Chap 2

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Très vite, le lieutenant Zaïre Zola prit sa thermos contenant du café, avant de prendre la route à bord de sa Toyota Passo noire. Aussitôt à l'intérieur, il s'empressa d'allumer la radio, histoire de stimuler son esprit.

- Un peu de musique devrait me faire du bien, pensa-t-il.À la recherche d'une station radio intéressante, il n'arrêtait pas de zapper :
- De la musique classique... non ! Une émission politique - bordel, qui écoute un truc pareil à minuit ! hurla-t-il.
Après une bonne vingtaine de secondes de recherche, il trouva finalement une station plus qu'intéressante.
- Ah, voilà qui me plaît !

Il venait de tomber sur l'une des chansons de Papa Wemba en featuring avec Koffi Olomide qu'il aimait tant. Et la providence voulut que le titre de la chanson coïncide parfaitement avec sa situation actuelle.
« Wake up » en était le titre.

Alors, il chantait comme un dingue en roulant à vive allure dans les artères de Kinshasa, qui, la nuit, dévoilait toute sa splendeur. Sous un croissant de lune, la circulation était si fluide, les arbres dansaient au rythme du vent, et les lucioles sillonnaient çà et là, en brillant de mille feux.

De loin, il pouvait apercevoir des hommes et des femmes, marchant bras dessus bras dessous, des commerces qui étaient encore ouverts à cette heure-là, comme si la nuit n'existait pas... Eh oui, malgré l'heure tardive, la ville était pleine de vie.

Finalement, après une heure de route, il arriva sur la scène du crime, avec sa petite thermos à la main, et sans se douter un seul instant combien sa nuit serait longue.

Tels des charognards, les journalistes avaient déjà envahi les lieux, au grand désarroi du lieutenant qui ne les appréciait pas tellement.

- Mais comment diable font-ils pour toujours arriver avant moi ? sonda-t-il.
Réputé pour son efficacité, le charmant lieutenant Zola attirait si souvent les journalistes, et cette nuit ne fit guère exception. Dès qu'ils le virent, tous les journalistes se ruèrent sur lui, tels des loups affamés, puis lui posèrent mille et une questions qu'il ignora royalement, avant d'entrer dans le domicile de la victime - comme s'il ne les avait pas vus.

À l'intérieur, une foule immense occupait déjà le salon. Dès qu'il fit son entrée dans la pièce, comme toujours, tous les regards se tournèrent vers lui.

Ceci était devenu une habitude, car aussi bien dans les scènes des crimes qu'au bureau de police, quand le lieutenant Zaïre Zola apparaissait, la bonne ambiance s'évaporait. Si certains le regardaient avec admiration, d'autres, par contre, n'éprouvaient que du mépris à son égard - et ça, il s'y était habitué avec le temps.

Les mains dans les poches, rejoignant le lieutenant Lokwa, au centre de la pièce - où le corps sans vie d'une jeune fille d'une vingtaine d'années reposait sur le canapé et baignait dans une mare de sang - le lieutenant Zola ne put, malgré tout, s'empêcher d'admirer la décoration qui lui rappelait un peu celle du domicile de Jacques. La victime avait opté pour des meubles contemporains en bois, un énorme lustre en bronze, suspendu au centre du salon, ainsi qu'une table rectangulaire en verre.

Près de la fenêtre, elle avait même installé un petit pot en terre cuite, où poussaient des violettes africaines... Nul doute, elle avait passablement bon goût.

- Alors, John, qu'est-ce qu'on a ?
- Eh bien, d'après les informations fournies par sa voisine Mme Goretti Kapinga, qui a découvert le corps, il s'agit d'Alicia Muya, journaliste d'un célèbre journal dénommé « Quid Magazine ». Elle était célibataire et vivait seule.
- La dame à l'entrée qui n'arrête pas de pleurer, je présume ? compléta Zaïre.
- Exact !
- Hum, hum ! Dis-moi, quand est-ce que cette dame, euh...
- Goretti Kapinga.
- Oui, c'est ça. Quand a-t-elle découvert le corps, déjà ?

Le lieutenant Lokwa feuilleta son bloc-notes :

- Laisse-moi le temps de vérifier... Ça y est, elle l'a découvert aux alentours de vingt-trois heures trente.
- Intéressant ! s'exclama-t-il en caressant sa petite moustache. Vingt-trois heures trente, hein. Dis-moi, John, que faisait-elle chez sa voisine à une heure pareille ?
- Disons qu'elle était venue se plaindre du volume un peu trop haut de la musique.

