Chapitre 75 : Sport du soir, désespoir.

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La nuit est déjà tombée quand on s'arrête enfin à un relais. On en a ignorés plusieurs au cours de la journée, avançant en permanence sans même faire d'arrêt pour se restaurer. Au moins, on peut manger le pain et le fromage tout en marchant ! Tous deux sont coriaces et ont un goût trop fort mais il ne faut pas trop en attendre de rations de voyage.

Signe que l'on est encore dans le Quadrant Bêta, le relais est entouré d'une robuste palissade de bois. Une vaste cour centrale permet d'aligner les chariots, une étable sur la gauche accueille les bœufs pendant qu'une écurie en face de nous contient les chevaux des premiers membres du convoi arrivés avant nous. Sur la droite, une énorme maison dotée de deux étages en plus du rez-de-chaussée forme l'auberge-relais proprement dite.

On entend le bruit rythmique d'un marteau frappant le fer : il doit y avoir un forgeron.

J'aide autant que je le peut Marcello à ramener les chevaux dans l'écurie. J'ai plus l'habitude des bœufs après tout. Une fois les derniers chevaux dans leur box, on se dirige vers l'auberge.

Le rez-de-chaussée fait office à la fois de comptoir d'accueil, de taverne et de lieu de restauration. L'odeur de soupe au pois nous flatte les narines.

-Il n'y a plus de place.

Et crotte...

Avec la reprise des contacts entre Jardin Bleu et le Quadrant Alpha il y a beaucoup de monde qui va dans les deux directions, ayant été bloqués pendant tout l'hiver par les machinations des Nobles. Du coup, l'auberge n'ayant plus que deux lits disponibles on se sacrifie pour le vieux couple.

-Vous irez dormir à l'écurie.

Ouh. Le vieux Neko qui dit ça vient de se faire une ennemie instantanément. Möngke, l'air furieuse, marche sur lui. Vu sa taille, sa masse musculaire nouvellement gagnée et son équipement guerrier complet, le Neko dans son tablier de cuir est écrasé par la présence intimidante de la centaure. Peut-être vient-il de se rappeler que demander à une centaure de dormir dans une étable est une insulte grave pour ce peuple ?

-Mon Maître parcours la route depuis des jours ! Comment osez-vous lui proposer de se reposer dans du purin !

Ou pas.

-Möngke ? Laisse tomber. Viens, on sort...

-Mais... Maître ?

-Allez, viens...

La guidant par la main, on ressort dans l'obscurité.

-Ce n'est pas un problème pour moi. C'est même mieux : les lits de paille de l'auberge sont utilisés par tant de personnes qu'on a plus l'impression de partager les puces et poux des autres voyageurs manquant de savoir-vivre ! Par contre, la paille des réserves de l'écurie est soigneusement conservée vu que ce sont surtout des riches qui se promènent en cheval.

-Oh ? Mais... et le repas ?

-Je vais en sortir un de mon Inventaire.

La déclaration se fait accueillir par un concert de gargouillis. Je ne vais pas leur jeter la pierre : moi aussi, j'ai faim.

Zanathi et Kahlee sont parties laver les couverts par solidarité vu qu'elles ont voyagé assises pendant qu'on trottait dans tous les sens.

Au menu de ce soir c'était rôti de chevreuil aux herbes fines avec du radis bouilli.

Délicieux !

Vu que le plat garde toute sa chaleur grâce à la nature d'Anomalie du Livre, les préparatifs ont consisté à trouver un endroit où manger à l'aise. La forge en train de refroidir est un bon plan. Les outils étant dans des meubles scellés par des glyphes, on nous a laissés tranquilles. Alors que j'utilise une écharde de bois pour chasser un bout de viande entre deux dents je remarque que Rada est tendu.

-Rada ? Quelque chose ne va pas ?

-Inquiet... Attaque possible.

-Rassurez-vous sire Rada. La nature même de ce lieu apporte sécurité et paix. Des gardes patrouillent tout autour pour chasser les hostiles.

-Danger dedans, pas dehors...

Il nous explique son problème. Aujourd'hui, dès qu'il s'éloignait de trop du convoi pendant ses envols il se faisait harceler par un Karasu qui cherchait à le provoquer au combat. Il lui aurait bien réglé son compte, les Hatos et Karasus se haïssant depuis des siècles.

Mais ce Karasu vient du convoi lui aussi.

