Révélations

29 minutes de lecture

Neuf heures… la porte de la bibliothèque s'ouvre. La visiteuse porte un jean noir ajusté, t-shirt blanc, blazer bleu marine, cheveux auburn lâchés…

Giles se lève.

- Mae govannen, Undómiel. » (Bienvenue, Étoile du Soir).

Un sourire plisse les yeux gris-bleu pailletés d'argent. Elle incline légèrement la tête, son Sindarin est fluide, beaucoup plus naturel et mélodieux que celui de Giles…

- Hannon le, Ion vedui in Edain, glass n'îl sí. (Je te remercie, Dernier descendant des Edain, c’est une grande joie d’être ici). Il y a bien longtemps que je n’ai pas eu le bonheur d’entendre prononcer ma langue…

Alors qu'Arwen s'avance pour prendre la chaise que Giles lui présente, elle passe près de Faith et effleure discrètement sa main posée sur l'accoudoir. La jeune femme tressaille à peine, une légère rougeur monte à ses joues. Le geste n’a évidemment pas échappé à Willow qui pousse Buffy du coude.

Giles bafouille d’émotion.

- Dame Arwen... asseyez-vous, je vous en prie. Je... nous vous devons de plates excuses. Nous vous avons prise pour... eh bien, pour une menace. Une entité maléfique. J'ai même envisagé... une Reine des Vampires. Quelle erreur impardonnable.

Arwen le regarde amusée.

- N'y pensez plus, cher monsieur Giles. Votre prudence est compréhensible dans ce lieu et à cette époque. Et je dois l’avouer... votre confusion est assez amusante. Reine des Vampires... un comble pour la dernière des Elfes en ce monde…

Giles, un peu rassuré, reprend.

- Si vous le permettez, votre Grâce... une question me brûle les lèvres. Les chroniques... l'Histoire telle que nous la connaissons par Maître Tolkien... et bien… elle rapporte votre trépas sur la colline de Cerin Amroth…

- Ce que ce cher Professeur Tolkien a écrit était vrai... en partie. Répond Arwen dont les yeux se voilent de nostalgie. Après le départ d'Estel (Aragorn) vers les chemins dont je ne sais rien, mon cœur était brisé. La lumière de ma vie éteinte, je désirais ardemment le sommeil et renoncer au fardeau des années bien mornes qui m’attendaient. Je me suis bien rendue sur Cerin Amroth, à l’endroit même où nous nous étions promis l’un à l’autre pour y attendre la fin d’une vie dénuée de sens. Mais ma grand-mère, Galadriel, avec sa sagesse aussi profonde que le temps, est revenue à moi depuis Valinor. Arwen lève sa main droite pour montrer sa bague, ornée d'une pierre blanche, qui brille doucement. Elle m'a convaincue, que mon rôle n'était pas achevé. Les ombres anciennes ne sont jamais totalement vaincues m’a-t-elle dit. Et les humains, vont avoir encore besoin d’êtres de lumière à leurs côtés. Elle m'a confié Nenya, l'Anneau d'Adamant. L'un des Trois grands anneaux qui n'ont jamais été souillés. Il me permet de perdurer, de veiller... et aussi d'intervenir lorsque le besoin s'en fait sentir. Il m’a rendu beaucoup plus forte pour affronter le mal. C’est un peu comme si mon peuple, voguant vers les Terres Immortelles, m’avait transmis une partie de sa puissance.

Le cœur de sorcière de Willow danse la samba dans sa poitrine.

- Nenya... L'un des Trois Anneaux Elfiques... Wow !

Arwen se tourne vers elle.

- Quant au Professeur Tolkien... J'ai effectivement eu le privilège de le rencontrer, à Oxford. Un homme remarquable. Je lui ai conté l'histoire du monde d'Arda… Il l’a reçue comme une légende, des mythes nés de l’imagination d’une jeune collègue qu’il trouvait brillante et amusante… enfin c’est ce qu’il disait. Il m’a demandé l’autorisation de la retranscrire. J’ai accepté. Mais j’y ai mis une condition qui l’a surpris : qu’il présente cette histoire comme le fruit de son imagination, sans jamais faire allusion à moi. Avec son immense talent, il en a fait... ce que vous connaissez. Il a changé des détails, en a ajouté d'autres parce qu'il pensait que cela servait mieux le récit. Arwen sourit et reprend. Par exemple, il trouvait un rôle de guerrière pas assez... féminin pour le personnage d’Arwen. Pourtant, c'est bien moi, pas Glorfindel, qui ai porté Frodon à travers le Gué de Bruinen, et affronté les Nazgûl. J’en ai gardé cette cicatrice. Elle lève le menton. Il pensait, lui, qu'un seigneur Elfe était plus crédible... J'ai trouvé assez amusant que Peter Jackson, sans le savoir, ait rétabli une partie de la vérité dans ses films. Cher vieux Professeur Tolkien, s’il avait su ma véritable nature lorsqu’il me proposait, à moi qu’il connaissait sous le prénom d’Anne, de modifier le personnage d’Arwen pour plus de vraisemblance disait-il…

Xander cherche désespérément à se faire remarquer… il se dit que, s’il s’y prend bien, il pourrait peut-être inviter Arwen au Bronze… Il se lance…

- Alors, euh... Dame Arwen... si je peux me permettre... C'était comment, la Terre du Milieu ? Y'avait des bons snacks ? Les Orques, ça sent vraiment mauvais ? Et Legolas, il était sympa en vrai ? »

Willow et Buffy échangent un regard amusé, Faith lève les yeux au ciel et Giles se contient à grand peine. Avec une indulgence amusée, Arwen répond d’un ton léger.

