Chapitre 14 - Anchor

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Quoi ! Attends ! C'est elle qui était visée. Qu'est-ce que c'est que ce bordel, putain ? Je fronce les sourcils en signe d'incompréhension, mes frères aussi.

— Enfin, poursuit mon p’tit chat, c'est bien lui qui était visé, mais pas parce qu'il est l'un des vôtres. Pas parce qu’il est un Sons of Hell.

On se regarde tous sans comprendre. Mais, de quoi elle parle ?

Il s’en est pris à lui parce qu'avec Nina, ils sont tout ce que j'ai. C'était pour m'atteindre moi. Me faire céder. Pour que je vienne ici, aux États-Unis.

— Attends. Pourquoi vouloir te faire venir ici ? demande Shadow, perplexe.

— Parce qu'il vit ici, dit-elle agacée. Parce qu'il s'imagine… Parce qu'il pense…

À ses mots, je me tends. Quoi ? Qui, bordel ?

— J'ai été conne, crache-t-elle en rogne. Très conne. Je l'ai sous-estimé. Je pensais Hunter à l'abri parmi vous, justement parce que c'est un Sons, un ex-SEAL. Je croyais qu’il ne craignait rien, qu’il était hors de portée, parce qu'il ignorait où il était. Mais, il a dû retracer les déplacements de Nina et…

— Attends, tu crois qu’il m’a fait suivre ? l'interrompt Stormy, alors que mon p’tit chat acquiesce.

— Mais comme tu étais protégée par une équipe de sécurité, il ne pouvait rien tenter, alors...

— Quoi ! rugit Stormy, ahurie. Tu me faisais surveiller ? Et sans rien me dire ! Putain, Bri !…

— Je sais, la coupe mon petit chat. Je suis désolée. Tu peux être en colère et m'en vouloir, mais ta sécurité passera toujours en priorité Nina. Si tu avais su, tu aurais agi différemment et il aurait trouvé un moyen de t’atteindre.

Elles s'affrontent du regard quelques secondes sans rien dire. Et finalement, Stormy rend les armes dans un soupir. Putain. Je regarde mes frères, on est tous sur le cul.

— C'est tout ? hallucine Jam. Tu ne l'insultes pas, ne lui casses pas les dents ? On n'a même pas le droit à un peu de sang ? Putain, Stormy t'es malade ? lance-t-il, alors qu'on se marre tous.

— Connard, lui répond-elle en lui tendant son majeur.

—Ah ben voilà, dit-il moqueur. Putain. J’ai eu peur.

Mon p’tit chat sourit par réflexe. Et bordel, ce qu’elle est belle. Mais son sourire n’atteint pas ses yeux. Elle est ailleurs. Préoccupée. Après quelques minutes de silence, le Près' le brise.

— Qui ? gronde-t-il. Son nom.

— C’est de ma faute. Je suis tellement désolée, murmure-t-elle. J’aurais dû…

Nous restons silencieux, suspendus à ses lèvres. Elle aurait dû quoi ? Qu'est-ce qu'elle aurait pu faire ? Bordel ! Peu à peu, le masque tombe et la carapace se fissure. Les larmes au bord des yeux, elle s'en veut. Mais de quoi ? De la taule pour Hunter ? De connaître l'enfoiré qui l'a piégé ? De ne pas l’avoir arrêté ? De quoi bordel ?

— Arrête, tu n’y es pour rien, tranche Stormy. Et toi, lance-t-elle au Près', la délicatesse, tu connais ?

— Autant que toi apparemment, rétorque Jam avec un sourire carnassier.

Le Près' grogne pendant que Stormy fusille Jam des yeux et que mes frères se marrent. Moi, je ne peux quitter ma belle du regard .

Ça m'arrache le cœur et les tripes de la voir comme ça. Se torturer. S'en vouloir. Culpabiliser. Elle est méconnaissable. Bordel. La souffrance et une profonde tristesse impriment son visage. Elle passe une de ses mains derrière sa nuque. Elle semble tellement épuisée et abattue. La douleur sur ses traits, dans sa voix, me déchire. Putain, j'ai la rage. Si je tenais l'enfoiré qui la met dans cet état, je le buterai sans hésitation. Je ne peux pas. Je ne peux pas la laisser comme ça.

