Chapitre 20 :

8 minutes de lecture

19 juillet 2021

Kasper :

Silas plonge son regard vert dans le mien et fait vivement accélérer mon rythme cardiaque. Je n'ai absolument aucune idée de pourquoi j'ai osé poser cette question. Je sais seulement que la journée d'hier était horrible pour moi, la nuit également, revoyant sans cesse le regard moqueur de Mathias braqué sur moi. J'ai besoin de penser à autre chose, d'oublier le sentiment désagréable qui m'a rongé l'estomac jusqu'à ce que les paroles de Silas apaisent mon trouble. J'aurais pu éviter ça, j'aurais pu l'affronter et lui demander des explications au lieu de fuir mais mon cœur battait trop fort pour que je puisse réfléchir. Les battements effrénés résonnaient à l'intérieur de ma tête et m'empêchaient de respirer convenablement. J'ai imaginé Silas dans les bras de Mathias, je l'ai vu lui sourire comme il me sourit, l'effleurer comme il caresse ma peau, l'embrasser comme il m'offre ses baisers et mon esprit ne l'a pas supporté. C'est probablement idiot, Silas n'a aucun compte à me rendre. Il fait ce qu'il veut et je suis la dernière personne à pouvoir lui dicter ses actes mais les images qui ont pris place dans ma tête étaient bien pires que toutes les moqueries que Mathias aurait pu me débiter.
Maintenant, je suis face à celui qui fait battre mon cœur d'une façon inédite et surprenante et je me sens comme une petite chose que l'on sort de son terrier pour mettre face aux phares d'une voiture. Je me sens aveuglé, ébloui par ce regard qui fouille le mien, minuscule contre cette paume qui caresse ma joue et englobe la moitié de mon visage ; je me sens tremblant, faiblard, lorsque son souffle vient chatouiller ma peau, rencontre mes lèvres et m'aide à respirer. Comme si son souffle était l'oxygène dont j'avais besoin pour remplir mes poumons. J'ignore ce que tout cela signifie et je refuse de lui demander des explications, je ne veux pas non plus trouver Kate pour qu'elle me guide sur ce sentier qui m'est inconnu. J'aimerais juste profiter de cet instant afin de stopper toutes les vilaines pensées que Mathias est venu fourrer dans mon esprit à coup de regards dédaigneux et de paroles moqueuses.

— Kas, souffle Silas contre mes lèvres, où es-tu parti ?

Je cligne plusieurs fois des paupières, effaçant les bribes de mes pensées errantes et indomptables pour me focaliser sur les yeux émeraudes qui ne m'ont pas quitté un seul instant.

— Dans ma tête...

— Est-ce que tu aimerais entrer dans la mienne ? Pour savoir ce qui me tracasse l'esprit depuis que je me suis installé près de toi ?

D'un petit mouvement de tête, j'approuve sa demande. Je ne sais pas ce que ça signifie. Bien que je passe mon temps à lire des romans dans lesquels les protagonistes sont dotés de capacités incroyables ; j'ai parfaitement conscience que même avec toute la bonne volonté du monde, je ne peux pas me faufiler dans la tête de Silas pour y entendre ses pensées et y voir ses rêves.