- La Terre du Milieu était... belle et terrible à la fois, Xander. Quant à Legolas... oui, un être de sang royal et un archer incomparable. Et les Orques... leur odeur était la moindre de leurs tares. Pour les snacks… peut-être dans le Comté…

Buffy convaincu que, décidément tout peut arriver à Sunnydale, prend le parti d’accepter l’incroyable…

- Ok... Donc, je résume, vous êtes une Elfe super puissante, immortelle, vous allez gérer Sunnydale et sa bouche de l’Enfer. Génial ! Avec vous dans les parages, je vais enfin pouvoir prendre ces longues vacances à Hawaï dont je rêve et surtout ma retraite de Tueuse !

Arwen se tourne vers elle.

- J'admire votre courage Buffy, si jeune mais tellement vaillante. Vous portez votre lourd fardeau avec une force admirable. Mais je crains que le repos ne soit pas encore à l'ordre du jour. Un danger se profile. Une ombre ancienne, différente de celles que vous avez combattues, s'agite dans les profondeurs. Sa présence se fait sentir, jusqu'ici, sur cette... Bouche de l'Enfer. C'est pour cela que je suis venue.

Ces paroles jettent un froid. Giles transformé en admirateur transi se penche légèrement, tripote nerveusement ses lunettes et reprend enfin la parole.

- Dame Arwen... Votre Grâce... C'est... c'est un honneur que vous nous faites. Vraiment. Vous avez parlé... vous avez mentionné un danger imminent. Pourriez-vous... si je peux me permettre... nous en dire plus ?

Tous les regards sont tournés vers Arwen. Chacun retient son souffle. L’elfe reprend, calme et résolue.

- Le danger qui nous menace... C'est une longue histoire, tissée de fils anciens et si sombres. Mais avant de tirer les fils de cette tapisserie... il y a une urgence absolue. Elle marque une pause, laissant la tension monter, on entendrait une mouche voler… Elle a un large sourire. Cette urgence... c'est que vous cessiez de multiplier les titres et les courbettes pour vous adresser à moi. Appelez-moi simplement Arwen.

Xander bondit sur l’occasion.

- Cool ! Arwen. Ça sonne bien. Alors... on peut aussi te tutoyer ?

Arwen le regarde malicieuse.

- Bien sûr. Vous tous... Elle marque une pause et son regard pétillant se pose sur Xander. Sauf toi.

Elle éclate d’un rire, clair et mélodieux et, devant l’air déconfit du garçon, l'hilarité devient générale, même Giles laisse échapper un gloussement étranglé. Arwen poursuit, non sans avoir posé une main amicale sur l'épaule de Xander.

- Bien. Maintenant que les formalités sont réglées... Parlons de choses plus graves. Sauron... ce nom évoque-t-il quelque chose pour vous ?

Les réponses fusent.

- Le méchant du Seigneur des Anneaux ? Le gros œil enflammé ? Le gars qui a perdu sa bague et qui était super colère ? Demande Xander.

- Un Maia corrompu par Morgoth, le premier Seigneur des Ténèbres... déclare Willow, toujours bonne élève.

Giles, professoral, prend la parole.

- Sauron ! Originellement un Maia d'Aulë, séduit par Melkor, devenu son plus puissant lieutenant. L'artisan des Anneaux de Pouvoir, le maître de l'Anneau Unique forgé pour les dominer tous. Vaincu une première fois par la Dernière Alliance des Elfes et des Hommes, où Isildur lui prit l'Anneau. Il revint sous la forme du Nécromancien de Dol Guldur, puis retrouva sa puissance au Mordor... jusqu'à la Guerre de l'Anneau et la destruction de l'Unique dans les flammes de la Montagne du Destin. Sa défaite fut absolue, son esprit dissipé, son pouvoir anéanti. Il fut... définitivement détruit.

Arwen hoche la tête approbatrice.

- Excellent résumé, Rupert. Précis et détaillé. Elle marque un temps d'arrêt, le regard grave et profond. Je n'aurais qu'un seul mot à enlever à votre brillante synthèse... "définitivement".

Un silence profond règne dans la bibliothèque, Giles reprend.

- Vous... vous voulez dire que... que Sauron... existerait toujours ?

- Hélas oui, Rupert, son corps physique fut bien détruit avec l'Anneau. Son pouvoir fut brisé, dispersé. Mais son esprit perdure. C’est une ombre qui rode entre deux mondes, une volonté maléfique, impuissante pendant des siècles. Mais l’ombre veut s'épaissir à nouveau. Son esprit cherche toujours à s'incarner, à retrouver son influence. Sans l'Anneau Unique, c'est infiniment plus difficile pour lui, mais... pas impossible. Surtout dans un lieu où le voile entre les mondes est mince, où le mal trouve un terreau fertile... comme ici. »

Oh génial... songea Buffy. Un Seigneur des Ténèbres, LE Seigneur des Ténèbres, niveau cosmique, veut faire son come-back à Sunnydale. Tout ce qui nous manquait…

Seule Faith parait sereine. Elle regarde Arwen, et d'une voix posée mais presque timide, qui ne lui ressemble pas, elle dit simplement

- Tu es là... Arwen... rien ne peut nous arriver.

Arwen tourne vers elle son sourire plein de tendresse.

- Ta confiance comble mon coeur, douce Faith. Mais Sauron est un adversaire ancien et redoutable, maître de la tromperie. Notre chemin sera périlleux.

Ok. Donc, résumé de la situation : le super-méchant ultime de la fantasy veut s'installer sur la Bouche de l'Enfer, songe Buffy et, pendant ce temps, Faith, la Tueuse la plus revêche de l'histoire, est en train de tomber raide dingue d'une Elfe immortelle qui lui rend ses regards et la qualifie de « douce » ce qui ressemble autant à Faith que moi à une bonne sœur. Entre Sauron et Faith amoureuse... ouais. Les temps qui viennent risquent de ne pas manquer de piment du tout.

