Lundi 17 avril Préparation
Excellent — j’adore ce genre de défi. Je vais reprendre ton texte en conservant ta structure et son réalisme du quotidien, sans rien anticiper de la suite, mais en le réécrivant à ma manière pour qu’on ressente mieux la texture du banal et les sensations diffuses qui remplissent ces matins-là. Comme si c’était écrit par quelqu’un qui a un peu le goût du détail ordinaire, sans jamais surjouer.
Je pars là-dessus. Voici ta scène revisitée :
Comme un autre de mes jours ordinaires, la sonnerie de mon réveil perce le silence. 6h30. D’un geste maladroit, je cherche à l’éteindre à tâtons, la main s’écrasant sur la table de chevet. Je finis par me lever, les yeux encore à moitié collés. Comme tous les matins, cette question me traverse : pourquoi je n’ai pas éteint la lumière plus tôt hier ? Une heure de plus, c’était possible…
Mes pieds nus rencontrent le parquet froid, et je traîne jusqu’à la porte. Trois pas à gauche, la poignée de la salle de bain grince un peu. J’entre, j’ouvre le robinet de la douche, l’eau frappe le fond de la baignoire en un clapotis irrégulier. J’attends qu’elle devienne tiède — pas chaude, je déteste ça, ça me donne l’impression d’étouffer.
Je retire mon pyjama, toujours dans le même ordre : le haut d’abord, puis le bas. Mon soutien-gorge glisse sur le sol, ma culotte suit. L’eau m’accueille avec cette tiédeur parfaite qui me fait frissonner. Pas longtemps, deux ou trois minutes, le temps que mes idées se remettent en place. Le bruit de l’eau couvre tout. C’est un des rares moments où il n’y a rien à entendre d’autre que ça.
Je me sèche vite fait. Les cheveux en premier parce qu’ils sont longs et qu’ils dégoulinent trop sinon. Ma brosse à dents dans la main, je farfouille dans ma trousse de toilette où chaque truc est étiqueté au prénom par ma mère. C’est relou, mais au fond pratique. Trois minutes de brossage, c’est le rituel. J’active le minuteur, c’est idiot mais ça me rassure de voir les secondes passer.
On toque à la porte.
« Occu-pée ! » j’essaie d’articuler, la brosse coincée dans la bouche.
Pas de réponse, mais personne n’entre. J’enfile vite ma culotte et mon soutien-gorge, remets mon pyjama en vitesse. Je crache, me rince la bouche. Deux minutes trente-sept. Tant pis.
« C’est bon ! » que je lance.
La porte s’ouvre aussitôt. Papa passe la tête. Il est déjà réveillé depuis un moment. Carrure de militaire, cheveux courts impeccables, son jogging noir sans un pli.
« Bonjour Élodie, tu as fini ? »
« Je dois juste me brosser les cheveux, Papa. »
« Très bien. Je vais patienter. »
Je me place devant le miroir, attrape la brosse. Mes cheveux sont lisses naturellement, un coup et c’est réglé. Je repense à Fanny et ses boucles impossibles à démêler. Elle appelle ça sa petite guerre matinale. Ça me fait sourire à chaque fois.
« Je te laisse la salle de bain, Papa. »
« Merci. »
Je file dans ma chambre. Quentin dévale l’escalier comme une balle. Je me change : l’uniforme scolaire, chemisier, jupe, collants. Un coup d’œil à l’horloge. Sept heures déjà. Le matin passe toujours trop vite, c’est comme ça.
Je descends, l’odeur du café et des œufs flotte dans la cuisine.
« Bonjour Maman. »
« Bonjour Élodie. Assieds-toi. »
Je m’exécute sans discuter. Défier l’ordre de ma mère au réveil, c’est pire qu’une mauvaise note.
« Bonjour Quentin. »
« Bonjour Élodie. »
Les mêmes mots, les mêmes tons. C’est ça aussi que j’aime et que je déteste dans ce quotidien : cette mécanique qu’on pourrait réciter en dormant.
Le petit-déj’ est là : œufs au plat, tartines. J’attrape mon panier repas — un détail de plus qui ne change jamais — et le glisse dans mon sac. 7h30.
« À ce soir, Maman. »
Je claque la porte. Le bus arrive dans la foulée. Je grimpe, je repère Fanny à sa place habituelle, les yeux sur son écran. Le son du jeu s’échappe par les écouteurs à moitié mal branchés.
Je m’assois à côté d’elle.
« T’as révisé le contrôle de français ? »
« Non, y’avait un événement dans mon jeu. Et toi, Élodie ? »
« J’ai essayé… mais bon, le français et moi… »
On lève les yeux au ciel en même temps. Katia, elle, va encore avoir dix-huit. C’est écrit d’avance.
On parle de tout et de rien. Le bus nous secoue un peu. Le lycée approche. La cloche sonne.
Monsieur Durand fait l’appel en râlant sur deux absents. Cours d’histoire-géo, c’est souvent intéressant, parfois long comme un jour sans pain.
On passe en maths. Madame Renard fait l’appel aussi. Les chiffres et moi, ça va. Fanny soupire à chaque équation, elle déteste ça.
Puis le français. Madame James n’a même pas besoin de dire qu’il y a un contrôle, tout le monde le sait déjà.
« Allez contrôle ! Un stylo et c’est tout ! Le reste dans vos sacs fermés. Si j’en prends un qui triche, c’est un zéro et quatre heures de retenue samedi ! »
On range tout. Elle distribue les feuilles. Quinze questions. Je lis les premières, ça semble jouable. Puis elle balance la dictée de la question quinze à une vitesse de mitraillette. J’essaie de suivre, ça fuse. Je laisse des mots en blanc, je comblerai après.
Je gratte mes réponses. Des conjugaisons, des synonymes, des règles à la noix. Je bloque sur deux ou trois. Le vent qui hurle comme un loup affamé, c’est quoi déjà ? Une personnification ? Une comparaison ? J’écris comparaison. Tant pis si c’est faux.
Le temps file. La cloche sonne. Copies ramassées. J’ai à peine relu la moitié de la mienne. J’ai déjà cette sensation de note bof qui me colle à la peau.
Enfin la pause déjeuner.
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