Chapitre 48 : Générosité douloureuse.

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Je part à la recherche de Terros et Möngke. Me voilà avec deux qui m'appellent maître maintenant ! J'ai plus de difficultés avec Kahlee vu que c'est elle qui m'a appris tant de choses pendant mon enfance et adolescence. Je regarde la forme massive et vaguement flippante du manoir par-dessus mon épaule.

Les Compétences de Kahlee font froid dans le dos. Elle a effectivement un mélange vicieux entre des capacités de prêtresse et d'assassin. Digne d'une Inquisitrice.

Ce qu'elle n'a jamais voulu être.

Le responsable de sa formation voulait se faire bien voir par ses supérieurs et n'admettait donc pas la présence d'une enfant refusant sa destinée toute tracée dès la détection de l'élément sacré en son corps. Un abandon au cours de l'enseignement est plutôt mal vu, les personnes ayant l'élément sacré dominant étant rares (cinq pour mille naissance il paraît, un peu plus chez les Hitsujis).

Humiliée, battue, rabrouée, Kahlee a tenu bon pour obtenir la seule chose qu'il lui était possible d'avoir vu l'entêtement de son responsable : être placée loin de ses yeux et de tout centre religieux important.

Haute-Côte était un paradis pour elle. Et elle s'est occupée des orphelins bien mieux qu'elle n'a été traitée elle-même.

Mais pas trop gentiment non plus, on est des Kitsunes après tout !

Plongé dans mes pensées, je suis arrivé devant le logement de Möngke et Terros. Le projet de scierie avançant bien grâce au métal que nous avons ramené du Donjon, la centaure a été relogée dans l'ancien réfectoire des officiers. C'est vaste, haut de plafond et avec une grande cuisine bien équipée. Personne n'en voulait car il jouxte le réfectoire des hommes de troupe qui a été transformé en lieu de travail. On y traite la viande, sale les provisions à conserver pour l'hiver, ouvre les poissons, tresse les paniers... bref, un endroit assez souvent bruyant et sentant fort.

Les Yukimimis sauvages n'ont vu aucun inconvénients à s'y installer vu que ça leur rappelle leurs campements respectifs. Möngke occupe le rez-de-chaussé pendant que Terros s'est installé au grenier : Il rentre chez lui par une échelle et a la chaleur grâce à une trappe dans le plafond de la cuisine.

Je frappe un coup à la porte.

Je voulais frapper deux fois mais la porte s'est ouverte avant.

Pouf.

Mon poing est tombé sur un truc mou, chaud et élastique.

Ne surtout pas regarder ce que j'ai fait.

Surtout pas.

L'air de rien, je ramène la main droite derrière la tête comme pour me gratter les poils des oreilles et pivote doucement vers la centaure en essayant d'avoir un sourire aussi neutre que possible.

-Rebonjour, Möngke, je voulais te...

Vlam !

La porte s'est refermée à quelques millimètres de mon nez.

-...voir.

Hésitant sur le pas de la porte, j'entends l'équivalent domestique d'une guerre à grande échelle. Puis, la porte se rouvrit sur la bouille ronde et franche de Terros qui ne semble même pas gêné par la centaure qui le tire en arrière de toutes ses forces vu qu'il est soudé au sol avec Corps de Pierre.

-Muh ?

-Oui, je viens aussi pour toi.

-Ah bon ?

Rouge comme une pivoine, Möngke regarde par-dessus la tête de l'ours.

-C'est au sujet des efforts à faire pendant la période hivernale.

-Ah ? Ah ! Ahahaha ! Aaaaah...

Elle s'en effondre de soulagement. A quoi est-ce qu'elle pensait ?

Les tables avaient été repoussées contre les murs. Il s'agit de grandes tables finement ciselées, des tables de banquet comme on en attend chez des officiers ou des nobles. Sans la moindre gêne, Möngke en a transformée une en atelier de fabrication de flèches. La montagne de fourrures dans le coin de la pièce le plus éloigné de l'entrée doit être son lit. Le reste est spartiate.

-Nous autres, centaures, sommes surtout un peuple itinérant. Nous ne possédons généralement que ce que nous portons et lorsque nous voyageons nous ne pouvons nous embarrasser d'objets inutiles. Notez bien que je suis enchantée à l'idée de posséder un foyer plus pratique qu'un feu de camp mais je n'attache point d'importance à l'image ou à l’accueil d'invités.

-Muuuh !

Terros pointe du doigt des débris qui viennent d'être repoussés sous une table. Débris vite camouflés par la masse de la centaure qui se place entre moi et eux.

-Je suis venu pour voir si vous avez fait des progrès concernant les magies.

Dans un bel ensemble, les deux Yukimimis semblent s'intéresser attentivement à des parties du carrelage près de mes pieds.

-Heu... nous sommes ravis de la confiance que vous nous portez mais... Pour ce qui est de lire... Nous manquons de... pratique.

Il fallait s'y attendre. Ils ont été formés depuis leur plus jeune âge par des guerriers et des chasseurs, pas par des érudits. Vu leur supériorité écrasante dans le domaine de la survie pure, le plus utile pour les Briseurs, je ne vais pas les critiquer.

Mais j'ai un truc à essayer.

-Ramenez-moi vos grimoires.

Ils sentent dans le ton de ma voix que je veut essayer quelque chose. Intéressés, ils vont chercher les deux grimoires. Celui de Möngke était posé sur une des tables et Terros a le sien au grenier. Ils me les tendent et j'active Sensibilité au Mana en fermant les yeux.

-Sortez le Livre à présent.

Ils hésitent un instant avant de comprendre que je parle de l'autre Livre. Je vois les Livres, le mana des grimoires et le mana ambiant. Je sort mon propre Livre et sort de mon Inventaire mon propre grimoire. Puis, avec la Sensibilité toujours active, le regarde comment il rentre dans l'Inventaire. Je retourne à Möngke et touche son grimoire, l'approche de son Livre et essaye de reproduire le même schéma de déplacement de Mana. On dirait que c'est possible mais limité à un seul ouvrage à la fois.

J'ouvre les yeux.

Le grimoire gris a disparu.

Un ensemble de feuilles se superposent devant son Livre. Elle tourne les pages du doigt, intriguée.

-Tu arrives à mieux le lire ?

Elle reste bouche bée. Regarde le Livre. Me regarde. Regarde le Livre.

Je pense que c'est un oui.

Je fait l'essai de sortir le grimoire de son Livre, vérifie son état et son contenu avant de le remettre chez Möngke.

Au tour de Terros.

Qui reste tout autant éberlué que sa camarade centaure.

-Bien, à présent vous pourrez mieux travailler la magie !

Silence causé par des mâchoires frôlant le carrelage.

-N'oubliez pas de travailler les bases en Manipulation de Mana et Sensibilité de Mana ! Ça améliore l'efficacité générale !

Silence têtu.

-Heu... ça ne vous plait pas ?

Les deux se jettent sur moi pour me serrer dans leurs bras.

Trois sorts de soin plus tard j'ai récupéré l'usage de tous mes membres et, sous les excuses sincères des deux Yukimimi, je rentre chez moi d'un pas mal assuré.

J'aurai encore du lui parler du fait que je vais faire des flèches avec elle mais j'avais peur de ne pas survivre à l'impact causé par la nouvelle.

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