Chapitre 54 :Entrée en guerre?

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Quelques jours plus tard je suis bien occupé à dépecer deux sangliers : les animaux sauvages sont de retour, chassés par les monstres qui se dispersent dans l'autre forêt. Du coup les trappeurs sont bien occupés, restent à l'extérieur des murs et n'ont pas le temps de s'occuper du traitement de leurs prises.

Avec Möngke, je me trouve dans leur local pour débiter les carcasses et nettoyer leurs fourrures. On voulait le faire avec Terros mais il a la mauvaise habitude de manger au travail.

On a assez de viande pour tous les briseurs mais on s'inquiète qu'avec l'arrivée du printemps les hostilités reprennent entre Ricci et les Nobles Paysans.

Et surtout, un groupe de cerfs cendrés a pénétré en notre forêt, à même pas un jour de marche du fortin !

Sans surprise, tous les Okamis ont sauté sur l'occasion.

Notre propre travail progresse bien, la centaure ne rechignant pas à la tâche. Même si ça n'a aucun rapport avec son objectif de grande guerrière, faire des réserves de nourritures et traiter des prises est une partie prépondérante de sa culture. On discute tout en travaillant.

-Cet animal est bien gras. C'est un bon signe : malgré la présence des monstres, il n'a point été troublé. Tout du moins, pas outre mesure.

-J'espère qu'on ne sur-chasse pas de trop. Il ne faudrait pas vider la forêt du gibier...

-J'en ai discuté avec sire Sham. La chasse n'a lieu qu'en automne et hiver et les Okamis privilégient les individus isolés, laissant les hardes se reconstituer.

-Tant mieux. Après tout, ce n'est pas comme les monstres du Donjon qui se renouvellent tout seuls avec le temps.

Comme vous pouvez le voir, nos conversations sont très professionnelles.

Je regrette la disparition totale des jeux et loisirs, ne sachant même pas si il y a de temps en temps des fêtes chez les Briseurs.

Même si j'arrivais à fabriquer un jeu de cartes ou, tout simplement, des dés, nos journées sont si remplies que je n'arriverai pas à mettre la main sur un camarade de jeu. Surtout que je les encourage à faire des efforts dans le domaine magique ou de combat pour l'hiver.

Je vais quand même essayer de fabriquer des dés, ne serait-ce que pour Kallisto et Katharos.

On est interrompu en entendant la cloche.

Deux coups rapprochés, répétés toutes les dix secondes.

Visite à la porte. Peu nombreux. Inconnus.

Sans se presser, on nettoie le sang de nos bras, rinçons les ustensiles d’équarrissage et de coupe de la fourrure avant de retirer nos tabliers de cuir. Nektaria voit venir de très loin et c'est seulement si on a trois coups rapprochés que l'on peut s'inquiéter.

On se couvre de chaudes capes d'hiver doublées de fourrure avant de sortir. L'escalier le plus proche menant aux remparts n'est pas loin car, après tout, cet endroit était la caserne des soldats avant le rachat par Hank.

-Stop ! Pas Möngke !

Rada vole au ras des toits, nous interceptant avant qu'on arrive à l'escalier. Je remarque que les coups de cloche se sont arrêtés, ce devait donc être son tour de garde.

-Oh ? Pourquoi ?

-Ma présence causerait-elle un ennui, sire Rada ? Je vous affirme que les escaliers ne m'inquiètent en rien !

-Non... Soldats avec... tenue rouge !

On se regarde, nerveux. Je m'attendais à une visite de courtoisie d'Isabella Ricci une fois que la situation se serait tassée mais pas à une manœuvre des Nobles Paysans.

-Combien de personnes ?

-Cinq soldats... Un homme habillé... autrement...

-Peuh ! Il est ridicule de vouloir prendre une place forte avec un si petit bataillon !

-C'est donc soit de la reconnaissance, soit un émissaire.

-Selon maman... pas cachés... prudents mais pas... furtifs.

Je comprends maintenant pourquoi Möngke ne doit pas monter sur le mur d'enceinte : On n'a pas croisés d'autres centaures dans les villages et la ville. Il ne faudrait pas qu'ils fassent le lien entre les moines pérégrins et les Briseurs.

-Et toi, Rada ? Il n'y a pas beaucoup d'Hatos dans les environs non plus.

-Vais me cacher... dans tour... Avec les sœurs... Aucun autre accès...

C'est vrai que leur maison est la plus inaccessible du fortin vu qu'on y rentre que par des fenêtres donnant sur le vide. Disant cela, il file chercher ses sœurs aux Herbes pendant que Möngke trotte dans la rue.

-Möngke ! Va trouver Terros et fait-le se cacher avec toi ! Et préviens aussi Kahlee !

-Ordre reçu et exécuté, Maître ! Fit la centaure avant d'accélérer jusqu'au galop.

Même si personne n'a vu son visage clairement grâce à la robe de moine, la présence d'un ours résidant au sein d'une communauté est un événement très rare. Il y a assez de fortes personnalités au sein des Briseurs pour leur épargner la compagnie d'un gamin stoïque et inamovible. Et l'absence d'une demi-démone au comité d’accueil coule de source.

