Chapitre 51, partie 1 :

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11 août 2021, dans la matinée.

Kasper :

Les lèvres pincées, je me retiens de rire face aux stupidités de Vinny. Ce dernier pense être discret lorsqu'il fixe Jonathan et Jessica d'un regard appuyé et presque effrayant.

— C'est dingue, chuchote-t-il à mon intention, ils ne vont pas nous le dire ! Ils font comme si de rien n'était.

— Laisse-les, ils le diront quand ils seront prêts.

— Mais regarde-les, ils se comportent exactement comme d'habitude.

— C'est peut-être trop tôt pour qu'ils en parlent, on verra d'ici quelques jours.

— De quoi vous parlez ? demande Jess en venant s'asseoir en face de nous.

— Oh, rien... on se disait qu'il faisait super beau pour tenter une activité, mens-je en baissant les yeux.

— Mais grave ! s'exclame Jo, plein d'enthousiasme. On fait quoi, alors ?

Ma main s'abat sur mon front alors que je me mords la langue pour avoir suggéré une telle chose. Je ne suis pas doué pour mentir et j'ai prononcé les premiers mots qui me sont venus à l'esprit. Vincent me lance un regard amusé tandis que je le maudis intérieurement.

— Attendez, intervient Jonathan, je vais chercher le flyer du camp. Il est dans la cuisine du bungalow.

— Pas la peine, soupiré-je, je connais toutes les activités proposées, mais je vous préviens, le premier qui parle de piscine ou de pédalos risque de se prendre un caillou dans le front !

Wow, notre petit Kascouilles sort les griffes.

Je lève les yeux au ciel, exaspéré. Je sais déjà que cette journée va être longue, mais il est fort possible que je finisse par m'amuser. Je ne suis jamais d'attaque à participer aux sorties de groupe, mais lorsque j'accepte de le faire, il est rare que je le regrette. Aussi agaçants puissent-ils être, mes amis comptent énormément pour moi et je serais perdu sans eux.
Après un quart d'heure à se chamailler, nous optons pour l'accrobranche. Je ne l'ai jamais essayé et j'avais dans l'idée de le proposer à Silas, mais je pourrais toujours lui demander lorsque j'aurais essayé. Au moins ainsi, je saurais à quoi m'attendre.

— Demande à ton mec de nous rejoindre, lance Jonathan en passant son bras autour de mes épaules.

— Il travaille, soufflé-je, jusqu'en début de soirée.

— Quel dommage, intervient Jess. Il est où aujourd'hui ?

— Au bar, je crois que Marco n'a pas eu le choix que de l'y mettre. Thonyo s'est plaint.

— Qui c'est ?

— Le barman, réponds-je en soupirant, n'est-ce pas évident ?

— Ouais, ça se tient, ricane Vinny. On ira le faire chier plus tard.

Lorsqu'on arrive près de l'accueil de l'accrobranche, c'est Jess qui part nous inscrire pendant que nous attendons un peu en retrait. Vincent ne cesse de lancer des sous-entendus à Jonathan qui semble visiblement ne pas les comprendre. Je me demande s'il le fait exprès ou s'il est vraiment bête au point de ne pas assimiler des choses aussi simples. Le connaissant, cela ne m'étonnerait pas qu'il soit réellement perdu au milieu des propos de Vinny. Jo a le cerveau d'une huitre mais c'est probablement pour ça qu'il nous fait mourir de rire la plupart du temps.
C'est avec un sourire éclatant aux lèvres que Jess nous rejoint. Elle nous précise qu'un employé va venir nous assister pour enfiler les harnais de sécurité ainsi que nous expliquer le parcours à effectuer. Je me sens triste que Silas ne soit pas là. Il me manque, je n'ai pas eu l'occasion de le voir aujourd'hui.
J'attrape rapidement mon téléphone avant que les sangles n'entravent ma poche et que je ne puisse plus le récupérer.

Kas :
Nous sommes à l'accrobranche, rejoins nous si tu as le temps pendant ta pause. Tu me manques, Silas...

— Kassoulet écrit des mots d'amour à son cher et tendre, n'est-ce pas mignon à se pendre à un arbre ?