Logique, Willow mouline ces informations, elle fronce les sourcils :

- Attends... Arwen... Si l'esprit de Sauron existe toujours et cherche à revenir depuis... eh bien, des milliers d'années... comment se fait-il que personne n'en ait jamais entendu parler ? ses tentatives de retour ça devrait faire un peu de bruit, non ? On n'a rien dans les chroniques, pas de récits historiques... Alors, peut-être qu'il n'est pas si dangereux que ça, ou qu'il ne peut tout simplement pas revenir ?

- Ton raisonnement est juste, Willow. Une telle malveillance ne saurait rester discrète. Mais qui vous dit que vous n'en avez pas entendu parler sous d'autres noms, sous d'autres formes ? Arwen laisse planer ces mots. Certes, l'esprit de Sauron, affaibli, ne peut pas aisément manifester sa pleine puissance. Mais il peut murmurer, influencer, corrompre... Il peut trouver une âme déjà sombre, un esprit puissant mais faillible, et s'y insinuer pour exacerber sa noirceur jusqu'à la monstruosité. Il y a réussi. Plusieurs fois. Au Moyen Âge, par exemple... peu après la Guerre de Cent Ans. Il a jeté son dévolu sur l'esprit tourmenté d'un très grand seigneur français. Un héros qui fut Maréchal de France et l'un des compagnons d'armes de Jeanne d'Arc...

Giles a compris,

- Grand Dieu... Gilles de Rais !

Willow pousse un petit cri d'horreur.

- Gilles de quoi ? Connais pas. Lance Buffy qui cherche désespérément à se souvenir de ses cours d’histoire. Un pote à Jeanne d'Arc qui a mal tourné ?

- Mal tourné… c’est un euphémisme… soupire Giles. Après ses faits d'armes il s'est retiré sur ses terres dans une région de France qui se nomme la Vendée. Il s’y est livré à des actes... abominables. Des messes noires, de l'alchimie... et surtout le meurtre sadique de centaines d'enfants. C’est l'un des pires monstres de l'Histoire. Il a fini par avouer et a été exécuté.

- C’était l'une des premières tentatives importantes de Sauron après sa grande défaite, précise Arwen. Son esprit était encore faible. Il ne pouvait pas contrôler totalement Rais, il n’a pu s’incarner en lui mais il a nourri sa folie et ses perversions. À l'époque, j'ai dû intervenir... subtilement, reprend Arwen, plongée dans ses souvenirs. Il m'a fallu atteindre son esprit, y affronter l'influence de Sauron et la supplanter juste assez longtemps pour qu'il ne puisse plus éviter de faire face à ses crimes, qu’il avoue et que la justice humaine puisse agir. C'était... éprouvant. J’étais épuisée après ce combat psychique. Il m’a fallu des mois pour récupérer.

Okay... Sauron "faible", ça donne Gilles de Rais, le super-monstre tueur d'enfants, se dit Buffy. Je suis moyennement pressée de voir ce que donne Sauron en pleine forme. Vraiment pas.

- Euh... les gars ? C'est vraiment une bonne idée de rester à Sunnydale ? lance Xander terrifié. Je veux dire, Hawaï, ça me semble de plus en plus attractif. Ou le Pôle Nord. N'importe où loin du fantôme du Mal Incarné qui a inspiré des tueurs en série historiques !

- Si t'as les jetons, Xander, tire-toi ! S'il faut se battre, je me battrai aux côtés d'Arwen. Même s'il ne reste que nous deux ! crache Faith avec mépris.

- Ton courage est aussi grand que ta beauté chère Faith, répond simplement Arwen.

Confirmation, Willow a raison sur toute la ligne. Non seulement Faith resterait seule avec Arwen sans hésiter, mais il est clair que l'inverse est vrai aussi. C'est officiel, on est entrés dans la quatrième dimension des relations amoureuses inter-espèces et inter-univers, conclut Buffy pour elle-même.

- Gilles de Rais, c'était il y a des siècles. Depuis, Sauron... il a réessayé ? D'autres tentatives comme celle-là ? Tente de se rassurer Buffy.

- Oh oui. Plusieurs fois. Des tyrans locaux, des nobles avides de pouvoir, des sorciers cherchant une puissance rapide... vos amis vampires bien sûr… au 1er âge, il était leur seigneur… Son esprit a murmuré à de nombreuses oreilles au fil des millénaires. Mais c'étaient des tentatives... limitées. Son influence était encore diffuse, et j'ai pu contrecarrer ses plans sans trop de difficultés, en alertant ceux qui pouvaient agir ou en intervenant discrètement pour briser son emprise naissante.

Bon, se dit Buffy, si Arwen a pu gérer jusque-là… peut-être la situation est-elle seulement normalement abominable.

La voix d’Arwen se fait sourde.

- Une fois il a été terriblement, près de réussir. Son influence a commencé à plonger le monde entier dans des ténèbres plus profondes encore que celles du Mordor d'antan. Des millions d’innocents ont été broyés.

Presque inconsciemment, Faith glisse sa main dans celle d'Arwen posée sur l'accoudoir de la chaise. L’Elfe resserre doucement ses doigts autour de ceux de la jeune femme, sans quitter le groupe des yeux. La voix d’Arwen trahit un profond dégout.

- C'était au début du XXème siècle. L'Europe se remettait à peine d'une guerre effroyable, les blessures étaient profondes, les haines vivaces. C'est dans ce terreau putride que l'esprit de Sauron a trouvé un hôte... idéal. Un ancien combattant aigri, rongé par le ressentiment... un peintre raté, refusé à l'Académie des Beaux-Arts de Vienne...

Willow a compris, elle frissonne violemment, ses yeux s’écarquillent d'horreur. Elle songe aux photos qui se trouvent chez elle rangées dans une armoire, ceux de sa famille qui n’ont pas quitté l’Europe à temps. Giles, le visage blême, murmure le nom comme une prière sombre :

- Adolf Hitler.