Je m'avance vers elle, m'accroupis et percute ce regard d'un bleu profond dans lequel je pourrais me noyer. Elle contient ses larmes, en vraie guerrière. Mon coeur se fend et sans réfléchir, je la soulève du fauteuil, m'assois et la dépose sur mes genoux. Sans un mot, je la prends dans mes bras. J'en ai besoin. J'ai besoin de la serrer, de la sentir contre moi.

Je glisse ma tête dans son cou et m'emplis de son parfum. J'espère que ma présence a le même effet que la sienne sur moi :, qu'elle l'apaise, la rassure. Je me rends compte que j'ai jamais eu à rassurer une femme de toute ma foutue de vie. Que j'en ai jamais eu besoin. Et encore moins envie. Elle est la première. Et bordel, je ne sais pas faire. Je voudrais que sa peine et sa douleur disparaissent, mais je ne sais pas comment. Alors, je l'embrasse doucement dans le cou et la serre un peu plus fort. Elle pourrait me repousser, me virer. Mais au contraire, elle se love contre moi.

— C'est moi qu'il veut, assène-t-elle d'un coup, tendue, sous les regards surpris de mes frangins. Il s'imagine que je vais lui revenir, que lui et moi c'est encore possible. Hunter est juste un moyen de pression, une manière de me punir et de me faire venir à lui. Un dommage collatéral pour servir ses intérêts. Il savait que je me battrais pour lui, que jamais je ne le laisserais être condamné. Comme je l’aurais fait pour Nina.

Bordel de merde ! Je prends ses mots en pleine gueule. Mon corps se tend sous la colère. Qui, bordel ? Qui ? Qu'elle lui revienne ? La punir ? Mais de quoi ? Qu’est-ce qu’elle a bien pu faire ? Je croise les regards de mes frères qui sont aussi largués que moi. Un excès de possessivité me prend à la gorge. Personne ne la touchera à moins de vouloir crever dans la seconde. Personne ne l'approchera, peu importe ce qu’elle a pu faire.

Merde. Depuis quand je suis possessif moi ? J'en ai rien à foutre des nanas d'habitude. Je les baise et adieu. C'est quoi ce bordel ?

— Ok, souffle-t-elle d’un coup. Je connais effectivement la personne qui l'a piégé, continue-t-elle en regardant le Près'. Je le connais même très bien. J'ai partagé sa vie. Enfin, si je puis dire...

Putain de merde. Mon connard de palpitant vient de se fracasser dans ma poitrine. Elle a eu un mec. Bordel. Et elle a même partagé sa putain de vie. Une foutue relation sérieuse. En même temps, tu l’as regardée, mec ? me souffle une voix dans ma tête. Qui ne voudrait pas de cette nana ? Elle est bandante, hyper sexy, intelligente, brillante, a de l’humour, du caractère et des tripes... Bordel. Attends. Il la veut. Il veut la récupérer. Et la punir. Mais de quoi ?

Je fronce les sourcils face à ces questions, quand d'autres surgissent avec la violence d'une bonne droite en pleine gueule. Est-ce qu'il lui manque ? Est-ce qu'elle l'aime toujours ? Est-ce qu'elle va le rejoindre ? Je suis à deux doigts d'exploser, quand mon p'tit chat dépose ses mains sur mes avant-bras. Le contact de sa peau avec la mienne m'électrise et j'oublie tout. Y'a plus qu'elle et sa peau douce, plus qu'elle et ses doigts qui tracent machinalement les contours de mes tatouages. Je suis parcouru de frissons. Putain, que c'est bon.

Je savoure la sensation de ses doigts caressant ma peau. Je n'ai jamais connu la douceur. La seule dont je me souvienne, c'est celle de ma mère. Après sa mort, plus rien. Le néant. Mon enfoiré de paternel était à l'opposé. Certes, il n'a jamais levé la main sur mes frères et moi, mais il n'en avait pas besoin. Nous n'existions pas pour lui. C'est moi, qui me suis occupé d’eux. À dix ans, j'ai dû devenir un homme.

