Le haut-parleur de la mosquée toute proche diffusait son appel matinal. La voix douce et entraînante du Muezzin se répandait dans la ville, planait au-dessus des toits, traversait les murs pour titiller les oreilles des personnes encore endormies ou à peine réveillées. Un rappel à la réalité après une nuit passée dans les bras de Morphée, où l’âme erre à la recherche de quelque rêve perdu, explorant les tréfonds du subconscient de l’être comme le spéléologue pénétrant dans les entrailles de la terre.
Tirée de son sommeil, Yasmina paressa encore un moment dans son lit puis se résolut enfin à le quitter, non sans regrets. Elle ne ratait jamais la prière de l’aube. Il faisait encore nuit noire, mais elle tenait à ce rituel matinal plus qu’à tout. C’était un moment privilégié de symbiose totale entre elle et le Créateur. C’était aussi un moment de solitude qu’elle appréciait particulièrement. Plutôt de paix car la solitude avait élu domicile dans son cœur depuis des lustres. Bien qu’il y’eut beaucoup de monde autour d’elle - le père, la mère, deux frères mariés et leurs enfants, elle se sentait toujours seule.
Alors, lorsque tôt le matin, bien avant le lever du soleil, le Muezzin lançait son appel, elle s'arrachait difficilement à la chaleur de son lit afin de profiter de ces rares instants de paix.
Après avoir fait sa prière avec beaucoup de ferveur, les vicissitudes de la vie n’ayant en rien altéré sa foi, elle se dépêcha d’aller préparer le petit déjeuner. La maisonnée ne tarderait pas à se réveiller et accaparer tout son temps.

Boire la calice jusqu'à la lie. C'est ce qui arrive quand on habite un petit trou perdu et qu'on ose enfreindre les lois établies par les gardiens auto-proclamés de la vertu. Aimer au grand jour est interdit dans certains endroits.
C'est ce que va découvrir à ses dépens une jeune fille dont le seul tort est d'être sorti avec un garçon.

Elle lui souriait, triomphalement, malicieusement. Belle dans sa robe blanche et le voile qui lui recouvrait le visage. Il devina plus qu’il ne vit son regard qui semblait lui dire : « Tu ressens maintenant ce que j’ai ressenti ? » avant de s’engouffrer dans une voiture et de partir avec « l’autre».