Chargé d'assurer la sécurité à l'avant de la procession de chariots, il est si vif qu'il fonçait vers Rada dès qu'il le voyait s'éloigner assez pour pouvoir l'asticoter sans que personne ne le voit.

Le pauvre Hato a donc lutté toute la journée entre la nécessité de suivre sa parole consistant à veiller sur tous les membres du convoi et son envie de massacrer un ennemi héréditaire qui le harcelait tout en sachant qu'il n'oserait pas lever la main sur lui.

Les Karasus sont des pros de l'attaque nocturne.

La nuit va être longue, nous allons devoir nous relayer pour éviter de tomber dans un...

-Hihihi ! T'étais donc là gamin !

Décidément...

La forge est derrière l'auberge et n'a pas de porte commune avec elle. Le fait que ce soit un peu caché et discret était un des plus qui me l'a fait choisir pour sortir un repas de mon Inventaire. On se tourne donc tous les quatre vers la silhouette s'encadrant dans la porte, éclairée par mon bâton lumineux.

Heu...

-C'est... lui ?

-Oui !

-Tu aurais pu préciser.

-Quoi ?

-Que c'était... elle.

La silhouette est féminine.

Incontestablement féminine.

Moulée dans une armure de cuir noir qui met la moindre portion de graisse périphérique en valeur, la jeune Karasu a de très courts cheveux d'un vert très sombre. Cette coupe à la garçonne est inutile vu le corps sexy dont elle doit forcément avoir conscience. Un peu plus petite que moi, elle doit avoir mon âge...

Nom : Brena Toshgîl

Prénom : Rashmi

Niveau : 7

Exp : 110 / 700

Clan : Karasu

Âge : 14 ans

Taille : 1m58

Métier : Assassin Ni.5

Titre : Furtive

Points de vie : 54/56

Points de magie : 10/10

Etat : Excitée

Perdu, elle n'a que 14 ans. Elle a la peau sombre et mate, rien à voir avec le teint Kokujin, plus comme si elle était naturellement bronzée. Elle est aussi très belle mais je n'ose pas la qualifier de mignonne après l'avoir vu se passer ouvertement la langue sur les lèvres en nous voyant. Ses yeux d'un rouge sanguin nous passent en revue les uns après les autres.

-Bien, bien... tant d'jolies promesses dans cette pièce...

-Que voulez-vous ?

-Du sang. D'la sueur. Du désespoir. Hé hé héééé.

On porte les mains à nos armes instinctivement. Il y a quelque chose qui ne tourne pas rond dans sa petite tête.

-Cessez ce comportement agressif ! Nous sommes ici sous la demande express de dame Ricci.

-Je sait. J'rêvais d'cette occasion où on s'ra seuls... Pourquoi tu n'm'as pas donné c'que j'voulais, mon p'tit Hato ?

Elle pénètre dans la pièce en se déhanchant, les bras croisés, minaudant en direction de Rada.

-L'fer qui s'croise à toute vitesse. L'sang qui tombe en une pluie fine. Le plaisir !

Elle n'a pas la moindre arme de visible mais si je me fie à Analyse elle a le métier Assassin, ce qui veut dire qu'elle peut avoir des moyens de tuer dissimulés dans ses vêtements.

-Oh ? Y'm'reluque sévère. Ça te rend pas jaloux, mon p'tit Hato ?

Je cherche des dagues, je ne me rince pas l'oeil. Même toi, Möngke ?

-Pourquoi moi ?

-Oh ! Oooohhhoooo.... Ce visage sévère, ce ton dur... huum ! J'ai fait l'bon choix ! Hihihi !

-Veuillez répondre à sa question, dame Karasu ! Votre présence commence à devenir inconvenante.

La Karasu s'est arrêtée avec son visage à quelques centimètres de celui de Rada, son ample sourire sadique ne quittant pas ses lèvres.

-Tu n'voulais pas des lames. Alors j'viens t'proposer d'transpirer avec moi. L'poing contre la chair. L'visage mordant la terre. L'pied dans...

Elle n'a pas le temps de terminer, se faisant jeter dehors à une telle vitesse qu'on n'a même pas compris ce qui s'est passé ! Reprenant son équilibre d'un coup d'aile, elle fusille du regard celui qui l'a empoignée à la ceinture avant de l'expédier dans la nuit comme un paquet de linge sale.

-Hors d'mon chemin l'ours !

-Muh !

Bien remonté, il frappe ses poings l'un contre l'autre. On dirait bien que j'ai sur-estimée sa tolérance à la provocation...

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