvres pourtant closes (même si j’ai parfois des difficultés à les maintenir ainsi ; satanée clinique esthétique : on ne trouve plus de bons chir’ de nos jours), s’échappe alors la cigarette !
Vous avez compris : ce petit cône incandescent atterrit irrémédiablement entre mes jambes et commence à mettre le feu à ma jupe (une pièce unique de chez Courrèges). Je n’ai pu me retenir et, oubliant toute décence, j’ai crié : « Sale cône ! », et cela en direction de ma culotte en feu.
Ayant ouvert la fenêtre pour évacuer l’épaisse fumée, ma voix a porté, et ces deux mots ont pu être entendus par des oreilles innocentes, et ainsi mal interprétés.
Je vous prie donc de cesser immédiatement tout harcèlement : je suis innocente.
[Mes avocats ne manqueront pas de poursuivre quiconque mettrait en doute ma version, au titre des articles R.610-1 à R.654-1 du Code pénal, section 1 : De la diffamation et de l’injure non publiques (articles R.621-1 et R.621-2).]
Mais je le redis : je n’ai rien fait. Mais on ne sait jamais. Il faut le dire. Vous êtes prévenus. Juste une mise en garde.

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