Alors cette caresse, elle me fait un putain de bien. Elle apaise ces foutues blessures. Je ne pensais pas que c’était possible. Jamais une femme ne m’a caressé comme ça. Avec douceur, tendresse, sans vouloir obtenir quoi que ce soit de moi. Je réalise que je n’aurais toléré ça d’aucune autre. Trop intime. La proximité, les caresses, les câlins, c’est réservé à ceux qui ont des sentiments. Et moi, j'ai appris, très tôt et à mes dépens, qu'ils étaient la pire des faiblesses.

Pourtant, mon connard de palpitant tape comme un dingue, comme s'il n'attendait que ça pour se réveiller, pour se remettre à battre. J'inspire profondément avec cette sensation de ne jamais avoir vraiment respiré avant ça, comme si je l'attendais, elle. Bordel oui, elle. Je savoure la caresse de ses doigts, dessinant sur ma peau et m’arrachant des frissons. À cet instant, rien n’existe, sauf elle. Et cette connexion entre nous. Je ne veux pas que ça s'arrête. J'attrape son autre main et entrelace nos doigts. Et putain, j’aime ça. Être avec elle. Près d’elle. Comment c’est possible ?

— Notre histoire s'est mal terminée, continue mon p’tit chat, me ramenant à la réalité. Surtout pour moi.

D'un coup, les images me percutent avec la délicatesse d'un tank et défilent devant mes yeux. Bordel de merde. Je me tends. Le dossier. Les comptes rendus médicaux. Les photos. C'est lui. Putain. Bri, méconnaissable, le visage tuméfié. Son corps, contusionné. Les fractures. Bordel de merde. Il a osé la toucher. Une bouffée de rage m’envahit sans que je n'y puisse rien. Je vais tuer ce bâtard. Je lève les yeux et croisent ceux de mon Près' et VP, on est d'accord.

— La dernière fois que je l'ai vu, nous confie-t-elle, j’ai fini à l’hôpital. Ce n'était pas la première fois que ça arrivait, mais ça a bien failli être la dernière… Il m'a laissée pour morte sur un trottoir en pleine rue.

Mes frères s'agitent, grondent et jurent. La colère m’aveugle. Je n'entends plus rien, ne vois plus rien. Les images tournent dans ma tête, s’impriment sur ma rétine et collent des envies de meurtre. Lui, cognant Bri. Toujours plus fort. Elle le suppliant d’arrêter. Bordel. Je me lève brusquement. La rage pulse à mes tempes. Plus rien ne compte. Il faut que je sorte d'ici avant de fracasser quelqu'un. Je me dirige vers la porte du bureau. Des insultes fusent, mais je ne les entends pas. J’en ai rien à foutre. Les images redoublent de violence. Les insultes. Les coups. Plus forts. Plus durs. Défigurant son sublime visage. Meurtrissant sa peau douce. Brisant son corps à se damner. Putain. Je vais crever cet enfoiré.

Une fois dans le couloir, j’appuie ma tête contre le mur d'en face. J'entends les cris de Bri. Ses supplications. Puis, plus rien. Juste du sang. Beaucoup de sang. Bordel de merde. Je crève d'envie d'enfourcher ma bécane et d'avaler du bitume pour me calmer, mais me barrer en plein Conseil restreint, le Près' m'éclaterait la tronche.

La haine m'enserre la gorge et la broie. Il aurait pu la tuer. Il a failli la tuer. Et il veut la reprendre. Qu’elle revienne. Plutôt crever. Il a eu la chance de partager sa vie. D’être près d’elle. De pouvoir prendre soin d’elle. Et il l’a cognée. Fils de pute. Je m'écarte du mur et balance mes poings jusqu’à ce que les jointures cédent et pissent le sang. Mais je ne sens rien. Je n’ai qu’une seule chose en tête, putain. Le buter. Il l'a touchée, tabassée à mort et laissée comme un clébard sur un putain de trottoir. Je vais le tuer. Et je prendrai tout mon temps. La mort serait encore trop douce pour cet enculé. J’imagine toutes les manières de le faire, lorsque la voix de Shadow et sa main sur mon épaule me ramènent au présent.