Je grogne en repoussant Vincent qui fixe l'écran de mon téléphone par-dessus mon épaule. Un éclat de rire s'élève et résonne entre les arbres qui nous entourent tandis que l'envie de le tuer me surprend de plus en plus.

Je lève la tête afin d'examiner le chemin qui nous attend. Cela semble énorme vu d'en bas et un frisson d'appréhension longe ma colonne vertébrale.

— Ne faites pas les idiots, soufflé-je alors que nous grimpons l'échelle, je vous fais confiance...

— Évidemment, Kastor !

Mes jambes tremblent légèrement lorsque je pose le pied sur la passerelle qui tangue doucement. Jessica enroule ses doigts aux miens en souriant puis passe devant moi pour avancer la première. Jonathan fait de même, glisse sa paume contre la mienne et de l'autre attrape la main de Vinny pour que nous formions une file. Un sourire naît sur mon visage, lorsqu'ils le veulent, ils savent se montrer prévenants.

— Attention où vous mettez les pieds, les planches sont de plus en plus espacées, nous conseille Jess.

— Ouais, ce serait dommage qu'un de nous tombe, si c'est la cas, tout le monde se casse la gueule ! s'amuse Jonathan.

Immédiatement, mon cœur s'emballe mais je ne peux m'empêcher de sourire. Je connais bien mon ami, je sais que s'il dit cela, c'est qu'une bêtise est en train de se préparer. Pourtant, pour une fois cela ne m'effraie pas vraiment. En réalité, le fait d'être aussi loin du sol est angoissant mais la vue est à couper le souffle. Nous évoluons au milieu du feuillage des arbres, l'odeur est douce et la sensation est incroyable.

— Aujourd'hui on va pouvoir la faire notre photo ! s'écrie brusquement Jonathan. Personne ne risque de prendre un bain.

— J'ai eu des envies de meurtres ce jour là, bougonné-je.

— C'est bien ! Il faut que tu te rebelles parfois, me sourit-il en m'offrant un clin d'œil. Faites gaffe je lâche, les gars !

La poigne de Jessica se raffermit autour de ma main tandis que j'attrape l'énorme corde qui sert de rampe afin de me maintenir. Vincent manque de tomber mais se stabilise ouvrant grands les bras alors que Jo commence à se battre avec son harnais pour attraper son téléphone. Lorsqu'il le libère enfin, il lâche un énorme cri de victoire et se penche pour le donner à Jessica.

— Prends-la, dit-il, en s'inclinant davantage, tu auras le meilleur angle.

Cette dernière tend le bras, puis sourit avec satisfaction lorsqu'elle parvient à le récupérer. Nous nous tournons vers elle, se rapprochant les uns des autres le plus possible pour une image parfaite.

— Tout le monde montre ses dents !

Nous lui obéissons, tandis qu'elle fait un nombre incalculable de photos en changeant la position du téléphone à chaque fois. Lorsqu'elle termine, elle pivote avec lenteur afin de rendre l'appareil à son propriétaire mais son pied glisse sur une planche et son corps est projeté vers l'avant. Les yeux ronds, je tente de la retenir mais c'est ensemble que nous tombons. Ma main passe à travers le filet et mon menton cogne contre une latte en bois. Je grince des dents, encaissant la douleur sans me plaindre tandis que je vois le téléphone de Jonathan chuter et finir dans l'herbe quelques mètres plus bas.

— Oh mon Dieu, Kasper ! Je suis désolée ! Est-ce que ça va ? panique Jessica en attrapant mes épaules. J'ai glissé, je ne voulais pas te blesser.

Je ferme les yeux un instant, inspirant longuement alors qu'un filet de sang coule dans mon cou.

— Kas ! Attends, on va t'aider.

C'est Jonathan et Vincent qui me redressent en luttant pour ne pas glisser à leur tour. Je m'assois sur le filet, puis mes amis me rejoignent en continuant de s'inquiéter. Jessica attrape mon visage qu'elle lève et examine dans tous les sens. La douleur se calme peu à peu, c'est gênant, ça pique mais ce n'est pas insupportable.

