Chapitre 13
La gare centrale bourdonnait de vie. Des centaines de passants se pressaient entre les quais, les valises roulant bruyamment sur le sol, les annonces des trains résonnant dans les haut-parleurs. Ludovic Leclerc observait la scène depuis un coin sombre, son regard perçant fouillant chaque mouvement de la foule. Il était tendu, épuisé, mais une nouvelle énergie l'animait. Aujourd’hui, il avait la certitude que Charlie était là, quelque part dans cette mer de visages anonymes.
Il avait reçu un message étrange la veille, une note glissée sous sa porte. Les mots étaient simples : "Gare centrale, demain. Tu sais où me trouver." Ludovic avait reconnu immédiatement ce qui semblait être une invitation à un nouveau jeu de chasse. Charlie le provoquait, encore une fois.
Le détective savait que cette confrontation risquait de lui échapper, comme toutes les autres. Mais il n’avait plus le choix. Ses pensées étaient désormais si étroitement liées à Charlie qu’il ne pouvait envisager de faire marche arrière. C’était aujourd'hui ou jamais. Alors il attendait, en silence, se fondant dans l’anonymat de la foule comme il avait tant appris à le faire en observant son ennemi.
Soudain, au bout du quai, il aperçut ce qu'il attendait depuis si longtemps. Un éclat de rouge et de blanc, se déplaçant parmi les voyageurs. Le pull rayé caractéristique. Charlie. Ludovic sentit son cœur s’accélérer. Ses mains se crispèrent, et une montée d'adrénaline balaya instantanément la fatigue qui l’avait habité ces derniers jours.
Il se glissa dans la foule, sans jamais quitter des yeux la silhouette qui avançait calmement à travers la gare. Charlie semblait parfaitement à l’aise, comme s’il ne craignait rien, sachant pertinemment que personne ne le remarquerait réellement. Il se déplaçait avec une fluidité presque surnaturelle, ses mouvements effaçant sa présence dans l’esprit des passants. Mais Ludovic, lui, le voyait. Il ne le lâcherait pas cette fois.
Le détective accéléra le pas, se rapprochant lentement mais sûrement. Charlie avançait toujours, serein, à quelques mètres seulement de lui. Ludovic pouvait presque le toucher. Mais au moment où il crut être assez proche pour l’atteindre, Charlie s’éclipsa brusquement entre deux groupes de passagers, disparaissant de son champ de vision.
Ludovic se figea un instant, désorienté. Il balaya la foule des yeux, cherchant désespérément à retrouver cette silhouette familière. Le pull rayé, le bonnet rouge. Où était-il passé ? Le détective tourna sur lui-même, le souffle court. Il avait été si proche… Comment avait-il pu le perdre encore une fois ?
Frustré, il se fraya un chemin à travers les quais, bousculant des voyageurs sans s’excuser, son regard fouillant chaque recoin de la gare. Il savait que Charlie était toujours là, quelque part, se délectant de cette nouvelle traque. Ludovic le sentait dans l’air lourd de la gare, comme une présence invisible qui l'observait en silence.
Il s’engagea sur un quai plus désert, espérant prendre de la hauteur pour mieux voir. Les trains arrivaient et partaient, les quais se remplissaient et se vidaient avec une précision mécanique. Mais Charlie restait introuvable. Ludovic serra les poings, la rage montant en lui. Ce n'était plus seulement une question d'enquête. C’était une guerre psychologique, et Charlie avait toujours un coup d'avance.
« Montre-toi, Charlie ! » cria Ludovic, sa voix se perdant dans le brouhaha de la gare.
Il savait que crier ne servait à rien. Charlie ne viendrait pas de lui-même. Il jouait avec lui, le poussant à bout, testant ses limites. C’était un jeu cruel et manipulateur, un jeu dans lequel Ludovic avait été piégé depuis le début. Mais cette fois, il refusait de perdre. Pas encore.
Au bout d’un instant, il l'aperçut de nouveau, à l’autre bout de la gare. Charlie, immobile cette fois, debout près d'un train en partance. Le pull rouge et blanc semblait briller d'une étrange intensité au milieu de la foule. Leur regard se croisa une seconde, et Ludovic ressentit un frisson glacial parcourir son échine. C’était comme si le temps s’était arrêté, comme si Charlie l’invitait une nouvelle fois à s’approcher.
Ludovic courut vers lui, le cœur battant à tout rompre. Mais avant qu’il n’atteigne le quai, Charlie tourna lentement sur lui-même et monta à bord du train. Ludovic accéléra encore, se frayant un chemin à travers les voyageurs, mais à peine eut-il atteint le quai que le train démarra dans un souffle métallique. Le détective s'arrêta brusquement, essoufflé, regardant le train s’éloigner.
Il resta là, immobile, pendant de longues secondes, fixant les rails vides. Charlie avait encore une fois disparu. Comme un mirage insaisissable, il s’était évaporé à l’instant précis où Ludovic pensait enfin l’avoir piégé.
Le détective sentit une vague de désespoir le submerger. Il avait été si proche. Cette poursuite, encore une fois, s'était soldée par un échec cuisant. Charlie jouait avec lui, toujours un pas en avance, toujours prêt à disparaître au moment critique. Ludovic sentit la colère monter en lui, une rage froide et implacable. Charlie ne cessait de le manipuler, de se montrer juste assez pour le maintenir dans ce jeu infernal.
Il regarda autour de lui, les épaules affaissées par la frustration. Les passants se pressaient encore autour de lui, ignorants du drame invisible qui venait de se jouer. Pour eux, ce n’était qu’un jour comme un autre. Pour Ludovic, c’était un énième affrontement perdu. Charlie s'amusait, profitant de l’anonymat des foules, de la confusion pour continuer à se dérober.
Ludovic se redressa, le regard dur. Il savait maintenant que Charlie ne faisait que le provoquer, jouant avec ses nerfs, le menant là où il voulait. Mais cela n'avait pas d'importance. Peu importait le nombre d'échecs, peu importait les doutes et la frustration, il ne pouvait pas abandonner. Il poursuivrait Charlie, encore et encore, jusqu'à ce qu'il comprenne comment le capturer.
Lentement, il quitta le quai désert, l’esprit en ébullition. Ce jeu était loin d’être terminé, et cette fois, Ludovic était plus déterminé que jamais. Charlie pouvait fuir, mais il finirait par faire une erreur. Et ce jour-là, le détective serait là, prêt à mettre un terme à cette chasse qui le dévorait de l’intérieur.
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