Chapitre 2-1

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Elaena dégagea nerveusement ses mains de la corde qui les retenait, puis ôta le bandeau qui entravait sa vision. Finalement libre de ses mouvements, elle balaya l’endroit du regard pour constater qu’il s’agissait d’une épaisse forêt. Elle ne pouvait apercevoir aucun signe de vie, humaine ou animale : seulement une végétation incroyablement dense, à perte de vue.

Elle entreprit de réorganiser ses idées. Quelques minutes plus tôt, elle était persuadée que Kellor l’avait doublée. C’était pourtant légitime, tenta-t-elle de se rassurer. Me couvrir les yeux et me faire traverser ainsi la moitié du pays… N’importe qui aurait cru à un enlèvement ! Mais Kellor avait tenu parole. Il semble tout de même qu’il espère se débarrasser de moi, en me perdant à l’écart de toute civilisation. Elaena sourit. Il ne pense pas sérieusement que son petit stratagème fonctionnera ? Il me donne trois jours pour retrouver mon chemin et le rejoindre à l’Académie. C’est bien plus qu’il n’en faut !

Elle était sur le point de rire, peut-être toutefois nerveusement : elle refusait de l’admettre, mais elle savait que la tâche ne serait pas réellement aisée. Sur le point de céder à la panique, elle décida de rester calme, d’organiser ses idées. Ils m’ont conduite au cœur d’une forêt qui m’est parfaitement inconnue, sans le moindre équipement. Je suis incapable de me situer sur une carte mentale, j’ignore même si je me trouve encore sur les Terres de Saphir. La voiture a roulé longtemps, au moins une demi-journée : la nuit est sur le point de tomber. Je dois rapidement retrouver ma route, sans quoi trois jours ne me seront pas suffisants. Kellor m’a sans doute laissé exactement le temps nécessaire.

Comme l’obscurité enveloppait son champ de vision, Elaena décida de s’abriter afin de se reposer durant la nuit : en l’absence de lumière, il lui serait impossible de se déplacer dans cet enfer de verdure dont elle ignorait les secrets. Qui sait sur quelle bête sauvage je risque de tomber ? Sans arme, je suis incapable de me défendre. Alors, je dois limiter le danger autant que possible.

Elle se mit en quête d’un abri sûr pour s’installer : peut-être y avait-il quelque part une grotte, un terrier laissé à l’abandon ou un vieux tronc. Alors qu’elle jetait un rapide coup d’œil dans chacun des recoins susceptibles de la satisfaire, son estomac la rappela à l’ordre. Elle lâcha un juron en réalisant qu’elle n’avait pas mangé depuis plus d’un jour entier. Consciente que le temps jouait contre elle, elle se résolut à avaler quelques plantes afin de faire taire sa faim durant quelques heures. Du moins, je l’espère. Cependant, la vie qu’elle avait mené jusqu’alors ne l’avait pas habituée à pareil régime, et elle eut à user de toute sa détermination pour parvenir à se nourrir ainsi sans rendre son repas à la nature.

Rapidement, les recherches se firent plus difficiles encore. Le soleil est sur le point de disparaitre. D’un moment à l’autre, les feuilles de ces arbres m’empêcheront de voir quoi que ce soit. Aussi décida-t-elle de s’installer dans le premier refuge qu’elle dénicha. Elle se recroquevilla tant bien que mal dans le creux d’une vieille souche et en dissimula l’entrée à l’aide de quelques feuilles et autres branchages qui se trouvaient là. Ce n’est ni confortable, ni vraiment discret, mais j’ose espérer que ce sera suffisant, se dit-elle. Cette forêt semble totalement inhabitée, personne ne devrait me mettre la main dessus. Je ne crains rien. Du moins… je le saurai demain matin.



Le village de Lanelle. Quel endroit merveilleux. Si ce qu’il y a après la mort est aussi agréable qu’on le dit, alors ça doit ressembler à Lanelle. J’y suis tellement heureuse. Ma vie est tout bonnement parfaite. J’ai une belle maison, un village dans lequel tout le monde est gentil et bienveillant. Ma tante Théa, mon père Orlion et mon frère Layne tiennent à moi. Je tiens à eux. Nous nous aimons et nous sommes heureux. Sans doute la famille la plus heureuse de Tercania.

Tout est parfait, et rien ne pourra jamais en changer.

Rien ? Pas même le plus violent des blizzards. Un blizzard, ici ? C’est impossible ! Pourtant, il arrive. D’énormes nuages aussi noirs que le charbon, des vents de neige aussi blancs que les ossements. La neige recouvre tout : champs, routes, maisons. Habitants. Tout est englouti sous une terrible couche de glace. Je ne vois plus personne. Puis, tout est silencieux. Le blizzard semble avoir disparu, mais jamais il ne sera tout à fait parti. Ses effets dévastateurs seront toujours présents, du moins aux yeux de ceux qui peuvent voir. Car tous les autres sont déjà morts, étouffés par la glace.

Tous. Sauf un homme. Un inconnu. Il ne vient pas de Lanelle. Il est laid. Le visage mauvais. Il sourit insidieusement. Il me regarde. Son rire est sournois. Et… il porte cet écusson. Celui que portaient les assassins de papa.

Qui êtes-vous ? Que me voulez-vous ? Pourquoi avoir tué papa ? Pourquoi avoir englouti Lanelle ? Rendez-moi Lanelle, rendez-moi le bonheur, rendez-moi la vie ! Que vous ai-je fait pour mériter que vous me la preniez ?

Il ne répond pas. Il se contente de rire. Il me méprise et me convoite.

Le blizzard revient d’un coup. L’homme disparait derrière un rideau de neige, ainsi que le ciel. J’ai froid. Trop froid. Je vais mourir si le froid persiste. Mais je ne peux pas partir, pas maintenant ! Je dois retrouver cet homme et obtenir les réponses qu’il me doit ! Après quoi je pourrai le tuer.

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