Perplexe, Zola s'exclama :

- De quelle musique tu parles ?
- « À force de dire » de Youssoupha qui tournait en boucle depuis vingt et une heures. Le volume était au maximum, chose qui était assez inhabituelle de la part d'Alicia. Alors, vers vingt-trois heures, elle est gentiment venue lui demander de bien vouloir baisser le volume, mais la porte était à moitié ouverte. Elle a donc pris la liberté d'entrer et c'est là qu'elle découvrit le corps.
- Très bien, John. Sinon, qu'avons-nous d'autres ?
- Dans sa chambre, ses affaires ont été éparpillées, comme si son assassin cherchait désespérément quelque chose...
- Des objets de valeur ? insinua-t-il pressément.
- Exact, son coffret bijou a été vidé comme une truite, il ne reste plus une seule perle ! Et comme tu peux le constater, son sac à main a été également fouillé et vidé. Tout ce qui y reste, c'est une boîte de cachets pour laquelle elle avait une ordonnance, que voici.
- Et je suppose, reprit Zola, que vous avez pensé à un cambriolage, n'est-ce pas ?

John Lokwa esquissa un petit rictus gêné :

- Disons que c'est l'hypothèse que j'entends sur toutes les bouches depuis un certain moment, dit-il sans grande conviction.

Le lieutenant Zola fronça ses sourcils :

- Vu la tête que tu fais, tu n'es pas non plus convaincu par cette hypothèse, n'est-ce pas ?

Sans attendre sa réponse, Zaïre Zola s'approcha davantage du corps d'Alicia et, ayant toujours ses mains dans les poches, il commença son petit rituel qui consistait à tourner autour du corps des victimes afin d'en déceler le moindre indice.

Nul doute, le beau lieutenant moustachu aux yeux marron prenait vraiment à cœur son travail qui, au fil du temps, fit de lui une élite de la police de Kinshasa. Les enquêtes étaient pour lui une énigme à laquelle il se donnait à cœur joie.

Il adorait examiner minutieusement les scènes de crimes auxquelles il donnait un sens théâtral. Une petite goutte de sang sur le sol, des ecchymoses de strangulation ou encore des traces de griffures... rien n'échappait à son œil de lynx qui lui permit de résoudre un grand nombre d'enquêtes et qui lui valut par la suite le surnom de Zaïre Holmes, renforçant ainsi son arrogance.

Cette nuit-là, il observa dès le premier coup d'œil une ecchymose de forme plus ou moins arrondie localisée sur la pommette gauche, qui mesurait environ 5 cm de diamètre et dont le centre était marqué par des discrètes traces linéaires.
- Sans doute un coup de poing, songea-t-il.

Il continua son rituel, tout en rassemblant les différentes pièces du puzzle afin de reconstituer la scène du crime, sous le regard admiratif de son coéquipier.
- Alors Az, ça y est, tu es déjà dans ta petite bulle ?

Mais Zola resta silencieux. La tête baissée, il réfléchissait toujours. La première chose qu'il remarqua était la présence d'un bouquet de fleurs fraîchement posé sur la table à manger.

Au salon, son attention fut attirée par la présence d'une bouteille de champagne, puis d'une coupe de champagne à moitié pleine qui gisaient sur la table à manger. Alors qu'il s'en approchait, il remarqua une autre coupe brisée sur le sol dont le contenu s'était déversé sur le joli tapis blanc.

Il s'en alla ensuite examiner minutieusement la porte d'entrée ainsi que les fenêtres qui, comme il s'y attendait, ne présentaient aucun signe d'effraction. Ensuite, il reprit fièrement sa place devant le corps d'Alicia avant de s'accroupir soudainement en se caressant son alliance - voilà une posture que Lokwa connaissait comme sa propre poche.

À chaque fois qu'il le voyait ainsi, son cœur se remplissait de joie, car cela voulait simplement dire que le grand lieutenant Zaïre Zola était sur le point d'énoncer sa thèse :
- Votre attention s'il vous plaît, beugla-t-il, voici ce que nous savons jusque-là sur ce meurtre. Tu as la parole, Az.
- Merci, John. Merci de me mettre en si mauvaise posture, lui chuchota-t-il. Bien, mesdames et messieurs, après avoir analysé minutieusement la scène du crime, je suis prêt à parier que la victime, Alicia Muya, connaissait son assassin. Un collègue de travail, un ami... bref, un proche en qui elle avait confiance.