Arwen acquiesce, le regard perdu dans ses souvenirs, elle poursuit.

- Au début Sauron n'a pas eu besoin de le posséder entièrement. L'homme portait déjà en lui les graines de la haine, du nationalisme exacerbé, de la mégalomanie. L'esprit de Sauron n'a fait que les arroser, les nourrir, les faire croître jusqu'à la monstruosité absolue. Il lui a insufflé des stratégies perverses, a attisé sa paranoïa, lui a donné une conviction fanatique, une intelligence diabolique et une capacité de séduction terrifiante auprès des foules désespérées. Sauron voyait là une chance inouïe de recréer un empire de terreur sur le monde. La voix décidée d’Arwen devient comme un souffle. J'ai tout tenté pour l'arrêter. J'ai essayé d'inspirer des complots, de pousser des généraux lucides à la révolte... J'ai même réussi à faire éliminer l'un de ses instruments les plus cruels et efficaces, son chef de la police à Prague. Mais le monstre semblait protégé. Sauron lui insufflait une sorte de prémonition, une intuition diabolique qui lui permettait d'échapper aux pièges, de déjouer les attentats. C'était... horrible et terrifiant de voir l'emprise de Sauron se renforcer. Je n’ai jamais ressenti une telle impuissance. Elle serre un instant plus fort la main de Faith. Son empire semblait proche de s'effondrer, les armées alliées approchaient de Berlin... alors j'ai perçu que Sauron mobilisait toute sa puissance de ténèbres pour s’incarner dans le dictateur. Cela aurait sans aucun doute retourné la situation rendant invincibles les débris de l’armée Allemande. J’ai concentré toute ma volonté, toute la lumière de Nenya, pour briser le lien psychique, pour couper l’esprit du dictateur de celui de Sauron. Je n'ai réussi que brièvement, mais ce fut suffisant. Privé du soutien surnaturel qui le galvanisait, il a entraperçu la ruine totale de ses ambitions démentes. Désorienté, hystérique, il s’est vu vaincu. Il s'est donné la mort dans son bunker et tout ce qu’avait construit Sauron s’est enfin effondré.

- Donc, Sauron... son but, c'est juste de tout casser ? Semer le chaos, la destruction, comme la plupart des démons qu'on croise le mardi soir ? demande Buffy essayant de ne pas céder au vertige.

Arwen secoue doucement la tête, les doigts toujours entrelacés à ceux de Faith.

- Non, Buffy. C'est là une méprise courante concernant la nature profonde de ce mal. Sauron n'est pas un agent du chaos primordial. Au contraire. Il déteste le désordre, le gaspillage, la destruction gratuite. Il les juge... inefficaces. Son but ultime est l'ordre. Un ordre parfait, total, absolu. Un monde fonctionnant comme une immense machine bien huilée, où chaque être, chaque pensée, chaque action est contrôlée, surveillée, dirigée vers un but unique : le sien. La destruction n'est qu'un outil pour éliminer la résistance. Il ne veut pas la disparition de l'humanité ou des autres peuples ; il veut leur asservissement complet, corps et esprit. La force et la terreur sont des instruments qu'il manie avec expertise, lorsque le temps est venu. Mais ce ne sont que rarement ses premières armes. Sa méthode de prédilection, son véritable art.… c'est la tromperie. La séduction. Il excelle à attiser les haines entre les peuples, à creuser les divisions, à nourrir les peurs irrationnelles. Il crée un climat de méfiance, de désespoir... puis il se présente, ou présente un avatar, comme le seul recours capable de restaurer l'ordre et la sécurité dans le chaos qu'il a lui-même orchestré.

- Mais... comment combattre un ennemi pareil ? S'il avance masqué, s'il manipule les esprits... Où porter le premier coup ? » demande Giles déconcerté.

- La première étape, Rupert, est d'identifier l'esprit qu'il cherche à envahir. Quel est le réceptacle qu'il convoite à Sunnydale ? Si nous pouvons le découvrir avant que son emprise ne soit totale, nous aurons peut-être un temps d'avance. Nous pourrons peut-être protéger cette personne... ou l'arrêter, répond Arwen après un temps de réflexion.

- Logique ! s’exclame Xander Donc, on cherche un type important, déjà puissant, non ? Un politicien véreux, un PDG sans scrupules, un chef de secte ? Quelqu'un qui a déjà le pouvoir de nuire ?

- Ce n'est pas certain, Xander. Sauron ne choisit pas nécessairement sa cible pour son pouvoir actuel. Il cherche la vulnérabilité. Une porte d'entrée. Cela peut être n'importe qui. Une personne ordinaire, mais consumée par l'amertume, qui se sent rejetée. Quelqu'un dont l'orgueil démesuré masque une profonde insécurité, explique Arwen. Gilles de Rais était un grand seigneur, mais il était brisé, traumatisé par la mort de Jeanne, la lumière qui l'aidait sans doute à contenir ses propres ténèbres, il avait dilapidé sa fortune et croulait sous les dettes. Quant à Hitler... avant que Sauron ne catalyse sa haine dans une direction, ce n'était qu'un agitateur misérable, vociférant dans les brasseries de Munich, rejeté par le monde de l'art. Le pouvoir est venu après, nourri par l'influence de Sauron.