— Chaque chose en son temps mon frère, me dit-il comme s'il lisait dans mes pensées. Je comprends ta colère et la partage, comme tous ici. Mais là, elle a besoin de toi. Pas d'un autre connard. Regarde-la, m'ordonne-t-il en l'observant par la porte du bureau. Fière. Digne. Courageuse. Elle s’est faite méchamment tabasser et pas qu'une fois. Tu crois vraiment qu'elle se sent en sécurité, ici, entourée de mecs dans notre genre ? Pourtant, elle est là. À nous parler, alors qu'elle ne nous connaît pas. Tout ça parce qu'elle a une confiance aveugle en notre frangin et Stormy. Elle a des couilles mon frère. C'est une guerrière. Une amazone. Et elle t'a laissé l'approcher. Alors, déconne pas putain.

Les mots de Shadow font leur chemin jusqu'à mon foutu cerveau. Merde. Il a raison. J'ai réagi comme un con. J'ai pas pensé deux secondes à elle. À ce qu'elle pouvait ressentir. Bordel. J'entre dans le bureau, Shadow sur les talons. Le regard noir de Stormy m’arrête, alors qu’elle caresse le dos de mon p’tit chat assise dans le fauteuil, la tête entre les mains. Et merde. Mes frères l’entourent et se défient silencieusement pour savoir lequel la prendra dans ses bras le premier. La colère ressurgit. Qu’ils aillent tous se faire foutre. Hors de question que l’un d’eux la touche.

Je m'approche rapidement, alors qu'ils s'écartent. Mais, elle a un mouvement de recul quand elle m’entend et ça me fout en l'air. Je ne veux surtout pas qu’elle ait peur de moi. Putain, je suis trop con. Lorsqu’elle relève la tête et que je croise ses deux saphirs, ils me transpercent. Mon palpitant rate quelques battements et repart de plus belle. Je me sens con, en rogne et vulnérable. J'ignore ce qu'elle lit dans mon regard. Mais moi, sa douleur, sa souffrance, son chagrin me percutent. Je suis sûr d'une chose : elle a connu l'Enfer. Et bordel, plus jamais. Plus jamais, je ne veux lire ça dans ses magnifiques yeux. Je voudrais la prendre dans mes bras, sentir son parfum, sa chaleur, l'embrasser et lui faire oublier tout ça. Je voudrais lui murmurer qu'elle est en sécurité, qu'on la protégera.

Mais quand ses yeux descendent sur mes phalanges explosées et couvertes de sang, l'éclair de déception et de colère qui les traverse, me glace. Mon putain de coeur se serre dans ma poitrine, prêt à exploser. Bordel. J'ai déconné. Vraiment déconné. Soudainement, je comprends mon frangin. Ses inquiétudes. Sa colère. Ses doutes. Sa frustration. Sa peur. Ses regrets. Elle se détourne, se rassoit bien droite et demande au Près' si on peut reprendre, ce qu'il accepte sans broncher. Fais chier. Mes frères se redressent et me regardent inquiets. Ils ne m'ont jamais vu comme ça. J'essaie de me calmer, mais je bous. Je ne perds pourtant jamais le contrôle. Mais depuis que je l'ai vue, c'est le bordel. Mon corps. Ma tête. Tout est hors de contrôle, y compris ses foutues émotions que j'avais réussi à enterrer jusque là. Elle débarque et c'est la merde. Sa présence fait péter toutes mes défenses et fout un beau bordel.

— À mon réveil, reprend-elle imperturbable, j'avais été admise à l'hôpital sous un pseudonyme. Nina s'était chargée de tout. Bref, on avait disparu des radars, ce qui m’a permis de me sentir en sécurité.