— Ce n'est rien, dis-je en essuyant mon menton du revers de la main. Je vais bien.

— Je suis vraiment désolée, répète-t-elle encore.

Je lui souris pour tenter de la rassurer puis tout à coup Jonathan se met à s'agiter, nous faisant valser sur le parcours.

— Mon téléphone ! Putain, vous le voyez ?

— Il est tombé dans l'herbe, il n'est peut-être pas cassé, lâche Vinny.

Je baisse la tête, observe l'endroit où il a finit alors que des vacanciers s'approchent sans le remarquer.

— Attention ! hurle Jonathan. Mon portable est tombé, ne marchez pas dessus !

Les têtes se lèvent dans notre direction, et je me fige à l'instant où le regard de Mathias rencontre le mien. Mon cœur s'emballe brusquement, les yeux écarquillés je le vois arborer un sourire moqueur tandis qu'il ne se détourne pas. Cela fait des semaines que je ne l'ai pas vu, j'étais certain qu'il était parti mais visiblement j'avais tort.

— L'écran est fissuré mais il semble encore fonctionner, nous apprend un de ses amis.

— Génial ! Je descends, tu peux m'attendre ?

Paralysé, je n'ose plus bouger lorsque les images de la soirée cinéma me reviennent en mémoire.

— Kas, tu es certain que ça va ? Tu fais une tête bizarre, grimace Jess.

En silence, je me relève et suis Jonathan et Vincent vers l'échelle. Jessica me colle presque en continuant de me demander si tout va bien. Mécaniquement, je hoche la tête, m'immobilisant à plusieurs mètres du groupe d'amis de Mathias tandis que Jonathan remercie celui qui lui tend son téléphone.

— T'es toujours aussi maladroit à ce que je constate, se moque-t-il en s'approchant lentement de moi.

— Qu'est-ce que... tu me veux ? murmuré-je en baissant les yeux. Ne t'approches pas de moi...

— Silas est-il toujours obnubilé par ta personne ?

— Il... il...

Un rire moqueur s'élève alors que Vincent vient près de moi.

— T'es qui, toi ? demande-t-il froidement.

— Un ami, sourit-il en me fixant. Alors ? Il n'est pas là, aujourd'hui.

— Tu te trompes, rugit brutalement la voix de mon copain, je suis là.

Mon cœur se calme instantanément, tandis que j'inspire doucement. Silas apparaît dernière Mathias qui s'est raidit dans la seconde. Les iris verts de mon petit-ami deviennent noirs de rage à l'instant où il remarque le sang qui coule encore sur mon menton. Immédiatement je comprends ce qu'il pense et me précipite sur lui avant qu'il n'ait le temps de riposter. La colère bouillonne en lui, tellement que son visage se colore de rouge. Je referme mes bras autour de son buste et me compresse contre lui en tentant de capturer son regard qui assassine Mathias.

— Silas..., soufflé-je, regarde-moi... Ce n'est pas ce que tu crois.

Il secoue la tête, fronce les sourcils puis ses poings se serrent. J'attrape une de ses mains, tente de passer mes doigts entre les siens tout en me dressant sur la pointe des pieds pour atteindre son visage.

— Ce n'est pas lui, murmuré-je contre ses lèvres, Silas, écoute-moi, s'il te plaît. Je suis tombé sur le parcours d'accrobranche.

— Pourquoi tu prends sa défense ? gronde-t-il d'un ton qui me fait frissonner.

Je fais un pas en arrière, surpris par sa façon de me parler. C'est la première fois qu'il se montre si véhément avec moi.

— Quoi... non, ce n'est pas... ce que je fais. Je suis vraiment tombé avec Jessica...

Son regard glacial rencontre le mien, il m'examine tout en pinçant les lèvres. Mathias se fait désormais tout petit, ayant perdu de sa superbe à l'instant où Silas est apparu.

— C'est vrai, vieux, intervient Vincent. Je ne sais pas qui c'est ce type mais ce n'est pas lui qui a blessé Kasper.