De mieux en mieux soupire Buffy, l'ennemi peut être le voisin grincheux, la prof de sport frustrée, ou le type bizarre qui parle tout seul au coin de la rue. Super ! Finalement, chasser des vampires et des démons qui annoncent clairement la couleur, c'était presque... reposant. Au moins, on savait à qui on avait affaire. À côté de ce Sauron, le Maître, c'était presque un type sympa avec un plan simple. Et Spike et Drusilla ? Un couple un peu déjanté, mais prévisible. A propos de vampires compliqués... Angel. Va falloir que j'aborde le sujet avec Arwen. Comment une Elfe quasi-divine va réagir à l'existence d'un vampire avec une âme, surtout un qui a… un passé ? Et Angel, comment réagira-t-il à Arwen ? Ça promet... D'ailleurs... maintenant que j'y pense, Angel était super bizarre ces derniers temps. Préoccupé, distant. Il trouvait toujours des excuses pour ne pas sortir de sa crypte moisie, il évitait même les patrouilles... Est-ce qu'il... Non, impossible. Ou... Encore un truc à ajouter à la liste "Pourquoi ma vie est un épisode permanent de La Quatrième Dimension". De plus en plus réjouissant.

La porte de la bibliothèque s'ouvre à nouveau sur Cordelia Chase, dans toute sa splendeur, ce qui achève Buffy. Oh, parfait. Manquait plus qu'elle. Franchement, entre Cordelia qui débarque et Sauron qui prépare son retour, je sais pas ce que je préfère... Bon, ok, j'exagère. Depuis qu'elle sait pour... eh bien, pour tout le cirque démoniaque, elle est devenue un peu moins reine des pestes. Un peu. Sauf avec Xander, bien sûr. Avec qui elle sort. Logique ? Zéro. Entre Xander et Cordy, Willow et Oz le loup-garou – tiens, encore un sujet sympa à aborder avec une Elfe millénaire –, moi et mon ex-vampire-avec-une-âme torturé, et maintenant peut-être Faith et Arwen... on est bons pour lancer notre propre série télévisée : "Amours, Gloire et Apocalypses".

Le radar à "personne importante" de Cordelia s'est aussitôt activé en apercevant Arwen. En une fraction de seconde, elle la passe à son scanner mondain : beauté exceptionnelle, classe innée ; vêtements d'une simplicité trompeuse qui crient « luxe discret » ; maquillage minimaliste mais zéro défaut. Conclusion : c’est soit une célébrité majeure, soit une héritière richissime, soit les deux. Wow. C'est qui, ça ? Elle respire le pognon et la classe à dix kilomètres. Jamais vue à Sunnydale. Qu'est-ce qu'elle fiche dans cette bibliothèque poussiéreuse ? Bon, pas de question idiote, Cordy. Souris et sois aimable. On ne sait jamais, c'est peut-être la nouvelle égérie Chanel ou la productrice de mon futur film.

Armée de son sourire le plus éclatant, Cordelia s'avance vers le groupe et plus particulièrement vers Arwen. Bonsoir tout le monde... Oh, bonsoir Madame ! Ravie de vous rencontrer. Elle tend la main avec une déférence calculée. Giles, se décide à faire les présentations, non sans une certaine gêne.

- Arwen, permettez-moi de vous présenter Cordelia Chase, une... amie… Cordelia, Dame Arwen Undomiel.

- Arwen... Undómiel ? Enchantée. Quel nom... très... original. Vous êtes actrice ? Mannequin ?

- Arwen est... la descendante d'une très noble lignée... Elfique, Cordelia, répond Giles agacé.

- Oh ! Elfique ! Comme c'est... fascinant ! C’est amusant, Européen ? Excusez ma question, Arwen, mais votre blazer est absolument divin ! Il a une coupe incroyable ! Où avez-vous bien pu le trouver ?

Giles atterré lève les yeux au ciel, et se prépare à rabrouer Cordelia mais Arwen répond, amusée.

- Merci, Cordelia. C'est une création de chez Saint Laurent.

- Saint Laurent ! J'adore ! Il vient de la nouvelle boutique du centre commercial ? Ils ont des choses sublimes en ce moment !

- Avenue Montaigne en fait, j’y ai mes habitudes.

- Avenue... Montaigne ? Cordelia a un froncement de sourcils C'est nouveau comme rue ? C'est près du Bronze ? Je ne connais pas...

- Et bien, c'est à Paris, pas loin des Champs Elysées.

- À… à Paris ? Vous voulez dire... Paris, France ? Vous... vous faites votre shopping à Paris ? Pour... pour tous les jours ? La mâchoire de Cordelia tombe comme celle du loup de Tex Avery.

- Souvent, oui, mais pas seulement. J'aime beaucoup Milan aussi, et à Barcelone, il y a des jeunes stylistes formidables, bien sûr Londres reste inégalable pour des choses originales, si vous avez l’occasion allez fouiner à Camden... Bien sûr, il y a aussi des créateurs intéressants à New York ou à Miami, selon les saisons.

Cordelia reste sans voix, presque intimidée. L'idée de faire son shopping à travers les capitales du monde comme on va chercher son pain dépasse son entendement. Faith éclate d'un rire franc et moqueur en voyant sa tête. Buffy savoure ce moment exquis où la reine du lycée est réduite au silence par une Elfe globe-trotteuse.

Mais c'en est trop pour Giles qui explose, sa voix monte dans les octaves.

- Cordelia ! Par tous les saints et les bibliothécaires martyrs ! Est-ce possible ? Nous sommes ici, à discuter de la menace potentielle de la réincarnation de Sauron, un Seigneur des Ténèbres millénaire qui a failli asservir le monde à plusieurs reprises, qui est responsable des pires atrocités de l'Histoire, et votre préoccupation principale est de savoir si Arwen préfère faire ses emplettes sur l'Avenue Montaigne ou la Via Montenapoleone ? Un PEU DE SÉRIEUX, JE T’EN SUPPLIE !

