Chap 7

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Deux mois après l'inculpation d'Hugo Malanda, à deux jours du procès, Zaïre Zola profitait pleinement de sa journée libre dans son jardin avec sa petite famille. Le soleil était au zénith, l'herbe était bien verte, et la petite Zuri, âgée de quatorze ans, courait et sautait dans tous les sens. Thessa, elle, essayait tant bien que mal d’allumer ce fichu barbecue. Sans succès

En voyant cela, Zaïre et Kaiser, qui jouaient aux échecs, se mirent à rigoler aux éclats. Tel un doux parfum qui se répand dans l'air, ces rires se propagèrent dans l'atmosphère si bien que tous se mirent à rire. Eh oui, c'était vraiment un bon moment. Des moments comme celui-ci, Zola les aimait tant.


C'étaient les seuls où il cessait d'être ce flic si compétent et arrogant. Les seuls où il cessait de se poser mille et une questions. Les seuls où son job n'avait plus la moindre importance… À des moments pareils, il était ni plus ni moins qu'un chef de famille dévoué. Rien ne lui faisait plus plaisir que de voir son épouse rayonner de bonheur, et ses enfants grandir paisiblement jour après jour ; bref, voir sa petite famille heureuse. Mais il n'avait pas toujours été ainsi.


L'homme qu'il devint au fil du temps était bien loin de celui qu'il était dans sa vingtaine.

*

Charmant jeune homme, il était jadis un tombeur avéré qui ne voyait guère l'utilité de s'attacher à une seule femme.


« Des femmes, il y en a des tas », se répétait-il si souvent.


Ainsi, il préférait passer d'une concubine à une autre, d'une pseudo-relation à une autre et se voyait bien continuer ainsi jusqu'à ses cinquante ans. En tout cas, c'est ce qu'il s'imaginait.
Jusqu'à ce jour, un certain 24 octobre, où il posa ses beaux yeux sur Thessa.

Assis dans un bar de la ville, il regardait paisiblement un match de football en buvant une bière bien fraîche quand elle fit soudain son entrée dans la pièce.

Elle était brune de peau et ses cheveux tressés étaient d'un noir si profond qu'il absorbait toute lumière. Elle était vêtue d'une somptueuse robe en pagne qui dévoilait parfaitement ses magnifiques jambes. Malgré sa passion pour le foot, il ne pouvait malgré tout s'empêcher de détourner le regard de l'écran, jetant nerveusement des coups d'œil qu'il croyait discrets.


— Mais qui est cette belle demoiselle ? s’interrogea-t-il. Des belles femmes, j'en ai pourtant déjà vu. Des blondes, des brunes, des métisses, mais une beauté comme celle-là, jamais !


Il était déjà sous le charme de cette belle inconnue.


À cet instant précis, le temps s'arrêta, son cœur de pierre se mit à battre si fort qu'il se brisa en mille morceaux. Quant à ses rêves de célibat, ils tombèrent à l'eau.
Fille unique, infirmière depuis seulement quelques semaines, elle venait de décrocher son tout premier boulot. Elle comptait fêter ça autour d'un verre avec une copine qui devait l'y rejoindre. Dès son entrée dans ce bar, d'un simple regard, elle remarqua illico ce bel homme assis seul devant son verre. Mais, comme toutes les bonnes femmes, elle fit celle qui n'avait rien vu.

Sa beauté était si paralysante que, pour la première fois de sa vie, le beau lieutenant eut peur d'aborder une femme. Alors, pour s'approcher d'elle, il lui fallut puiser dans ses dernières réserves. Ce fut pénible certes, mais il y parvint finalement :

— Bonjour, somptueuse demoiselle, excusez-moi de vous importuner, mais il… il me semble vous avoir déjà vu quelque part, dit-il d'une voix douce et séduisante. Mais c'est étrange, je n'arrive pas à mettre le doigt dessus.


Cette approche plus que surprenante eut au moins le mérite de lui arracher un sourire qui dévoila des fossettes parfaitement symétriques ; le genre à en faire craquer plus d'un.

— Serait-ce à la télévision ? poursuivit-il. Au beau milieu de la route ? Ou simplement dans mes rêves ?


Mais Thessa, elle, fit la sourde oreille et se contenta de prendre son verre comme si de rien n'était. Puis soudain, alors que Zaïre désespérait déjà, elle le regarda légèrement du coin de l'œil et lui lâcha quelques mots :


— Eh bien, monsieur, je peux vous assurer que ce n’était pas à la télé, ni dans la rue, sinon, je crois que je m'en souviendrai.
Sa voix aussi douce que la soie lui donna des frissons. Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’il l'appréciait de plus en plus.


— Et c'était quoi la dernière chose déjà ? murmura-t-elle d'un air plaisantin.
— Dans… dans mes rêves, déclara-t-il l'air un peu gêné.


Sans vraiment qu’elle comprenne pourquoi, elle esquissa un rictus inattendu.


— C'est triste, en vous regardant je n’aurais jamais cru que vous étiez, comment dire, un pervers. Et pour votre information, c'était vraiment la pire phrase d'approche de l'histoire, ajouta-t-elle en souriant.