La stupeur envahit la pièce. D'aucuns avaient quelques doutes.

- Qu'est-ce qui vous fait dire ça ? sonda la légiste.
- Rien de plus simple, très chère. En examinant la porte d'entrée ainsi que les fenêtres, je n'y ai décelé aucun signe d'effraction, ce qui veut dire qu'Alicia connaissait son assassin et qu'elle lui a ouvert la porte.

Mais cette thèse ne semblait pas satisfaire tout le monde :

- Excusez-moi, s'écria l'un des lieutenants présents ! Vu que tous les objets de valeur ont été volés, je miserais surtout sur un cambriolage qui aurait mal tourné, comme c'est si souvent le cas dans ce quartier. Vous n'avez pas idée de tous les salopards qui rôdent dans les parages.
- C'est vrai, affirma un autre. Alicia était une femme qui vivait seule dans son domicile et qui, d'après les voisins, n'était pas toujours à la maison ; ce qui faisait d'elle une sérieuse candidate pour un cambriolage.
- J'ai déjà eu des affaires de cambriolage dans ce quartier, ajouta le jeune sergent Josh, l'un des premiers à arriver sur la scène. Ces enfoirés réussissaient à forcer la serrure à partir de l'extérieur, probablement avec des crochets de serrure, et à chaque fois, il n'y avait pas de trace d'effraction non plus. Sauf qu'aujourd'hui, ça ne s'est pas passé comme prévu, insinua-t-il. Ils ont forcé la serrure, croyant qu'elle ne serait pas là, mais hélas, Alicia était bien présente. Pris de panique, ils la tuent et lui volent ensuite ses objets les plus précieux.
- Ouais, ceci me semble plus logique ! Ils ont peut-être raison ! pouvait-on entendre de plus en plus.

Dans la pièce, nombreux affirmaient que c'était l'hypothèse la plus plausible.

Le visage plein de dédain, Zola regardait la satisfaction qui se dessinait sur ces flics qui venaient de tisser une théorie qu'il jugeait un peu trop tirée par les cheveux.

Alors, il se fit un malin plaisir à arracher ce mini rictus qu'ils avaient en démolissant leur théorie :

- Eh bien messieurs, je constate que vous avez tous un cerveau pour dix, et du coup, vous vous trouvez super intelligents, n'est-ce pas ?
Malheureusement pour vous, tout ceci n'est que pure illusion. Si vous étiez si malin que ça, vous auriez sans doute remarqué la présence de cette bouteille de champagne ainsi que de ces deux coupes, dont l'une est encore sur la table et l'autre brisée sur le sol.
- Oui et alors ?
- Je ne sais pas vous, mais je doute fort qu'elle aurait servi du champagne à des cambrioleurs.

À cet instant, plus personne ne souriait, tous commencèrent à avoir des doutes ; tous sauf ce fameux sergent Josh qui s'accrochait encore à sa théorie farfelue :

- Peut-être qu'elle a reçu dans la soirée un proche avec qui elle a pris du champagne, d'où la présence de...

Le lieutenant Zola trouva sa réflexion si odieuse qu'il l'interrompit froidement :
- Sergent Josh, êtes-vous stupide ou le faites-vous exprès ?
Irrité, il tenta de répondre, mais là encore, il fut interrompu :

- C'était une question rhétorique, sergent !Puis, il récupéra le sac à main de la victime avant de poursuivre :
- Dites donc, que constatez-vous, sergent ?
- Un sac à main tout vide.
- Pas n'importe quel sac à main, il s'agit là d'une marque de luxe qui, croyez-en mon expérience d'homme marié, vaut une petite fortune. En plus de cela, il me semble apercevoir son ordinateur portable ainsi que son téléphone sur son bureau, non ? Pour ceux qui n'ont pas encore compris où je veux en venir, sachez qu'on peut en tirer un bon prix en les revendant. Vous en connaissez, des cambrioleurs, qui les auraient laissés en partant ? Eh bien, pas moi, conclut-il.

Le silence qui régnait à cet instant-là était pour Zaïre Zola une véritable source de joie. Bien qu'ils étaient énervés, ces confrères étaient bien forcés d'admettre la fausseté de leur théorie.

Certains trouvèrent même le courage de mettre de côté leur fierté et décidèrent d'en savoir plus sur la thèse de Zola.