— Qu'on se comprenne bien, assène Stormy en rogne. Si ce connard n'a pas voulu la tuer, c'était drôlement bien imité ! Elle a failli y passer. Trauma crânien avec hématome sous dural. Deux côtes fracturées. Perforation du poumon gauche. Éclatement de la rate. Fractures maxillo-orbitales et nasales. Fracture de l’avant-bras et tibia droit. Il l'a massacrée. Elle a passé plus de quinze jours dans le coma. J'ai bien cru que j'allais la perdre. Et putain, si j'avais croisé cet enfoiré, on n'aurait pas cette discussion. Je lui aurais arraché la tête.

Le bâtard. Il s’est vraiment défoulé sur elle. Elle a failli y rester. Cette idée tourne dans ma tête et me file la rage. J'ai envie de tout exploser. Je me retiens, le corps tendu à l’extrême. Une chose est sûre, cet enfoiré ne l'approchera plus.

— Je savais que lorsque je sortirai, il serait parti pour les États-Unis, intégrer le prestigieux cabinet d'affaires de son père. J’ai naïvement pensé être libre et pouvoir tourner la page.

— C’est pour ça que t’es jamais venue ici, lâche le Près', comprenant ce qu’elle fuyait et pourquoi.

— En effet, confirme-t-elle. Le fait de savoir qu'un océan nous séparait, était rassurant.

Bordel, quand Hunter l'apprendra, il va carrément péter les plombs. Savoir que ce mec l’a, non seulement cognée, mais à failli la tuer et qu’en plus, c’est à cause de lui qu’elle ne foutait pas les pieds ici... Putain, il va le pulvériser.

— Hunter ? demande le Près' qui a sans doute pensé la même chose.

— Non, répond mon p'tit chat. Personne ne savait jusqu'à… mon hospitalisation. Et jusqu'à aujourd'hui, juste Nina.

— Quand il va le savoir, ça va être un putain de carnage, lâche Rift.

— Ouais, ajoute Deep, ça va pas être beau à voir.

C'est clair. Bordel, son pire cauchemar. Qu'un mec touche à son ange. Je croise le regard de mes frères, de Shadow et du Près'. Ouais, ça va être un beau merdier.

— C'est à moi de lui dire, affirme mon p'tit chat.

— Vaut mieux, tranche Stormy en regardant le Près', si on veut limiter la casse.

Ouais, c'est mieux. Mais, ça ne l'empêchera pas de péter les plombs, de le traquer et de le torturer jusqu'à ce qu'il en crève. Et il pourra compter sur moi pour achever cet enfoiré.

— Si tu n'avais plus de nouvelles, pourquoi maintenant ? demande Shadow.

— Je croyais après ce qu'il avait fait que le message était clair, que lui et moi c'était terminé. Mais visiblement, nous n'avons pas la même conception du mot "rupture".

Attends, quoi ? Comme moi, mes frères hallucinent. Jam et Deep crachent sur ce bâtard. Moi, je jouerai bien à la roulette russe avec sa tronche au bout du canon.

— Une fois sortie de l'hôpital, j'ai commencé à recevoir des mails. Il disait que je lui manquais, qu'il avait hâte que je le rejoigne. J'ai donc changé plusieurs fois d'adresse mail, sans résultat. Il a toujours réussi à se la procurer. Je n'ai jamais répondu. Mais j'aurais peut-être dû…

— Tu crois que lui répondre aurait changé quelque chose ? questionne Shadow.

— Peut-être. Je ne sais pas. Tout ça est un jeu pour lui. Ne pas lui répondre revenait clairement à le défier. C'était stupide.

— Tu plaisantes j'espère, lance Stormy. Que tu lui ais répondu ou pas, on n'en serait au même point. Ce mec est malade. T'es une putain d’obsession pour lui. Il fera tout pour la récupérer, nous lance-t-elle, morte ou vive. Il est du genre, soit elle m'appartient, soit elle ne sera à personne.

Un grondement franchit mes lèvres sans que je ne puisse me contrôler. La tuer. Sauf si je le descends avant. Mes frères me regardent et acquiescent. Cet enculé est déjà mort. Il n'aura plus jamais l'occasion de l'approcher, ni de la toucher.

— D'un mail de temps en temps, continue-t-elle, nous en sommes à plusieurs dizaines par jour. Menaçant, sans vraiment l'être. Le dernier date du jour où votre Sergent nous a contactées.