Je ne vois rien pour le moment. Je suis le premier arrivé au sommet et suis rejoint par les Inus qui se sont équipés d'arcs et de couteaux de chasse.

Pas qu'ils doutent du jugement de Nektaria mais parce qu'ils ont appris à vivre dans un environnement hostile.

-C'est pas un peu de trop toutes ces armes ?

-Il est déjà arrivé que des visiteurs attirent des monstres. Ils sont si peu discrets...

Je ne peut qu'hocher la tête. Que ce soit à l'intérieur des murs ou en forêt, la plupart des Briseurs évitent les bruits inutiles. Pour certains c'est pour éviter de faire peur au gibier, pour d'autre d'attirer une attention non souhaitée. Nektaria revient d'un vol en haute altitude, se posant à côté de mon groupe.

-Trappeurs prévenus. Resteront loin des murs. Une heure avant arrivée.

A ce moment, le pont-levis se relève.

Hank n'a pas l'intention d'être poli visiblement.

Quand il vient sur le rempart, les bras croisés, il n'a pas la tête à plaisanter. Je sursaute quand je remarque qu'il est suivi par Zanathi dans sa tenue « moi, grande sorcière ! » avec renfort de collier d'os et son bâton en os fraîchement renforcé magiquement. Sham n'est pas là, traquant le gibier, mais ces trois chefs des Briseurs ont de quoi intimider.

-Maintenant, on attend. Allumez les braséros sur la façade Levant. Alain ? Tu viendras parlementer avec nous vu que tu es le seul Kitsune ici.

-Vous êtes sûrs ?

-Peur d'être inoubliable ? Parle comme un paysan et tout se passera bien...

Il a l'air carrément en colère, oui !

On ne peut pas accéder au pont-levis depuis les remparts, devant passer par le pont-levis interne afin d'accéder au pied de celui donnant sur l'extérieur.

C'est peu pratique au quotidien mais radical en cas d'affrontement : la machinerie est si profondément installée dans les fortifications que c'est sûrement la dernière pièce à tomber sous le contrôle d'un assaillant.

Je suis donc sous le porche intégré aux murailles, devant le pont relevé et en compagnie des trois autres chefs qui semblent se concentrer. J'espère que mon rôle se résumera à celui du chargé des champs...

Au bout d'un moment, j'entends des bruits de sabots. Il ne s'agit pas de Möngke car il vient du dehors.

Des cavaliers ?

Rada aurait pu préciser !

-Holà ! De la forteresse ! Vous avez l'extrême honneur d'avoir la visite de sire Santini ! Abaissez le pont-levis et faites bon accueil !

-Je vais me gêner, tient ~ …

Puis, d'une voix bien plus forte.

-Abaissez le pont !

Quand la manœuvre s'engage, j'admire le sens du spectacle d'Hank et Nektaria. Ils se tiennent côte à côte au pied de l'endroit où le pont de bois cessera sa manœuvre, bras puissants croisés pour l'Hyo et main sur le pommeau de son épée pour l'Hato totalement couverte de son armure de métal. Zanathi et moi on restera dans l'ombre du porche, invisible aux yeux des soldats qui auront leur spectacle gratuit pour accaparer toute leur attention.

Alors que le pont s'abaisse, je remarque les deux cavaliers. Un des hommes a une belle tenue de ville pendant l'autre est habillé en soldat mais a un plumeau au bout de son casque et une cape doublée de fourrure. Les quatre autres sont à pied, armés d'une lance et dotés d'une cape en tissu ainsi que d'épais sacs. Après tout, le voyage en forêt prend deux jours d'une marche rapide.

L'un des cavaliers dirige sa monture vers le bout de la passerelle quand le pont-levis finit sa manœuvre.

-Halte-là ! A quel moment avez-vous été invités à poser le pied en notre demeure !

Les cavaliers s'arrêtent, plus à cause de leurs montures effrayées par la puissance du cri que par leur propre volonté.

Il a des poumons en pleine santé, l'Hyo !

-Nous avons plein droit pour pénétrer ici ! Vous vous trouvez sur la Ferme et nous...

-Vous nous avez déclaré la guerre !

Ouh ? C'est comme ça qu'il veut attaquer le problème ? Au moins, il est clair. Le chef des soldats et l'envoyé discutent à voix basse avant que le soldat au plumeau ne prenne la parole.

-Les habitants du fort Briseur se considèrent donc en guerre avec les troupes de Jardin Bleu ?

-Nous nous considérons en état de siège ! Vos troupes nous empêchent de nous ravitailler, nous rançonnent quand nous cherchons à rejoindre notre foyer et ont coupé tous nos lien commerciaux avec toutes les cités alentour ! Donc oui, techniquement nous sommes en guerre et c'est vous qui nous l'avez déclarée ! Avant de nier, sachez que je suis un ancien de la Guerre de Scission et que je sait reconnaître un uniforme !

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