- À qui pensez-vous exactement, lieutenant ? exigea l'un des lieutenants.
- Ça, je l'ignore pour le moment, mais ce dont je suis quasi sûr, c'est qu'Alicia connaissait son agresseur, qu'elle lui a ouvert la porte et qu'ensuite, pour une raison qui m'échappe encore, ce dernier a décidé de lui ôter la vie. Pris de panique, il essaie de masquer son meurtre en cambriolage qui aurait mal tourné et vous, messieurs, vous vous êtes fait avoir comme des bleus, ricana-t-il. Et c'est ce qui justifie la présence de certains objets de valeur dans le domicile.

Sans dire un mot de plus, il se dirigea ensuite vers la voisine d'Alicia, Mme Goretti Kapinga, laissant perplexes ses confrères.

À première vue, c'était une dame d'âge mûr qui semblait être très touchée par la tragédie. Elle qui avait découvert le corps sans vie d'Alicia n'avait cessé de pleurer.
- Rien de plus normal, se dit-il. Tout le monde serait autant affecté qu'elle dans une situation pareille.
Puis, avec une voix douce, il prit la parole :
- Bonjour Mme Goretti, je suis le lieutenant Zaïre Zola, c'est moi qui suis chargé de l'enquête. Navré que vous ayez assisté à cet horrible spectacle. J'imagine que vous étiez proches toutes les deux.

Le visage pâle, la voix enrouée, elle dut puiser dans ses dernières réserves pour répondre :

- Oui, on peut dire ça. Vous savez, dans ce quartier, tout le monde cherche à se mêler des affaires des autres. D'un œil avide, ils observent tous vos faits et gestes, mais... Alicia n'était pas du tout comme ça, je veux dire, sur le plan personnel. Elle s'occupait de ses affaires, c'était une personne très discrète et on avait ça en commun.
- Vous m'envoyez navré, madame, mais dites-moi donc, savez-vous si Alicia avait des ennemis ou si elle avait reçu des menaces de mort ces derniers temps ?

Le regard pensif, elle le fixa vaguement, se remémorant cette conversation qu'elle avait eue avec Alicia, deux semaines auparavant. Ce regard-là, le lieutenant Zola le connaissait si bien qu'il décida d'insister :

- À quoi pensez-vous ? Dites-le-moi, même si cela vous paraît peu futile.
- Hugo, chuchota-t-elle.
- Je vous demande pardon, madame ?
- Hugo, dit-elle d'une voix un peu plus confiante. Elle m'a confié qu'elle était harcelée depuis quelques semaines par Hugo, son ex-petit ami avec qui elle s'était séparée depuis maintenant deux mois, je crois.
- Hugo, vous dites, marmonna-t-il en gesticulant de la main comme s'il attendait qu'elle lui donne son nom de famille.

Un geste que Mme Goretti Kapinga comprit assez vite.

- je n'en sais trop rien, lieutenant, répondit-elle en essuyant les dernières larmes qui coulaient de ses joues. Tout ce que je sais, c'est qu'il s'appelle Hugo.
- Ce n'est pas grave, madame.

Sans broncher, il sortit son portable et commença à faire des recherches.
Curieuse de savoir ce qu'il faisait, Mme Goretti l'interrogea quant à cela, tout en lorgnant dans son téléphone.

- Puis-je savoir ce que vous faites, lieutenant ?
- Dites-moi, madame, ils se sont séparés depuis combien de temps déjà ?
- Depuis deux mois. Pourquoi donc ?
- Vous savez, madame, aujourd'hui, les jeunes couples passent bêtement leur temps à se prendre en photo à chaque fois qu'ils le peuvent.
- En effet, lieutenant.
- Savez-vous où finissent généralement ces photos ?

Mme Kapinga hocha la tête :

- Sur les réseaux sociaux, madame.
- Vous espérez donc que, comme tout le monde, Alicia ait également pris des photos avec Hugo.
- Exactement, madame ! Étant donné que leur séparation ne date que de deux mois, avec un peu de chance, elle ne les a peut-être pas encore supprimées.