Elle sort son portable et après quelques secondes, le tend au Près'. Il fait défiler je ne sais quoi, fronce les sourcils, alors qu’un éclat de colère traverse son regard. Il finit par le passer à Shadow. Ce dernier fait de même, tout en demeurant impassible. Mais je ne rate pas la contraction de sa mâchoire. Il le file à mes frères et leur réaction est assez similaire. Ils sont à cran. Lorsque Jam me le tend, tous me scrutent.

Je lis très attentivement tous les mails et me les transfère. Dès les premiers, le ton est donné. Il lui lèche le cul, tout en la rendant responsable de son “dérapage”. Aucune excuse. Aucun remord. Bordel. Un dérapage. Il appelle ça un dérapage. Ce mec n’a pas de couilles. Aucun honneur. Aucun principe. S’en prendre à une femme pour se sentir puissant. Putain de sous-merde. S’en prendre à mon p’tit chat. La rage me consume, mais je me contiens. On va le trouver et le buter. Mais avant, on s'amusera un peu.

Plus j'avance dans la lecture, plus je mesure ce qu'elle a vécu avec ce taré. La menace n'est jamais claire, mais elle est là. Tout comme le chantage. Noyés dans ce qu’il appelle de l’amour. Mais, c’est tout sauf ça. Ce qui me tord les tripes et finit de me mettre la rage, c’est ce qu’il lui dit. Qu’elle n’est rien sans lui. À chaque mail, il la descend un peu plus. Bordel de merde. Je me décompose en lisant les derniers mails. Il lui dit que sa place est auprès de lui, qu'elle ne sera jamais capable de satisfaire quelqu'un d'autre, qu'il est le mieux qu'elle puisse espérer. Bordel ! Qu'il a hâte de pouvoir la prendre comme elle aime, avec bestialité et qu'elle se débatte…

Merde ! Des images d’elle avec lui s’imposent à moi et exacerbent ma colère déjà trop contenue. C’est la voix de Bri, qui me ramène au présent, alors que machinalement, je lui rends son portable, toujours sonné.

— Depuis plus rien. Mais il sait que je suis ici. L'appel du Procureur général n'est pas non plus un hasard.

— Comment ça ? questionne Rift.

— Comment vous expliquez qu'à peine arrivée, alors que je n'ai pas encore rencontré mon client, que je n'ai pas officiellement accepté sa défense, je reçoive un appel du procureur général de Californie pour me proposer une rencontre, pour soi-disant négocier un accord. Deux appels en moins d'une demi-heure. Curieux, non ?

— Il voulait t'obliger à le rencontrer, en déduit Shadow. À sortir à découvert.

— Probablement, confirme-t-elle.

— Très bien, tant qu’on n’en sait pas plus, vous ne sortez pas de l'enceinte du Club, ordonne le Près'.

— Tu rêves ! grogne Nina, prête à en découdre.

— Vous pensez qu'il ne peut pas m'atteindre ici ? coupe Bri. Première erreur. Ne le sous-estimez pas. Jamais. Hunter est incarcéré et risque la peine capitale et vous n'avez rien vu venir. Il est une menace très sérieuse. Son père et lui sont avocats, mais frayent avec des gens puissants et très dangereux. Rien ne les rebute, pas même le meurtre. Il a beaucoup d'influence et de très gros moyens. Et il est extrêmement intelligent.

— Et nous sommes des Sons, gronde le Près'.

Mes frères grognent leur approbation. Nous sommes une famille, s’en prendre à l’un de nous, c’est s’en prendre à nous tous.

— Vous ne comprenez pas, tout ça n’est qu’un jeu pour lui. C’est moi qu’il veut. C’est à cause de moi si Hunter est en prison. Pour me punir de lui tenir tête. Je n'avais pas ce loisir quand on était ensemble, murmure-t-elle.

Putain de merde. Attends, j'ai bien compris là ? Devant cet aveu, mon cerveau tourne à plein régime. Et les images qui se succèdent devant mes yeux me rendent dingue. Bordel.