Faith rit de plus belle et Buffy essaie de cacher son sourire derrière sa main tandis qu’Arwen observe la scène avec une lueur d'amusement dans les yeux. Mais Cordelia n’a pas dit son dernier mot. Elle a une illumination soudaine. Ce nom "Arwen"... ce visage d'une beauté irréelle... ça lui rappelle quelque chose. Un film. Le Seigneur des Anneaux ! Bien sûr ! Attends... c’est Liv Tyler, c’est la star qui jouait Arwen ! C'est ça ! C'est dingue, on a du mal à la reconnaitre mais elle est encore plus belle en vrai qu'au cinéma !

- Oh mon Dieu ! Arwen... ou plutôt Liv bien sûr… Cordelia glousse et fait un clin d’œil à l’elfe. C'est incroyable de vous rencontrer ! Je vous admire tellement ! Votre rôle dans Armageddon était... bon, c'était un film, mais Le Seigneur des Anneaux ! Vous étiez sublime ! Et je n'en reviens pas, vous êtes encore plus lumineuse en réalité que sur grand écran ! C'est fou ! Vous préparez un film ici, à Sunnydale ? C'est pour ça que vous êtes là ? Vous avez besoin d'une assistante ? Je suis disponible !

- Je crains qu'il n'y ait méprise, Cordelia. Je ne suis pas... Liv Tyler, je la connais bien, elle est très sympathique, sa maison à Manhattan est fabuleuse on y a fait de ces fêtes… et j’ai beaucoup apprécié son interprétation de mon personnage, mais je ne suis pas une actrice.

Le rire sonore de Faith trop longtemps contenu éclate. Elle se plie en deux, les bras croisés sur l’estomac puis pose son front sur l’épaule d’Arwen. C’est vrai qu’elle est jolie sans son masque renfrogné habituel, se dit Buffy. Giles est maintenant proche de l’apoplexie.

- Cordelia ! Pour la dernière fois ! Arwen n'est PAS une actrice ! Elle est... ce qu'elle est ! Une Elfe ! La véritable Arwen Undómiel des récits de Tolkien, qui se trouve être une réalité et non une fiction, aussi incroyable que cela puisse paraître ! Est-ce que vous écoutez parfois ?

- Cordelia paraît décontenancée une seconde. Mais, après tout ce qu'elle a vu à Sunnydale – vampires, démons… une Elfe ne semble finalement pas une apparition si extravagante. Moins en tout cas que quelqu’un qui s’habille à Paris et fait la fête chez Liv Tyler… Elle hausse les épaules. Ah, d'accord. Une Elfe. Ok… Mais... je croyais que les Elfes avaient les oreilles pointues ?

Devant cette question saugrenue, Arwen elle-même ne peut réprimer un fou rire cristallin, qui se communique rapidement à tous. Seul Giles tente de rester stoïque, se prenant la tête entre les mains comme pour s'empêcher de hurler.

- Ah, les oreilles pointues ! Une charmante invention du Professeur Tolkien ! Tout comme les pieds velus des Hobbits. Il avait un esprit facétieux sous ses airs d'universitaire sérieux, vous savez. Personnellement, je trouve que mes oreilles sont très jolies comme elles sont, déclare Arwen avec un air charmeur.

- Y'a pas que les oreilles que je trouve jolies... dit Faith à voix basse, mais de manière, à ce que tout le monde entende, tout en plongeant son regard dans celui d’Arwen.

C’est alors que déboule Oz, pâle, en sueur. Ses yeux lancent des éclairs agités.

- Willow... La lune...

- Oh non ! La nuit ! J'avais complètement oublié ! Willow blêmit.

Oz pousse un grognement rauque, ses traits se déforment, les os craquent. En quelques secondes, le garçon calme et laconique se transforme en un loup-garou massif les yeux injectés de sang, crocs découverts. Il renifle l'air, repère la personne la plus proche et la plus apprêtée – Cordelia – et se ramasse sur lui-même, prêt à bondir. Giles se précipite vers l'armoire où il range le fusil hypodermique. Mais Arwen est déjà debout. D'une voix impérative, sans la moindre hésitation, sa voix claque.

- Couché.

Oz s'arrête net, surpris par le ton. Menaçant, il tourne sa tête vers Arwen. Au grand effroi de tous, celle-ci s'avance, décidée, vers le monstre. D'un geste vif et sec, elle lui administre une claque sonore sur le museau. Stupéfait, le loup-garou pousse un jappement de douleur et de surprise mêlées, puis s'aplatit au sol, les oreilles basses, la queue entre les pattes, totalement soumis.

- À côté de ma chaise ! Là, Couché. Et tu ne bouges pas. Le loup-garou obéit. Il rampe misérablement jusqu'à l'endroit indiqué et s’y pelotonne en gémissant doucement. Avec les lycanthropes, il ne faut montrer aucune crainte. Ne jamais reculer, ne jamais se détourner. Il faut s'imposer immédiatement. C'est assez simple à gérer, en vérité, lâche Arwen, parfaitement décontractée.

Xander a le tort de penser que c’est… « simple ».

- Ok ! Hé, Oz ! Le loup ! Assis ! Donne la patte ! Grosse erreur… le loup-garou redresse la tête, tous crocs dehors, avec un grondement féroce. Il se ramasse sur lui-même, prêt à se jeter sur Xander, qui se pétrifie sur place.

Arwen pointe simplement un doigt en direction d’Oz qui reprend aussitôt sa place penaud. L’elfe le félicite et lui caresse la tête puis s’adresse à Xander qui va se rassoir le plus loin possible du loup.