Alors que je pense qu'il va se mettre à me raconter ce que lui chuchote la petite voix qui résonne dans son esprit, il approche lentement son visage du mien pour réduire l'espace entre nos bouches quémandeuses. Avec une infinie délicatesse, ses lèvres rencontrent les miennes et font frémir ma peau. Les bras de Silas passent dans mon dos et y font pression pour me rabattre contre lui. Ma main s'écrase sur sa poitrine, son cœur battant en écho du mien contre ma paume. Une chaleur irradie en moi alors que Silas demande l'autorisation à sa langue de découvrir ma bouche en effleurant la courbe de ma lèvre supérieure. J'accepte cette intrusion qui n'en est finalement pas une. J'aime les sensations qu'il me fait découvrir lorsqu'il m'embrasse avec cette passion et cette tendresse qui lui est propre. Jamais personne ne m'a regardé comme il le fait, jamais personne ne m'a caressé comme ses mains qui longent ma colonne vertébrale. Je me sens à ma place lorsqu'il me presse contre son corps ferme, à la peau légèrement hâlée par le soleil, au cœur qui bat aussi frénétiquement que le mien. Ma main libre vient se perdre dans ses mèches brunes pour ne pas qu'il s'éloigne. Je crois, non, je suis certain que c'est la première fois que je me montre si empressé. J'ai besoin d'éradiquer Mathias de mes souvenirs et Silas est celui qui me fait tout oublier. Je suis fait de feu et de flammes. Mon épiderme est brûlant alors que celui de Silas est encore plus chaud contre le mien. Un électrochoc s'étend dans le bas de mon ventre alors qu'il se redresse sur les genoux tout en m'emportant avec lui. Nos corps sont comprimés l'un contre l'autre et un gémissement guttural m'échappe lorsque ses dents mordillent doucement ma lèvre inférieure.
Surpris par ce son qui passe ma bouche, je m'éloigne en faisant pression sur son torse. Il me laisse faire alors que ma paume s'écrase contre mes lèvres et que mes yeux s'arrondissent. Je me sens étrange, haletant, frissonnant et les battements de mon cœur me font tourner la tête.

— Par... pardon, bredouillé-je, honteux d'avoir émis un tel bruit.

Le regard enflammé de Silas trouve le mien et je crois défaillir. Ses yeux sont d'une telle intensité que ma gorge s'assèche et mes joues crépitent. Mon corps tremble et frémit à chaque souffle qui s'abat contre mon visage.

— Oh non, murmure-t-il en souriant doucement, ne t'excuse pas pour ça.

— Mais, je...

Son index vient se perdre sur mes lèvres alors qu'il embrasse lentement ma joue brûlante.

— Tais-toi, soupire-t-il en venant cacher son visage dans le creux de mon cou. J'ai besoin d'une seconde pour me remettre les idées en place.

Je reste muet, attendant qu'il revienne à moi tandis que mon esprit s'embrume d'un désir inconnu jusqu'ici. Son souffle chaud vient heurter ma gorge et provoque une déflagration brutale dans mon estomac. Ses lèvres effleurent ma peau en un baiser qui échauffe mon âme et mes doigts se perdent dans ses cheveux.
Est-ce normal de se sentir si fébrile à cause d'un baiser ? Est-ce normal que mon corps s'éveille de cette façon alors qu'il n'a absolument jamais réagit avant que Silas embrouille mon esprit ? Est-ce normal de ressentir ce bien-être et toute cette frustration alors que je souhaite qu'il m'embrasse encore ?

Les cheveux de Silas chatouillent ma peau alors qu'il se redresse légèrement pour croiser mon regard. Les larmes brouillent ma vue, m'empêchant de me repaître de l'émeraude de ses iris. J'ai envie de pleurer, sans même savoir pourquoi. J'ai besoin d'évacuer ce surplus de sentiments qui ronge mon palpitant et fait suffoquer mon âme.

— Qu'est-ce qui m'arrive ? demandé-je si bas que je ne suis pas certain qu'il m'entende.

Entre les gouttes salines de mes yeux, je perçois son sourire qui illumine son visage. J'ai peur de mal me comporter, de mal faire ou de dire des bêtises mais Silas m'admire d'une façon qui enflamme davantage mon corps.

— Je ne comprends pas ce qu'il se passe, Silas, soupiré-je alors qu'une larme m'échappe.

Son pouce la recueille doucement avant qu'elle ne se perde sur mes lèvres.

— Je me sens... bizarre, comme si je prenais feu et que rien ne pouvait apaiser les flammes... sauf toi.

— Je sais, murmure-t-il doucement, mais tu ne dois pas avoir peur. C'est une réaction normale, et je ressens exactement la même chose que toi.

— Qu'est-ce que ça veut dire ?

— J'aimerais te répondre, mais je ne suis pas certain que tu sois prêt pour un tel aveu.

— Pourquoi ?