— Ce qu’il veut, c’est ma soumission, ma reddition totale, nous confie-t-elle. Mais je préfère mourir que de lui céder. Seulement chaque personne qui m’entoure est une cible potentielle. Vous êtes tous en danger par ma faute. Nina et Adam encore plus. Il sait que je ne laisserai rien leur arriver. C'est la raison pour laquelle je vous ai demandé de ne rien faire, claque-t-elle déterminée. Il doit avoir le sentiment de tout contrôler et d'avoir gagné puisque je suis là. Et c'est exactement ce que je veux. Qu'il pense dominer le jeu. Réagir, le traquer ou lui rendre visite, serait lui donner confirmation que vous savez et je perdrai mon plus gros avantage.

Ces mots me frappent, tout comme la détermination que je lis dans son regard. Elle est prête à aller jusqu'au bout. Pour sortir Hunter de la merde. Pour protéger Stormy. Elle serait prête à mourir pour eux. Bordel. Elle a affronté ça seule pour protéger les siens. Elle a failli mourir pour eux et est prête à recommencer. Seule et vulnérable, il y avait de quoi devenir dingue ou se foutre en l'air. Pourtant, elle est là. Prête à la guerre. Pour protéger ceux qu'elle aime. Cette nana, c'est une putain de force de la nature. Shadow a raison, une putain de guerrière. La fierté m'envahit à nouveau.

— T’as un plan d'action ? la questionne le Près' qui a perçu la même chose que moi.

— Exact, répond-elle.

— Attends un peu Près', lance Rift, depuis quand on demande leur avis aux gonzesses ?

— Depuis qu'elles ont un QI bien supérieur à la taille de ta queue, Einstein, répond Stormy avec un sourire carnassier.

On se marre tous devant la tronche de Rift, avant que Shadow adresse un regard interrogateur à Stormy.

— Bri est un p'tit génie, répond-elle amusée à la question silencieuse de notre VP. Elle a réellement un QI supérieur à celui d'Einstein. Et ouais les mecs, ça vous la coupe, hein ?

— Ninaaaa ! grogne mon p'tit chat.

Bordel. En plus d'être une bombe, c'est une tronche. Ça non plus, Hunter n'en a pas parlé. Je crois qu'il va falloir qu'on ait une petite explication de frangin à frangin.

— Pour en revenir à ce qui nous intéresse, gagner du temps est primordial pour deux raisons : la première, trouver des preuves de ce que j'avance. J'ai un expert informatique qui…

— Non, la coupe le Près'. Rien ne sort du club. Anchor s'en chargera.

Je hoche la tête, ravi. Je vais pouvoir passer beaucoup de temps avec mon p'tit chat. Humm. Ça risque d'être piquant et intéressant. Faut que je trouve un moyen de me faire pardonner. Et ça me permettra d’en apprendre plus sur cet enfoiré.

— La deuxième ? demande-t-il abruptement.

— Etes-vous sûr de vouloir la connaître ? Ça risque de ne pas vous plaire…, lâche-t-elle alors qu’il la fixe durement.

— Il faut l'obliger à agir à découvert et ce ne sera possible qu'en découvrant le traître.

— Quoi ! rugit le Près'.

Non. Bordel. C'est une putain de blague ! Mes frères balancent tout un tas de jurons, mais avant qu'on ait le temps de comprendre, mon p'tit chat reprend.

— J'ai lu le dossier et deux questions se sont imposées à moi. La première, comment les empreintes d'Adam ont pu se retrouver sur l'arme du crime ? La seconde, comment pouvait-il savoir quand frapper sans risque qu'il ait un solide alibi ?

Le Près' grogne et se réinstalle au fond de son fauteuil.

— Parce que quelqu'un le lui a dit, conclut Shadow.

— Exact, affirme-t-elle. Et s’il y a effectivement un traître, que je sorte ou non d’ici est le cadet de vos soucis.

— Putain, crachent Jam et Deep.

— Bordel, lâche Crow.

— C'est la merde, grogne Rift. Ok, Stormy, j’admets que les gonzesses qui ont un QI supérieur à la taille de ma queue servent à quelque chose.

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