Une araignée au plafond

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 Cette nuit, j'ai rêvé d'une énorme araignée noire suspendue juste au-dessus de mon lit. Accrochée au plafond par ses pattes hideuses, elle me fixait de ses huits yeux globuleux. Dans ce songe, je hurlais et m'enfuyais , bien évidemment — j’ai une peur bleue de ces bêtes poilues — puis je suppliais mon conjoint de la tuer sur-le-champs. 

 J'ai entendu un crac ignoble. La bile m'est montée à la gorge. Quand je suis revenue dans la chambre, des éclats noirs étaient éparpillés sur le lit. Certains m’arrivaient même dans la bouche. Un cauchemar, pas d’autre mot. Vous en conviendrez. 

 Spirituelle à mes heures, j'ai cherché prestement la signification de ce rêve. Voici ce que j'ai trouvé : 

Ton rêve d'araignée noire reflète une peur ou angoisse oppressante qui plane sur toi. Le fait que ton conjoint la tue montre ton besoin de soutien et de protection, mais les traces qui finissent dans ta bouche indiquent que, même aidée, tu gardes malgré tout une part de cette peur ou de ce problème en toi. 

En résumé : tu essaies de te libérer d'une angoisse, mais elle te laisse encore des traces difficiles à avaler.

 Ce message m'a laissé sans voix. Il était juste. Tellement juste. Il mettait des mots sur un ressenti que ne savais nommé : la peur. 

Mais peur de quoi, exactement ? 

La réponse n'était pas si difficile à trouver :

 - La peur de ne pas être reconnue pour ma vraie valeur 

 - Le peur d'être rejetée ou rabaissée

 - La peur de perdre confiance en moi 

 J'avais peur que le regard critique des autres devienne plus fort que le mien, qu'il m'empêche de m'affirmer telle que je suis. À mon grand étonnement, l'eau n'avait toujours pas coulé sous les ponts. J'en étais encore là, même des années plus tard, à avaler les critiques acerbes des autres me concernant. 

Mais comment faire quand ces autres sont des membres de notre famille ? Notre propre sang ? 

 Depuis tout ce temps, je n’ai entrevu aucune solution. Les années ne m’ont pas permis d’être totalement moi-même. Les critiques insidieuses ont fini par m’écraser. Leurs jugements planent toujours au-dessus de moi comme… cette araignée noire. Leurs mots me renvoient une version hideuse de moi, comme… cette araignée noire. Je suis prisonnière d’une toile invisible, proie d’un détraqueur redouté… cette araignée noire.

 Malgré l'aide de mon conjoint, leur méchanceté a laissé des traces. Elle s’est infiltrée si intensément en moi qu’elle a laissé un goût amer.

 À trente-quatre ans, je continue à avaler les critiques, à les intégrer malgré moi, au point de douter de ma valeur, de mon corps, de mon art. Ces mots qui ne m’appartiennent pas deviennent une lourdeur intérieure. Un poids dont je n’arrive toujours pas à me détacher.

 Bien sûr, j’ai pensé à prendre de la distance. Mais ça n’a pas marché. Le temps d’un instant, j’oublie. Et puis, comme un coup de poignard en plein cœur : PAF ! Cela revient et me blesse.

 J’ai même été résolue à couper les ponts. Mais je n’ai jamais été prête.

 Encore aujourd’hui, au lendemain de ce cauchemar, j’avoue ne toujours pas savoir. Ce mal me ronge. Je me dis alors que peut-être, je dois arrêter d’être “gentille”, oser dire le fond de ma pensée. Mais je sais que mon message ne sera pas compris. Il est plus facile de faire du mal que de comprendre qu’on en fait.

 En écrivant, je sais qu’il n’y a pas de solution parfaite. Mais je sais aussi que la meilleure viendra de moi. Et non des autres.


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