— Parce que tu risques d'avoir du mal à l'encaisser et je ne veux pas que tu m'échappes une fois de plus.

— Est-ce que... c'est grave ?

— Non, ça ne l'est pas, affirme-t-il en effleurant mes lèvres des siennes. C'est même très bien, surtout si c'est avec moi que ça arrive, mais c'est trop tôt.

— Pourquoi est-ce que ça ne passe pas ? murmuré-je. Pourquoi est-ce que j'ai mal au ventre ? Et pourquoi ma tête est brûlante ?

— Kas... s'il te plaît, arrête de parler.

Ses paupières se ferment et sa lèvre est emprisonnée entre ses dents à tel point que j'ai peur qu'il se fasse saigner. Mon doigt vient se poser sur son menton pour la libérer doucement. Il se laisse faire mais ne rouvre pas les yeux. J'ai l'impression que les rôles sont inversés et c'est assez surprenant. Ses joues sont probablement aussi rouges que les miennes.

— Ai-je fait quelque chose de mal ? m'enquiers-je en sentant la panique me gagner.

— Non, tu n'as rien fait de mal. Tu es juste beaucoup trop mignon et j'ai du mal à gérer ça. Ce n'est pas ta faute, ton innocence me rend dingue et tes questions me font perdre la tête.

— C'est la première fois que... que je ressens ça et je... je crois que c'est douloureux.

— Ça l'est. C'est douloureux pour moi aussi et crois-moi, crois-moi, si je m'écoutais je... mais je ne peux pas. Pas maintenant, Kas.

— Je ne comprends rien, râlé-je en fronçant les sourcils.

Son éclat de rire résonne entre les arbres et me fait sourire sans aucune raison. Un baiser atterrit sur le bout de mon nez alors que ses mains délaissent mon dos pour s'éloigner lentement.

— Ok..., soupire-t-il, je crois qu'il est temps que je retourne travailler avant de... enfin, bref.

Il se relève, attrapant mes mains au passage pour me guider à sa suite.

— Comment tu as su que j'étais là ? demandé-je finalement.

— Je ne savais pas que tu étais là, j'ai juste tenté ma chance et je ne me suis pas trompé. Milla m'a un petit peu agressé, c'est une brute ta sœur.

Il rit et mon cœur s'emballe. C'est difficile à supporter, toutes ces émotions étranges qui me submergent lorsqu'il est là.

— Elle a fait quoi ? soufflé-je en levant les yeux au ciel.

— Hum, j'ai sûrement quelques bleus sur les tibias mais sinon tout va très bien, sourit-il.

— Je suis désolé, murmuré-je embarrassé.

— Ne le sois pas, c'était assez drôle en y repensant.

J'acquiesce, puis il embrasse encore mon nez. Sa main se lève pour replacer mes lunettes afin d'ôter les mèches rebelles sur mon front.

— Est-ce que le malentendu est réglé ? me demande-t-il en souriant.

— Oui, excuse-moi pour mes réactions stupides.

— Ce n'est pas stupide, c'est compréhensible. Mais la prochaine fois, tu essaies de me parler, d'accord ? Ne me fuis pas, Kas, je n'aime pas ça. Et tu peux aborder n'importe quel sujet avec moi.

— D'accord, pardon.

— Bon, souffle-t-il, il est temps de partir. Thonyo va faire la tronche si je le laisse trop longtemps avec les gaufres.

— Quoi ?

— Je t'expliquerai plus tard, s'amuse-t-il. Tu viens avec moi ?

— Euh... non. Je crois que je vais rester un peu ici, pour lire. J'ai besoin d'être seul. 


Il m'observe un moment, puis hoche la tête en souriant.

— Très bien. Je termine ma journée à 17h00, on se voit plus tard ?

— Oui, soufflé-je en baissant les yeux.

Il s'approche lentement de moi et dépose ses lèvres sur les miennes. Alors que je m'apprête à fermer les yeux pour profiter de sa tendresse, un hoquet de surprise s'élève entre les arbres et mon corps se fige brusquement contre Silas.

Je suis dans la mouise...

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