Alors que Daniel s'approchait d'une rangée de bancs, située sur les quais, abritée par une allée de platanes, un sans-abri, assoupi sur un des bancs, une grande canette de bière à la main, une guitare défoncée en bandoulière, se redressa soudain comme une personne réveillée en sursaut puis se dirigea vers Daniel lui barrant le chemin.
D'une voix aux accents monocorde, il s'adressa à Daniel, lui déclarant
"Commandant Lambert, vous êtes convié a un meeting du BIO, demain à 15 h 30" répétant la phrase plusieurs fois, machinalement, comme un automate. Ayant débité son message, le clochard, se laissa choir à nouveau sur son banc et sembla retomber dans sa stupeur initiale.
Daniel tenta en vain de le secouer de sa stupeur éthylique, le pauvre bougre n'émit qu'un grognement inintelligible et se mit à ronfler à gros bouillons. Daniel le saisit par le collet et le secouant vivement s’exclama :
"Qu'est-ce que c'est que cette mascarade, qu'est-ce que c'est que le BIO ? Pour qui travaillez-vous ?"
Le personnage entrouvrit péniblement les yeux mais ne semblait pas en mesure de les focaliser sur le monde réel l’entourant, au contraire, il semblait plongé dans un autre univers. En recoupant plusieurs indices aisément déductibles de l'apparence du personnage que celui-ci n'était pas un comédien ou un espion habilement grimé, mais un malheureux sans-logis. Que signifiait son intervention inattendue ?
Sans grand espoir Daniel tenta de le questionner à nouveau :
"Qu'est-ce que c'est que le BIO ?, que savez-vous de cette réunion ? Qui êtes-vous ?".
Le personnage répéta à l’identique le message qu’il avait déjà débité à Daniel, le murmurant les yeux mi-clos toujours tournés vers un autre monde, puis il se figea dans sa position, comme pétrifié. Daniel passa rapidement sa main droite devant les yeux du personnage, mais il ne nota pas la moindre réaction de réflexe pupillaire. Quelle que soit la transe dans laquelle cette personne était plongée et quelque en fut la cause, Daniel était sur le point d’abandonner tout espoir d'obtenir plus d'informations de cette source. Le singulier individu s'assit machinalement sur son banc, puis soudain s'animant à nouveau prit une rasade de la grande canette de bière qu'il tenait toujours à la main, scruta son environnement avec une certaine curiosité, comme émergeant d'un songe, puis apercevant Daniel qui le scrutait avec insistance, demanda
"Auriez-vous une pièce pour moi, s’il vous plait ?".
Daniel pris au dépourvu fouilla sa poche et lui tendit une pièce. Le changement radical de timbre qui s’était opéré dans la voix du personnage avait tout particulièrement déconcerté Daniel. La voix était rauque et quelque peu inarticulée, mais nullement mécanique quasi robotique comme auparavant. Daniel ne put s'empêcher de songer une fraction de seconde au film l’ ’exorciste’, puis il se reprit et pensa que l'infortuné personnage était peut-être schizophrène, mais dans ce cas-là se demanda Daniel, par quel extraordinaire sortilège sert-il de canal de communication et à qui ou à quoi ? Qui est le ventriloque ? De quelle forme redoutable de contrôle de l'esprit à distance s’agit-il ?
Le sans-logis bredouilla un remerciement inintelligible et Daniel comprit qu'il n'y aurait plus rien de raisonnable à escompter de ce dialogue. Il allait reprendre sa course lorsqu'une idée germa dans son esprit. Il tendit une seconde pièce au personnage et lui dit distinctement
"Informez le BIO que je serai au rendez-vous !"
Le personnage se figea instantanément, laissant choir sa canette et répondit de sa voix monocorde
"Le conseil du BIO vous attend demain, joignez le groupe de scientifiques qui visitera les laboratoires d'analyse du Louvre, nous vous contacterons durant la visite." avant de s'affaisser à nouveau sur son siège, tel un tas de chiffons.

Roman de fiction que je compte publier chapitre par chapitre (en feuilleton).

Genre : Fantasy / humour / aventure.

Extrait :

« Si vous vous demandez ce que je fais en train de courir dans la neige au cœur de la nuit, dans ce décor médiéval, au clair de lune, poursuivi par une horde de loups-garous en furie, voici comment cette aventure a commencé, par une belle nuit d'été (littéralement). »