J'observe Silas fermer les yeux afin d'inspirer lentement. Il se détend peu à peu mais la colère est encore visible sur son visage. Sans se soucier de moi, il me contourne, attrape Mathias par le col de son tee-shirt et l'attire à lui, les mâchoires serrées.

— Ne t'approches plus de lui, tu n'as pas compris encore ? Même si ce n'est pas toi le responsable de ça, j'ai entendu les stupidités que t'as débité. Ne me cherche pas, Math.

— Non... je, je ne voulais pas... enfin c'était juste pour...

— Pour quoi ?

— Pour l'emmerder un peu, c'est tout...

Un rictus mauvais barre les lèvres de Silas alors qu'il se penche davantage vers lui.

— Recommence encore une fois et je peux te garantir que ce que tu as pris dans la tronche la dernière fois sera insignifiant face à ce que je ferai. Ne joue pas avec mes nerfs, tu l'as blessé une fois, je ne te laisserai pas recommencer !

— Ou... oui, je... ok.

Silas le relâche brusquement, à tel point que Mathias tangue légèrement. En retrait, je patiente, l'estomac noué. Je n'aime pas ce que je constate sur le visage de Silas, il est terrifiant. Je n'ai pas vraiment peur de lui, je sais qu'il ne me fera jamais de mal mais ce qu'il cache dans son regard est alarmant. Il m'a déjà montré que sa colère est brutale et ingérable, et si Félix n'avait pas été là ce soir-là, je ne suis pas certain qu'il se serait arrêté. Mais je ne souhaite pas qu'il s'attire de nouveau des ennuis par ma faute.
Lorsqu'il revient vers moi, il m'enferme entre ses bras et pose doucement son front contre le mien.

— Excuse-moi, Kasper. Je ne voulais pas te parler si sèchement, mais je ne supporte pas que...

Il se tait, clos les paupières et inspire lentement. Mes mains englobent ses joues, caressent sa peau. Il a l'air perturbé, je n'apprécie pas de le voir ainsi.

— Ce n'est rien, je comprends.

— Non, je n'aurais pas dû...

— Silas..., le coupé-je, arrête, tout va bien.

Ses yeux s'ouvrent à nouveau, percutent les miens et font battre mon cœur à une vitesse effrénée. Ce que je lis dans son regard est si intense que je peine à respirer.
Silas pivote légèrement vers Vincent qui nous observe en silence, le regard curieux et une expression indéchiffrable sur le visage.

— Il vous rejoint plus tard, dit-il en me maintenant contre lui, il faut désinfecter sa plaie.

Vinny acquiesce, passant une main dans ses cheveux afin de rabattre ses mèches vertes vers l'arrière. Je lui souris puis après un signe de la main, je me laisse guider par Silas qui entoure mes doigts des siens. J'aimerais comprendre ce qu'il se passe dans la tête de mon ami. Vincent semblait un peu pensif et je ne comprends pas le regard qu'il m'a lancé.
Silas s'arrête à mi-chemin. Le dos contre un arbre, il se penche afin d'attraper mes cuisses. Un couinement de surprise m'échappe quand je me retrouve dans ses bras. Mes jambes s'enroulent d'elles-mêmes autre de son bassin alors qu'il penche la tête en arrière pour me dévorer les lèvres avec avidité. Mes doigts s'ancrent dans ses épaules, les paupières closes je réponds à son baiser avec autant d'empressement.

— Pardon, Honey... Pardon de m'être montré désagréable, répète-t-il encore avant de capturer ma bouche avec toujours plus de détermination.

— Sil... as, couiné-je laborieusement.

Une chaleur incandescente s'éveille dans le creux de mes reins à tel point que mes cuisses se resserrent brusquement autour de son bassin.

— Silas..., suffoqué-je, on ne peut... pas rester... là...

Comme subitement sortie de sa torpeur, il s'éloigne et cligne plusieurs fois des paupières avant de me reposer sur le sol. Mon cœur hurle de le retrouver, je n'aime pas la distance qu'il impose entre nous alors sans réfléchir, c'est moi qui prends le dessus cette fois. Mes doigts s'enroulent autour de son poignet et je n'hésite pas un seul instant avant de traverser le camping pour rejoindre son bungalow.

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