- Cela demande... une certaine autorité naturelle, je te conseille de ne pas t’y essayer Xander précise Arwen…

- Ok, elle le contrôle, c'est génial, mais... quand elle partira... je crois qu'il faudra quand même prévoir la cage et les tranquillisants. Juste au cas où, chuchote Willow à Buffy…

Bon, récapitulons. Points positifs : Arwen remet Cordelia à sa place, elle transforme les loups-garous en toutous, et elle semble même en voie de civiliser Faith. Points négatifs : Sauron veut revenir et transformer le monde en dictature bien rangée. Ok... C'est compliqué, mais au moins, on a une Elfe super puissante, super belle et apparemment super douée avec les animaux et les Tueuses rebelles dans notre équipe. Ça pourrait être pire. Ça va probablement être pire, mais pour l'instant, c'est presque... gérable. En observant le loup-garou, étonnamment docile aux pieds d'Arwen. Elle repense à Angel… C'est peut-être le bon moment ? Ou le pire ? Après Gilles de Rais et Hitler version Sauron, est-ce que parler de mon petit-ami vampire-avec-une-âme, c'est trop ? Ou est-ce que ça a préparé le terrain ? Mieux vaut peut-être tout mettre sur la table d'un coup... Allez, Buffy, mais avec diplomatie et prudence. Elle se tourne vers Arwen, le ton aussi détaché que possible.

- Arwen... tu as parlé des vampires tout à l'heure. Ils ont vraiment l'air de te craindre. Qu'est-ce que... qu'est-ce que tu penses d'eux, en général ?

Arwen semble avoir gouté quelque chose de répugnant…

- Les vampires... Je ne les aime pas. Ils sont plus retors que ces pauvres lycanthropes, qui sont surtout de gros balourds victimes de leur malédiction. Les vampires choisissent leur voie, leur perfidie. Comme je te l’ai dit, au 1er âge, Sauron était le maître des vampires. Je n’ai pas connu ces temps très lointains… Mais, plus tard, lorsque la Tueuse en titre était débordée, il m'arrivait de nettoyer un peu... pour me distraire.

Ok, "nettoyer un peu". Ce n'est pas gagné, se dit Buffy. Mais faut bien y aller. Elle prend une inspiration.

- Est-ce que... par hasard... tu connais un vampire nommé Angel ?

Arwen ne sourit plus du tout, le dégout confine à l’écœurement, sa voix se fait glaciale.

- Angelus ! Ce monstre de cruauté, un véritable artiste de la souffrance. Je ne serais pas fâchée de mettre enfin la main dessus, pour l'expédier définitivement dans les Abysses où est sa place. Il y a bien longtemps que je le cherche.

Un frisson parcourt l’échine de Buffy, les membres du Scooby Gang échangent des regards chargés d’angoisse. Arwen poursuit, la colère dans la voix.

- C'était au XIXème siècle, dans les Carpates. Cet... Angelus, et ses trois acolytes, semaient la désolation. Une guérisseuse du cru, une femme de grand cœur mais désemparée, a lancé des appels à l'aide dans l'éther, sans trop savoir à qui ils parviendraient. J'ai capté sa détresse et je me suis rendue sur place. Les villageois furent d'abord déçus, je crois, de voir arriver une femme seule et non une troupe de guerriers. Elle esquisse un sourire fugace. Leur déception fut de courte durée. J'ai traqué cette vermine et leurs sous-fifres. J'en ai éliminé un grand nombre, et j'espère les avoir persuadés de ne jamais revenir importuner ces bonnes gens. Malheureusement, quatre m'ont échappé : un crétin peroxydé et braillard qu'ils appelaient Guillaume le Sanglant, une jeune femme complètement hystérique et imprévisible nommée Drusilla, une blonde assez jolie mais d’une rare perfidie et leur chef... le pire de tous, Angelus.

Buffy déglutit difficilement.

- "Crétin peroxydé"... ça ne peut être que Spike, la blonde ça doit être Darla... Ça ne s'arrange vraiment pas. Elle jette un regard inquiet vers Faith, craignant qu’une remarque déplacée de l’incontrôlable tueuse vienne envenimer les choses.

- Je les ai pistés ensuite jusqu'en Chine, pendant la Révolte des Boxers. Ils y ont commis d'autres abominations. C'est là, d'ailleurs, que Guillaume a lâchement assassiné la Tueuse de l'époque. Le visage d’Arwen se durcit encore, un bloc de marbre. Malheureusement, les voyages prenaient du temps à l’époque, des mois de mer.... Quand je suis arrivée, ils s'étaient à nouveau volatilisés. J'ai perdu leur trace depuis. Tu penses qu’Angélus est ici ?

Buffy se sent vraiment mal. Elle se voit déjà tentant de défendre Angel contre une Elfe millénaire surpuissante et se dit qu'elle n'a aucune chance, mais qu'elle le fera quand même. Un comble tout de même pour une tueuse de vampires de périr sous les coups d’un être de lumière en tentant de protéger… un vampire… Elle se fige. Faith a passé son bras sur les épaules d’Arwen, Buffy est tétanisée à l’idée ce qu’elle va dire.

- Arwen... Ce type, Angelus... Il a changé. Vraiment changé. Y'a longtemps, des gitans lui ont jeté un sort, lui ont rendu son âme. C'est compliqué, mais... il n'est plus le monstre que tu as connu. Il est... Ok, il est un peu coincé, très torturé, pas vraiment fun, mais... il est cool maintenant, pour un vampire. Il aide les gens. Il se bat contre les démons.

Arwen regarde Faith, son expression est toujours dure. Bien qu’intimidée Faith poursuit :

- Et puis... c'est le petit ami de Buffy. Enfin, c'est compliqué, mais... ils tiennent l'un à l'autre.

Arwen plonge ses yeux dans ceux de Faith, son expression s’adoucit. Elle passe sa main dans les cheveux de la tueuse qui se blottit contre elle.

- Si Angelus est devenu Angel... s'il a retrouvé une âme... et si toi, tu me dis qu'il s'est amendé... je te fais confiance bien sûr…

Buffy n’en revient pas… Wow... Ok. Cette improbable romance naissante vient peut-être de sauver la non-vie d’Angel. Il y a donc une justice elfique... ou juste très, très bizarre.