Un silence un peu embarrassant s'installa jusqu'à ce que le lieutenant Zola trouvât ce qu'il cherchait :
- Eureka ! hurla-t-il. La photo a été prise il y a environ deux mois, et vu comment se regardent ces deux-là, je suppose que c'est lui ? sonda-t-il en lui montrant la photo.
- Oui, c'est bien lui.
- Bingo, elle l'a clairement identifié sur la photo...
- Dites-moi donc comment s'appelle-t-il, s'obstina-t-elle.
- Hugo Malanda. Ça y est, je te tiens ! marmonna-t-il. Mme Goretti Kapinga, je vous remercie pour votre coopération.
Il se pressa ensuite d'écrire son identité dans son petit carnet, puis s'en alla auprès de Rachel Mbela, la légiste, qu'il taquina aussitôt :

- Salut ma belle. Oh, que vois-je là ! Un magnifique visage finement maquillé, une robe de soirée assortie d'un talon de 5 cm ! Dis donc, j'en connais une qui n'était pas chez elle, susurra-t-il d'un ton sarcastique.
- En effet, mon grand, répliqua-t-elle en écrivant. Je n'étais pas à la maison ce soir. J'avais un rencard dans un restaurant chic de la ville, dégustant un délicieux caviar tout en buvant un excellent Muscadet aux côtés d'un charmant prétendant. Vois-tu, Zaïre, je passais une excellente soirée, jusqu'à ce que je reçoive ce maudit appel, se plaint-elle. Et on se demande pourquoi je suis toujours célibataire !
- Ne m'en parle pas, j'étais dans les bras de ma femme lorsqu'on m'a appelé. Bon, trêve de plaisanterie, qu'est-ce qu'on a ?

La légiste cessa d'écrire, ôta ses gants et commença son exposé :

- Eh bien, la victime est décédée des suites d'un choc hypovolémique consécutif à une hémorragie interne causée par une blessure par arme blanche au niveau de l'hypochondre droit. Vu sa longueur et sa profondeur mesurant environ 7 et 6 cm respectivement, je parierai sans doute sur un couteau. La victime s'est vidée de son sang après que ce couteau a lésé le foie - un organe très vascularisé, soit dit en passant. L'heure du décès est estimée entre vingt et vingt-deux heures, basée sur la température du corps et la rigidité cadavérique. Je n'ai pas trouvé de chair sur ses ongles, ce qui me pousse à penser que...
- Quelle ne s'est pas battue !
- Qu'elle n'en a pas eu l'occasion. Tu vois l'échymose sur sa joue ? Je crois que le meurtrier lui a infligé un coup de poing qui l'a hélas assommé. Puis, il a enchaîné avec un coup de couteau sur l'hypochondre droit. Eh oui, ce salopard savait sans doute ce qu'il faisait.
- Donc c'était sans doute prémédité ! commenta-t-il l'air pensif.
- Voilà ce que je peux dire pour le moment. Le reste après autopsie, mon grand !

Lissant sa belle moustache, le lieutenant Zaïre Zola réfléchissait à chaque détail avec d'ores et déjà une théorie qui expliquerait le meurtre. Ce qu'il aimait encore plus dans son travail, c'était le fait de diriger les enquêtes, traquer les criminels, leur passer les menottes et ensuite, reconstituer la scène du crime avec une précision chirurgicale.

Nul doute, c'était vraiment un bon flic, si bon qu'il estimait ne pas avoir besoin des autres, une attitude qui suscita le mépris et la haine de ses confrères. Ainsi, le regard plein de haine, le cœur rempli de convoitise, ses collègues de travail murmuraient si souvent derrière son dos :

- Mais pour qui se prend-il ? Il se croit meilleur que nous ? Un jour, son orgueil le perdra, disaient-ils.

Nul doute, Zaïre Zola n'était pas vraiment apprécié par ses collègues. Jetant un coup d'œil sur sa montre, il s'aperçut qu'il était déjà trois heures et, à cet instant précis, toute la fatigue accumulée depuis la veille réapparut soudainement, mais il était loin d'être sorti de l'auberge. Il lui restait encore beaucoup de travail à faire et pourtant, ce qui le préoccupait le plus n'était guère toute la paperasse qui l'attendait... Non, ce qui l'inquiétait le plus, c'était de devoir annoncer la mort de cette pauvre Alicia à ses proches. Pendant que le corps de la victime était transporté sur la civière, une seule question tournait en boucle dans sa tête :

« Comment dire à ses parents qu'ils ne reverront plus jamais leur petite fille ? »
Installé dans sa voiture, il repensait à cet aspect de son travail qu'il détestait tant. Finalement, au bout de plusieurs minutes de réflexion, il se laissa emporter par le sommeil. Et c'est sur ces quelques centimètres qu'il passa la nuit.

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