Gêné, Zola était bien heureux de lui avoir arraché ce sourire :


— Eh bien, pour être sincère avec vous, d'habitude, je suis assez bon à ce jeu-là, mais le problème est que… s’interrompit-il soudainement.


Impatiente de connaître le fond de sa pensée, elle se pressa de l’interroger quant à ce sujet :


— Qu'est-ce donc ?
— Pour être sincère avec vous, votre beauté me laisse si perplexe que j'en perds mes mots, madame ?


Et ses jolis yeux se mirent à briller comme une étoile et ses joues rougirent tout à coup. Tout portait à croire que ce compliment ne la laissait pas indifférente. Alors, elle tendit fermement sa main en le dévorant du regard :


— Thessa Ayuza, infirmière Thessa Ayuza.
— Zaïre Zola, lieutenant Zaïre Zola. Enchanté de vous rencontrer.
— Eh bien, M. Zaïre, je suis presque enchantée, souffla-t-elle en lui serrant la main.


Et de cette prise de contact s'ensuivit une longue série de rendez-vous, car, contrairement aux filles qu'il avait l'habitude de fréquenter, lady Thessa n'avait rien d'une fille facile. Et, au bout du nième rendez-vous, ils se marieront finalement dans la grande cathédrale Notre-Dame, et de cet amour naîtront Kaiser et Zuri Zola.


*


Le soleil s'étant couché depuis maintenant plusieurs heures, toute la famille était déjà dans les bras de Morphée, pendant que Zaïre, lui, faisait la vaisselle en se repassant le film de cette merveilleuse journée. Un coup d'œil sur le calendrier lui rappela que le procès d’Hugo Malanda aurait lieu dans deux jours.


« Tiens, un innocent va sûrement être condamné pour un crime qu'il n’a peut-être pas commis. Et le comble est que je vais devoir témoigner contre lui », se désola-t-il.


Voilà une chose qui venait contraster avec sa journée si parfaite. Il tenta donc de chasser cette idée de son esprit. Mais hélas, il était si convaincu par la possible innocence d'Hugo qu'il ne pouvait s'empêcher d'y penser encore et encore, maudissant son incompétence.


— Espèce de crétin, tu n'as même pas été capable de trouver la solution ! se lamentait-il.


Son ego profondément touché, il décida de se creuser à nouveau les méninges, en espérant cette fois-ci obtenir un résultat différent que les précédentes fois. Et pour cela, il commença à se repasser dans son esprit les éléments de l'enquête :


« Ça va au moins m'occuper l'esprit pendant que je fais la vaisselle », se rassura-t-il.


En murmurant, il commença à analyser soigneusement les différents aspects de ce casse-tête :


« Voyons voir ! Il n'y avait aucune trace d'effraction au domicile de la victime – ce qui veut dire qu'elle connaissait probablement le meurtrier et qu'elle se sentait suffisamment en sécurité à ses côtés pour le laisser entrer si tard. En plus de cela, elle lui a même servi une coupe de champagne. Pourquoi diable aurait-elle agi ainsi s'il s'agissait d'Hugo Malanda – qui, soit dit en passant, lui a cassé l'avant-bras pendant qu'ils sortaient ensemble et qui la harcelait depuis leur séparation ? Ça, c'est illogique.»


Si certains éléments remettaient en question la culpabilité d'Hugo, d'autres, par contre, étaient assez ambigus.
Alicia a été tuée avec un couteau de cuisine – un foutu couteau de cuisine ! Pourquoi utiliser une arme blanche, quand on possède un magnum ? Pourquoi se donner tant de mal, pendant qu'on peut faire plus simple ? Peut-être voulait-il qu'elle souffre, qui sait ? Si c'est bien lui le coupable, pourquoi aurait-il gardé l'arme
du crime dans sa voiture ? Il avait pourtant tout le temps de s'en débarrasser. Quel est cet idiot qui agirait ainsi ? Ça non plus, ce n'est pas logique.


Comme précédemment, sa réflexion se heurta à une multitude de questions sans réponses, ce qui empêchait son esprit – pourtant si brillant – de voir le revers de la pièce. En vrai, tout ce qu'il avait, c'était une théorie qui lui paraissait logique, mais sans preuve, à quoi pouvait-elle servir ?
Grosso modo, Zaïre Zola pensait que l'assassin d'Alicia aurait essayé de maquiller son meurtre en un cambriolage qui aurait mal tourné, en saccageant son domicile et en n'emportant que son porte-monnaie et ses bijoux – mais en laissant derrière lui son ordinateur portable, son sac à main ainsi que son téléphone. Des objets de valeur qu'un mec aussi fauché qu'Hugo aurait sans doute emportés. Et le fait que le nouveau petit ami de celle-ci n'ait pas fait signe de vie depuis lors le rendait particulièrement soupçonneux à son égard.


« Pour quelle raison se cache-t-il ? », s'interrogeait-il.


Toutes ces interrogations poussèrent le lieutenant à tenter un dernier coup, en poursuivant l'enquête.

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