Arwen se tourne vers elle.

- Puisque tu aimes Angel et qu’il a retrouvé son âme, il n’a plus rien à craindre de moi. Il n'est plus la créature immonde que j'ai pourchassée. Ca m’amusera de le rencontrer… Bien que je soupçonne qu'il ne soit pas particulièrement enthousiaste à l'idée de me revoir. Arwen se tourne vers Faith et, avec un clin d'oeil, lance « Vive l’amour » …

Ok, crise Angel évitée de justesse grâce à… l'intervention la plus improbable de l'histoire. Soulagée ? Oui. Mais maintenant, il va falloir expliquer à Angel qu'une Elfe millénaire super puissante qui voulait sa peau depuis 150 ans veut le rencontrer parce que Faith, la Tueuse avec qui il a une relation... compliquée, s'est portée garante pour lui. Et accessoirement, lui dire qu'il y a Sauron qui veut revenir. La vie d'une Tueuse, c'est décidément jamais simple se dit Buffy, songeant qu’un gros obstacle semble tout de même franchit.

- Je crois que nous avons tous besoin de... digérer ces informations. Et de nous reposer. La soirée a été... intense, propose Giles.

- Sage proposition, Rupert. L'esprit a besoin de calme pour assimiler tout cela. Retrouvons-nous demain chez moi. Nous commencerons à élaborer une stratégie. Quelqu'un a besoin que je le ramène ? Elle lance un coup d’œil appuyé à Faith…

- Ouais, moi ! Mon motel est super loin. Et... euh... c’est dangereux la nuit.

Un silence amusé s'installe à la pensée de Faith jouant les demoiselles en détresse, apeurée à l’idée de rentrer seule.

- Je dois avouer que je suis... surpris. Une Elfe d'un tel lignage, d'une telle sagesse... qui semble s'intéresser de si près à... Faith ? C'est pour le moins... inattendu, murmure Giles, tandis qu’Arwen et Faith, main dans la main, franchissent la porte.

- L’amour prend des chemins étranges, Giles. Même à travers les Âges et les espèces, apparemment, répond Willow, attendrie malgré sa profonde méfiance envers Faith. Soudain, son expression change alors qu'un grognement sourd se fait entendre du coin de la pièce. Oh non ! Oz ! Le loup-garou, a entrouvert un œil et émet un grondement menaçant fixant Xander qui cherche où se cacher.

- Arwen ! Attends ! Hurle Willow paniquée.

L’elfe revient sur ses pas et, sans un mot, claque des doigts en direction du loup-garou. Celui-ci dompté pousse un jappement et se précipite de lui-même dans la cage de contention que Willow s'empresse de refermer et de verrouiller solidement.

- Voilà qui est réglé. Bonne nuit à tous. À demain, lance Arwen. Elle retrouve Faith dans le parking, plantée devant la Corvette, les yeux brillants d'admiration. Elle s'approche, sort les clés de la poche de son blazer et les lui tend. Ça te tente de conduire ? Les yeux de Faith s'illuminent d'une joie enfantine. Elle attrape les clés comme si c'était le Graal.

- Oh que oui ! Carrément ! Elle s'installe avec enthousiasme derrière le volant et Arwen se penche vers elle.

- Dis-moi, ma belle... Es-tu vraiment sûre de vouloir retourner dans ton motel. Ça doit être un peu sinistre ? J'ai une maison très agréable, non loin d'ici. C'est très calme... On y dort merveilleusement bien. L'invitation, cependant, ne vaut que pour dormir. Chacune dans sa chambre. Je crois qu'il est important de prendre son temps pour les choses qui comptent vraiment.

Le visage de Faith se ferme un instant. Sa joie s'évanouit, remplacée par une pointe de tristesse et d’agressivité.

- Quoi ? C'est ça le truc ? Je ne te plais pas assez ? C'est ça ? Elle fait mine de descendre de la voiture.

Arwen attrape doucement son menton pour obliger la jeune femme à la regarder. Elle remarque que ses yeux sont embués de larmes.

- Au contraire, Faith. Tu me plais... énormément. C'est pour cela que je veux prendre notre temps. Je ne suis pas intéressée par une histoire banale d'un soir. Ce que je ressens... ce que je vois en toi... mérite mieux que ça. Arwen se penche et dépose un baiser léger, mais chargé d'émotion, sur les lèvres de Faith. Puis pose un instant sa main sur sa cuisse. Maintenant... montre-moi ce que tu sais faire au volant… Il y a aussi de la sensualité dans la conduite !

Faith, sent la tristesse s’évanouir. Elle tourne la clé. Le moteur de la Corvette ronfle dans la nuit.

Xander, qui n’a pas perdue une miette de la scène depuis la fenêtre, revient vers les autres, les yeux écarquillés.

- Vous... vous avez vu ça ? Le baiser ? La main sur la cuisse ? C'est... c'est le coup de foudre le plus rapide et le plus bizarre de l'histoire !

Buffy perplexe se tourne vers Giles...

- Les Elfes... enfin, les femmes Elfes... elles aiment les femmes ? C'est courant ?

- Buffy, ma connaissance des Elfes se limitait jusqu'à ce soir aux écrits de Tolkien, que je croyais inventés... Mais si l'on se fie à l'esprit de ces récits, les elfes sont des êtres pour qui les sentiments, la connexion spirituelle, l'amour sous toutes ses formes, priment sans doute sur les contingences physiques ou le genre tel que nous le concevons. L'âme sœur, pourrait-on dire, n'a pas nécessairement de sexe défini pour eux je suppose. C'est une spéculation, bien sûr... Et puis je pense que quelqu’un d’aussi haute noblesse qu’Arwen ne prête aucune attention au qu’en dira-t-on.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire Brume Autize ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0